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littérature

  • Lecture – Cinéma – ANATOMIE DU CINÉMA de Frédéric Sojcher

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    « J’ai depuis toujours comme credo l’existence de vases communicants entre le passé et le présent, entre le cinéma et la vie, entre ce que l’on apprend et ce que l’on ressent. » Cette phrase extraite d'Anatomie du cinéma de Frédéric Sojcher est une de celles qui pourrait définir le mieux ce livre, et les raisons pour lesquelles cet ouvrage qui relie passé et présent, le cinéma et la vie, l’expérience personnelle et l’expérience professionnelle, la mémoire et la création, se révèle aussi personnel qu’universel, et surtout passionnant.

    Après le remarquable livre d’Olivier Rajchman, L’aventure des films, dont je vous parlais longuement, ici, le 20 avril dernier, voici un autre livre sur le cinéma que je vous recommande de lire, qui possède d’ailleurs beaucoup de vertus en commun avec le premier. Dans les deux cas, il s’agit en effet de passionnantes (et passionnées) leçons de cinéma livrées avec humilité qui jamais n’assènent des vérités, et se lisent comme des romans.

    Réaliser un film est un parcours du combattant avec ses hasards, ses obstacles et ses revirements. Un film en soi car comme le rappelle l’auteur « tout film est un prototype » et donc une aventure singulière : « Le cinéma, c’est plus que du cinéma : se distraire, avoir des émotions, être parcouru par des émois esthétiques et philosophiques…. »

    Cette « anatomie du cinéma » (qui a pour sous-titre Ce qu'il faut savoir avant de se lancer) qui lui donne chair, et en explore l’âme, est une leçon de cinéma qui ne se veut pas donneuse de leçons, se définissant ainsi comme un « antimanuel » du cinéma, à destination aussi bien des étudiants en cinéma, que des « professionnels de la profession » ou simplement de lecteurs curieux de pénétrer dans les arcanes. Là aussi, c’est toute une aventure : celle des coulisses de la création. Une création dans laquelle « Le budget détermine le projet ».

    Je vous avais déjà parlé du dernier film de Frédéric Sojcher, Le Cours de la vie, (retrouvez ma critique, à nouveau, en bas de cet article). Mais tout commença beaucoup plus tôt pour lui, dans l’enfance… C’est à 11 ans, sur un plateau de tournage que Frédéric Sojcher découvre le cinéma, comme figurant sur le film Préparez vos mouchoirs de Bertrand Blier, tourné en Belgique, pays d’origine de l’auteur de ce livre. « Être cinéaste, c’est forcer son destin. » : tels sont les mots de François Truffaut avec lequel il eut la chance d’entretenir une relation épistolaire. Peut-être pourrait-il également faire sienne cette phrase de Truffaut : « Tout ce que j'ai appris dans la vie, je le dois au cinéma. »  Ce livre démontre à quel point il a suivi ce conseil, qui est aussi désormais le sien. Il commence, à 18 ans, par réaliser un court métrage, Fumeurs de charme (1985), avec Serge Gainsbourg et Michael Lonsdale, puis une dizaine de courts métrages et cinq longs métrages dont Cinéastes à tout prix (Sélection officielle au Festival de Cannes, 2004), Hitler à Hollywood -sélectionné au festival de Venise, prix FIPRESCI à Karlo Vivary, 2011- et Le cours de la vie. Il fut également professeur en pratique de cinéma à l’Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne où il dirige le Master en scénario, réalisation, production depuis 2005… dont je fis partie des étudiantes (de la toute première promotion !). Il est aussi l’auteur ou le coordinateur d’une trentaine de livres sur le cinéma.

    Le titre du livre se réfère au film de Justine Triet, Anatomie d’une chute. Il se divise en trois parties, et entremêle son parcours de cinéaste et de professeur, mais aussi l’histoire du cinéma, les étapes de la fabrique du film, les débats actuels et son expérience personnelle. La première partie traite de « l’Histoire « du » et histoire « de » cinéma », depuis sa naissance jusqu’à aujourd’hui. La deuxième s’attèle à décortiquer la fabrique du film, toutes les étapes de la fabrication d’un film et de la rencontre non pas avec « un » mais avec « des » publics. Et la dernière, que j’ai trouvée la plus captivante, est un « traité de survie » évoquant l’enseignement du cinéma et les débats sociétaux qui le traversent comme le combat pour une réelle égalité entre femmes et hommes, la condamnation des violences sexuelles, l’idée qu’il ne faut plus admettre aucun abus… : il évoque avec justesse et nuances les enjeux de #MeeToo, sans nier les nécessaires combats qu’il faut mener, et sans oublier non plus le sens de la nuance et de la justice.

    Ce qui marque d’abord, c’est le caractère exhaustif du livre qui n’oublie aucun aspect des rapports de force (et de passions) qui régissent le cinéma et aucun métier (jusqu’aux attachés de presse, remerciés à la fin de l’ouvrage). Sont ainsi abordés le montage, la musique (trop souvent oubliée, des critiques notamment : combien aujourd’hui encore parlent d’un film sans évoquer ce rouage essentiel ?) ou l’étalonneur (« véritable magicien ») jusqu’à l’importance de la critique et des festivals de cinéma. Il décrypte ainsi les rapports complexes entre l’art et l’argent, et démontre à quel point économie et esthétique s’imprègnent puisqu’un projet est toujours tributaire du budget qui lui sera alloué. Il n’oublie pas non plus la nouvelle donne que constituent les questions de société qui secouent actuellement le milieu du cinéma mais aussi le développement des séries et les plateformes qui modifient les rapports entre cinéastes et spectateurs.

    Frédéric Sojcher rappelle tout d’abord que le cinéma a été créé par les frères Lumière (à ce propos, retrouvez aussi, en complément,  ma critique de l’essentiel Lumière ! L’aventure continue de Thierry Frémaux) et non par Thomas Edison, version que préfèrent évidemment les Américains. Avec son kinétoscope, une seule personne pouvait visionner des images animées, et devait de surcroît tourner la manivelle d’un boitier. Avec le Cinématographe des frères Lumière, le film pouvait être projeté sur un écran, permettant ainsi d’en faire profiter un public.

    Son « antimanuel » recommande ainsi de ne pas suivre à la lettre les livres de scénario (petite parenthèse pour constater qu’actuellement fleurissent les formations payantes censées apprendre l’écriture romanesque délivrées par des auteurs…mais il me semble justement que la « recette » d’un bon livre comme d’un bon film est de ne pas suivre des schémas préétablis, même s’il reste des règles intangibles, a fortiori dans le domaine cinématographique). Sans doute le meilleur conseil est-il celui donné par François Truffaut : « Pour François Truffaut, le plus important est le début et la fin d'un film. Il faut selon lui que le récit commence avec une « accroche » afin que le spectateur ait envie de connaître la suite. Il faut qu'il finisse avec une scène forte, pour que le film continue à travailler le spectateur, une fois qu'il sortira de la salle ». Et celui de l’auteur concernant l’importance de l’enjeu : « Conflictualiser un récit, pour amener les liens de causalité qui insufflent l'intrigue. » On suivra aussi le conseil du fameux « Et si… », titre initial du Cours de la vie, prodigué dans le livre d’Alain Layrac sur l’écriture de scénario, Atelier d’écriture (dans lequel, là aussi, le scénariste entrecroise son histoire personnelle avec des conseils plus théoriques).  Frédéric Sojcher souligne ainsi que « C'est l'un des rares textes qui aborde la question du scénario sans être ni théorique ni dogmatique. » Il ajoute : « Je suis persuadé que ce que j'enseigne ne s'enseigne pas. »

    Il opère aussi une analyse très juste de la critique, déplorant les avis lapidaires et définitifs auxquels s’adonnent parfois certains : « Trop nombreux sont les critiques qui décident une fois pour toutes qui est un « bon » ou un « mauvais » cinéaste, avec une facilité déconcertante à mettre chacun d'entre eux dans une case. », « Danger de la critique quand elle devient conformiste. » Dans la vie comme au cinéma, il me semble que toute personne comme toute œuvre ne doit pas être jugée sur un moment mais dans une globalité, et pouvoir bénéficier d’une deuxième chance.

