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Cinéma - Page 2

  • Critique de DALLOWAY de Yann Gozlan (Séance de Minuit – Festival de Cannes 2025)

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    Clarissa (Cécile de France), romancière en mal d’inspiration, rejoint une résidence d’artistes luxueuse à la pointe de la technologie, à l’abri de la chaleur caniculaire et de la pandémie qui sévissent à l’extérieur dans un Paris futuriste et pourtant familier. Elle trouve en son assistante virtuelle, incarnée par la voix envoûtante de Mylène Farmer et nommée Dalloway comme l’héroïne de Virginia Woolf, un soutien et même une confidente qui l’aide à écrire son nouveau roman justement consacré à l’écrivaine britannique. Mais peu à peu, Clarissa éprouve un malaise face au comportement de plus en plus intrusif de son IA, renforcé par les avertissements d’un autre résident, Mathias Nielsen (Lars Mikkelsen). Se sentant alors surveillée par cette domotique omnisciente, Clarissa se lance secrètement dans une enquête pour découvrir les réelles intentions de ses hôtes. S’agit-il alors d’une menace réelle ou cette dernière, éprouvée par le suicide de son fils, est-elle en plein délire paranoïaque ?

    Le film commence par des images paisibles de la mer, portées par le bruit rassurant des vagues. Ce tableau idyllique disparaît pour laisser place à une chambre, celle de Clarissa. Ce sentiment de quiétude n’était qu’une illusion. Projetée par l’IA. Clarissa se lève, échange avec Dalloway sur la température du jour. Dans la salle de bain, un miroir affiche les résultats de ses tests de santé quotidiens analysés par Dalloway. La journée peut commencer, entièrement régenté par Dalloway qui fait bouillir l’eau, trie les emails, impose sa voix et sa voie. Dalloway est omniprésente et toute puissante. Elle contrôle tout, la température de l’air, la santé de l’artiste, la fermeture de la porte. Elle distille quelques idées à Clarissa pour son roman, lui pose des questions bienveillantes qui se transforment insidieusement en interrogations intrusives.

    Lorsque le roman dont le film est l’adaptation a été écrit, l’Intelligence Artificielle n’était encore qu’une abstraction. Elle s’empare aujourd’hui de toutes les sphères de la société, au point de rendre obsolètes certaines professions. Dalloway est l’adaptation du roman d’anticipation de Tatiana de Rosnay, Les Fleurs de l’ombre, publié en 2020. Le contexte de la crise sanitaire qui n’était pas présent dans le roman a été ajouté par les scénaristes (Yann Gozlan, Nicolas Bouvet, en collaboration avec Thomas Kruithof).

    La résidence apparaît donc de prime abord comme un cocon protecteur, et Dalloway comme une présence rassurante. La chambre si confortable de Clarissa et la résidence prestigieuse se transforment peu à peu en univers menaçant et carcéral. Le film brosse le portrait d’un monde, le nôtre déjà, dans lequel des images et des informations nous sollicitent en permanence, et dispersent notre attention. En même temps que Dalloway lui lit la lettre d’une lectrice qui souhaite la rencontrer, Clarissa lui demande l’avis des téléspectateurs sur le fim qu’elle va regarder, zappe d’un film à l’autre, s’intéressant sommairement à la lettre comme aux films. Comme dans la société contemporaine, l’attention est constamment sollicitée. L’émotion est tenue à distance. Une émotion que l’écriture permet de recréer, de cristalliser, de verbaliser.

    Ce film est aussi captivant pour les questions qu’il pose sur les conséquences de l’Intelligence Artificielle que sur l’acte d’écrire. Qu’est-ce qui nourrit l’écriture ? C’est ici la culpabilité et les émotions qui la submergent qui font naitre le récit de Clarissa mais qui vont provoquer une autre culpabilité, et surtout une dépendance. Quand la fuite par l’écriture n’existe plus, quelle issue reste-t-il ? Quelle fenêtre sur l’ailleurs ou quelle introspection trouver encore ? Isolée de son entourage, Clarissa voit en l’IA l’attention que ses proches ne lui accordent pas, à ses risques et périls. Même sa montre connectée est fournie par la résidence pour surveiller ses moindres déplacements. Des capteurs de mouvements sont installés dans son appartement, enregistrant peut-être plus que les simples gestes. Mathias en est d’ailleurs certain : ces capteurs servent à les surveiller et l’IA va s’emparer des émotions des artistes pour se perfectionner, et les remplacer.

    Cette histoire qui aurait semblé invraisemblable il y a cinq ans nous paraît désormais effroyablement plausible. Même ce Paris écrasé de chaleur, aseptisé et fantomatique, où tout est surveillé (des drones observent et suivent les passants), contrôlé (la santé est vérifiée à l’entrée du métro, des chiens robots reniflent les passagers) ne nous est pas totalement étranger.

    La voix, mystérieuse, chaleureuse, et ensorcelante de Mylène Farmer forge la personnalité de l’IA, d’une étrangeté douce et autoritaire. Récemment, elle était déjà la voix (off) d’un autre film, Bambi de Michel Fessler, dans lequel elle était une voix ensorcelante d’une présence discrète qui ne force pas l’émotion mais ajoute subtilement une dimension poétique, parfois philosophique.

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    « Il n'y a pas de plus profonde solitude que celle du Samouraï si ce n'est celle d'un tigre dans la jungle… Peut-être… ». Cette citation qui figure en ouverture du film de Melville pourrait s’appliquer à tous les films de Yann Gozlan qui ont en commun d’ausculter la solitude portée à son paroxysme.

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    Ainsi, dans Boîte noire, Pierre Niney incarnait Mathieu Vasseur, un technicien au BEA, autorité responsable des enquêtes de sécurité dans l’aviation civile, personnage en apparence aux antipodes d’un autre Mathieu, celui que l’acteur incarnait dans Un homme idéal, sa précédente collaboration avec Yann Gozlan, l’un paraissant aussi sombre que l’autre semblait solaire. Comme dans Un homme idéal néanmoins, et comme dans Dalloway avec Clarissa, se dessine peu à peu le portrait d’un personnage face à ses contradictions, ses failles, ses rêves brisés, qui veut tout contrôler et qui perd progressivement le contact avec la réalité. Dans les deux films, comme dans Dalloway, la réalisation de Yann Gozlan enserre le protagoniste pour souligner son enfermement mental. Déjà dans Un homme idéal, les brillantes références étaient savamment intégrées :  Plein soleil, Match point, La Piscine, Tess, Hitchcock pour l’atmosphère (ce qui est à nouveau le cas dans Dalloway), Chabrol pour l’auscultation impitoyable de la bourgeoisie. La mise en scène était déjà précise, signifiante et le scénario, terriblement efficace, allait à l’essentiel, ne nous laissant pas le temps de réfléchir, le spectateur ayant alors la sensation d’être claquemuré dans le même étau inextricable que Mathieu, aux frontières de la folie.  Il en va de même, là encore, pour Clarissa dans Dalloway.

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    Dans Un homme idéal, cet autre Mathieu a 25 ans et travaille comme déménageur. 25 ans, l’âge, encore, de tous les possibles. L’âge de croire à une carrière d’auteur reconnu. Malgré tous ses efforts, Mathieu n’a pourtant jamais réussi à être édité. C’est lors de l’un de ces déménagements qu’il tombe par hasard sur le manuscrit d’un vieil homme solitaire qui vient de décéder. Jusqu’où peut-on aller pour réussir à une époque où celle-ci se doit d’être éclatante, instagramée, twittée, facebookée ? Pour Mathieu : au-delà des frontières de la légalité et de la morale, sans aucun doute…

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    Les films s’évertuent souvent à nous montrer à quel point la création, en particulier littéraire, est un acte jubilatoire et un symbole de réussite (nombreux sont les films à se terminer par l’envol d’un personnage qui, de mésestimé, voire méprisé, devient estimable et célèbre en publiant son premier roman), ce qu’elle est (aussi), mais ce film montre que cela peut également constituer une terrible souffrance, comme elle l’est pour Clarissa qui a choisi d’écrire sur une écrivaine qui s’est suicidée, après le suicide de son propre fils.

    Le talent qu’il n’a pas pour écrire, Mathieu l’a pour mettre en scène ses mensonges, se réinventant constamment, sa vie devenant une métaphore de l’écriture. N’est-elle pas ainsi avant tout un arrangement avec la réalité, un pillage ? De la vie des autres, de soi-même. Elle l’est aussi dans Dalloway puisque Clarissa va puiser dans les émotions de son fils pour écrire…tout comme l’IA va se nourrir des émotions de l’écrivaine.

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    En 2014, le quatrième long métrage de Spike Jonze, Her, nous embarquait dans les réjouissants méandres d’un imaginaire débridé, celui du cinéaste et de son personnage, et nous interrogeait aussi sur les dangers de l’Intelligence Artificielle. Theodore Twombly (Joaquin Phoenix), écrivain public des temps modernes est inconsolable après une rupture difficile, en effet en instance de divorce avec sa femme Catherine (Rooney Mara), vit seul dans un appartement sans âme. Il fait alors l'acquisition d'un programme informatique ultramoderne, capable de s'adapter à la personnalité de chaque utilisateur. En lançant le système, il répond à de brèves questions, choisit une voix féminine et fait la connaissance de Samantha (Scarlett Johansson), une voix féminine intelligente, intuitive et dotée d’humour et même d’ironie. Peu à peu, l’impensable va survenir : l’homme et la machine vont tomber amoureux…A l’image de l’affiche, c’est avant tout l’histoire d’un homme seul face à nous, miroir de nos solitudes modernes, et surtout face à lui-même, et dont le métier consiste à envoyer des lettres pour et à des inconnus avant de retrouver son appartement glacial donnant sur les lignes verticales et froides de la ville, avec l’hologramme d’un jeu vidéo pour seule compagnie. Dans la première scène, il dit des mots d’amour face caméra. Puis, nous découvrons qu’il est en réalité sur son lieu de travail, seul face à un ordinateur. Comme une prémonition. Dans cette ville intemporelle et universelle (Spike Jonze a tourné à Shangaï et Los Angeles) se croisent des êtres qui vivent dans leur bulle imaginaire, soliloquant, emmurés dans leurs solitudes comme ils le sont dans cette ville tentaculaire. La technologie froide et déshumanisée va s’humaniser pour devenir l’âme sœur au sens propre, un amour désincarné, cristallisé. Le vrai bonheur semble dans l’ailleurs, l’insaisissable, l’imaginaire, ou alors le passé, cette « histoire qu’on se raconte » et la forme et le fond se répondent intelligemment puisque le passé idéalisé est ici raconté par des flashbacks silencieux auréolés de lumière. Scarlett Johansson réussit le pari de donner corps à cette voix (elle  a même remporté le Prix d'Interprétation Féminine au 8ème Festival International du Film de Rome, en novembre 2013) et de faire exister ce personnage invisible. Un film à la fois salutaire, parce qu’il montre le redoutable et magique pouvoir de l’imaginaire et fait appel à celui du spectateur (par exemple pendant la scène d’amour, seul demeure un écran noir), et terrifiant en ce qu’il nous montre un univers d’une tristesse infinie avec ces êtres « lost in translation » prêts à tout pour ressentir la chaleur rougeoyante d’un amour fou, sublimé, un univers pas si éloigné du nôtre ou de ce qu’il pourrait devenir.

    Cette crainte exprimée dans Her est devenue réalité puisque des cas de personnes tombées amoureuses de leur IA ont déjà été diagnostiqués. Le monde où tout, y compris les émotions, serait régi par l’IA, et qui fabriquerait de l’art à la demande, n’est pas celui de demain mais celui d’aujourd’hui. Cela rend ce film encore plus passionnant et glaçant. Cette Clarissa, peu à peu dépossédée de ses émotions, d’elle-même, qui s’étiole tandis que l’IA au contraire se nourrit et grandit, pourrait exister. L’identification est renforcée par les focales très courtes auxquelles recourt le réalisateur. Et par le jeu de Cécile de France, dans un rôle très éloigné des personnages mémorables qu’elle a incarnés dans Un Secret ou Quand j’étais chanteur ou même des rôles plus « physiques » comme celui de Möbius d’Éric Rochant (remarquable thriller, que je vous recommande), apporte un supplément d’âme, une intensité et une ambivalence qui rendent le délire paranoïaque et l’emprise aussi crédibles l’un que l’autre.

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    Pour le personnage d’Anne Dewinter, qui dirige la résidence, Anna Mouglalis, apporte magnétisme, autorité et mystère. Frédéric Pierrot, qui porte toujours si bien son nom, jouant souvent des personnages lunaires, amène quant à lui sa force tranquille à ce personnage bienveillant de l’ancien mari. 

    La musique de Philippe Rombi accroît le sentiment d’angoisse latente et la paranoïa, avec des notes sombres et minimalistes, mélangeant sons électroniques et cordes acoustiques.

    Un thriller d’anticipation terrifiant en ce qu’il nous parle d’un monde qui nous est familier, et passionnant en ce qu’il interroge ce qui distingue l’homme de la machine, mais aussi le devenir de l’émotion et de la création, dans cet environnement de plus en plus robotisé qui tente de les maîtriser, et qui les tient de plus en plus à distance de ce qui en constitue l’essence : la sincérité et la singularité. Une fois de plus, fortement inspiré par les films noirs et leur indissociable fatalité inexorable et implacable, en explorant les failles de la solitude, et en nous plongeant dans ses abysses, Yann Gozlan m’a captivée. Son prochain film intitulé Gourou racontera ainsi « l’ascension d’un gourou du développement personnel qui va se révéler une personnalité toxique », un thriller dans lequel Pierre Niney tiendra le rôle principal. En attendant ce film que je ne manquerai pas d’aller voir (au cinéma le 28 janvier 2026), je vous recommande de vous laisser charmer par Dalloway sans rien perdre de votre libre-arbitre et de la distance nécessaire que ce film nous invite habilement à questionner dans une société dans laquelle l'Intelligence Artificielle tient une place grandissante.

