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  • Le film de la semaine-Critique- "Toscan" d'Isabelle Partiot-Piéri: portrait d'un être libre

    Dans mon récapitulatif des sorties de la semaine, j'ai honteusement oublié LE film à ne pas manquer cette semaine découvert à Cannes. Retrouvez ma critique ci-dessous.

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    Isabelle Partiot-Pieri s'est penchée sur des centaines d'heures d'interviews pour dresser le portrait de ce dandy flamboyant, amoureux fou de la vie et du cinéma, complexe, cultivé, enthousiaste.

    C'est dans le cadre de la section Cannes Classics que j'ai découvert ce passionnant  documentaire réalisé par Isabelle Partiot-Pieri en présence du Ministre de la Culture, d'Abbas Kiarostami, Juliette Binoche et de nombreux amis du producteur décédé en 2003.

    Au-delà du portrait de l'homme c'est aussi celui d'une vision du cinéma qui semble s'être éteinte avec lui. Un cinéma défendu avec énergie, enthousiasme, conviction contre vents et marées, contre le scepticisme des uns ou l'incrédulité des autres. Etrange sensation que de voir ce film à Cannes où il a si souvent promené son inimitable silhouette, Cannes qu'il définit comme un passage aussi nécessaire qu'effrayant, le plaisir d'y être étant selon lui le même que celui éprouvé par « un lapin le premier jour de la chasse ». A voir la violence lunatique et souvent surjouée du public cannois, il est assez facile d'imaginer la terrible épreuve que cela peut représenter pour un producteur qui aimait autant ses films et les cinéastes qu'il défendait.

    Au fil du documentaire se dessine le portrait d'un homme qui aime les mots, a le sens de la formule, cite Guitry, Cocteau, Nietzsche et bien d'autres mais aussi d'une personnalité complexe qui, au détour d'une émission, avoue que ce qu'il dissimule derrière son enthousiasme c'est finalement une forme d'indifférence. Impossible de le croire indifférent au cinéma pourtant tant il le défend comme si sa vie en dépendait, qu'un film existe (indépendamment de toute considération commerciale) étant pour lui plus important que tout, s'évertuant à toujours tout ramener à son enthousiasme et sa passion pour un film quand les journalistes veulent absolument lui faire parler d'argent et d'intérêt commercial.

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    En parallèle de son portrait se dessine aussi une magnifique définition du cinéma, quête d'éternité, de vérité. Toscan du Plantiers ne voulait pas entraver la liberté des auteurs mais au contraire les porter, profondément admiratif de ces êtres libres que sont selon lui les artistes.

    Un être libre : c'est d'ailleurs ainsi que l'on a avant de le définir à l'issue de ce beau portrait . Il cite ainsi Cocteau « Ce qu'on te reproche, cultive-le, c'est toi ».  Amoureux des mots, du cinéma, de musique et d'opéra, des actrices (il épousa ainsi Marie-Christine Barrault mais fut aussi notamment le compagnon d'Isabelle Huppert) de la vie tout simplement pour lui indissociable du cinéma, une vie dont il a  traversé les drames avec beaucoup de dignité (et notamment l'assassinat de son épouse en Irlande, une affaire qui revient d'ailleurs actuellement sur le devant de la scène).

     Directeur général de la Gaumont à 35 ans, président de la Cinémathèque de Toulouse (devenu la 4ème au monde), président de l'Académie des arts et technique du cinéma (César), co-fondateur du Festival du Film de Marrakech, s'essayant à la mise en scène lyrique avec « Don Giovanni » il est aussi indissociable des films et des cinéastes qu'il a ardemment défendus : Losey, Fellini, Greenaway, Zulawski, Bergman, Fassbinder...et surtout Pialat qu'il accompagnait lors de la fameuse palme d'or 1987 pour « Sous le soleil de Satan » reçue sous les applaudissements et les sifflets. Celui pour qui le cinéma c'était avant tout « faire devenir réalité une utopie » en a accompagné tant de sublimes et incontournables.

    Une très belle leçon de vie et de cinéma en un lieu où la parole est un peu trop souvent convenue et cynique et l'enthousiasme suspicieux. Une belle réussite aussi au sens nietzschéen (une phrase qu'il cite d'ailleurs) : « deviens ce que tu es ».  Un documentaire dont on ressort avec l'envie de dévorer l'existence et une soif encore plus insatiable de cinéma. Le portrait d'un homme libre, rare et élégant... dans tous les sens du terme.