     Il rappelle aussi l’importance des festivals, et que certains grands cinéastes en furent injustement oubliés : « Tous les grands films n'ont pas été sélectionnés par les grands festivals. Claude Sautet, par exemple, ne connut que très peu de sélections et de récompenses festivalières. » Il déplore, toujours à juste titre, que les plateformes « donnent le sentiment d'être comme un client face à des produits présentés indifféremment » et la « transformation de l'œuvre singulière qu'est un film de cinéma en pur objet de consommation. »

    Il rappelle encore à quel point un film est lié à l’histoire de son auteur, et son rapport au cinéma, à la naissance de sa cinéphilie, « d’où l’on vient » : « Le paradoxe serait que c'est seulement en reconnaissant sa propre subjectivité que l'on peut tendre vers une objectivité. » Je vous parlais ailleurs (dans un post sur Instagram) de ces fameuses fiches Bristol vertes, que je retrouvai récemment, bouleversée, des fiches sur lesquelles mon père écrivait scrupuleusement tous les films que je voyais depuis l’âge de neuf ans. Ma « raison ardente », peut-être. Frédéric Sojcher en parle en effet, ainsi :  « Revenir aux fondements d'une passion pour comprendre ce qu'Apollinaire appelle la raison ardente. » Là encore, il s’appuie sur sa propre histoire, poignante, en racontant que sa grand-mère paternelle ne vivait qu'à travers les films, ayant perdu son mari décédé à Auschwitz et ne l’ayant pas su tout de suite.

    Il relate aussi les travers du milieu du cinéma avec beaucoup de franchise et de lucidité :  « Le cinéma, c'est aussi le bal des hypocrites. Le traité de survie demande de les circonscrire ou de les ignorer. » « Le traité de survie consiste à toujours repartir au combat. » Il n’en tire pas un constat amer mais, au contraire, il transmet l’énergie nécessaire pour « repartir au combat », pour se/les surpasser pour que les projets aboutissent. Les raisons invoquées pour lui refuser une aide par la Commission du film belge, après examen d’une troisième version du scénario du Cours de la vie, sont ainsi particulièrement parlantes et, nous l'imaginons aisément, blessantes pour le réalisateur et le scénariste Alain Layrac quand on sait à quel point ce film était lié à son histoire personnelle « car l’histoire de la mort de Noémie…c’était la reproduction de la mort de son frère à lui…qui l’avait dévastée quand il était jeune » (à qui le film était dédié) : « Les membres comprennent mal la raison de la rupture ou le rapport avec la mort du frère de Noémie ».

    Le cinéma est aussi affaire de renoncements, aussi douloureux soient-ils, de contournements, de liens fragiles aussi (entre acteurs et réalisateurs, réalisateurs et scénaristes quand ils diffèrent, financiers et créateurs…). Tout est jeu et enjeu de pouvoir. L’humain est au centre de cet art collectif, avec ses contradictions, ses ambitions, ses petitesses et ses grandeurs. Chacun de ses projets qui illustre le livre en est le révélateur : de sa rencontre avec Vladimir Cosma, à l’influence...positive puis négative de Jacqueline Aubenas, son expérience de cinéma tristement rocambolesque sur son film Regarde-moi, à l’histoire du tournage de son long-métrage Le Cours de la vie, son lien avec Bertrand Tavernier, au passage sans doute un des cinéphiles les plus érudits et passionnants en plus d’avoir été un grand cinéaste.

    Avec un humour certain, et une détermination sans faille, Frédéric Sojcher nous entraîne jusque dans les aspects les plus tragiques de son histoire comme le viol dont il fut victime lorsqu’il était enfant. Mais ce ne sont pas les ombres mais les lueurs (d'espoir, de passion) qui ressortent de ce livre comme les lettres, remplies d’émotions communicatives, qu’il adresse à la fin, notamment à sa compagne Dina Neves qui fut costumière sur son dernier long métrage, Le Cours de la vie : « C’est grâce à toi Dina que je sais à quel point personne n’a à se sentir supérieur à quiconque. ». Son livre est celui d’un réalisateur et d’un passeur (d’émotions, d’expériences).

    Nombreux sont les défis qui attendent aujourd’hui le cinéma : la survie des salles face aux plateformes, la nouvelle menace que peut constituer l’Intelligence Artificielle pour les créateurs, le respect de l’autre qui fut trop souvent négligé symbolisé par #MeToo… L’œuvre achevée est le fruit d’une alchimie fragile, de compromis nécessaires, de rapports de forces, mais avant tout de la passion et de la détermination de celui qui en est l’initiateur. Lorsque toutes ces conditions sont réunies, émerge ce petit miracle qu’est un film réussi. La passion et la détermination : c’est ce qu’exhale ce livre qui, dans ses dernières pages, laisse l’émotion affleurer et nous emporter. Il témoigne avant tout du respect et de l’admiration de son auteur pour ceux qui font le cinéma. Ce livre est ainsi autant l’anatomie du cinéma que le portrait de ce dernier. Et comme pour un film, c’est cette alchimie fragile et réussie qui permet que la magie opère.

    Je termine avec le conseil qui clôt le livre et qui résume magnifiquement le parcours semé de mésaventures et de rencontres de Frédéric Sojcher : « Ce qu’il faut savoir avant de se lancer ? Tenir. »

    Anatomie du cinéma – Editions Nouveau Monde (nouveau-monde.net)

    Critique - LE COURS DE LA VIE de Frédéric Sojcher

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    Dans On connaît la chanson d’Alain Resnais, dont Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri ont signé le (si inventif) scénario, dans le dernier acte, à l’occasion d’une fête, tous les protagonistes sont réunis, et chaque personnage laisse tomber son masque, de fierté ou de gaieté feinte. Dans l’appartement dans lequel a eu lieu cette fête, ne reste qu’un sol jonché de bouteilles et d'assiettes vides, le lieu comme les personnages alors débarrassés du souci des apparences, et du rangement (de tout et chacun dans une case). Les personnages d'On connaît la chanson sont ainsi avant tout seuls, enfermés dans leurs images, leurs solitudes, leur inaptitude à communiquer, et les chansons leur permettent souvent de révéler leurs vérités, personnalités ou désirs masqués, tout en ayant souvent un effet tendrement comique. La séquence finale se termine cependant ensuite par une pirouette, toute l’élégance de Resnais et de ses scénaristes figurant là, dans cette dernière phrase qui nous laisse avec un sourire, et l’envie de saisir l’existence avec légèreté. C’est avec ce même sentiment que j’ai quitté, bouleversée, les personnages du film de Frédéric Sojcher (qui eux ne communiquent pas par chansons interposées mais par leçon de scénario interposée), celui de vouloir embrasser (et scénariser) chaque parcelle de seconde de l’existence.

    Ce début d’année 2023 n’a pourtant pas été avare en (excellents) films sur le cinéma : Empire of light de Sam Mendes, la fresque foisonnante de Damien Chazelle, Babylon, mais surtout The Fabelmans de Steven Spielberg. Ce dernier, en plus d’être une ode à la magie du cinéma qui éclaire et sublime la réalité (à l’image de cette hypnotique danse à la lueur des phares qu’il met en scène), démontre le pouvoir cathartique de l’art. Un film mélancolique et flamboyant, intime et universel. Le cours de la vie de Frédéric Sojcher, cette quatrième déclaration d’amour cinématographique de l’année au septième art, contre toute apparence, ne manque pas de points communs avec la nouvelle œuvre de Spielberg. Dans l’un comme dans l’autre film, le cinéma est un pansement sur les plaies béantes de l’existence et de l’âme. L’un et l’autre sont aussi de remarquables mises en abyme, à la fois intimes et universelles. Je précise en préambule que c’est même une double mise en abyme me concernant, ayant fait partie de la première promotion du Master 2 Scénario, réalisation, production que Frédéric Sojcher a initiée et dirige toujours à la Sorbonne, et ayant suivi ses cours à Rennes puis à Paris. À son actif également : cinq longs métrages, trois fictions et deux documentaires.