  • Ouverture du Festival Cinéma à la folie – Critique LES RÊVEURS d’Isabelle Carré

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    Ce mardi 23 septembre, au Cinéma du Panthéon, avait lieu le lancement du festival « Cinéma à la Folie, nouveaux regards sur la santé mentale », avec la projection de la première réalisation de la comédienne et romancière Isabelle Carré, marraine de cet évènement dont Nicolas Philibert est également le parrain.

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    La présence d’Isabelle Carré dans un film est toujours pour moi une raison de le découvrir, tant elle excelle dans ses rôles qu'elle choisit toujours astucieusement, de l’Angélique (si bien nommée) des Émotifs anonymes de Jean-Pierre Améris, film dans lequel elle parvient à nous faire rire avec les fragilités attendrissantes de son personnage sans que jamais cela soit aux dépends de ce dernier, à la Claire (si bien nommée, aussi) du film Entre ses mains d’Anne Fontaine, fascinée et effrayée, blonde hitchcockienne dans l’obscurité tentatrice et menaçante, tentée et menacée, guidée par une irrépressible attirance pour cet homme meurtri, peut-être meurtrier, incarné par Benoît Poelvoorde. C’est cela qui la distingue, l’empathie qu’elle éprouve pour ses personnages, qu’elle transmet dans son jeu si nuancé, la grâce inconsciente, la délicatesse intense, une force fébrile, une douleur contenue et une douceur puissante. Il faudrait aussi vous parler de son personnage dans Se souvenir des belles choses, et de tant d’autres…

    Le but, louable, de ce festival est de « déstigmatiser la maladie mentale », déclarée cette année cause nationale. Le festival propose six fictions et six documentaires dans huit villes françaises de taille moyenne avec pour objectif de « faire du cinéma un moteur de dialogue autour de ce sujet » sachant qu’« une personne sur trois sera concernée au cours de sa vie par la maladie psychique qui ne se résume pas à la folie, à la violence, à la faiblesse. » Ces films aspirent ainsi à déplacer les stéréotypes. Les organisateurs souhaitent en effet lever les tabous et les clichés encore trop nombreux sur les troubles psychiques. Le festival « Cinéma à la folie, nouveaux regards sur la santé mentale » a été créé avec le soutien de la Fondation Erié et en partenariat avec le Fipadoc, le Festival La Rochelle Cinéma (Fema) et l’Alliance pour la Santé Mentale. Le festival sillonnera la France tout au long du mois d’octobre en passant par Boulogne-sur-Mer, Clermont-Ferrand, La Rochelle, Orléans, Nancy, Nantes, Nîmes et Pau. Des récits inspirants et porteurs d’espoir qui montrent que le rétablissement est possible et qu’avec le bon accompagnement, chacun peut retrouver confiance et qualité de vie. Pour garantir l’inclusivité et l’ouverture à tous, les projections seront accessibles gratuitement avec une séance par ville réservée aux scolaires pour sensibiliser les plus jeunes. Chaque projection sera suivie d’un débat réunissant équipes de films, experts, pairs aidants, associations locales et public afin de mettre des mots sur les maux, de libérer la parole et de valoriser l’expérience vécue. L’ambition du festival est claire : favoriser la compréhension, le soutien et l’accès aux soins, et faire progresser la société vers une plus grande acceptation et une meilleure inclusion.

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    « Un film peut vous sauver une soirée mais peut aussi vous sauver la vie » a déclaré Isabelle Carré avant la projection de son film. Je le crois aussi profondément. Elle a réalisé ce film pour dire « réveillons-nous » face à l’urgence de s’emparer de ce sujet de la santé mentale, en particulier chez les jeunes.

    Dans le dossier de presse de son film, mais aussi lors de l’avant-première, Isabelle Carré a tenu à rappeler que « l’institution a évolué, on sait mieux faire aujourd’hui, mais pas partout. Certaines régions sont totalement dépourvues de pédopsychiatres (il n’en existe que cinq cents en France !), des régions entières sont même dépourvues de lieux de soins. Comment expliquer l’abandon d’une société qui laisse des jeunes en détresse, sans aucun recours possible ? J’ai aussi conçu ce film comme un outil pour dénoncer cet état de fait. Qu’est-ce qu’une société qui néglige l’enfance à ce point ? Il me semble que la fiction a le pouvoir de créer une identification et de dessiner un chemin plus doux pour partager des choses intimes, et faciliter le débat. »

    Dans cette adaptation de son troisième roman, éponyme, Les Rêveurs, publié chez Grasset en 2018, Isabelle Carré incarne une comédienne, Élisabeth. Cette dernière anime des ateliers d’écriture à l’hôpital Necker avec des adolescents en grande détresse psychologique. À leur contact, elle replonge dans sa propre histoire : son internement à 14 ans (Elisabeth, à cet âge, est jouée par Tessa Dumont Janod), dans les années 70, dans une famille de rêveurs (son père Jacques - Pablo Pauly -, sa mère Alice - Judith Chemla -, et son frère) un peu à part, cherchant eux aussi la lumière, et leur parcelle d’ailleurs. Peu à peu, les souvenirs refont surface. Et avec eux, la découverte du théâtre, qui un jour l’a sauvée.

    Isabelle Carré raconte que Marie Rose Moro lui a ouvert les portes de La Maison de Solenn et lui a ainsi permis d’animer un atelier d’écriture dont elle s’est inspirée pour son film dont elle a coécrit le scénario avec Agnès de Sacy.

    Cela commence dans l’appartement familial. Les murs sont rouges (tels ceux de l’appartement d’enfance d’Isabelle Carré). La petite fille tente de retenir ses parents sur le point de sortir pour passer la soirée à l’extérieur, la laissant seule avec son frère. Elle s’accroche désespérément à sa mère. Mais ils les « abandonnent », malgré tout. La voix de Dalida résonne. Un art déjà pour édulcorer la réalité.  Le père, lui aussi, semble fuir constamment. Il dessine des robes pour Cardin. La mère s’enferme dans le refus de manger (ou si peu) et sa mélancolie. Elisabeth se réfugie dans la fantaisie, la musique, le dessin, les allers et retours dans le couloir de l’appartement qu’elle sillonne à rollers. Parfois, aussi, ses rêveries font prendre vie à des oiseaux dessinés qui s’envolent. Pour Elisabeth tout cela (sa famille) sonne faux. Alors, elle se laisse bercer par une histoire d’amour à laquelle elle a envie de croire, avec un copain de son frère qui n’avait d’autre envie que de jouer avec elle, et de parier sur sa naïveté. Elle tente de se suicider, et se retrouve à l’hôpital dans un service de psychiatrie pédiatrique, où elle va rester plusieurs semaines.

    Comme l’a expliqué la réalisatrice, même si l’épisode qu’elle relate dans ce film ne correspond qu’à une courte partie du roman, elle tenait à conserver le titre car « cet internement est le cœur du livre, ce qui m’a fondée ».

    Ce film évoque un sujet âpre avec beaucoup de douceur et d’empathie. Il s’empare de la rêverie comme échappatoire à la douleur.  C’est ici un refuge qui permet de fuir la réalité, de se créer un monde meilleur, de dessiner un avenir dans lequel l’art permettra de l’exorciser. Alors, Elisabeth rêve. En regardant la tour Montparnasse de la fenêtre condamnée de sa chambre d’hôpital. Les petits carrés de lueurs sur la tour sont autant de lucarnes sur des vies plus douces, imaginées. Mais la vraie fenêtre qui s’ouvre pour elle, c’est celle qui lui donne à voir la découverte du film Une femme à sa fenêtre de Pierre Granier-Deferre à l’hôpital, l’émotion de Romy Schneider et cette phrase : « préférer les risques de la vie aux fausses certitudes de la mort ».

    À la fin du film des chiffres, glaçants, nous sont rappelés : « 246, c'est le pourcentage de hausse du nombre de jeunes filles entre 10 et 14 ans hospitalisées en psychiatrie depuis quinze ans, pour la plupart pour tentative de suicide. Un jeune sur deux ne peut pas être suivi par manque de moyen et de place ».

    Ce film nous rappelle ainsi à quel point l’art peut sauver, mais aussi que les douleurs tues peuvent assassiner des vies, aussi jeunes soient-elles. Chaque enfant qu’Elisabeth côtoie à l’hôpital traîne son propre mal-être, ses symptômes, ses cicatrices plus ou moins visibles. La réalisatrice fait exister chacun, donne une voix à leurs maux. Parmi eux, Isker (Mélissa Boros). Isker et ses poignets bandés pour cacher ses entailles. Isker et son teint cadavérique, comme si elle était un personnage irréel forgé par l’imaginaire d’Elisabeth. Isker contre laquelle elle se blottit.

    Isabelle Carré est « pair-aidant ».  Elle parle d’une situation qu’elle a vécue adolescente. Elle en connaît les difficultés, la solitude, et sait ce qui peut redonner de l’espoir. Nous connaissons aujourd’hui davantage les remèdes à la souffrance morale des enfants et adolescents, trop longtemps ignorée ou méprisée, et n’étant pas prise en compte et en charge comme elle devait et doit l’être : moins les médicaments que l’art-thérapie, la créativité, ou le théâtre dans le cas d’Elisabeth, ou la musique (pour son frère et les enfants de l’atelier). L’art sauve, permet de transformer la douleur en beauté. Elisabeth écrit, rêve, voit dans le théâtre une porte d’évasion. Plus tard, sa professeure de théâtre (incarnée par Nicole Garcia qui, en quelques plans, impose sa gravité souriante et rassurante), lui donne Mademoiselle Else d’Arthur Schnitzler, le premier texte qu’Isabelle Carré avait joué en entrant dans ce cours de théâtre qui la sauva, qu’elle retrouva quelques années plus tard, et qui lui valut un Molière. Être « else », être l’autre, pour se retrouver.

    Judith Chemla, sa force et sa fragilité entremêlées, incarne avec beaucoup de subtilité la mère qui ne sait pas vraiment quoi faire de cette mélancolie qu’elle traîne constamment, comme de cette enfant dont on voit pourtant qu’elle l’aime profondément. Et puis surtout la vraie découverte (même si tout le casting est judicieusement choisi) : la jeune Tessa Dumont Janod qui joue Elisabeth enfant, en décalage, sombre et rêveuse, butée et perdue, déterminée à fuir la vie dans la mort puis à l’embrasser dans le théâtre. Sa présence d’une intensité douce et fragile, d’une grâce qui s’ignore, rappelle celle d’Isabelle Carré.

    Les décors signés Nicolas de Boiscuillé et la lumière de la cheffe-opératrice Irina Lubtchansky, épousent l’évolution psychique d’Elisabeth. Les couleurs d’abord pâles et ternes à l’hôpital (contrastant avec celles du début, rouges et pailletées, dans l’appartement) reviennent progressivement, avec le goût de la vie, et comme lui, prennent de l’intensité et de la consistance. L’univers fantomatique, insaisissable et claustrophobique reprend peu à peu forme, les sons même deviennent plus présents. La réalisatrice recourt aussi à de judicieux hors-champs pour nous laisser deviner la violence à l’hôpital, comme s’il s’agissait d’un cauchemar. Lorsque Élisabeth quitte l’hôpital, les bruits urbains sont amplifiés, très agressifs. Benoit Carré, membre du groupe Lilicub, signe la musique dont les notes de pianos accompagnent la solitude du personnage, et Isabelle Carré pose sa douce voix sur La Symphonie des éclairs de de Zaho de Sagazan dans le générique de fin, comme une ultime preuve que la fragilité peut se muer et se sublimer en force créatrice.

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    Après la projection de ce drame (largement) autobiographique bouleversant, qui nous a conduit de l’ombre vers la lumière, des douleurs étouffées aux couleurs retrouvées, un cocktail était offert aux invités à l’étage du Cinéma du Panthéon. Comme pour Elisabeth à sa sortie de l’hôpital, il m’était difficile de retrouver les bruits, la lumière, la vie, après cette traversée poignante du cauchemar vers le rêve, ou son espoir. Je repensais à cette très belle scène dans la voiture. Elisabeth et son frère, devenus adultes, évoquent les secrets de leur père, la raison pour laquelle tout sonnait si faux, et son bonheur trouvé. L’habitacle est à l’image de la salle de cinéma : un espace protégé et calfeutré qui permet de donner la parole, d’ouvrir le débat, d’accepter les fêlures, de laisser les émotions nous submerger, parfois même de nous réconcilier avec la vie. Les mots ce soir-là m’ont manqué. J’aurais aimé dire à Isabelle Carré, que j’ai évitée à la sortie du cocktail, cela, simplement : merci. Merci pour la sensibilité avec laquelle elle traite ce sujet délicat, avec tout le souci de l’autre qui la caractérise. Merci pour ce beau film (dont on oublierait presque que c’est une première œuvre) émaillé de rêveries poétiques et musicales que, vous l’aurez compris, je vous recommande vivement. Une ode aux rêves comme pansement sur les balafres à l’âme. Un film qui donne aux enfants et adolescents (et adultes qui portent en eux ces plaies du passé) le droit à l’expression de leurs différences, de leurs fragilités, et de les transformer en forces. Je suis sortie du cinéma : une pluie lacrymale et intrépide inondait Paris, et mes joues. Je l’ai affrontée, le sourire aux lèvres, imaginant que tels les oiseaux dessinés du film qui s’envolent, elle se transformait en goutte d’étoiles ou de diamants éclairant ma route vers des jours plus ensoleillés, comme on imagine celle d'Elisabeth après sa découverte du théâtre.