    A voir absolument en salles le 1er décembre!

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  • Les films de la semaine du 1er décembre vus et/ou recommandés par inthemoodforcinema.com

    Parmi les sorties de la semaine, j'ai vu 4 films dont vous pouvez d'ores et déjà retrouver mes critiques.

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    Je vous recommande avant tout "Le Guépard" de Luchino Visconti dont la version restaurée sort cette semaine en DVD et Blu-ray, et qui ressort également en salles, malheureusement dans très peu de salles dont la Filmothèque du Quartier Latin.  Cliquez ici pour lire mon dossier spécial consacré au "Guépard".

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     Le nouveau film à l'affiche cette semaine à ne pas manquer c'est le documentaire Toscan d'Isabelle Partiot-Piéri dont vous pouvez retrouver ma critique en cliquant ici.

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    Egalement à l'affiche cette semaine "Alamar" de Pedro Gonzalez-Rubio, un de mes coups de coeur de la compétition du Festival Paris Cinéma 2010. Retrouvez mes commentaires au sujet de ce film en cliquant ici.

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    Cliquez ici pour lire ma critique du sympathique "Mon pote" de Marc Esposito.

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    Et enfin le décèrébré "A bout portant" de Fred Cavayé dont vous pouvez retrouver ma critique en cliquant ici.

     Et toujours:

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    Cliquez ici pour retrouver mon dossier spécial consacré à "Harry Potter et les reliques de la mort" (article recommandé par Elle.fr cette semaine).

  • Lequel de ces 5 films Diaphana voudriez-vous voir en projection privée?

    vcm_s_kf_m160_160x160.jpgPour fêter les 20 ans de Diaphana Distribution, un coffret collector contenant 80 de leurs films les plus cultes a été fabriqué en édition limitée. A cette occasion, chers lecteurs, j'ai le plaisir de vous proposer une projection privée du film de votre choix, uniquement pour les lecteurs d'inthemoodforcinema.com.  Cette projection privée aurait lieu dans une salle aménagée dans les locaux de Diaphana Distribution à Paris. La salle sera réservée uniquement pour vous durant la journée.

    Parmi les 80 films de la liste, j'en ai choisi 5, les cinq que je préfère parmi les 80 de la liste suivante: http://diaphana.fr/film/coffret-diaphana-20-ans . Et c'est maintenant à vous de donner votre avis et de voter dans les commentaires pour celui de ces 5 films que vous souhaiteriez (re)découvrir. Bien entendu ceux qui participeront seront d'office invités à la projection.

    1. "Les Virtuoses" de Mark Herrman

    Synopsis de ce bijou du cinéma britannique: L'histoire des membres de la fanfare d'une petite ville miniere, Grimlet, dont le chef Danny reve de participer aux finales du championnat national des fanfares au Royal Albert Hall. Les virtuoses de la fanfare de Grimley joueront-ils a Londres ? Et quand bien meme vivraient-ils une journee de gloire passagere, quelle medaille la Direction des charbonnages britanniques leur reserve-t-elle a leur retour ?

    2."Harry, un ami qui vous veut du bien" de Dominik Moll

    3. "L'enfant" de Jean-Pierre et Luc Dardenne

     

     

    4."Le vent se lève" de Ken Loach

     

     

    5."La vie rêvée des anges" d'Erick Zonca

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  • Cinq extraits du making-of de "Mon Pote" de Marc Esposito avec Edouard Baer, Benoît Magimel...

    pote.jpgAlors que "Mon pote" de Marc Esposito sortira en salles le 1er décembre prochain et que vous pouvez retrouver ma critique du film en avant-première en cliquant ici, je vous invite à découvrir cinq extaits du making-of du film, ci-dessous.

      

  • Programme des 11èmes rencontres cinématographiques de Bretagne à Dinard

     

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    A Dinard, il y a l'incontournable Festival du Film Britannique mais aussi les rencontres cinématographiques de Bretagne. Ainsi, du 26 au 29 janvier 2011, au cinéma Les 2 Alizées de Dinard, vous pourrez découvrir 18 films en avant-première en présence des équipes de films.

    Parmi ces films:

    LA LIGNE DROITE de Régis Wargnier

    MONSIEUR PAPA de Kad Mérad

    AVANT L’AUBE de Raphaël Jacoulot

    LES YEUX DE SA MÈRE De Thierry Klifa etc

    Plus d’infos : ŸLe site officiel de l’association : www.regledujeu.org

    Le site du cinéma Les 2 Alizés : www.emeraude-­‐cinema.fr

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  • Avant-première – Critique – « A bout portant » de Fred Cavayé : la comédie de l’année ?