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    Dans son indispensable livre sur le scénario Atelier d’écriture (publié dans la collection que dirige Frédéric Sojcher aux éditions Hémisphères, réédité ce mois-ci avec une nouvelle couverture), le scénariste du Cours de la vie, Alain Layrac, recommande Martin Eden, le roman de Jack London qui, selon lui, « décrit mieux qu’aucun autre livre ce sentiment euphorisant et éphémère de la satisfaction du travail d’écriture accompli. » C’est en effet un -sublime- roman (que je vous recommande au passage) qui entrelace la fièvre créatrice et amoureuse qui emprisonnent, aveuglent et libèrent. Un entrelacs que l’on retrouve aussi dans Le cours de la vie. Ce sont deux livres dont les souvenirs, puissants, ne m’ont pas quittée, même des années après leur lecture. Les mots du livre d’Alain Layrac m’ont ainsi accompagnée après sa lecture en 2017 (une amie que je ne remercierai jamais assez avait eu la bonne idée de me l’offrir), et aujourd’hui encore, comme cela peut être le cas pour les personnages d’un roman ou d’un film, ils continuent à vivre avec moi, intégrés à ma propre histoire. Et puis le livre avait pour couverture initiale une image du film Les choses de la vie de Claude Sautet, c’était forcément déjà une belle promesse. Au-delà de ses excellents conseils d’écriture, de ce livre je garde en mémoire des passages particulièrement forts qui ont d’ailleurs donné lieu à des scènes très émouvantes dans le film de Frédéric Sojcher mais aussi des phrases qui font particulièrement écho comme cette phrase d’Harold Mac Millan : « On devrait utiliser le passé comme trempoline et non comme sofa. » Ou encore cette citation de l’auteur : « Tant que j’aurai l’envie de raconter une histoire, je resterai vivant. »

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    Si, en apparence, adapter un essai en scénario peut sembler improbable, j’espère que cette introduction lèvera vos doutes à ce sujet. Il ne s’agit d’ailleurs pas seulement d’un essai. Sans doute ce livre aurait-il déjà pu s’appeler Le cours de la vie… L’affiche (très réussie) du film, en écho au double sens du titre, donne le ton et évoque ainsi déjà judicieusement cette mise en abyme mais aussi la nostalgie dont est empreint le long-métrage.

     Le film se déroule ainsi sur une journée de masterclass d’une scénariste dans une école de cinéma. Le scénario du film applique la célèbre règle des trois unités : unité de lieu, de temps et d’action.  Noémie (Agnès Jaoui) retrouve Vincent (Joanthan Zaccaï), son amour de jeunesse, dans l'école de cinéma de Toulouse dont il est désormais directeur pour y donner une masterclass, à l’invitation de ce dernier. Et si Noémie ne donnait pas seulement une masterclass pour les étudiants de l’école mais s’adressait aussi à quelqu’un en particulier ?   Et si… C’est ainsi la formule magique du scénariste selon Alain Layrac (que Noémie enseigne à ses élèves), celle qui permet de démarrer toute histoire.

     Être auteur, n’est-ce pas aussi être le scénariste de sa propre vie, entremêler sans cesse fiction et réalité, faire de sa vie le matériau de sa fiction, et instiller du romanesque dans sa vie ? En écrivant pour tous, n'écrit-on pas toujours pour une seule personne en particulier ? Noémie se livre ainsi à travers sa leçon de scénario qui va influer sur le cours de la vie (estudiantine et personnelle) de ses étudiants mais aussi sur celui de sa propre histoire. La masterclass va aussi transformer la vie des étudiants mais aussi celles de la scénariste et du directeur d’école et ainsi leur donner l’occasion à l’un et l’autre de revenir sur ce passé qui n’a jamais cessé de les habiter, et qui est resté en suspens. La salle de cours va devenir un antre dont le cadre protecteur et où le prisme du cours permettront de dire des vérités indicibles à la lumière crue de l’extérieur, comme la salle de cinéma dans laquelle chacun est à l’abri des tumultes du monde.

    Jonathan Zaccaï est parfait dans le rôle de Vincent, directeur d’école aussi réservé et maladroit que son écharpe (rouge) est voyante. Géraldine Nakache interprète elle aussi avec beaucoup de nuances et sensibilité un magnifique personnage en retrait mais essentiel, celui de la belle-soeur de Vincent, sorte de double du spectateur, puisqu’elle est la régisseuse de l’école de cinéma, et voit tout par le prisme de l’écran, mais aussi double de Noémie, ayant vécu comme elle un drame qui a changé le cours de sa vie.  Agnès Jaoui est successivement drôle, touchante, bouleversante, mais toujours charismatique dans ce magnifique rôle de femme qui semble écrit pour elle tant elle rayonne, convoquant des images puissantes par la « simple » force de ses mots et de son interprétation, comme lors de ce sublime monologue au sujet de son frère ou lors de l’évocation d’un cœur en plastique de fête foraine qui ne s’est jamais dégonflé pendant 30 ans.

    Grâce à un dispositif ingénieux de réalisation et de montage et au travail du chef opérateur Lubomir Bakchev, les scènes de masterclass (filmées à plusieurs caméras et par le recours au flou, à des recadrages brusques...) ne sont jamais ennuyeuses ou didactiques mais toujours vivantes et rythmées.

    Le film est certes un coup de projecteur sur le magnifique métier de scénariste mais aussi sur le rôle essentiel du compositeur, le troisième auteur du film. Il met en exergue le rôle primordial de la musique de film, que celle-ci exacerbe ou accompagne ou même suscite une émotion. Ainsi, aucun des extraits de films choisis par Noémie pour illustrer sa leçon de scénario n’est visible par le spectateur. Nous les « voyons » alors à travers le regard des étudiants mais surtout nous les entendons. Merveilleuse idée (même si elle fut au départ en partie dictée par des raisons budgétaires) qui nous plonge dans l’univers des films grâce aux inoubliables musiques de Vladimir Cosma. Le compositeur a ainsi accepté que Frédéric Sojcher choisisse dans le catalogue de musiques qu’il a créées pour d’autres films. En plus de ces musiques préexistantes, Vladimir Cosma (dont je vous avait dit à quel point son concert au Festival du Cinéma et Musique de Film de la Baule en 2017 était inoubliable, l’occasion d’entendre la musique de La septième cible,  La Boum, Les  Aventures de Rabbi Jacob, La Chèvre et tant d'autres, jouées par un orchestre symphonique) a aussi composé ici un morceau et une chanson originale que l’on entend au générique  et dans la cour de l’école, quand les étudiants autour de l’arbre entament les paroles d’un refrain : Et si…, une chanson pour laquelle Vladimir Cosma a travaillé avec le parolier Jean-Pierre Lang.

    « La qualité d’un scénariste, ce n’est pas tant l’imagination que le sens de l’observation des autres et de soi-même. Il faut aimer les personnages, leurs défauts, leurs faiblesses ,comme leurs qualités, peut-être même encore plus leurs défauts » rappelle ainsi Noémie à ses étudiants. Une leçon de scénario est finalement une leçon de vie, comme ce film qui nous invite à regarder (les images, les autres, l’existence) plus intensément. Un cours sur la vie autant qu’un cours de cinéma.  

    Cette journée est pour Noémie une parenthèse après laquelle en apparence rien n’a changé et après laquelle rien ne serait tout à fait pareil. Comme pour le spectateur, après ce vibrant hommage au cinéma savoureusement anticonformiste (adapter un essai sur le scénario et faire d'une masterclass le cadre des 3/4 d'un film, il fallait oser, et pourtant cela fonctionne incroyablement grâce...au scénario, mais aussi à la réalisation, constamment en mouvement). Et puis cette fin, inattendue et poignante, est une de celles que je n’oublierai pas, qui continuera à m’accompagner comme Martin Eden et le livre d’Alain Layrac. Elle m’a fait penser au fameux « Brûle la lettre » des Choses de la vie (on y revient) qui ne cesse de résonner dans mon esprit comme une ultime dissonance. Un hommage au cinéma, au métier de scénariste, à la musique de film, mais aussi au pouvoir des mots.

    Ceux qui auront connu la peine ineffable d’un deuil insurmontable en seront d’autant plus émus, tant le sujet, à travers deux magnifiques personnages de femmes, est traité avec délicatesse et poésie.  Une magnifique histoire d’amour, teintée d’humour et de mélancolie, qui entremêle sens de l'existence et du cinéma et qui nous invite à mieux regarder l’une et l’autre, mais aussi à nous laisser emporter par le tourbillon de la vie, à l'unisson de ce magnifique plan, lorsque la caméra virevolte autour d’un arbre, sublimé par la musique de Vladimir Cosma*.