    Au cinéma le 12 novembre 2025

    Retrouvez toutes les informations sur le festival sur www.cinema-a-la-folie.fr.

  • Critique de UN SIMPLE ACCIDENT de Jafar Panahi – Prix de la Citoyenneté et Palme d’or du 78ème Festival de Cannes

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    Ce Festival de Cannes 2025 s’est achevé pour moi comme il avait débuté, par une histoire de son, en l’espèce le film en compétition The History of sound de Oliver Hermanus. Des sons qui viennent débusquer la nostalgie nichée au fond de nos cœurs. Un note finale implacable qui justifie la partition antérieure, tout en retenue. Celle d’une rencontre vibrante qui influe sur la mélodie d’une vie entière. L’art rend les étreintes éternelles : l’affiche de ce 78ème Festival de Cannes le suggérait déjà magnifiquement. Ce Festival de Cannes 2025 s’est terminé pour moi par un autre son, glaçant, celui qui accompagnait le dernier plan du film de Jafar Panahi qui me hantera longtemps comme ce fut le cas avec cette rose sur le capot dans le chef-d’œuvre qu’est Taxi Téhéran.

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    En février 2010, le pouvoir islamique avait interdit à Jafar Panahi de se rendre à la Berlinale dont il était l'invité d'honneur. Cette interdiction était intervenue après sa participation à des manifestations après la victoire controversée d'Ahmadinejad en 2009. Il avait ensuite été arrêté, le 1er mars 2010, puis retenu dans la prison d'Evin. Lors du Festival de Cannes, une journaliste iranienne avait révélé qu’il avait commencé une grève de la faim pour protester contre les mauvais traitements subis en prison. Comment ne pas se souvenir de la pancarte tenue par Juliette Binoche et de son siège vide de membre du jury cannois en 2010 ? Il fut libéré sous caution le 25 mai 2010, ce qui l’empêcha de venir défendre L’Accordéon sélectionné à la Mostra en 2010 et, en décembre de la même année, il fut condamné à six ans de prison et il lui fut interdit de réaliser des films et de quitter le pays pendant vingt ans. En février 2011, il fut tout de même membre du jury à titre honorifique à la Berlinale. En octobre 2011, sa condamnation a été confirmée en appel.

    Après le Lion d'or à la Mostra de Venise en 2000 pour Le Cercle, l'Ours d'or à la Berlinale en 2015 pour Taxi Téhéran, l’Ours d’argent pour Closed Curtain en 2013, Jafar Panahi vient donc de recevoir la Palme d'or du Festival de Cannes 2025 pour Un Simple accident, des mains de la présidente du jury (ironie magnifique de l’histoire), Juliette Binoche…, après avoir (notamment !) déjà remporté la Caméra d’or au Festival de Cannes 1995 pour Le Ballon blanc, le Prix du jury Un Certain regard en 2003 pour Sang et or,  le Prix du scénario au Festival de Cannes en 2018 pour Trois Visages et le prix spécial du jury de la Mostra de Venise en 2022 pour Aucun ours.

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    Pour Taxi Téhéran, filmer dans un taxi avait été un véritable défi technique. Trois caméras étaient ainsi dissimulées dans le véhicule. Jafar Panahi avait par ailleurs tout géré seul : le cadre, le son, le jeu des acteurs et donc le sien, tout en conduisant !  Cette fois, pour la première fois depuis vingt ans, il n’apparaît pas à l’écran.

    On se souvient du début de Taxi Téhéran. Un plan fixe : la ville de Téhéran grouillante de monde et de vie, vue à travers la vitre avant d’un taxi dont on perçoit juste le capot jaune. Le chauffeur reste hors-champ tandis que la conversation s’engage entre les deux occupants du taxi qui ne se connaissaient pas avant qu’ils ne montent l’un après l’autre dans le véhicule. L’homme fait l’éloge de la peine de mort après avoir raconté une anecdote sur un voleur de roues de voiture. « Si j’étais à la tête du pays, je le pendrais » déclare-t-il ainsi. La femme, une institutrice, lui rappelle que l’Iran détient le triste record mondial d’exécutions après la Chine. Avant de partir, l’homme révèle son métier : voleur à la tire. Ce premier tableau permet un début d’esquisse de la société iranienne mais aussi de planter le décor et d’installer le ton, à la fois grave et burlesque. Le décor est l’espace feutré du taxi qui devient un lieu de liberté dans lequel se révèlent les incongruités suscitées par l’absurdité des lois et interdictions en vigueur. L’ingéniosité du dispositif (qui nous rappelle que Panahi a été l’assistant de Kiarostami) nous permet de rester à l’intérieur du taxi et de voyager, pas seulement dans Téhéran, mais aussi dans la société iranienne, et d’en établir une vue d’ensemble.

    Un Simple accident commence aussi dans une voiture et comme le titre du film l’indique, par un « simple accident ». Sur les hauteurs de Téhéran, une famille (le père, la mère enceinte, et la petite fille) voyage en voiture sur une route cabossée et tombe en panne après avoir heurté un chien. Ce  « simple accident » va enrayer la mécanique… Rien ne laisse présager quel type d'individu sinistre est le conducteur de la voiture, si ce n’est peut-être la manière dont il qualifie la victime de l’accident,  ce avec quoi la petite fille est en désaccord. Il entre ensuite dans un hangar pour demander de l’aide. C’est là que travaille Vahid (Vahid Mobasheri), un ouvrier, qui semble reconnaître le son si particulier de sa démarche boiteuse. Le lendemain, Vahid suit le père de famille, l’assomme et l’embarque à l’arrière de sa camionnette. Mais cet homme est-il réellement Eghbal (Ebrahim Azizi) dit « La guibole » à cause de sa prothèse à la jambe ? Est-il vraiment le gardien de prison qui l’a autrefois « tué mille fois » ? L'idée ne nous quitte pas, qu'il se trompe, et que le châtiment soit encore plus inhumain que ce qui l'a suscité, en se déployant sur un innocent.… Vahid n’est d'ailleurs pas certain, lui qui s’était retrouvé dans cette situation éprouvante, simplement parce qu’il réclamait le paiement de son salaire d’ouvrier. Après avoir emmené celui qu'il pense être Eghbal dans un endroit désert, et l’avoir mis dans la tombe de sable qu’il a creusée, l’homme parvient à le faire douter qu’il fut vraiment son tortionnaire. Vahid va alors partir en quête d’autres témoins capables d’identifier formellement leur bourreau : une future mariée et son époux, une photographe, un homme qui ne décolère pas. Va alors se poser une question cruciale : quel sort réserver au bourreau ? Lui réserver un sort similaire à celui qu’ils ont subi, n’est-ce pas faire preuve de la même inhumanité que lui ? La meilleure des vengeances ne consiste-t-elle pas à montrer qu’il ne leur a pas enlevé l’humanité dont il fut dépourvu à leur égard ?

    Comme dans Taxi Téhéran, le véhicule devient un lieu essentiel de l’action de ce film tourné dans la clandestinité. Dans Taxi Téhéran, ce n’est qu’après plus de neuf minutes de film qu’apparaît le chauffeur et que le spectateur découvre qu’il s’agit de Jafar Panahi, révélant ainsi son sourire plein d'humanité, sa bonhomie. Son nouveau passager le reconnaît ainsi (un vendeur de films piratés qui, sans doute, a vendu des DVD de Jafar Panahi, seul moyen pour les Iraniens de découvrir ses films interdits et qui, comble de l’ironie, dit « Je peux même avoir les rushs des tournages en cours ») et lui déclare « c’étaient des acteurs », « C’est mis en scène tout ça » à propos d’une femme pétrie de douleur que Panahi a conduite à l’hôpital avec son mari ensanglanté, victime d’un accident de deux roues. Panahi s’amuse ainsi de son propre dispositif et à brouiller les pistes, les frontières entre fiction et documentaire. De même, dans Un Simple accident, le protagoniste n’apparaît pas tout de suite. Nous pensons d’abord suivre les trois membres de cette famille, et que le père sera le personnage principal, celui qui suscitera notre empathie…

     

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    Au-delà du portrait de la société iranienne sous le joug d'un régime autoritaire et inique mais malgré tout moderne, vibrante de vie, d’aspirations, Taxi Téhéran était aussi une déclaration d’amour au cinéma dont le taxi est une sorte de double : un espace salutaire de liberté, de jeu, de parole, d’irrévérence, de résistance. Le film devient ainsi une leçon de cinéma, le moyen pour Panahi de glisser quelques références. Le jeu de mise en abyme, de miroirs et de correspondances est particulièrement habile. Le cinéaste multiplie les degrés de lecture et les modes de filmage, de films dans le film, ce que filment les caméras dans le véhicule, ce que filme sa nièce avec son appareil photo, ce que filme son portable, démontrant ainsi la pluralité de possibles du cinéma.

    Le dispositif est beaucoup plus simple ici, il n’en recèle pas moins de puissance dénonciatrice, et d’autant plus de courage puisque le propos est encore plus clair et direct.

    Dans Taxi Téhéran, lorsque Jafar Panahi évoque aussi sa propre situation, avec une fausse innocence, et celle des prisons (« J’ai entendu la voix du type qui me cuisinait en prison » dit-il à son avocate), cela pourrait être le point de départ de Un Simple accident comme si les deux films se répondaient. Et lorsque cette dernière, suspendue de l’ordre des avocats, lui dit « comme si le syndicat des réalisateurs votait ton interdiction de tourner », l’ellipse qui suit, ou plutôt la pseudo-indifférence à cette phrase, en dit long. « Tu es sorti mais ils font de ta vie une prison », « Ne mets pas ce que je t’ai dit dans ton film sinon tu seras accusé de noirceur », « Il ne faut montrer que la réalité mais quand la réalité est laide ou compliquée, il ne faut pas la montrer ». Chaque phrase de l’avocate ressemble à un plaidoyer contre le régime. Un Simple accident pourrait être le prolongement de ce dialogue, même si Jafar Panahi n’apparait pas, ou justement parce que Jafar Panahi n’apparaît pas.

    Avec Un Simple accident, le cinéaste continue donc son exploration et sa dénonciation de la dictature iranienne. Il a choisi cette fois la forme d'un thriller, mais un thriller burlesque. Comment traiter autrement l’absurdité de ce régime ? Cette fois, il s’agit cependant de penser à l’après, de poser les questions morales et politiques concernant la manière dont il faudra traiter les tortionnaires du régime. Comme tout un pays, les cinq passagers de la camionnette sont hantés par ce qu’ils ont vécu. Ce trajet avec leur bourreau va mettre à l’épreuve leur humanité et leur avidité de justice. Mais va surtout révéler ce qui les différencie de celui qui les a torturés, qui a tué et violé.

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    Pour la première fois depuis quinze ans, Jafar Panahi était présent à Cannes pour défendre son film.  « Faire un film engagé n’a pas été facile » a -t-il expliqué. Si son film est un acte politique et un acte de courage (Jafar Panahi, malgré cette dénonciation frontale du régime, de ses oppresseurs mais aussi de sa corruption, est retourné en Iran après le festival), il est aussi une vraie œuvre de cinéma. Le film lui-même est ainsi une vengeance, ou du moins une revanche sur ses oppresseurs. Ils n’auront pas atteint sa liberté de dire, de filmer, de dénoncer, ni son humanité.

    L’an passé, Les graines du figuier sauvage de l'iranien Mohammad Rasoulof, qui aurait aussi mérité une Palme d’or, est reparti avec un prix spécial du Jury, prouvant la grande vitalité du cinéma iranien, bien qu’entravé par les lois du régime. 

    Grâce à un sens de la mise en scène toujours aussi aiguisé, un courage admirable, des comédiens parfaits, un ton tragi-comique, une portée morale, politique et philosophique, qui interroge aussi notre propre rapport à la vengeance et notre propre humanité, une fin glaçante d’une force indéniable, cette  farce savoureuse, quête de vérité rocambolesque méritait amplement cette Palme d’or.

    Jafar Panahi a dédié la projection de son film à « tous les artistes iraniens qui ont dû quitter l'Iran ».  Il ne fait aucun doute que sa voix les défendra et portera bien au-delà de l’Iran. Si l’art rend les étreintes éternelles, il donne aussi de la voix aux cris de rage et de détresse. Comme l’a si justement remarqué la présidente du jury de cette 78ème édition, lors de la remise de la Palme d’or, « l’art provoque, questionne, bouleverse », est « une force qui permet de transformer les ténèbres en pardon et en espérance. » Comme ce film. Comme cette mariée et sa robe blanche qui résiste aux ténèbres de la vengeance. La force n'est pas ici physiquement blessante, mais c'est celle des mots et des images, en somme du cinéma, qui feront surgir la vérité et ployer l'oppresseur.