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    Ayant beaucoup apprécié le premier film de Fred Cavayé, le nerveux, efficace, rythmé et haletant « Pour elle » sorti en 2008 qui, par ailleurs, marquait la naissance d’un cinéaste français imprégné de cinéma américain initiant un film de genre et son genre de film bien à lui, j’étais impatiente de découvrir son deuxième film « A bout portant ».

    Dans  « A bout portant », tout va pour le mieux pour Nadia (Elena Anaya) et Samuel (Gilles Lellouche) : lui va bientôt passer les examens pour devenir infirmer, elle est enceinte de leur premier enfant et ils sont visiblement très amoureux. Tout bascule le jour où un truand recherché, un certain Hugo Sartet-Roschdy Zem- (un nom de famille qui rappellera quelqu’un aux cinéphiles) est hospitalisé dans le service de Samuel. Chez lui, Samuel est brutalement agressé. Sa femme est kidnappée. Samuel a alors trois heures pour sortir Sartet, alors sous surveillance policière, de l’hôpital…

    Voilà un pitch plutôt alléchant qui nous en rappelle d’ailleurs un autre. Celui du premier film de Fred Cavayé. Même basculement brusque d’un quotidien joyeux et tranquille dans l’absurdité et dans l’horreur. Même principe hitchcockien d’un homme ordinaire plongé dans une situation horriblement extraordinaire. Scène similaire du début pour nous montrer un couple amoureux dans son quotidien. Même recours à un slogan, hier « Jusqu’où iriez-vous par amour ?», aujourd’hui « Il a trois heures pour sauver sa femme. » Chacun des deux slogans peuvent d’ailleurs s’appliquer pareillement aux deux films, de même que les titres également interchangeables, « A bout portant », aurait très bien pu s’intituler « Pour elle ». La comparaison s’arrête là.

    D’abord, qu’on arrête de comparer le cinéma français au cinéma américain, toujours au profit du second. Le cinéma français est justement intéressant (oui, il l’est) quand il conserve sa spécificité et non quand il cherche, souvent vainement, à singer une caricature du cinéma américain. D’ailleurs, Fred Cavayé n’aime pas seulement le cinéma américain puisqu’il cite ouvertement Verneuil en nommant le personnage de Roschdy Zem Sartet (Alain Delon s’appelle Roger Sartet dans « Le Clan des Siciliens » d’Henri Verneuil). Sorte de personnage melvillien imperturbable, le Sartet de Fred Cavayé n’est guère plus loquace et expansif que celui de Verneuil. Là aussi, la comparaison s’arrête là.

    Un pitch accrocheur. De brillantes références (qui s’avèreront présomptueuses). Une noble ambition.  Et tout cela s’avère être finalement un décevant trompe l’œil. Comme si le film lui-même était la bande-annonce du long-métrage intéressant qu’il aurait pu être. Le film ne correspond d’ailleurs pas à son slogan puisque les trois heures fatidiques seront bien vite mises de côté au profit d’une course poursuite  harassante qui nous hypnotise et nous ferait presque oublier la vacuité du scénario et l’enjeu initial qui n’a finalement plus aucun intérêt.

     Premier problème : l’absence totale de vraisemblance. L’injection d’adrénaline que Sartet a reçue doit être bigrement efficace pour qu’il se rétablisse aussi vite, et passe du statut de presque mort à celui de champion olympique capable de braver les pires poursuivants. Sans parler de la facilité avec laquelle il entre dans l’antre des policiers alors que son portrait de truand recherché  est  absolument partout. Ni de celle avec laquelle une femme enceinte ( de 7 mois et demi pour corser l’affaire et ne devant absolument pas bouger de chez elle) résiste à la violence physique et morale puis se rebelle avec une même violence. Le summum est quand même atteint avec cette bande de flics ripoux à la tête desquels se trouve Gérard Lanvin tous sur le même moule psychologique ( corrompus, impitoyables, violents) et agissant au siège même de la police sans que personne ne s’en aperçoive ( !!). A part la corruption qui les anime entièrement, on ne saura jamais qui ils sont. D’ailleurs tout le film est à cette image. Comme si les personnages correspondaient à des prototypes pas vraiment incarnés. Il y a les flics ripoux impitoyables. L’homme ordinaire dans la situation extraordinaire. Le truand brutal et hiératique (pensez donc il ne bronche même pas en découvrant la mort de son frère). La femme enceinte terrifiée qui ne comprend rien et qui subitement comprend tout sans qu’on lui ait rien expliqué (le film est très avare de dialogues).