    « Tant que j’aurai envie de raconter une histoire, je serai vivant. »  Ce film nous conforte dans l’idée que raconter des histoires n’est pas une manière de fuir la vie mais de l’exalter, l’adoucir, la sublimer, la regarder passionnément, la savourer plus intensément.  La force des histoires, des mots, du montage, de la musique prennent ici tout leur sens, si noble, en résonance avec nos fêlures, nos regrets, nos rêves, nos espérances, nos sentiments enfouis, jusqu’à, peut-être, modifier le cours de notre vie. Bref, une démonstration implacable et passionnante de la puissance du cinéma, des personnages quand ils sont comme ici "uniques et universels", et évidemment du scénario.

    Le cours de la vie a reçu le Prix Cineuropa et le Prix RTBF au Love International Film Festival de Mons

     

     

     
     

     

  • Salon du livre de Saint-Germain-des-Prés DES PAGES AVANT LA PLAGE :

    littérature, livres, lire, culture, Saint-Germain-des-Prés, salon du livre des pages avant la plage de Saint-Germain-des-Prés, Paris 6, Les Deux Magots, Lipp, Castel, L'écume des pages, Paris, lecture, littérature

    Avant de revenir à l'actualité cinématographique, je fais une petite incursion dans l'autre domaine qui m'est cher, la littérature, pour vous parler d'un formidable évènement qui aura lieu la semaine prochaine, à Saint-Germain-des-Prés.

    Ce quartier, c'est celui où, en un instant d'éblouissement, dans un envol enivrant d'illusions, se dissolvent les chagrins glaçants et naissent les élans fiévreux. 
     
    C'est celui qui me donne l'impression de vivre dans un décor de cinéma, de mon cinéaste préféré : celui dans les films duquel les vitres des brasseries sont battues par la pluie pour mieux s'y réfugier, parler, quereller, et aimer. 
     
    C'est celui du Marchand de masques et de la place la plus charmante de Paris avec son banc du Temps de l'innocence, lieux emblématiques de mon roman La Symphonie des rêves
     
    C'est celui où mon âme incurablement romanesque, même ébréchée, finit toujours par trouver des interstices de rêves pour se faufiler hors de la réalité. 
     
    C'est celui de la littérature, et de la rue Saint-Benoît, d'une certaine Marguerite pour qui "Écrire, c'est hurler sans bruit" (tellement).
     
    C'est celui des allées du Luxembourg, antre protecteur où s'esquissent en cadences indociles les songes languissants des passants insaisissables (et les allitérations en s).
     
    C'est celui dans lequel rien ne semble impossible (et le redeviendra sitôt le Pont des arts franchi).
     
    C'est celui où, quand le présent se fait trop sombre, des projets insensés finissent toujours par éclore et éclairer l'avenir. 
     
    C'est celui où bat le cœur de Paris, de la littérature et des habitants tel qu'il le devrait toujours. Passionnément. Éperdument. 
     
    C'est celui où devait forcément avoir lieu un festival littéraire. 
     
    Alors que j'ai initié récemment mes "chroniques germanopratines" ( à retrouver sur mon compte Instagram),  je ne pouvais  pas ne pas vous parler de ce Salon du Livre de  Saint-Germain-des-Prés, Des Pages avant la plage, fondé par Carole Fernandez, dont la deuxième édition aura lieu les 28 et 29 juin, autour de la place Saint-Germain-des-Prés. 
     
    Au programme : des rencontres, une dictée géante, un atelier d'écriture. 
     
    Un festival en partenariat avec ma librairie fétiche, l'Ecume des pages (entre les rayons de laquelle vous pouvez rêver jusqu'à une heure tardive -la librairie est ouverte tard le soir-, plaisir indicible de lecteur).
     
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    Avant de revenir à l'actualité cinématographique, je fais une petite incursion dans l'autre domaine qui m'est cher, la littérature, pour vous parler d'un formidable évènement qui aura lieu la semaine prochaine, à Saint-Germain-des-Prés.

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  • Lecture - Cinéma – À NOS AMOURS ! de Gilles Jacob, Marie Colmant et Gérard Lefort

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    Un livre écrit (ou coécrit) par Gilles Jacob est déjà une bonne raison de l’acheter parce qu’en émane toujours sa passion contagieuse pour le cinéma, et pour ceux qui le font.

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    Dans le Dictionnaire amoureux du Festival de Cannes, Gilles Jacob, qui disait avoir fréquenté le Festival de Cannes « 52 fois 3 semaines, 5 ans » de sa vie (comme journaliste, comme directeur, comme président), évoquait aussi celui dont le titre du film a inspiré celui de ce nouvel ouvrage, Pialat :

    « Pialat a une hantise : l'art doit capter la vie. À n'importe quel prix, fût-ce celui de mettre le film en danger. Pour lui, quelques minutes de vérité sauvent un film inégal, c'est à cela qu'il s'est toujours efforcé de parvenir. » 

    La vie passera comme un rêve. J’ai vécu dans mes rêves.  Les titres des livres de Gilles Jacob sont souvent des promesses d'ailleurs et d’évasion. Six ans après le Dictionnaire amoureux du Festival de Cannes, avec ce titre emprunté au film de 1983 de Maurice Pialat, ce nouvel ouvrage nous invite cette fois à un autre voyage, à un voyage amoureux, à la rencontre des actrices et acteurs français.  Ce livre est en effet une ode aux actrices et aux acteurs, « ode à trois voix évoquant en toute subjectivité des artistes choisis et estimés. Et leur existence, leur itinéraire couvrant l’histoire du cinéma français (et même francophone), de la naissance du film parlant à nos jours. »

     Ces textes se savourent comme autant de petites nouvelles qui constituent ce livre de 710 pages, comme une invitation à voyager dans le cinéma français, à prendre immédiatement son billet pour les films évoqués avec passion par le biais de leurs acteurs. D’Isabelle Adjani à Roschdy Zem, les trois auteurs (ce livre a été coécrit par Gilles Jacob et les journalistes Marie Colmant et Gérard Lefort) nous proposent ainsi un « florilège des actrices et acteurs français », de la naissance du film parlant à nos jours.

    En 2014, lorsque Gilles Jacob quitta la présidence du Festival de Cannes (tout en restant alors à la tête de la Cinéfondation qu'il avait créée, il est toujours président du prix Louis-Delluc), s'afficha sobrement derrière lui sur la scène du festival un discret Au revoir les enfants, une révérence tout en malice et pudeur. Mais aussi une référence à un moment crucial de son histoire, de l'Histoire. 70 ans après, comme un signe aux méandres du destin. Ce moment terrible où tout aurait pu basculer. Ce moment où, s'il n'était pas resté immobile et silencieux dans l'ombre, jamais il ne se serait retrouvé sous les projecteurs du Festival de Cannes, à mettre les autres en lumière...C’est cette histoire-là que Gilles Jacob racontait dans son précédent livre, le remarquable L’échelle des Jacob, « Une histoire française prise dans la tourmente du siècle et les tourments intimes » (mon livre préféré de l’auteur dont je vous parle à nouveau plus bas dans cet article).

    Outre la passion du cinéma, un autre point commun à chacun des livres de Gilles Jacob, qu’il s’agisse de romans, d’autobiographies, d’échanges épistolaires, réels ou imaginaires, c’est cet amour des mots avec lesquels il jongle malicieusement. Comme dans son Dictionnaire amoureux du Festival de Cannes, si riche et foisonnant d’anecdotes, d’histoires, d’Histoire, de descriptions flamboyantes et amoureuses de films que chacun s’attardera certainement sur des passages différents selon sa sensibilité comme dans ce À nos amours.