    Voilà qui me donne aussi envie de revoir et de vous recommander un autre chef-d’œuvre du cinéma iranien, Copie conforme de Kiarostami, avec une certaine Juliette Binoche qui, en 2010, année où Panahi devait faire partie du jury, remporta le prix d’interprétation féminine à Cannes. (Et je pense aussi à ce petit bijou méconnu de Kiarostami, mais je m'égare). Copie conforme est un film de questionnements plus que de réponses. À l'image de l'art évoqué dans ce film dont l'interprétation dépend du regard de chacun, le film est l'illustration pratique de la théorie énoncée par le personnage principal. Un film sur la réflexivité de l'art qui donne à réfléchir. Un dernier plan délicieusement énigmatique et polysémique qui signe le début ou le renouveau ou la fin d'une histoire plurielle.

    Enfin, je vous parlerai ultérieurement d’un autre coup de cœur cannois, en compétition et qui aurait mérité aussi de figurer au palmarès, un autre film iranien, Woman and child de Saeed Roustaee qui, comme Jafar Panahi cette année, avait obtenu le Prix de la citoyenneté, pour Leila et ses frères, en 2022. Le jury du Prix de la Citoyenneté 2025 était présidé par le cinéaste Lucas Belvaux. Ce prix met en avant des valeurs humanistes, universalistes et laïques. Il célèbre l'engagement d'un film, d'un réalisateur et d'un scénariste en faveur de ces valeurs auxquelles répond incontestablement le film de Jafar Panahi (ci-dessous, la remise du prix à Cannes). Le jury a ainsi salué  la « façon dont la réalisation a utilisé le cinéma pour faire d'un simple accident une réflexion sur la responsabilité individuelle, le courage, et la nécessité d'arrêter le cycle de la violence.»

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    Un Simple accident sortira au cinéma en France le 1er octobre 2025.

     

  • Bilan et palmarès du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2025 – 51ème édition

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    Ci-dessous, retrouvez mon bilan émotionnel de ce 51ème Festival du Cinéma Américain de Deauville auquel j'ai assisté de l'ouverture à la clôture. Je reviendrai ultérieurement en détails sur les films présentés lors de leurs sorties en salles.

    Retrouvez aussi de nombreuses photos et vidéos de cette édition sur mon compte Instagram @Sandra_Meziere, ici.

    Mes stories Instagram consacrées au 51ème Festival du Cinéma Américain de Deauville sont à retrouver ici.

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    « Il n'y a pas d'âge pour réapprendre à vivre. On dirait même qu'on ne fait que ça toute sa vie : repartir, recommencer, respirer à nouveau. » Françoise Sagan

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    Réapprendre à vivre. Repartir. Recommencer. Respirer à nouveau. Il me semble que ce sont ces pouvoirs magiques que m'insuffle Deauville chaque année depuis ce tout premier Festival du Cinéma Américain de Deauville auquel j’ai assisté, il y a trois décennies. Peut-être parce que là flotte toujours dans l'air le parfum de réminiscences de souvenirs heureux. Probablement est-ce le reflet du passé qui pare les planches de cette aura particulière. Ainsi, la lumière ici me semble puissamment douce, comme nulle part ailleurs, si ce n'est quelque part sur les bords de la mer Égée peut-être.

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    Comment résumer ces dix jours intenses de cinéma ? Que va-t-il me rester de ce défilé enivrant de sons, d’images, d’émotions, de rencontres, de soleil ardent et d’ombres brûlantes ? Des images de films certainement qui vont s’intégrer à celles de ma propre vie. La claustrophobie enchantée et l’apocalypse tamisée de The End de Joshua Oppenheimer. Le pouvoir réparateur des mots et les cicatrices suintantes The Chronology of water de Kristen Stewart. L’hémoglobine de la fable paranoïaque de Yorgos Lanthimos, Bugonia. La nostalgie poignante et la musique consolatrice de The History of sounds de Olivier Hermanus. Les mensonges bouleversants, la vitalité et le cœur brisé de Eleanor the great de Scarlett Johansson. Le discours lyrique et marquant de Pamela Anderson, et son éloge de la vulnérabilité.

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    Les vœux de résistance et la douce puissance de la brillante Golshifteh Farahani face à l’Amérique, à l’image du monde : vacillante et fracturée. La danse aérienne de Marie-Agnès Gillot lors de la cérémonie d’ouverture, sur la musique de Philip Glass (The Hours de Stephen Daldry).

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    La valse des goëlands dans le projecteur de la pleine lune. Les vagues hypnotiques de la mer (trompeusement donc) prometteuse. Les idées insensées qui s’élancent et me grisent et m’égarent. Les promenades jusqu’à l’épuisement pour se gaver d’éclats et d’illusions.

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    Cette édition fut placée sous le signe du vertige. Celui de Kim Novak (qui a illuminé le festival de sa présence mythique et insaisissable) et d’Hitchcock auquel se référaient deux films de la compétition (dont le troublant After this death de Lucio Castro oublié du palmarès) et le documentaire qui était consacré à la comédienne, Kim Novak’s Vertigo de Alexandre O. Philippe. Même le film de clôture, Vie privée de Rebecca Zlotowski jongle avec les vertiges de l’identité et certains plans (notamment d’un escalier en spirale) se référent au film d’Hitchcock.

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    Un festival est un peu comme le chignon de Madeleine/ Carlotta, cercle de fatalité inexorable, non ? Tout est faux-semblants et nous hypnotise. Avant que la chute ne ramène au début, au présent, à la réalité, et à la beauté à jamais insondable de cet amour illusoire et incandescent.

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    Vous avez pu écouter quelques-unes de mes chroniques sur Deauville La Radio. J'y évoque quelques classiques que vous avez pu (re)découvrir pendant le festival : Sueurs froides (Vertigo ) d’Alfred Hitchcock (hommage à Kim Novak), La chatte sur un toit brûlant de Richard Brooks (hommage à Paul Newman), mais aussi Gatsby le magnifique de Baz Luhrmann (hommage à Joel Edgerton)... presque une mise en abyme d'un festival de cinéma et de ses apparences trompeuses. Ou de cette fameuse « poussière empoisonnée flottant sur ses rêves » pour reprendre les mots de Francis Scott Fitzgerald. Retrouvez aussi ces chroniques en version écrite en bas de cet article.

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    « Nous célébrons non seulement les œuvres d'aujourd'hui mais aussi les rêves de demain » a déclaré le Maire de Deauville, Philippe Augier, lors de la cérémonie d’ouverture. C’est en effet ce qui distingue ce festival, ce à quoi nous pouvons aussi ajouter qu’il célèbre les œuvres d’hier puisque le festival a cette année rendu hommage à Paul Newman, Kim Novak et Alice Guy. Ironie du sort alors que vient de s’éteindre une autre légende du cinéma, Robert Redford. En 2013, All is lost dans lequel il incarnait le rôle principal avait d’ailleurs remporté le prix du jury à Deauville (je vous en parlais, ici). Le Maire de Deauville a aussi rappelé que cette 51ème édition était placée sous le signe du rêve californien, ce sont pourtant avant tout sur les cauchemars, les peurs et les ombres de l’Amérique qui les cinéastes en compétition ont braqué leurs projecteurs. « Un cinéma qui bouscule nos certitudes » a-t-il ajouté, se félicitant aussi que le jury de cette édition ait brillé par sa «convivialité et bonne humeur communicative.»

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    Ce festival était aussi placé sous le signe de la « rébellion féminine, puissante et joyeuse » pour reprendre les termes de la directrice du festival, Aude Hesbert. De la rétrospective Alice Guy, à Kristen Stewart, en passant par Kim Novak, Pamela Anderson, et la formidable Eleanor the great (qui prouve qu’une femme peut être une héroïne à 94 ans, merci Scarlett Johansson) en passant par Zoey Deutch ( récipiendaire du prix du Nouvel Hollywood, Jean Seberg dans le film Nouvelle vague de Richard Linklater présenté en avant-première à Deauville) ou encore la présidente du jury, Golshifteh Farahani (qui a reçu la distinction numérique de l’INA), les femmes étaient en effet à l’honneur.

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    Chaque soir, avant la projection officielle s'affichait cette phrase de Jack London : « The proper function of a man is to live, not to exist. » C'est cette impression que procure un festival de cinéma. Vivre. Impression fallacieuse peut-être, mais si douce. Car c'est vivre au rythme de 24 images par seconde, certes. Au rythme d'un réjouissant vertige. Vertigo. Tel le titre du chef-d’œuvre d'Hitchcock sous le signe duquel était placé la première journée du festival avec la présence de l'éblouissante Madeleine/Judy : Kim Novak. Et la projection du passionnant documentaire que lui consacre Alexandre O.Philippe, Kim Novak's Vertigo, dans lequel il est bien sûr question de Sueurs froides qu'elle évoque comme si ses personnages avaient déteint sur elle, dans une troublante et fascinante confusion.

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    Il fut aussi souvent question du poids de chagrins condamnés au silence, notamment dans le premier film en tant que réalisatrice de Kristen Stewart, The Chronology of water (adaptation de La Mécanique des fluides de Lidia Yuknavitch) qui a ainsi récolté le Prix de la Révélation pour ce film audacieux, impressionniste, âpre et sensible, mais aussi dans celui de Scarlett Johansson, Eleanor the great (qui a remporté le prix du public) mais aussi dans The History of sounds de Olivier Hermanus, présenté en avant-première après sa sélection en compétition du dernier Festival de Cannes. L'un évoque un amour impossible. Un autre deux deuils qui le sont tout autant. Le troisième un cœur qui saigne. Les trois m'ont bouleversée par la justesse et la résonance de leurs notes finales qui viennent débusquer nos propres chagrins et les apaiser, un temps. En nous démontrant le pouvoir des mots et de la musique comme forces réparatrices, ou pour nous permettre « disparaître dans l’imagination ».

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    Dans The History of sound de O.Hermanus, les sons viennent débusquer la nostalgie nichée au fond de nos cœurs. Une note finale implacable qui justifie la partition antérieure, tout en retenue. Celle d'une rencontre vibrante qui influe sur la mélodie d'une vie entière. L'art rend les étreintes éternelles.

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     Dans Eleanor the great, Eleanor Morgenstein, 94 ans, tente de reconstruire sa vie après la mort de sa meilleure amie, Bessie. Elle retourne à New York auprès de sa fille et de son petit-fils, après avoir vécu en Floride pendant des décennies. Incarnée par l'inégalable June Squibb, Eleanor, pour faire revivre Bessie, son amie survivante de la Shoah, va s'emparer de son histoire. Un film poignant sur les chagrins indicibles, le pardon, écrite et filmée avec beaucoup de délicatesse, humour et tendresse. « Il faut parler des choses qui nous rendent tristes. » « J'avais peur d'admettre que j'ai le cœur brisé ». Deux phrases extraites de ce film sur le « tabou du chagrin ». Il y a parfois des mots qui vous donnent envie de humer plus que jamais le parfum du présent... et de savourer la beauté incendiaire de Deauville.

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    N'avez-vous pas remarqué d’ailleurs qu'il en va des films comme des êtres humains ? Les plus intéressants sont ceux qui ne se contentent pas des apparences. Qui débusquent les failles, et tentent de les comprendre. Derrière le sourire. Derrière l'image lisse. Lisse comme semble l'être le cadre dans lequel évolue la famille de The End, premier long métrage de fiction de Joshua Oppenheimer déjà multi primé pour ses précédentes œuvres (documentaire et docu-fiction).

    « Vingt-cinq ans après qu’une catastrophe écologique a rendu la Terre inhabitable, Mère, Père et Fils vivent reclus dans leur luxueux bunker. Pour garder espoir et préserver une illusion de normalité, ils s’accrochent aux rituels du quotidien – jusqu’à l’arrivée de Fille, une inconnue qui bouleverse leur routine bien rodée. À mesure que les tensions montent, leur existence en apparence idyllique commence à s’effondrer. » Tableaux de maître. Intérieur luxueux. Mais pas de fenêtres. Et quelques dissonances et étrangetés nous font rapidement comprendre que ce décor aseptisé dissimule une terrible réalité. Le vernis va rapidement se craqueler et les égoïsmes meurtriers de chacun vont se révéler. Nous ne pouvons nous empêcher de penser que cette fable écologiste est prémonitoire. Les intermèdes musicaux apportent des notes trompeusement enchanteresses, dévoilant les états d'âme avec une gaieté trompeuse. Je vous parlerai longuement de ce film lors de sa sortie, film à la fois magique et terrifiant. Qui nous fait frissonner de jubilation et de terreur. La durée (2h29) a découragé quelques spectateurs qui ont quitté la salle en cours de route. Ce voyage déroutant et fascinant vaut pourtant le détour. Voilà qui me fait songer à cette phrase extraite de La chatte sur un toit brûlant programmé dans le cadre de l'hommage à Paul Newman :

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    « L'être humain sait qu'il doit mourir et il est le seul à le savoir dans la nature et cela ne le rend ni meilleur ni plus charitable que les autres bêtes. »

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    « Disparaître dans l'imagination » : je ne cesse de repenser à cette idée formulée dans le film The Chronology of water de Kristen Stewart. Là me semble la clef de tout, pour laisser les écorchures apparaître, les panser, les penser sans entraves. Disparaître dans l'imagination et y renaître.  Un film sur une femme qui saigne qui ne peut pas appeler à l'aide. Lors du débat d’après film, la réalisatrice a ainsi évoqué comme référence Tarkovski et la nécessité pour les films de « nous aider à nous comprendre nous-mêmes ».

    Ce sont 13 films en compétition qu’ont dû départager les deux jurys, l'un présidé par Golshifteh Farahani et l'autre (de la révélation) présidé par Jean-Pascal Zadi avec pas moins de 10 premiers films parmi lesquels ceux des comédiennes Scarlett Johansson et Kristen Stewart. « Une sélection vibrante et kaléidoscopique, qui dresse le portrait d’une jeunesse américaine composite, en quête de sens et d’identité » avait annoncé la Directrice du Festival, Aude Hesbert. Une sélection qui met à mal la figure paternelle, reflète une Amérique repliée sur elle-même en quête d'espoir, qui (se) ment pour supporter une réalité ineffable.

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    Soulignons cette ouveauté appréciable cette année : la reprise du palmarès, le dimanche 21 septembre, au Cinéma Le Grand Action, à Paris.  J'y rattraperai les films du palmarès que j'ai manqués.

    En attendant, voici la liste des films en compétition :

    AFTER THIS DEATH 
    Lucio Castro
    (Première française)
    ELEANOR THE GREAT 
    Scarlett Johansson
    (1er film)
    I LIVE HERE NOW
    Julie Pacino 
    (1er film - Première française)
    IN TRANSIT
    Jaclyn Bethany
    (Première française)
    LURKER
    Alex Russell
    (1er film - Première française)
    OLMO
    Fernando Eimbcke
    (Première française)
    OMAHA
    Cole Webley
    (1er film - Première française)
    REBUILDING
    Max Walker-Silverman
    (1er film - Première française)
    SOVEREIGN
    Christian Swegal
    (1er film - Première européenne)
    THE CHRONOLOGY OF WATER
    Kristen Stewart
    (1er film)
    THE END
    Joshua Oppenheimer
    (1er film - Première française)
    THE NEW WEST 
    Kate Beecroft
    (1er film - Première française)
    THE PLAGUE 
    Charlie Polinger
    (1er film)

    PALMARES

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    Le Jury de la 51ème édition du Festival du Cinéma Américain de Deauville, présidé par Golshifteh Farahani, entourée de Thomas Cailley, Eye Haïdara, Katell Quillévéré, Philippine Leroy-Beaulieu, Vincent Macaigne, Benjamin Millepied et Emilie Tronche a dévoilé son palmarès, établi à partir des 13 films présentés en compétition cette année.

    Grand Prix
    THE PLAGUE de Charlie Polinger

    Prix du Jury
    OLMO de Fernando Eimbcke

    Prix du Jury
    OMAHA de Cole Webley

    Le Jury de la Révélation la 51eédition du Festival du Cinéma Américain de Deauville, présidé par Jean-Pascal Zadi, entouré de Suzy Bemba, Julien Colonna, Bilal Hassani et Anaïde Rozam a dévoilé son palmarès, établi à partir des 13 films présentés en Compétition cette année.

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    Prix de la Révélation
    THE CHRONOLOGY OF WATER
    de Kristen Stewart
    En salles le 15 octobre 2025

    Prix du public de la ville de Deauville
    ELEANOR THE GREAT
    de Scarlett Johansson

     

    Prix CANAL+
    SOVEREIGN de Christian Swegal

    Le Jury de la Critique la 51e édition du Festival du Cinéma Américain de Deauville, composé des critiques et journalistes Eva Bettan (Présidente), Sophie Avon, Emily Barnett, Lily Bloom et Gael Golhen a remis un prix au film suivant :

    Prix de la critique
    THE PLAGUE
    de Charlie Polinger

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    Prix d'Ornano-Valenti
    NINO
    de Pauline Loquès
    En salles le 17 septembre 2025

    Hommage à Paul Newman – La chatte sur un toit brûlant de Richard Brooks

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    Une des forces du Festival de Deauville est d’être à la fois un découvreur de talents, notamment avec les films en compétition, mais aussi une vitrine étincelante du cinéma d’hier et du glamour hollywoodien. Ainsi, à 19H30, le mercredi 10 septembre, au CID, les festivaliers ont pu assister à un hommage à Paul Newman en présence de sa fille.


    Dans le cadre de cet hommage étaient programmés plusieurs films dont La chatte sur un toit brûlant de Richard Brooks, le 6 septembre à 11h au Morny. Ce film est adapté de la pièce de Tennessee Williams, Cat on a Hot Tin Roof, qui fut présentée à Broadway en 1955, mise en scène par Elia Kazan et qui eut un grand succès critique, remportant ainsi le Pulitzer Price. On accuse souvent le film d’être plus consensuel que la pièce, l’auteur qui avait pourtant été régulièrement consulté pendant le tournage le qualifiera même de saccage total. Il s’agit ainsi du 13ème long métrage de Richard Brooks qui connut un triomphe au box-office 1958, récolta six nominations aux Oscars 1959 dont celles de meilleure actrice pour Elisabeth Taylor et du meilleur acteur pour Paul Newman. L’intrigue nous plonge dans l’atmosphère moite d’une immense villa du Sud des Etats Unis, une prospère plantation du Mississippi, où se réunit une famille pour fêter le 65ème anniversaire du patriarche, surnommé « Big Daddy» sur le point de mourir, ce qu’il ignore. Sont présents sa belle-fille, Maggie, (Elisabeth Taylor) et son fils, Brick, (Paul Newman), ancien champion de football, terrassé par le suicide de son ami et coéquipier Skipper, après un mystérieux moment passé avec Maggie et un énigmatique coup de téléphone avec ce dernier. Brick se réfugie alors dans l’alcool et repousse sa femme au prétexte qu’il considère comme responsable de la mort de son ami. Elle se compare alors à une « chatte sur un toit brûlant. »  Pendant ce temps, la famille se déchire pour l'héritage de Big Daddy que Cooper, le frère de Brick, et son épouse, assoiffée d’argent et exaspérante, veulent absolument s’accaparer. Ils sont accompagnés de ceux que Maggie qualifie de « monstres sans tête », leurs cinq enfants insolents et pas très malins, que leur mère force à chanter des airs stupides à tout instant, pour flatter leur grand-père.

    C'est Richard Brooks qui insista pour que le Newman tienne le rôle principal, les producteurs étant réticents à cette idée. Le réalisateur disait l’avoir choisi parce « qu'il y a toujours en lui quelque chose qui demeure secret et refuse de se dévoiler facilement (...). Paul Newman livre une prestation habitée et bouleversante, de ce personnage tourmenté mais attachant. « Je suis un vieux gosse de 30 ans. » Ainsi Brick se qualifie-t-il. Il dit ne plus croire en rien et que le dégoût qu’il 'éprouve pour le mensonge est en fait le dégoût de lui-même.  Sa solitude et sa souffrance, emportent d’emblée l’empathie du spectateur, même si le sens de la pièce est ici trahi, censure oblige, et volonté du réalisateur de s’adresser au plus grand nombre, les liens plus affectifs qui l’unissaient à son coéquipier étant ici transformés en simple amitié.

    Face à Paul Newman, Liz Taylor, d’une insolence réjouissante, avec une palette de jeu très étendue, de la tendresse a cynisme, est d’une sensualité animale, d’une vitalité féroce et d’une beauté flamboyante.  Le film était prévu pour être tourné en noir et blanc mais Richard Brooks insista pour tourner en couleurs afin de mettre en valeur des yeux bleus de Paul Newman et ceux d’Elizabeth Taylor, couleur violette. Les couleurs y sont là aussi éblouissantes.


    Il y a une vraie jubilation à entendre ces dialogues délicieusement lucides et cruelles, à assister à l’effondrement de ce petit monde dominé par le mensonge, la duplicité, la cupidité, dans lequel tout le monde ment. La mise en scène est aussi particulièrement inventive, la tension étant rythmée par un orage et des pluies torrentielles qui les cristallisent. L’orage se déchaîne ainsi aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur. Vous ferez aussi attention décor qui sert de séparation des clans ou qui dément ce que les mots disent. Il faut aussi louer la mise en scène inventive et ce scénario ciselé.


    Qui sait …. Peut-être le calme reviendra-t-il après la tempête, après cette chaleur suffocante, ces mensonges étouffants, mais vous en ressortirez étourdis comme après un voyage aussi palpitant qu’éreintant. Terminons par une phrase du film qui en reflète la cruelle lucidité, et la qualité littéraire : « L'être humain sait qu'il doit mourir et il est le seul à le savoir dabs la nature et cela ne le rend ni meilleur ni plus charitable que les autres bêtes. »

    Hommage à Kim Novak – Sueurs froides (Vertigo) d’Alfred Hitchcock

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    Parmi les évènements incontournables de cette 51ème édition du Festival du Cinéma Américain, il y eut la venue de Kim Novak qui a reçu un Icon Award le 6 septembre à 17h au CID avant la projection du documentaire que lui est consacré. Les festivaliers ont également pu (voir ou revoir le chef d’œuvre d’Hitchcock Sueurs froides, intitulé en vo Vertigo, le 7 septembre au Morny et le 11 au Casino.


    En 1958, le maître du suspense adapte le roman de Boileau et Narcejac, D’entre les morts. Ce sera la quatrième et dernière collaboration de James Stewart et Alfred Hitchcock. L’acteur incarne ici un personnage moins sympathique et plus trouble que dans ses précédents rôles. Ce film aux multiples visages et interprétations décontenança ainsi le public et la critique lors de sa sortie, ne recevant que deux nominations aux Oscars. Il est aujourd’hui unanimement reconnu comme un chef-d’œuvre, voire comme le plus grand film de l’histoire du cinéma. Un film fascinant et captivant dès son générique en spirale hypnotique qui préfigure celle du fameux chignon de Kim Novak.


    James Stewart incarne ici Scottie, policier, sujet à l’acrophobie, une peur du vide. Rendu responsable de la mort d'un de ses collègues, il décide de quitter la police. Une ancienne relation le contacte afin qu'il suive sa femme, Madeleine, Kim Novak, dont le comportement étrange lui fait redouter qu’elle se suicide. Elle serait possédée par l'esprit de son aïeule, Carlotta Valdès. Scottie s'éprend immédiatement de la jeune femme. D’elle ou d’une image idéalisée. Puis peut-être de son sosie. Vivants et morts, Illusion et réalité, s’enlacent et s’entrelacent en effet dans un étourdissant manège visuel.


    Alfred Hitchcock souhaitait que Vera Miles incarne Madeleine. Celle-ci étant tombée enceinte, il engage Kim Novak. Il déclarera après le tournage que ce changement lui avait fait perdre « tout intérêt pour le personnage et le film en lui-même ». On se demande pourtant qui mieux qu’elle aurait pu incarner la blonde hitchcockienne, douloureusement belle, élégante et mystérieuse, idéalisée par Scottie, une sorte de rêve morbide dans lequel il se laisse emporter. Kim Novak était d’ailleurs déjà une star quand elle tourna Sueurs froides. Elle avait notamment déjà joué dans L'Homme au bras d'or sous la direction d'Otto Preminger.  Alfred Hitchcock a utilisé de nombreux filtres pour les apparitions de l’actrice, ce qui rend son personnage encore plus énigmatique, à la fois éblouissant et fantomatique.

    Sueurs froides marque aussi la quatrième collaboration entre Alfred Hitchcock et son compositeur Bernard Hermann. La beauté énigmatique, romantique et grave de sa musique fait écho à celle de Kim Novak et contribue à l’atmosphère sombrement envoûtante du film. Regardez bien aussi les couleurs avec lesquelles Hitchcock  joue admirablement, du gris des vêtements de Madeleine pour exacerber son étrangeté, au vert, pour évoquer ce qui a trait au passé, et le rouge, pour annoncer la mort.


    Un film insaisissable comme Madeleine avec une atmosphère troublante, qui nous emporte dans son vertige (au sens figuré et au sens propre lors de la magistrale scène de l’escalier du clocher, une des nombreuses scènes d’anthologie que compte le film), qui nous aspire dans son étourdissant mystère. Un thriller en trompe-l’œil sur l’obsession et la culpabilité. Une histoire d’amour bouleversante. Ce film dans lequel tout est faux-semblants nous hypnotise comme le chignon de Madeleine qui signifie aussi l’idée de répétition du drame, comme un cercle de la fatalité inexorable.


    Hitchcock a réalisé là un film dans lequel chacun peut aussi projeter ses rêves ou ses cauchemars. La fin est certainement une des plus marquantes et redoutablement et ironiquement poignante de l’histoire du cinéma. Un film qui a inspiré de nombreux cinéastes comme Brian de Palma. Enfin, ne manquez le cameo d’Alfred Hitchcock qui fait une courte apparition comme dans chacun de ses longs-métrages. Vous l’aurez compris, je vous recommande de voir ou revoir ce chef-d’œuvre aussi intrigant et ensorcelant à la première vision qu’à la dixième.

    Hommage à Joel Edgerton – Gatsby le magnifique de Baz Luhrmann

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    Le lundi 8 septembre, à l’occasion de l’hommage à Joel Edgerton, à 10H30 au Cinéma Le Morny les festivaliers ont pu voir Gatsby le Magnifique, un film de 2013 de Baz Luhrmann, adaptation de l’intemporel chef-d’œuvre éponyme de Francis Scott Fitzgerald. Peut-être certains d’entre vous connaissent-ils uniquement la version de Michael Clayton de 1974 avec Mia Farrow et Robert Redford dans les rôles repris par Carey Mulligan et Leonardo Di Caprio. Joel Edgerton incarne Tom Buchanan décrit par Francis Scott Fitzgerald comme un riche colosse. Il fallait un acteur au physique imposant qui puisse rivaliser de charisme avec Di Caprio.