     En parcourant les pages de ce Dictionnaire amoureux du Festival de Cannes, Gilles Jacob nous rappelait que, comme il le disait dans un autre livre, si « Cannes n’est pas un paradis pour les âmes sensibles » c’est aussi et avant tout cela, le lieu des « beaux films », ceux qui vous transportent et vous élèvent l’âme, ceux qui sont une « fenêtre ouverte sur le monde ». Cannes, c’est cette bulle d’irréalité, ce lieu où une sorte de « fièvre » qui vous coupe de la réalité s’empare de vous, paradoxalement tout en projetant des films qui souvent sont un miroir grossissant de cette réalité. Et surtout, comme le rappelle si justement Gilles Jacob, « la passion collective réunificatrice est logée là. »

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    Dans ce Dictionnaire amoureux du Festival de Cannes, il m’avait donné envie de revoir (parmi d’autres films), Partie de campagne de Jean Renoir au sujet duquel il rappelait : « Quel grand cinéaste français peut se vanter de ne rien devoir à Jean Renoir ? Sûrement pas Pialat, ni Rivette, ni Truffaut, ni Tavernier, ni Dumont, ni Beauvois, ni Patricia Mazuy, pour n’en citer que quelques-uns ». Et justement, dans  À nos amours, un bel hommage est rendu à ce film de Renoir tourné en 1936, sorti en 1945, et surtout à Sylvia Bataille, épouse de l’écrivain Georges Bataille puis du psychanalyste Jacques Lacan, qui interprète l’inoubliable Henriette, avec « son regard-caméra le plus triste du monde » : « N’eût-elle prononcé que cette unique phrase dans sa vie de comédienne qu’elle n’en aurait pas moins été assurée de la postérité. Cette petite phrase toute simple : « Moi, j’y pense tous les soirs. »

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    Que de vibrantes déclarations d’amour figuraient dans ce Dictionnaire amoureux du Festival de Cannes. Aux films. Aux cinéastes. Mais aussi, déjà, forcément, aux acteurs et aux actrices dont Gilles Jacob brossait déjà les portraits comme il l’aurait fait pour des personnages de romans. D’ailleurs, souvent, ce sont des personnages de romans. Comme Adjani « Elle apparaît, elle disparaît. Elle se toque, elle s’aperçoit qu’elle est trahie, elle jette. Les déceptions laissent des bleus à l’âme et les regrets des cicatrices invisibles. Elle croit qu’on les voit, alors il lui arrive d’oublier sa main le long de sa joue, trouve des poses nonchalantes qui masquent à demi son visage de déesse pour toujours. »

    Adjani est évidemment présente aussi dans À nos amours, même en tout premier : « Alors s’il fallait privilégier un film, ce serait L’Histoire d’Adèle H. (1975), summum de François Truffaut et sommet dans la carrière d’Adjani, plus que prégnante en fille malmenée de Victor Hugo que sa liberté indisposait. »

    Dans le Dictionnaire amoureux du Festival de Cannes, nous trouvions déjà les sublimes portraits de Catherine Deneuve « sans conteste la plus grande actrice française de sa génération » venue 19 fois à Cannes et qui « aurait mérité mille fois le prix d'interprétation qui lui est toujours passé sous le nez », Huppert «...aujourd'hui, après le long règne de Jeanne Moreau et de Catherine Deneuve, elle est devenue la patronne. » Et bien sûr l’inoubliable Jeanne Moreau qu’il décrit en reprenant ainsi la célèbre formule de Truffaut : « Elle a toutes les qualités qu'on attend d'une femme, plus celles qu'on attend d'un homme, sans les inconvénients des deux.. » à laquelle Gilles Jacob ajoute « Car il est des comédiennes pour lesquelles, indépendamment de leur gloire, la classe et l'élégance morale sont un art de vivre. Jeanne Moreau était de celles-là.  C'est pourquoi, à la Bresson, un seul mot pour conclure : Ô, Jeanne. » En une formule, poignante, tout est dit, avec pudeur…

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    Ces comédiennes sont également présentes dans À nos amours. De Jeanne Moreau et son « rire cajoleur, ruisselant comme une cascade un jour d’été » à Catherine Deneuve, notamment par le truchement des mots de François Truffaut : « On a l’impression qu’elle garde des pensées pour elle, et que sa vie intérieure est au moins aussi importante que sa vie extérieure. Avec Catherine, il y a une importante part de rêve et on a l’impression que tout n’est pas montré à l’écran. Il y a le personnage qu’elle incarne et les pensées qui ne sont pas exprimées. Oui, Catherine Deneuve est une actrice de rêverie, il n’y a pas d’autre mot. »

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    Les acteurs n’étaient pas oubliés non plus dans le Dictionnaire amoureux du Festival de Cannes. Là aussi, Gilles Jacob avait le don de les  percer à jour, de nous laisser deviner l’être parfois blessé et mélancolique derrière l’acteur joyeux et exubérant comme Rochefort, ainsi magnifiquement portraituré (absent de À nos amours)  : « Jean était revenu à la case départ, à sa nostalgie existentielle et ce désespoir solaire qu’il cachait derrière des pulls de couleur et des absurdités délicieuses », « cette voix sans pareille dans l’éloquence tranquille et la verve narquoise », « Jean méritait l’admiration collective de ses contemporains ; c’était quelqu’un ».

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     On se souvient aussi du magnifique portrait de Piccoli, « Il aura tout joué avec la même sincérité, la même virtuosité, la même force intérieure capable d'exprimer la folie furieuse comme la tendresse la plus délicate. C'est aussi un homme de bien qui inspire les plus beaux mots de la langue française : allure, générosité, élégance, pudeur, tendresse, extravagance ».

    Ici, dans À nos amours, nous pouvons lire à son sujet : « Quand vient le moment de trouver un adjectif qui siérait au jeu ou aux choix de carrière de Michel Piccoli, on opterait volontiers pour excentrique, qualificatif inventé Outre-Manche bien avant ses débuts au cinéma. Ou anticonformiste, épris de liberté, d’aventures, de rencontres. »

    Tout amoureux du cinéma sera forcément comblé avec ce livre dans lequel chaque portrait donne envie de (re)voir des classiques ou des films oubliés. Mais aussi des filmographies entières. On y chemine studieusement dans l’ordre chronologique, ou avec avidité et gourmandise en passant d’un portrait à l’autre au gré de ses goûts cinématographiques et curiosités (que ce livre aiguise encore).  Un livre de chevet à lire le soir  comme une madeleine de Proust pour nous replonger dans nos souvenirs de cinéma.   Et pour, nous aussi, vivre dans nos rêves.

    Ainsi, quelques extraits de ces portraits pour vous donner envie de les découvrir :

    - Vicky Krieps, à propos de son rôle dans Bergman island de Mia Mia Hansen-Løve « Vicky Krieps, plausible en charmante épouse et tout aussi convaincante en émancipée, est une magnifique figure de féminisme radieux, car jamais elle ne cesse de sourire. »

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    - Romy. « Elles sont rares les actrices dont le seul prénom suffit à l’évocation. » avec le récit de cette scène extraordinaire qualifiée d’« extrasolaire » dans Ludwig ou le Crépuscule des Dieux de Visconti. Je vous laisse la découvrir…

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    - Léa Drucker, à propos de son rôle dans L’Eté dernier de Catherine Breillat : « Léa Drucker est plus que parfaite dans ce jeu du mensonge raisonnable où la passion folle valse avec un pragmatisme cruel. D’une grande beauté, jusque dans l’ombre de ses noirceurs. »

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    - Michèle Morgan : « son visage pur, ses hautes pommettes, sa peau douce et claire de vedette assumée la différencient, mais surtout on sent chez elle un heurt entre détermination farouche et constante inquiétude. »

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    - Signoret comme Romy dont le prénom Simone suffit à nous faire comprendre qui il désigne : « très belle avec quelque chose en plus, peut-être la noblesse de son âme qu’on lit sur son visage ou la fente oblongue de ses beaux yeux verts toujours prêts à faire feu pour la défense des libertés. »

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    - Gabin dont on nous rappelle cette scène merveilleuse de la Marseillaise dans La Grande Illusion quand « Gabin entonne La Marseillaise. Emotion, émotion. » à son dernier « coup gagnant avec Mélodie en sous-sol ».

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    - Ventura avec sa « force vulnérable, où la blessure physique ou morale n’est jamais loin », rappelant son rôle inoubliable dans Garde à vue de Claude Miller : « où il joue l’inspecteur, sa manière de bouger, s’asseoir, compulser un dossier, lever les yeux sur Michel Serrault, le prévenu qu’li interroge permet de mesurer le chemin parcouru et de voir que l’amateur des débuts est devenu un immense comédien. Toute une gamme de sentiments – perplexité, agacement, irritation, perte de contrôle – est obtenue par un infime jeu de la physionomie, l’écarquillement d’une pupille ou la modulation de la voix. »

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    - Macaigne avec sa « façon, fantasque, lunaire, fragile, pour mieux tenir la tristesse à distance, de voiler son regard, comme s’il était éteint. »

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    Chaque portrait est surtout un exercice d’admiration, savoureux à lire. Quelques éléments biographiques seulement les traversent et à la fin des portraits, trois « films notables » sont recommandés. Les portraits ravivent nos souvenirs de cinéphiles. C’est absolument passionnant mais pas seulement : instructif aussi. Un magnifique hommage aux actrices et acteurs, à ce que les films et nos souvenirs de ceux-ci leur doivent, à leurs mille nuances de jeux, leurs fêlures, leur grâce. Ce livre indispensable nous rappelle à quel point on les aime ces actrices et acteurs, à quel point certains films n’auraient pas eu le même destin et n'auraient pas laissé la même empreinte avec un casting différent. Sautiller avec bonheur d’un nom à l’autre est particulièrement réjouissant…. Une ode aux actrices et acteurs certes mais plus largement une ode au cinéma. Ce livre m’a rappelé pourquoi je l’aime ainsi, passionnément. Un incontournable pour tout amoureux du cinéma, qu’il souhaite se replonger dans ses souvenirs de cinéphile ou accroître ses connaissances. Vous y apprendrez une multitude de choses, je vous le garantis...et je vous préviens aussi : au fil de votre lecture, une envie insatiable de films s'emparera de vous, suscitée par cet ouvrage gourmand et délicieux.

    À nos amours. Un florilège des actrices et des acteurs français. Gilles Jacob, Marie Colmant, Gérard Lefort - 24/04/2024 -Calmann-Levy / Grasset - 25,90 €

    De Gilles Jacob, je vous encourage aussi à lire :

     - La vie passera comme un rêve (2009 – Robert Laffont), autobiographie entre rêve et réalité dans laquelle s’entremêlent les lumières de la Croisette et les ombres mélancoliques de l’enfance, une (dé)construction judicieuse un peu à la Mankiewicz ou à la Orson Welles, un ouvrage assaisonné d’humour et d’autodérision à la Woody Allen.

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    -  Les pas perdus (2013 – Flammarion), savoureux et mélodieux tourbillon de (la) vie, de mots et de cinéma, « en-chanté » et enchanteur dont  les pages exhalent et exaltent sa passion du cinéma mais aussi des mots, avec lesquels il jongle comme il y jongle avec les années, les souvenirs, les films. Avec une tendre ironie. Un voyage sinueux et mélodieux dans sa mémoire, une vie et des souvenirs composés de rêves et, sans doute, de cauchemars.

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    - Le Fantôme du Capitaine ( 2011 – Robert Laffont), une correspondance imaginaire, une soixantaine de lettres comme autant de nouvelles, une évasion pleine de fantaisie dans le cinéma et la cinéphilie, la littérature, et en filigrane une réflexion sur l'art, un  hommage à l’écriture, au pouvoir salvateur et jouissif des mots qui vous permettent les rêveries les plus audacieuses, les bonheurs les plus indicibles, et un hommage au pouvoir de l’imaginaire, à la fois sublime et redoutable, ce pouvoir qui fait « passer la vie comme un rêve ».

     - Le Festival n’aura pas lieu ( 2015 – Grasset).  Un roman  qui vous emmène notamment sur le tournage de Mogambo sur lequel Lucien Fabas est envoyé en reportage en 1952, au Kenya, où il côtoie John Ford, Clark Gable, Ava Gardner et Grace Kelly.  Et quand Gilles Jacob y écrit à propos de son personnage Lucien Fabas, « Le bonheur de transmettre s’imposait à lui comme une évidence » on pense que ce personnage est loin de lui être étranger.

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    J’ai vécu dans mes rêves (2015 – Grasset). Ping-pong jubilatoire entre deux rêveurs, passionnants passionnés de cinéma, Michel Piccoli et Gilles Jacob. Caustiques échanges épistolaires (je vous recommande tout particulièrement la lecture des morceaux choisis qui figurent à la fin du livre et qui vous donneront une idée de leurs joutes verbales) mais aussi confidences sous forme de correspondance. Au gré des évocations des autres, c’est finalement le portrait de Piccoli qui se dessine. Sa liberté. Sa franchise. Sa complexité. Sa peur de paraître prétentieux. Ses blessures. Et surtout son amour immodéré pour son métier, sa passion plutôt en opposition à ses parents, son « contre-modèle », dont il regrette tant qu’ils en fussent dénués.

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    Un homme cruel (2016 - Grasset). Un voyage à travers une vie aussi romanesque que celles des personnages que Sessue Hayakawa (l’homme cruel) a incarnés. Une vie tumultueuse entre Tokyo, Los Angeles, Monaco et Paris. La vie multiple d’un homme qui de star mondiale et adulée en passant par « agent péril jaune » pour la résistance française termina sa vie comme frère Kintaro, avec les moines bouddhistes. En paix, enfin. L’histoire de Sessue Hayakawa est surtout l’histoire vraie d’une star tombée dans l’oubli. L’éternelle histoire de la versatilité du public et du succès, de la gloire éblouissante et de l’oubli assassin.  C’est bien sûr cette dichotomie entre son être et l’image qui est passionnante mais aussi le portrait de l’être plus sensible, avec sa femme, Tsuru Aoki.  Un homme cruel nous raconte aussi une passionnante histoire d’amour qui a surmonté le temps et la distance et le succès et les infidélités, et une autre, impossible, chacune révélant une autre facette du personnage. Gilles Jacob décrit magnifiquement les tourments de l'âme et du cœur, une autre histoire dans l'Histoire. C’est aussi un trépidant voyage dans l’Histoire du 20ème siècle qui nous fait croiser ses figures illustres : Claudel, Stroheim, et tant d’autres. Mais aussi les drames du 20ème siècle entre séisme meurtrier, racisme, guerre là aussi tristement intemporels.