    Nous sommes au printemps 1922. Apprenti écrivain, Nick Carraway quitte la région du Middle-West pour s’installer à New York, où son voisin est le mystérieux millionnaire, Jay Gatsby qui s’étourdit en fêtes mondaines. Dans son entourage figure aussi sa cousine Daisy et son mari volage, Tom Buchanan. Nick se retrouve au cœur de leurs illusions, de leurs amours et de leurs mensonges.

    L’adaptation de Clayton (écrite par Coppola), se distinguait avant tout par la magnificence crépusculaire de la photographie et par la langueur fiévreuse qui étreignait les personnages et laissait entendre que tout s’achèverait dans le drame. C’est avant tout dans la retranscription de la flamboyance de l’univers de Gatsby que Luhrmann se distingue. La mélancolie affleure néanmoins dans cette débauche festive. L’amertume derrière l’apparente légèreté. Le désenchantement derrière la désinvolture. Gatsby le magnifique est une critique de l’insouciance cruelle de l’aristocratie que symbolise Daisy, mais aussi le portrait fascinant d’un homme au passé trouble et à l’aura romantique dont la seule obsession est de ressusciter le passé et qui ne vit que pour satisfaire son amour inconditionnel et aveugle. Face à lui Daisy, frivole et lâche, qui préfère sa réputation et sa richesse à Gatsby dont la réussite sociale n’avait d’autre but que de l’étonner. Gatsby est une histoire de contrastes. Entre le goût de l’éphémère de Daisy et celui de l’éternité de Gatsby. Entre la réputation sulfureuse de Gatsby et la pureté de ses sentiments. Entre la fragilité apparente de Daisy et sa cruauté. Entre la douce lumière d’été et la violence des sentiments. Des contrastes d’une douloureuse beauté dans le roman, et dans l’adaptation de Luhrmann. Joel Edgerton ne démérite pas face à Di Caprio et représente avec beaucoup de crédibilité l’arrogance et le privilège associés à l’ancienne richesse.  Enfin signalons la B.O exceptionnelle qui vaut aussi le déplacement.


    Un film, comme celui de Clayton, empreint de la fugace beauté de l’éphémère et de la nostalgie désenchantée que symbolise Gatsby. Baz Luhrmann y ajoute une mélancolique flamboyance.

    Relisez le magnifique texte de Fitzgerald, ne serait-ce que pour des expressions sublimes telles que « La poussière empoisonnée flottant sur ses rêves » …mais ne passez pas non plus à côté de cette adaptation qui ne déshonore pas la beauté de ce roman bouleversant sur l’amour absolu, la solitude et les illusions perdues derrière le faste et la multitude. Presque une mise en abyme puisque cela pourrait finalement être aussi la définition d’un festival de cinéma.

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    Le bilan du 51ème Festival du Cinéma Américain de Deauville en chiffres :

    - 64 films présentés

    - plus de 150 séances et évènements

    - plus de 100 invités américains

    - 36 films inédits

    - 19 premières françaises

    -3 premières européennes

    - 16 premiers films

    -plus de 500 professionnels et équipes de films accrédités

     

  • Festival du Cinéma Américain de Deauville 2025 : le programme complet

    Affiche du 51ème Festival du Cinéma Américain de Deauville.jpg

    Cet article sera mis à jour au fur et à mesure des annonces concernant le 51ème Festival du Cinéma Américain de Deauville.

    En ces jours assombris par une actualité particulièrement anxiogène, le Festival du Cinéma Américain de Deauville, avec l’affiche de sa 51ème édition, nous invite à croire à un horizon plus ensoleillé et à plonger dans le rêve californien. Avant de vous présenter le programme complet de cette édition 2025 annoncé lors de la conférence du 21 août, en direct de l'hôtel Barrière Le Normandy de Deauville, quelques mots sur la 50ème édition qui a entrelacé le cinéma indépendant et la flamboyance d’un cinéma plus grand public. Une alliance magique, source de la singularité de ce festival, si bien symbolisée par les présences de James Gray et Francis Ford Coppola.

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    L’édition 2024 fut particulièrement marquante pour les 60000 festivaliers venus célébrer le 50ème anniversaire du festival. Il y eut ainsi :  la passionnante master class de James Gray, un hommage à deux figures du cinéma récemment disparues, indissociables de Deauville, Anouk Aimée et Gena Rowlands, Michael Douglas récipiendaire d’un prix d’honneur, Natalie Portman qui reçut son Deauville Talent Award des mains d’Isabelle Adjani, des « prix du Nouvel Hollywood » décernés à Daisy Ridley, Mikey Madison et Sebastian Stan, des Premières prestigieuses (La plus précieuse des marchandises, Anora, All we imagine as light, Lee Miller, Megalopolis), l’émotion communicative de Coppola, la présence des anciens présidents du jury…

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    Comme chaque année, le prix d'Ornano-Valenti fut un des temps forts du festival, attribué à Rabia de Mareike Engel­hardt. Comme chaque année également, la compétition a recelé des petits bijoux, explorant l’incommunicabilité d’une Amérique déboussolée, la violence dans les rapports familiaux et sociaux, et la quête d’un espoir souvent inaccessible. Mon coup de cœur, le délicat et poignant Color Book de David Fortune, a reçu du Prix de la Critique. Dans un élégant noir et blanc, il sublime un voyage père/fils aux accents d’adieu à la mère décédée, pour voir, enfin, étinceler l’avenir.

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    « On demande tout le temps aux artistes de résoudre des échecs sociaux ou politiques mais notre rôle est de communiquer la beauté, de transcender la réalité » a déclaré James Gray lors de sa master class. Transcender la réalité et la relater, c’est une symbiose à laquelle parvient magistralement ce festival depuis 50 ans, éclairant ainsi les ombres, les élans et les magnificences des êtres et de la société américaine.

    Une cinquantième édition fabuleuse dont je suis repartie avec cette phrase résonnant tel un air entêtant, à l’image du film dont elle est issue (La plus précieuse des marchandises), d’une force déchirante et d’une beauté renversante : « Voilà la seule chose qui mérite d’exister : l’amour. Le reste est silence ».

    L'édition 2025

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    Cette année, le programme du festival (avec pas moins de 65 films dans 11 catégories) s’annonce une fois plus judicieusement diversifié, mettant en avant les premières œuvres, sans rien oublier du glamour et de la flamboyance avec l’hommage à l’actrice légendaire de Sueurs froides, Kim Novak, qui recevra un « Icon award » mais aussi « l’entrée posthume au panthéon deauvillais de la cinéaste française pionnière des débuts du cinéma en Amérique, Alice Guy » (selon les mots de la directrice du festival, Aude Hesbert), le prix du Nouvel Hollywood à Zoey Deutch qui incarne Jean Seberg dans Nouvelle Vague de Richard Linklater (présenté en première dans le cadre du festival), un Deauville Talent Award à Joel Edgerton ainsi qu’à Pamela Anderson, un focus sur Greg Arraki, des documentaires  sous l’appellation « American doc stories », une carte blanche « Mon cinéma français » à Kristen Stewart qui viendra présenter son premier film en tant que réalisatrice, séléctionné en compétition. Mais aussi les 13 films en compétition que devront départager les deux jurys, l'un présidé par Golshifteh Farahani et le jury de la révélation présidé par Jean-Pascal Zadi, et encore les 14 Premières parmi lesquelles Libre échange de Michael Angelo Covino en ouverture et Vie privée de Rebecca Zlotowski en clôture. Deauville proposera aussi une nouveauté cette année à travers un volet professionnel, Deauville Industry Encounters, « destiné à faire du festival le laboratoire de la coopération artistique et économique entre les deux industries ». La directrice du festival annonce ainsi cette édition 2025 comme une  « promesse de beauté et de pensée, de dialogue et d’amitié, à travers l’éclectisme d’une programmation » « généreuse et audacieuse, dans un syncrétisme de l’expérimentation, du divertissement et du rêve qui définissent si bien les fondements du cinéma américain. »

    Dates du festival 2025

    L’édition 2025 aura lieu du 5 au 14.09.2025.

    Le jury

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    Le jury sera présidé par Golshifteh Farahani. L’Institut National de l’Audiovisuel lui remettra une Distinction numérique

    Elle sera entourée de

    • Thomas Cailley
      Réalisateur et scénariste
    • Eye Haïdara
      Comédienne
    • Katell Quillévéré
      Autrice et réalisatrice
    • Philippine Leroy-Beaulieu
      Comédienne
    • Vincent Macaigne
      Comédien, auteur, metteur en scène & réalisateur
    • Benjamin Millepied
      Chorégraphe et réalisateur
    • Emilie Tronche
      Réalisatrice, scénariste & animatrice

    Le jury de la révélation

    Le jury de la révélation sera présidé par Jean-Pascal Zadi. Le comédien sera entouré de la comédienne Suzy Bemba, du cinéaste Julien Colonna, du chanteur Bilal Hassani, et de la comédienne Anaïde Rozam

    Les films en  compétition

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    Comme chaque année, à n’en pas douter, la compétition nous réservera de belles surprises. Au programme : 13 films dont 10 en Première française et 10 premiers films parmi lesquels ceux des comédiennes  Scarlett Johansson et Kristen Stewart. « Une sélection vibrante et kaléidoscopique, qui dresse le portrait d’une jeunesse américaine composite, en quête de sens et d’identité. » Ainsi la Directrice du Festival, Aude Hesbert, qualifie-t-elle cette compétition 2025. Voilà qui accroît encore notre impatience ! Enfin, nouveauté appréciable cette année : la reprise du palmarès, le dimanche 21 septembre, au cinéma le Grand action, 5 rue des Ecoles, 75005 Paris.

    AFTER THIS DEATH 
    Lucio Castro
    (Première française)

    ELEANOR THE GREAT 
    Scarlett Johansson
    (1er film)

    I LIVE HERE NOW
    Julie Pacino 
    (1er film - Première française)

    IN TRANSIT
    Jaclyn Bethany
    (Première française)

    LURKER
    Alex Russell
    (1er film - Première française)

    OLMO
    Fernando Eimbcke
    (Première française)

    OMAHA
    Cole Webley
    (1er film - Première française)

    REBUILDING
    Max Walker-Silverman
    (1er film - Première française)

    SOVEREIGN
    Christian Swegal
    (1er film - Première européenne)

    THE CHRONOLOGY OF WATER
    Kristen Stewart
    (1er film)

    THE END
    Joshua Oppenheimer
    (1er film - Première française)

    THE NEW WEST 
    Kate Beecroft
    (1er film - Première française)

    THE PLAGUE 
    Charlie Polinger
    (1er film)

    Les Premières

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    14 films seront projetés en avant-première.

    BUGONIA de Yórgos Lánthimos

    FORGE de Jing Ai Ng

    LE SON DES SOUVENIRS de Oliver Hermanus

    LEFT-HANDED GIRL de Shih-Ching Tsou

    LES LUMIÈRES DE NEW YORK de Lloyd Lee Choi

    L'INTERMÉDIAIRE – RELAY de David Mackenzie

    LIBRE ÉCHANGE de Michael Angelo Covino
    (Film d'ouverture)

    NOUVELLE VAGUE de Richard Linklater

    SUPER GRAND PRIX de Waldemar Fast
    (Séance jeune public)

    THE ASTRONAUT de Jess Varley

    THE MASTERMIND de Kelly Reichardt

    THE SUMMER BOOK de Charlie McDowell

    TRAIN DREAMS de Clint Bentley

    VIE PRIVÉE de Rebecca Zlotowski
    (Film de clôture)

    American doc stories

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    8 documentaires seront projetés en avant-première.

    À 2000 MÈTRES D'ANDRIIVKA de Mstyslav Tchernov

    ANDRÉ IS AN IDIOT de Tony Benna

    HOLDING LIAT de Brandon Kramer

    KIM NOVAK'S VERTIGO de Alexandre O. Philippe

    LOWLAND KIDS de Sandra Winther

    ORWELL 2 + 2 = 5 de Raoul Peck

    VIKTOR de Olivier Sarbil

    WHY WE DREAM de Meredith Danluck

    Focus - Gregg Araki : Trilogie Teenage Apocalypse

    Dans les années 90, la trilogie Teenage Apocalypse consacre Gregg Araki comme un cinéaste culte et un chef de fil du “New Queer Cinéma” américain. Les trois longs métrages qui la composent, Totally F***ed Up (1993), The Doom Generation (1995) et Nowhere (1997) font exploser les conventions du cinéma hollywoodien traditionnel par leur flamboyance visuelle et le nihilisme post-moderne de son auteur. Avec pour fils conducteurs la ville de Los Angeles et l’acteur James Duval, ces trois films dressent un portrait halluciné de la jeunesse américaine des années 90 : désenchantée, hypersexualisée, perdue dans un monde saturé d’images, attirée par la drogue et la mort.

    L'affiche

    Communiqué de presse du Festival du Cinéma Américain de Deauville au sujet de l'affiche :

    Derrière le soleil brûlant de la Californie, ses palmiers légendaires, sa nature généreuse et ses grands espaces, son Lifestyle légendaire, c’est l’épitome de l’industrie du cinéma cohabitant avec ses rêves d’avant-garde, c’est l’Amérique tout entière, que nous regardons, que nous rêvons, et que nous admirons.