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    Et enfin le livre dans lequel Gilles Jacob a décidé de faire une déclaration d’amour, non pas au cinéma (même si, bien évidemment il se glisse dans ces pages) mais à sa famille, aux siens. L’Echelle des Jacob (Grasset - 2020) : Vous y croiserez bien sûr aussi quelques figures du cinéma comme Claude Chabrol, son camarade du lycée, qui lui enseignait le roman noir américain et le jazz ou encore Truffaut qui commençait toutes ses phrases « par oui, oui » même pour dire non. Vous y lirez ses débuts de critique avec la revue Raccords qu’il créa en 1949, ces deux vies qu’il mena de front, celle de critique et celle à la tête l’entreprise de son père, rôle lui fut imposé et qu’il est passionnant de découvrir. Il fut ainsi en même temps et pendant des années directeur à la Toledo, là où il « apprit la nécessité de trancher » et critique.  Mais ceux que vous n’oublierez pas en refermant ces pages, ce sont surtout Denise, André, Jean-Claude, François, Jeannette. Sa mère. Son père. Son frère. Son cousin. Son épouse. Ce que vous n’oublierez pas en refermant ces pages, c’est le portrait magnifique de sa mère, leur « lien indéfectible, plus fort que tout », malgré la gifle d’enfance, malgré le temps dévoreur. Celle qui « a été là ». Toujours. Envers et contre tout. Celle qui lisait les entretiens d'Hitchcock et Truffaut en cachette. Ce que vous n’oublierez pas c’est son regard, le sens de la formule. Son regard acéré, lucide, mais toujours dénué de cynisme et d’esprit de revanche. Même quand il évoque les courtisans, qu’il égratigne doucement, même si là non plus n’est pas le sujet : « Lorsqu’on est au pouvoir, tout le monde est votre ami, on s’en aperçoit d’autant plus lorsqu’on n’y est plus. »  Ce que vous n’oublierez pas, c’est qu’il lui a toujours fallu se « battre pour obtenir des choses qui n’étaient pas évidentes ou qui paraissaient trop faciles à première vue. » Ce que vous n’oublierez pas, c’est l’enfance de celui qui fut « pendant trente-huit années l’otage et l’amant du Festival de Cannes » malgré sa « timidité maladive » et son « désordre légendaire » Ce que vous n’oublierez pas, c’est le portrait de son père, qui aurait pu être un personnage de cinéma, qu’il dépeint sans manichéisme, homme dur, malgré les souvenirs de rares éclats de tendresse de l’enfance, dont on se dit que malgré tout, il parvint à « l’aimer dans le souvenir ». Une histoire française. La sienne. Intime mais toujours pudique, écrite avec la délicatesse, l'attention aux autres et l'élégance morale qui caractérisent son auteur. Une histoire dont il a « gardé aussi l’envie de mordre la vie à pleines dents, la vie simple, l’amour de la famille, de ma femme, le rire d’un enfant, l’harmonie d’une sonate, la page d’un livre souvent lu, le partage d’un repas. L’envie, comme tout le monde, d’être heureux. » L’envie dont ce livre transpire. Malgré les drames. Malgré les obstacles. L’envie de « tenir bon et prendre la vie comme elle vient » parce qu’«il n’y a pas le choix », comme le dit cette citation qu’il emprunte à Philip Roth. Et puis comme ça, sans prévenir, au fur et à mesure que se tisse l'histoire et que se dévorent les pages, comme un flot impétueux et ravageur, ses mots et l’émotion vous emportent, vous submergent, vous laissent ko. Quand les liens se distendent avec André (et pour cause, vous verrez !) et que ressurgissent les souvenirs de l’enfant à qui il apprit à monter à bicyclette. Réminiscences foudroyantes de l’enfance. Malgré tout. Il le nomme aussi André mais aussi « mon père », « papa », « p’pa ». Valse des identités et sans doute des sentiments à l’égard de celui qui fit souffrir Denise mais qui fut aussi le « petit gars de Nancy », soldat, marchand de biens, de nouveau soldat, prisonnier de guerre, directeur de société. La complexité d’une histoire française. Comme une autre. Et si singulière. Quand il raconte cette nuit de 2014 au Carlton, l’année de sa dernière présidence, dans laquelle perce la nostalgie et que remontent aussi les souvenirs de « l’élégance viscontienne de l’hôtel Hermitage », lorsque le personnel leur fit une haie d’honneur à Jeannette et lui, cette « attention précieuse ». Et que son épouse, partageant son émotion, presse son bras. Toujours d'ailleurs, l'émotion, subrepticement, surgit, quand il parle de sa femme, Jeannette. Et cette phrase m'a bouleversée : « Quand nous ne serons plus là, je sais que je penserai toujours à elle ». Nous rappelant son récit à propos de ce film japonais vu à Chinatown mettant en scène ces amants inséparables dont on se demande presque s’il ne l’a pas inventé, comme une parabole de leur propre histoire. Quand il évoque sa mère, toujours aussi, et qui « Un matin de 1985 », « le 23 décembre », « ne se réveilla pas ». Quand il écrit cette phrase poignante à propos de son frère « J’ai pensé « C’est à toi maintenant de le protéger », et je n’ai pas su le faire. » Quand il n’arrête pas de penser que son père est mort seul. Toutes ces fois, l’émotion nous saisit, grandit, m’a saisie parce que si ce récit est personnel, il est aussi universel en nous renvoyant à nos disparus, que nous aurions toujours pu mieux protéger, aimer, comprendre, étreindre. Et aux regrets qui eux aussi nous étreignent. Jusqu’à la phrase finale que je vous laisse découvrir, à laquelle on ne peut que répondre que oui, sans le moindre doute, désormais, Jeannette, Denise, André, François, Jean-Claude, et même Auguste et Lambert, ses grands-pères, qu’il ne connut jamais, et même les rôles secondaires et pourtant tellement essentiels comme le barman Adolphe, le père Bruno, un Juste, ils feront partie de notre univers, seront intégrés à la mémoire de notre propre vie, à la farandole de personnages qui la peuple. Comme le sont toujours les personnages d’un livre qu’on n’oublie pas. Auquel des personnages marquants procurent vie, force, singularité, émotion. Un peu plus parce qu’ils furent réels. Et désormais immortels grâce à L’échelle des Jacob. Non, cher Gilles Jacob, vous ne serez plus seul à vous souvenir. Merci pour ce livre, cette « opération de séduction », victorieuse indéniablement. Merci pour eux. Merci à la boîte rouge en carton bouilli d’avoir réveillé les souvenirs enfouis. J’ai terminé cette lecture le cœur chaviré, et étrangement avec un peu de baume sur les blessures de l’âme ébréchée des fêlures incurables laissées par ses irremplaçables absents. Le cœur chaviré, enfin, en pensant aux larmes de nos pères qui charrient tant de mystères. Et en pensant qu’il n’est jamais trop tard pour tenter de les comprendre. (Critique complète à lire ici).

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  • En dédicace au Festival livres & musiques de Deauville 2024

     

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    Le Festival littéraire Livres et Musiques de Deauville aura lieu du 3 au 5 mai prochain, dans le splendide musée des Franciscaines de Deauville. J’ai le grand plaisir d’être invitée le samedi 4 mai, de 15h30 à 17H30, pour la fameuse « grande dédicace », avec mon roman La Symphonie des rêves.

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    La magnifique affiche de cette édition rend hommage à Françoise Sagan (et à son livre Aimez-vous Brahms…, si vous regardez attentivement).
     
    Que de douces réminiscences pour moi au simple énoncé de ce nom de Deauville. D'abord, les débuts de mon histoire avec les festivals de cinéma puisque le premier auquel j’ai assisté fut le Festival du Cinéma Américain de Deauville, il y a une vingtaine d’années, un festival dont je n’ai pas manqué une édition depuis lors, juste deux jours l’an passé…pour relire les épreuves de La Symphonie des rêves
     
    Deauville, c’est aussi évidemment pour moi le film de Lelouch (que j'avais regardé déjà tant de fois avant de venir à Deauville !), et plus récemment ce remake avec P.Cruz et B.Pitt en introduction du défilé Chanel (c’est à Deauville qu’elle ouvrit sa première boutique). Dans le film de Lelouch, le montage et les alternances de noir et blanc et de couleurs jouent et jonglent habilement avec les méandres du temps et de la mémoire émotive, entre le présent et le bonheur passé qui ressurgit sans cesse. C’est un peu aussi mon histoire avec Deauville. À chaque retour à Deauville, une chaleureuse nostalgie m’envahit, le parfum de l’insouciance qui, là seulement inaltéré, flotte dans l’air. Comme la voix de Jean-Louis Trintignant quand il prononce « Montmartre 1540 » ou lorsque dans sa Ford Mustang il prépare ce qu'il dira à Anne lorsqu’ils se retrouveront. J’ai parfois aussi l’impression d’y entrevoir cet homme avec son chien qui marche dans la brume qui lui font penser à Giacometti.  Vous rappelez-vous sa question dans le film : « Qu'est-ce que vous choisiriez : l'art ou la vie ? ». Il semblerait qu’à Deauville, pour moi, les deux s’entremêlent constamment, et se confondent même parfois. 
     
    De Sagan, à l'honneur lors de cette édition 2024 du festival, j'aime tout : la mélancolie, la nostalgie, la lucidité, le romantisme désenchanté, l’humour, la petite musique des mots, l’élégance, le sens du détail, la gravité légère… Je crois avoir lu tous ses livres. Et il ne se passe pas une année sans que j’en relise un, voire plusieurs.

    Depuis 2004, le  Festival littéraire Livres & Musiques célèbre, chaque printemps, les mots et la musique...ou la fameuse musique des mots.

    Le Festival se déroule en deux temps : avec le Prix des Ados, remis en avril. En mai, romanciers, biographes, illustrateurs et auteurs de BD, auteurs jeunesse, se retrouvent à Deauville pour des lectures musicales, des concerts littéraires et des rencontres singulières. Un Jury d’écrivains et de musiciens, présidé par Jérôme Garcin, décerne depuis 2004 le Prix Livres & Musiques de Deauville qui récompense un roman inspiré par la musique.

    Depuis 2021, le Festival Livres & Musiques se déroule sur  3 jours de festivité dans les différents espaces des Franciscaines.


    En 2024, il revient pour sa 21ème édition, du vendredi 4 au dimanche 6 Mai 2024, et rendra un hommage aux petites et grandes musiques de Françoise Sagan à l’occasion du 20e anniversaire de la mort de celle-ci. Retrouvez le programme détaillé, ici.

    La Symphonie des rêves poursuit ainsi sa jolie route qui passera aussi bientôt par Cannes, le salon Quartier du Livre à Paris, le Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule...
     