    Phare encore scintillant de valeurs progressistes, féministes et humanistes, incarnation de l’excellence cinématographique, la Californie - et ses emblèmes que sont Los Angeles et Hollywood - personnifie ce pays de la liberté, de l’innovation, et de la création.

    Avec cette affiche, nous rendons hommage aujourd’hui à sa résilience, sa solidarité, et sa capacité à renaître de ses cendres après les épreuves du Covid, des grèves et des incendies.

    Deauville se veut plus que jamais un espace de conversation et de dialogue avec l’Amérique, à travers son cinéma, véhicule privilégié de ses valeurs et de ses inquiétudes.

    Gageons que cette amitié culturelle aura de longs jours devant elle, et nous serons heureux de la sceller à Deauville.

    Prix du Nouvel Hollywood

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    L’actrice Zoey Deutch recevra un Prix Nouvel Hollywood. Cette distinction honore chaque année une personnalité émergente du cinéma américain dont "le parcours, la justesse de jeu et les choix artistiques incarnent le renouveau du 7ème art."

    À cette occasion sera projeté en Première le dernier film de Richard Linklater, Nouvelle vague, dans lequel l'actrice y incarne le rôle de Jean Seberg. Cette projection aura lieu le vendredi 12 septembre 2025.

    Deauville Talent Award

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    Acteur, scé­na­riste, réa­li­sa­teur et pro­duc­teur, Joel Edger­ton recevra un Deauville Talent Award. On se souvient notamment de son rôle de Tom Buchanan dans Gatsby le magnifique de Baz Lhurmann.

    Après Michelle Williams, Nata­lie Port­man et Michael Dou­glas en 2024, le Fes­ti­val pour­sui­vra cette année son hom­mage aux artistes d’exception en remet­tant un Deau­ville Talent Award à Joel Edger­ton. La céré­mo­nie se tien­dra le jeu­di 11 sep­tembre et sera sui­vie de la pro­jec­tion hors com­pé­ti­tion du film Train Dreams, adap­ta­tion de la nou­velle de Denis John­son réa­li­sée par Clint Bent­ley, dans lequel Joel Edger­ton tient le pre­mier rôle aux côtés de Feli­ci­ty Jones.

    Plu­sieurs de ses films emblé­ma­tiques seront éga­le­ment pro­je­tés au cours du Fes­ti­val, pour per­mettre au public de (re)découvrir son œuvre en salle :

    -Boy Erased de Joel Edgerton

    -Gatsby le magnifique de Baz Luhrmann

    -Loving de Jeff Nichols

    -Master Gardener de Paul Schrader

    -Warrior de Gavin O'connor

    Prix d'Ornano-Valenti

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    Cette année, le Prix d’Ornano-Valenti sera remis à Nino de Pauline Loquès lors de la Cérémonie du Palmarès, le 13 septembre.

    Instauré en 1991 par les compagnies membres de la Motion Picture Association (MPA), association regroupant six studios de production et de distribution de films américains, le Prix d’Ornano-Valenti est décerné par un jury de journalistes anglo-saxons sous la présidence de Jean-Guillaume d’Ornano. Il récompense un premier film français, dans le but d’aider à sa reconnaissance, sa promotion et son exportation. Depuis 2009, le Fonds Culturel Franco-Américain soutient cette initiative.

    Nino de Pauline Loquès
    Avec Théodore Pellerin, William Lebghil, Salomé Dewaels, Jeanne Balibar
    Dans trois jours, Nino devra affronter une grande épreuve. D’ici là, les médecins lui ont confié deux missions. Deux impératifs qui vont mener le jeune homme à travers Paris, le pousser à refaire corps avec les autres et avec lui-même.

    En salle le 17 septembre 2025

    Prix Lucien-Barrière du Roman Américain


    L'écrivaine Joyce Maynard sera quant à elle la lauréate du Prix Lucien-Barrière du Roman Américain qui sera également décerné pendant le festival.

    Deauville Industry Encounters

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    Cette année, le Festival du Cinéma Américain de Deauville proposera un nouveau programme professionnel qui aura pour ambition de devenir une plateforme d'échange de bonnes pratiques des deux côtés de l'Atlantique et un espace de dialogue pour mieux se comprendre afin de collaborer plus efficacement. Cette journée aura lieu le lundi 8 septembre. La matinée sera consacrée aux enjeux de tournage et de la production. Et l'après-midi au jeu d'acteur en France et aux Etats-Unis. 

    Un hommage à Paul Newman

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    Image tirée de La Chatte sur un toit brûlant de Richard Brooks

    Acteur de légende, réalisateur respecté, pilote passionné et philanthrope infatigable, Paul Newman (1925 - 2008) incarne l’élégance rare de ceux qui ont su conjuguer célébrité et engagement.  À l’occasion du centenaire de sa naissance, le Festival de Deauville rend hommage à cette figure mythique d’Hollywood, dont l’aura magnétique et la profonde humanité continuent d’inspirer les générations.

    Pour célébrer la mémoire d’un homme d’exception, dont l’influence perdure tant dans l’histoire du cinéma que dans les engagements solidaires qu’il a fait naître, le Festival de Deauville organisera une cérémonie en son honneur le mercredi 10 septembre, en présence de sa fille, Clea Newman, ambassadrice de cet héritage humaniste.

    Plusieurs des films ayant jalonné sa carrière seront également présentés à cette occasion pendant le Festival :

    La chatte sur un toit brûlant de Richard Brooks

    La couleur de l’argent de Martin Scorsese

    Le Verdict de Sidney Lumet

    Luke la main froide de Stuart Rosenberg

    Prix d’honneur à Kim Novak

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    Photo issue de Sueurs froides d’Alfred Hitchcock (1958)

    Dernière grande star glamour de l’âge d’or hollywoodien, pionnière libre et artiste complète, Kim Novak incarne une figure légendaire du 7ᵉ art.

    En 1958, elle entre dans la légende avec Sueurs froides d’Alfred Hitchcock. Son interprétation magistrale, aux côtés de James Stewart, est devenue l’une des plus commentées et analysées de l’histoire du cinéma. Elle devient alors l’actrice la plus rentable du box-office mondial. Pionnière des droits des femmes, elle est aussi la première comédienne à fonder sa propre société de production, refusant de se plier aux diktats des studios pour préserver sa liberté artistique. Au sommet de sa notoriété, elle fait le choix de quitter Hollywood pour mener une vie loin des projecteurs. Elle s’installe près de Carmel, en Californie, puis dans l’Oregon. Peintre et poétesse, elle consacre sa vie à la création et voit son œuvre plastique saluée par plusieurs institutions prestigieuses.  
    Kim Novak occupe une place à part dans le panthéon du 7ᵉ art.

    Pour saluer la richesse de son parcours, le Festival de Deauville lui remettra un Prix d’Honneur le samedi 6 septembre. La cérémonie sera suivie de la projection du documentaire inédit Kim Novak’s Vertigo, réalisé par Alexandre O. Philippe, un portrait intime de cette légende hollywoodienne farouchement indépendante.

     Plusieurs de ses films emblématiques seront également projetés au cours du Festival :

    - L'HOMME AU BRAS D'OR de Otto Preminger

    - L'ADORABLE VOISINE de Richard Quine

    - SUEURS FROIDES de Alfred Hitchcock

    Pamela Anderson – Deauville Talent Award

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    Photo issue de Y a-t-il un flic pour sauver le monde ? de Akiva Schaffer (2025)

    Après Michelle Williams et Natalie Portman en 2024, le Festival poursuit cette année son hommage aux artistes d’exception en remettant un Deauville Talent Award à Pamela Anderson à l’occasion de la cérémonie d’ouverture du Festival le vendredi 5 septembre.

    À l’occasion de sa 51ème édition, le Festival de Deauville tient à célébrer la carrière singulière d’une artiste qui a su conjuguer sa carrière de comédienne à un engagement constant, marquant ainsi durablement l’imaginaire collectif. En 2024, elle s’illustre dans The Last Showgirl de Gia Coppola présenté au Festival de Toronto puis au Festival de Saint-Sébastien, où il reçoit le Prix spécial du jury. Le film sera projeté pendant le Festival pour permettre à chacun de (re)découvrir cette performance saluée par la critique qui vaut à Pamela Anderson des nominations aux Golden Globes, aux SAG Awards et aux Gotham Awards.

    Kristen Stewart – Carte Blanche « Mon cinéma français »

    Pour cette 51e édition, le Festival du cinéma américain de Deauville propose au public une rencontre avec une figure majeure du cinéma américain. Le samedi 13 septembre, la comédienne, scénariste et réalisatrice Kristen Stewart échangera sur sa vision du cinéma français en dévoilant sa filmothèque coup de cœur.

    Alice Guy à l'honneur

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    Pour la première fois de son histoire, le Festival du Cinéma Américain de Deauville consacre une rétrospective aux films américains d’Alice Guy, en mettant à l’honneur une réalisatrice visionnaire, trop longtemps restée dans l’ombre. En 2025, Le Festival de Deauville fait événement en programmant une sélection exceptionnelle de ses œuvres rares, exclusivement américaines, quelques-unes inédites en France, et récemment restaurées avec le concours de la Library of Congress.

    Pour en savoir plus... :

    Retrouvez mon bilan de l’édition 2024 du Festival du Cinéma Américain de Deauville dans le magazine Normandie Prestige 2025 et tous mes articles sur l'édition 2024, ici, sur Inthemoodforcinema.com et Inthemoodfordeauville.com.

    En complément, retrouvez également le deuxième article de ma nouvelle rubrique "bonnes adresses in the mood for cinema" consacré ce mois-ci à l'Hôtel Barrière Le Normandy de Deauville, ici.

    Retrouvez aussi mes chroniques sur Deauville La Radio : Gatsby le magnifique (hommage à Joel Edgerton), films en compétition, La chatte sur un toit brûlant (hommage à Paul Newman), Sueurs froides (hommage à Kim Novak), Valeur sentimentale (tourné à Deauville, pendant l'édition 2024 du Festival du Cinéma Américain)... et suivez la radio en direct ici (en bas pour la version smartphone, colonne de droite du blog pour la version web).

  • Festival de la fiction et du documentaire politique de la Baule 2025 : le programme

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    Je vous ai souvent parlé ici de la Baule, cadre d'un certain nombre de mes fictions romanesques, lieu suscitant de nombreuses réminiscences de vacances familiales, et décor du Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule que j'ai couvert ici pendant 10 ans. Pour la première fois cette année, je suis ravie de couvrir un tout jeune festival de cinéma dont ce sera la troisième édition, le Festival de la fiction et du documentaire politique qui aura lieu de ce jeudi 2 octobre à ce samedi soir 4 octobre, et qui allie deux de mes passions : la politique et le cinéma. Jeune festival ne signifie pas festival amateur ou inexpérimenté comme le prouve la qualité de la sélection et des invités depuis la première édition.

    Dans un monde dans lequel tout va si vite, dans lequel une actualité en dévore une autre sans que la première ait pu être digérée et appréhendée, dans un monde de plus en plus complexe, un tel festival de cinéma qui permet de la décrypter et disséquer avec une juste distance et d'en explorer les différents ressorts, est plus que nécessaire. Comme le disait Machiavel, "tout n'est pas politique, mais la politique s'intéresse à tout."

    L'an passé le prix du jury de la compétition fiction avait couronné L'Histoire de Souleymane de Boris Lojkine, et en 2023 L'Enlèvement de Marco Bellochio. Un palmarès qui témoigne déjà de la qualité des films présentés, qu'il s'agisse de fictions ou de documentaires.

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    Cette année ne dérogera pas à la règle avec, au, programme, des films parmi les plus attendus des mois à venir, notamment en ouverture, le nouveau film de Thierry Klifa, La femme la plus riche du monde qui avait été présenté à Cannes en mai dernier, ou encore Dossier 137 de Dominik Moll, qui fut également présenté à Cannes, en compétition.

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    Difficile de définir un film politique, tout acte comme tout film l'étant finalement plus ou moins (n'en déplaise à Machiavel, cf citation ci-dessus).  Comme le souligne ainsi les organisateurs : "Quel que soit son genre, quel que soit son thème un film a une dimension politique, car le regard du cinéma est pluriel tant par sa dimension artistique que par sa portée sociopolitique."

    Jérôme Paoli et Anne-Catherine Mendez, les fondateurs du festival précisent aussi très justement que "Le cinéma politique n’est pas seulement un genre, il est une voix. Une voix capable de raconter le réel, de le questionner, parfois de le bousculer. Une voix qui ouvre des chemins de réflexion là où tout semble figé, qui donne à voir ce que l’on n’ose pas toujours dire. Dans un monde marqué par la vitesse et la polarisation, prendre le temps de s’arrêter devant une œuvre, d’en débattre ensemble, devient un acte précieux – presque un geste de résistance."

    Les invités d'honneur du festival sont les suivants : 

    Yaël Braun-Pivet (Présidente de l’Assemblée nationale), Jean Emmanuel Casalta (Président Public Sénat), Hugues Cazenave (Président Opinion Way), Vincent Chauvet (Maire de la ville d'Autun), Michel Field (Directeur de la culture et du spectacle vivant – France Télévisions), Nicolas Daniel (Directeur éditorial chargé de la stratégie et du numérique, LCP), Christian Giacomini (Président Rumeur Publique), Emmanuelle Guilcher (Directrice des programmes Public Sénat), Philippe Guedj (Journaliste au service culture du Point), Cyril Graziani (Chef du service politique de France Télévisions), Emmanuel Kessler (Président-directeur général de LCP-Assemblée nationale), Emmanuel Prévost (Producteur), Carole Rocher (comédienne), Nathalie Saint-Cricq (Directrice de la rédaction nationale de France Télévisions), François de Rugi (Ancien Président de l’Assemblée Nationale, Ancien Ministre), Thomas Sotto (Présentateur et rédacteur en chef de la matinale de RTL), Mario Stasi (Président de Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme).