    « On ne m'ôtera jamais de l'idée que c'est en se colletant avec les extrêmes de soi-même, avec ses contradictions, ses goûts, ses dégoûts et ses fureurs que l'on peut comprendre un tout petit peu, oh, je dis bien, un tout petit peu ce que c'est que la vie. » (Françoise Sagan - Des bleus à l’âme).
     
    « Ce n'est pas parce que la vie n'est pas élégante qu'il faut se conduire comme elle. » (Des bleus à l’âme -Françoise Sagan).
     
    Et trois autres citations de Sagan auxquelles je souscris… :
     
    « Il m'arrive de trouver que la vie est une horrible plaisanterie. Si l'on est tant soi peu sensible, on est écorché partout et tout le temps. »
     
    « Un ami qui comprend nos larmes a beaucoup plus de valeur que plein d'amis qui ne comprennent que notre sourire. »
     
    « Écrire, c'est comme avoir un rendez-vous d'amour dangereux. J'ai toujours aimé la littérature. Elle m'a toujours aidée. C'est la seule réponse à la terre. Je n'ai jamais pensé que je lui rendais service. »
  • Les films de mon roman "La Symphonie des rêves" à l’honneur sur Universcine

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    Mon roman La Symphonie des rêves, à partir de mercredi, sera doublement à l’honneur sur la plateforme de VOD Universcine.com (@universcine), puisque non seulement trois exemplaires du roman seront à gagner pour les abonnés mais aussi parce que les 15 films dont les titres figurent ci-dessous, évoqués dans le livre, sont à l'honneur sur la page d’accueil du site.

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     Inutile de vous dire que je vous recommande ardemment chacun de ces longs-métrages. Dans tous, la musique joue un rôle primordial. D’ailleurs, c’est la puissance émotionnelle d'une de ces musiques et l'émotion que procure la musique en général (son potentiel comme lien romanesque) qui on suscité l’idée de ce roman (et son rôle consolateur que définit si bien cette citation de Stendhal qui figure au début du roman « La bonne musique ne se trompe pas, et va droit au fond de l’âme chercher le chagrin qui nous dévore ») dont une large partie se déroule ainsi dans le cadre du Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule.

    Alors, avant de vous retrouver pour de nouvelles séances de dédicaces, notamment au Festival de Cannes (Fnac de Cannes, probablement le 20 Mai), au Salon Livres et Musiques de Deauville (le 4 mai), à Saint-Malo (Cultura, le 20 avril),...je vous laisse avec ces films que vous croiserez au fil des pages du roman dans lequel ils sont cités plus ou moins explicitement…

    Pour certains, vous retrouverez mes critiques ci-dessous. Je remercie Universcine.com pour ce magnifique coup de projecteur.

    En rouge, les films dont mes critiques figurent ci-dessous.

    César et Rosalie de Claude Sautet

    Monsieur Klein de Joseph Losey

    In the mood for love de Wong Kar Wai

    La tortue rouge de Michael Dudok de Wit

    Le temps de l'innocence de Martin Scorsese

    Les parapluies de Cherbourg de Jacques  Demy

    Les choses de la vie de Claude Sautet

    La main au collet d'Alfred Hitchcock

    La bête humaine de Jean Renoir

    Deux hommes dans la ville de José Giovanni

    Le Train de Pierre Granier-Deferre

    Une vie cachée de Terrence Malick

    Le Chat de Pierre Granier-Deferre

    Sueurs froides d'Alfred Hitchcock

    Lawrence d'Arabie de David Lean

    Lire la suite

  • Roman - La Symphonie des rêves (Editions Blacklephant) - premiers épisodes de la belle aventure : critiques et dédicaces

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    Ci-dessus, La Symphonie des rêves à la librairie du Bon Marché Rive Gauche

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    Ci-dessus, La Symphonie des rêves à la nouvelle librairie Albin Michel, Boulevard Raspail, à Paris

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    Ci-dessus et ci-dessous, à la FNAC

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    Ci-dessous, à la librairie Gibert à Paris

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    Il est là. Le rêve qui se concrétise. Au milieu des autres. Un peu intimidé par ce prestigieux compagnonnage. Un peu fier d’y être, enfin. Je me souviens de ce sentiment d’exaltation quand l’idée s’est imposée, obsessionnelle, quand l’envie irréfragable d’écrire ce livre m’a transportée, quand j’ai établi un véritable plan d’attaque pour en bâtir l’univers en six mois alors que j’écris d’habitude à l’instinct, me laissant porter par mes personnages et émotions. L’émotion. C’est toujours la source et le but. Une émotion qui me submerge et m’envahit tant qu’il est vital de la transformer en histoire. Celle que j’espère réussir à vous transmettre, aussi. Je me souviens de cette énergie démente pendant ces six mois, à l’image de l’émotion d’alors qui la guidait. Je me souviens de ce journal intime auquel, à huit ans, j’avais confié le rêve secret, celui de devenir romancière. La voie me semblait impossible mais aussi être la seule possibilité de faire résonner ma voix. Je me souviens de ces livres dits d’adultes (Balzac, Hugo, Stendhal), que je dévorais à l’âge où ce n'était pas "normal", où au cours imposé de lecture à l’école je feignais de lire des BD pour avoir l’air « comme les autres ». Je me souviens que la normalité n’est qu’une invention des êtres sans fantaisie pour claquemurer celles des autres, et se rassurer. Je me souviens que les livres furent les derniers compagnons de vie de mon père qui m'en a transmis la passion, qu’ils nous relient au passé, aux disparus, aux rêves et êtres impossibles. Je me souviens qu’il vaut mieux éviter de se souvenir, parfois. Je me souviens d’une musique qui a tout enclenché, consolante et magnétique. Je me souviens que j’écris, à la fois pour me souvenir et pour oublier, pour une seule personne et pour tous. Et comme l’héroïne sur la couverture, pour regarder vers la mer, l’avenir, l’ailleurs, l’espoir.
    Je me souviens enfin de ces deux phrases déjà citées mais qui évoquent si bien la genèse de ce roman :
    « Écrire est un acte d'amour. S'il ne l'est pas il n'est qu'écriture. » Cocteau
    « Écrire, c'est aussi ne pas parler. C'est se taire. C'est hurler sans bruit. » Duras

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    Je pourrais vous parler des chemins détournés et épineux qu'empruntent les rêves pour se concrétiser. Je pourrais vous parler de tous les hasards et coïncidences, des turbulences et des rebondissements qui ont jalonné ces derniers mois avant et après la publication de ce roman. Je pourrais vous parler de ce qui, profondément, viscéralement, a suscité l'envie irrépressible de raconter cette histoire sur la force des rêves et la puissance émotionnelle de la musique qui, dans ce roman, bouscule et relie les destinées, enfièvre et console. Je pourrais vous parler des désillusions, des drames, des joies, des rencontres, des doutes qui l'ont nourri. Mais au fond je ne "parlerai" jamais aussi sincèrement et aussi bien de tout cela qu'à travers les personnages de La Symphonie des rêves, sorte de kaléidoscope de toutes ces émotions qui vous feront voyager, d'Athènes à Venise, de Trouville à Nice, de Dinard à Cannes, de La Baule à Hydra, de Beaune à Paris, du Festival de Cannes au Festival du Cinéma et Musique de Film de La Baule, au rythme des élans musicaux et de leurs élans du cœur.

    D'autres, aussi, en ont parlé magnifiquement, et je les remercie, tout particulièrement Dan Burcea pour son sublime article et sa magnifique analyse dans la revue littéraire Lettres Capitales, une chronique que vous pouvez lire, ici.

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    Retrouvez également mon interview sur le site littéraire A la lettre pour en savoir plus sur le roman, sa genèse, mes goûts cinématographiques, en matière de musiques de films...

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    Quelques avis de lecteurs, aussi (partagés avec leur accord) :

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    Merci à radio J pour l'invitation, et en particulier à Line Toubiana et Lise Gutman, les premières à avoir parlé de La Symphonie des rêves.

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    Enfin, les premières séances de dédicaces furent un bonheur, à la Librairie du Marché de Deauville, à la FNAC de Laval et à la Librairie du Cinéma du Panthéon de Paris que je remercie pour leur confiance.

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    Photo ci-dessus, copyright Dominique Saint

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    Retrouvez d'autres photos et vidéos des séances de dédicaces sur mon compte Instagram @Sandra_Meziere.