    La troisième édition est présidée par le scénariste et réalisateur Gabriel Le Bomin.

    Quatre jurys viendront récompenser les documentaires et fictions présentés dans le cadre du festival.

    Le jury fiction politique est présidé par  la comédienne, réalisatrice, scénariste Audrey Dana. Elle sera entourée du réalisateur Antoine Raimbault, du producteur Philippe Boeffard, de la Haute Commissaire à l'enfance Sarah El Hairy, et le comédien Arié Elmaleh.

    Le jury documentaire politique est présidé par la comédienne Odile Vuillemin, le producteur Paul Rozemberg, l'ancien ministre de la Mer et de la Biodiversité Député de la 2ème circonscription des Côtes d'Armor, Hervé Berville.

    Le jury presse et médias politique est présidé par l'éditorialiste politique, essayiste, ancien DG de France Télévisions, Patrice Duhamel, le Directeur de la rédaction de la Tribune Dimanche, éditorialiste à BFMTV, Bruno Jeudy, le rédacteur en chef des Echos de la Presqu'île Frédéric Prot, la journaliste et éditorialiste politique, Saveria Rojek, et l'éditorialiste politique de TF1.

    Le jury lycéens politique est présidé par l'ancienne ministre, responsable associative, Najat Vallaud-Belkacem qui sera entourée de Charlie Connan-Levallois, Gustave  Diebolt, Inès Fernandez, Anna Gallou-Papin, Maël Lehuede, Swann Mahyaoui-Chantrel, Elyne Pernet.

    FILMS EN COMPÉTITION

    LA VAGUE

    2025 – Chili

    2h09 – VOSTF

    Réalisation : Sebastián Lelio

    Interprétation : Daniela López, Lola Bravo, Avril Aurora, Paulina Cortés

    Projection le vendredi 3 octobre 2025 à 10h

    THE PRESIDENT’S CAKE

    2025 – Irak

    1h43 – VOSTF

    Réalisation : Hasan Hadi

    Interprétation : Baneen Ahmed Nayyef, Sajad Mohamad Qasem, Waheed

    Thabet Khreibat, Rahim Alhaj

    Projection le vendredi 3 octobre 2025 à 14h

    DOSSIER 137

    2025 – France

    1h56 – VF

    Réalisation : Dominik Moll

    Interprétation : Léa Drucker, Jonathan Turnbull

    Projection le vendredi 3 octobre 2025 à 16h30

    DEUX PROCUREURS

    2025 – France, Allemagne, Pays-Bas, Lettonie, Roumanie, Lituanie

    1h58 – VOSTF

    Réalisation : Sergei Loznitsa

    Interprétation : Aleksandr Kuznetsov, Alexander Filippenko, Anatoli Beliy,

    Andris Keiss, Vytautas Kaniusonis

    Projection le samedi 4 octobre 2025 à 10h

    LES BRAISES

    2025 – France

    1h42 - VF

    Réalisation : Thomas Kruithof

    Interprétation : Virginie Efira, Arieh Worthalter

    Projection le samedi 4 octobre 2025 à 14h en présence du réalisateur Thomas Kruithof

     

    FILMS HORS-COMPÉTITION

    Film d’ouverture

    LA FEMME LA PLUS RICHE DU MONDE

    2025 – France, Belgique

    2h03 – VF

    Réalisation : Thierry Klifa

    Interprétation : Isabelle Huppert, Laurent Lafitte, Marina Foïs, Raphaël

    Personnaz, André Marcon, Mathieu Demy

    Projection le jeudi 2 octobre 2025 à 19h30

    JEAN VALJEAN

    2025 – France

    1h36 – VF

    Réalisation : Éric Besnard

    Interprétation : Grégory Gadebois, Bernard Campan, Alexandra Lamy,

    Isabelle Carré

    Projection le vendredi 3 octobre 2025 à 19h en présence du réalisateur

    Éric Besnard

    Film de clôture

    L’INCONNU DE LA GRANDE ARCHE

    2025 – France

    1h46 – VF

    Réalisation : Stéphane Demoustier

    Interprétation : Claes Bang, Sidse Babett Knudsen, Xavier Dolan, Swann

    Arlaud, Michel Fau

    Projection le samedi 4 octobre 2025 à 20h

    Le programme complet

    jeudi 2 octobre

    19h00 : Cérémonie d’ouverture

    19h30 : La Femme la plus riche du monde Hors-Compétition

    vendredi 3 octobre

    10H00 : Holding Liat Compétition Documentaire

    10H00 : La Vague Compétition Fiction

     

    14H00 : France, Une histoire d’amour Compétition Documentaire
    14H00 : The President’s cake Compétition Fiction

     

    16H30 : Les armes secrètes de Poutine Compétition Documentaire
    16H30 : Dossier 137 Compétition Fiction

     

    19H00 : Jean Valjean Hors compétition

     

    Samedi 4 octobre

    10H00 : Les combats méconnus de Robert Badinter Compétition Documentaire
    10H00 : Deux Procureurs Compétition Fiction

    14H00 : Les Glucksmann, une histoire de famille Compétition Documentaire
    14H00 : Les Braises Compétition Fiction

    16h00 : Séance de dédicaces en collaboration avec la librairie les oiseaux

    16h30 : Masterclass Pouvoir en chute: de l’assemblée à l’écran

    19H00 : Cérémonie de clôture

    19H30 : L’inconnu de la Grande Arche Hors compétition

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    Projections au Cinéma Le Gulf Stream

    Salles 1 et 5
    52 Av. du Général de Gaulle, 44500 La Baule-Escoublac
    Tél. : 02 51 75 15 41
    Site internet : cinegulfstream.fr
    Vous y en rendre : GMap
    Tarif unique : 7€

    Suivez-moi en direct du festival sur Instagram (@sandra_meziere) et retrouvez mon compte-rendu détaillé la semaine prochaine sur Inthemoodforcinema.com.

    Pour en savoir plus sur le festival, le site officiel du Festival de la fiction et du documentaire politique de La Baule 2025.

  • Critique de VALEUR SENTIMENTALE de Joachim Trier – Grand Prix du Festival de Cannes 2025

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    En 2021, le jury du 74ème Festival de Cannes attribuait son prix d’interprétation à Renate Reinsve pour son rôle dans Julie (en 12 chapitres), le portrait d’une trentenaire, entre légèreté et mélancolie, un mélodrame toujours d’une grande justesse. Cette fois, son réalisateur, Joachim Trier, est reparti du Festival de Cannes avec le Grand Prix, la palme d’or 2025 ayant été attribuée à Un simple accident de Jafar Panahi.

    « Rien n’est plus beau que les ombres » entend-on dans Valeur sentimentale. C’est peut-être ce dont il est question avant tout dans ce film, d’ombres, celles qui planent sur cette famille et cette maison par le point de vue de laquelle le long métrage commence. Située à Oslo, elle est le témoin du temps qui s’écoule à une vitesse étourdissante. Elle porte en elle un chagrin qui se faufile entre les générations, et qui pèse sur leurs épaules : les fissures du passé, au sens propre comme au sens figuré, comme l’avait déjà compris et analysé la jeune Nora dans sa dissertation dont la bâtisse fut l’objet. Cette maison appartient à Gustav Borg (Stellan Skarsgard), un cinéaste renommé qui n’a pas tourné depuis quinze ans. Il a vécu là avec son ex-femme, Sissel, et ses deux filles, Nora (Renate Reinsve) et Agnès (Inga Ibsdotter Lilleaas), avant de partir et de les délaisser toutes ces années. Il retrouve ses filles le jour de l’enterrement de leur mère, dans cette même maison. Un retour qui déplaît à Nora autant qu’il la bouleverse. Nora est comédienne, rongée par la solitude, et des blessures passées. Son père lui propose le rôle principal du film qu’il a écrit pour elle. Elle refuse le rôle. Elle refuse même de lire le scénario. Gustav décide finalement de le proposer à Rachel Kemp (Elle Fanning), une jeune actrice américaine en vogue que Gustav rencontre au Festival du Cinéma Américain de Deauville où il se trouvait à l’occasion d’une rétrospective qui lui était consacrée. Les frontières entre fiction et réalité sont d’autant plus étanches qu’il a l’intention de tourner dans la maison familiale, une grande bâtisse teintée de rouge qui recèle une multitude de secrets, comme ceux des patients de leur mère psychologue que les deux filles écoutaient à leur insu. C’est là aussi que l’arrière-arrière-grand-père de Nora et Agnès est mort. C’est là également que leur grand-mère est née et qu’elle est décédée. La maison incarne la mémoire et les ombres de la famille, de l’histoire et de l’Histoire, les secrets enfouis.

    Depuis son premier film, Nouvelle Donne (2006), Joachim Trier n’a cessé de partager ses questionnements personnels dans ses œuvres. Il est lui-même père de deux enfants et cinéaste comme le personnage de Gustav. Dans ce film, l’art, son art, se fait réconciliateur entre ce père et cette fille qui ne savent pas communiquer et se ressemblent pourtant tellement.

    « Prier, c’est accepter son désespoir » a écrit Gustav dans le scénario qu’il destinait à sa fille. Le film est aussi cela, une route vers l’acceptation (« je veux trouver ma place » y est-il aussi écrit), vers le dépassement du désespoir, afin aussi que la maison ne soit plus un décor insondable, qu’on regarde en face toutes les blessures qu’elle a abritées.

    Gustav incarne un père d’avant #metoo, séducteur, hâbleur, égoïste, maladroit. Stellan Skarsgård l’interprète avec beaucoup d’intensité et de douleur contenue.  Elle Fanning est aussi parfaite pour incarner cette actrice humble, pleine de doutes, d’empathie, de clairvoyance, prête à se teindre les cheveux et à prendre un accent pour le rôle, mais pas à se substituer à une autre, et lui voler sa vie.

    Renate Reinsve et Inga Ibsdotter sont bouleversantes, et parfaitement crédibles, dans les rôles de ces deux sœurs, surtout quand leurs chagrins se rencontrent enfin pour, peut-être, se soigner l’un l’autre.

    Coscénaristes depuis Nouvelle donne, Joachim Trier et Eskil Vogt optent pour la première fois pour la narration chorale, qui alterne donc entre les points de vue et les temporalités.

    Le chef opérateur Kaspen Tuxen qui avait déjà travaillé sur Julie (en 12 chapitres) adapte sa lumière au rythme des saisons. Son évolution traduit autant l’évolution dans le temps que les changements dans les états d’esprit des personnages.

    La BO est aussi le malin reflet de ces émotions. Il s’ouvre avec Dancing Girl de Terry Callier et se referme avec Cannock Chase de Labi Siffre. C’est la pianiste, compositrice et chanteuse polonaise Hania Rani qui signe la musique originale. C’est sa première collaboration avec Joachim Trier. Sa mélancolie reflète la fragilité et la tristesse de Nora. Se déploie une multitude de styles musicaux au gré des émotions contrastées des personnages : Roxy Music, New Order, Artie Shaw et même des compositeurs classiques comme Berlioz et Debussy.

    Valeur sentimentale n’est pas seulement l’exploration des blessures familiales. Il multiplie aussi les références au monde du théâtre et du cinéma. De cette scène marquante du début où Nora refuse de monter sur la scène du théâtre, tétanisée, pétrifiée par le trac, à ces scènes au Festival de Deauville lors de la rétrospective sur la carrière de Gustav avec la projection de son film emblématique dans lequel jouait sa fille cadette, enfant. Les scènes sur la plage de Deauville, auréolée de la lumière presque irréelle de l’aurore, offrent une respiration judicieuse. Gustav offre aussi des DVD à son petit-fils de 9 ans. Et le film n’épargne pas Netflix, ce que ces plateformes engendrent comme contraintes à la création, Gustav n’ayant visiblement pas compris que son film ne sortirait pas au cinéma.

    Valeur sentimentale ausculte cependant avant tout les méandres des blessures familiales, les fantômes qui planent sur cette maison, la transmission douloureuse qu’elle représente comme le signifie cette séquence onirique avec les visages empreints de tristesse du père et de ses deux filles qui se (con)fondent. Une histoire universelle et d’une grande sensibilité sur le manque d’amour ou le mal-amour, sur les ombres du passé et du cœur avec des personnages attachants, dans leurs failles comme dans leurs combats. Ces fondus au noir qui séparent les séquences sont comme le masque ou le mur qui sépare les membres de la famille et que le décor reconstitué abattra. Une mise en abyme ingénieuse entre la vie et le cinéma, sur l’art qui guérit les maux de la vie. Joachim Trier dénoue avec beaucoup de pudeur la complexité des rapports familiaux et des blessures intimes, distillant tout doucement l’émotion tout du long, pour susciter la nôtre à la fin. Allez savoir si le décor ne va pas exploser, les fissures se réparer, et la valeur sentimentale l’emporter… Pour cela, il vous faudra vous plonger dans cette Valeur sentimentale subtile et poignante. (Quel beau titre d'ailleurs qui désigne autant ce que représente la maison, que ce qui unit les membres de la famille qu'elle réunit).