     Passons encore sur l’invraisemblance, la vraisemblance n’était pas la condition sine qua non d’un bon film. Après tout sans doute l’amour, la vengeance  donnent-ils des ailes à notre infirmier/superman en devenir. Seulement 1H24 de courses-poursuites, pour nous dire que l’homme ordinaire plongé dans une situation extraordinaire peut se surpasser perdant toute notion de morale ou de bien ou de mal, suffisent-elles à faire un film ?

    Et 1H24 peut être très longue avec presque pas de dialogues ou alors eux aussi absurdes « Ma femme est enceinte » ( dit par un Gilles Lellouche affolé, yeux globuleux de rigueur, comme si à 7 mois et demi personne ne s’en était aperçu) ou « Qu’est-ce que vous faîtes », (un automobiliste parterre affolé venant de se faire voler sa voiture). Melville a pourtant montré qu’on peut très bien se passer de dialogues (cf la longue et palpitante scène du casse dans « Le Cercle rouge ») seulement n’est pas Meville ou Verneuil qui veut.  Jamais la tension ne retombe si bien qu’à être constamment sur la même note, il n’y a plus de crescendo ou de decrescendo, la note en question perd toute force et sa répétition finit par  ennuyer. Un comble pour un film d’action qui n’aspire justement qu’à divertir. Fred Cavayé et ses mouvements de caméra frénétiques ne ménage pourtant pas ses efforts pour que nous aussi nous sentions « à bout portant », suffoqués, prisonniers de ce qui aurait dû être ou en tant ou cas était initialement annoncé comme un inéluctable compte à rebours.

    Heureusement : Roschdy Zem, comme toujours excellent, est là pour essayer de tenter de sauver le film. Il met toute l’intensité qu’il peut dans son rôle stéréotypé et silencieux. La relation qui le lie à Samuel lié à lui par la force des choses aurait pu être passionnante, mais ils semblent coexister sans que rien ne se passe. Les seconds rôles ont visiblement été négligés au profit de l’action tant là encore les interprétations manquent de nuances (mais comment faire exister des personnages qui ne parlent pas et ne sont que des stéréotypes ?).

    Je me suis même demandée s’il ne s’agissait pas d’une parodie tant ce film est une caricature de blockbusters américains : absence de dialogues ou alors dialogues ineptes, absence de psychologie, musique omniprésente, pitch en forme de slogan sans réel rapport avec le film, scènes violentes finalement ridicules, fin morale et rassurante etc. Non, pourtant, ce film est dramatiquement sérieux.

    En bref, une injection d’adrénaline pour nous en mettre plein la vue et nous anesthésier, nous garder, nous aussi, artificiellement éveillés. Un écran de fumée pour masquer une absence totale de scénario, de psychologie, de dialogues, d’enjeu. Je ne pense pas que le cinéma français consiste à « parler dans une cuisine » (boutade introductive à la projection de Fred Cavayé, et quand bien même, une conversation dans une cuisine peut s’avérer plus palpitante qu’une course-poursuites), pas plus que le cinéma américain consiste à des courses-poursuites sans dialogues et des personnages sans consistance. Ma déception a été à la hauteur de mon attente et de l’enthousiasme que j’avais éprouvé en voyant « Pour elle », espérons que le troisième film de Fred Cavayé saura prendre le meilleur de l’un et de l’autre, et de son premier film pour nous faire oublier le second!

    Cliquez ici pour lire ma critique de « Pour elle » de Fred Cavayé

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  • Critique de "L'homme de chevet" d'Alain Monne ce soir sur Canal +

    Ce soir, à 20H50, Canal + diffusera "L'homme de chevet" d'Alain Monne avec Christophe Lambert et Sophie Marceau. Retrouvez ma critique ci-dessous.

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    Voilà un film que la critique n'a pas épargné victime, sans doute, de la notoriété de ses deux acteurs principaux, et de ce qui les unit au-delà de l'écran. Ils n'ont pourtant pas choisi la facilité, avec cette adaptation du roman d'Eric Holder, la deuxième de l'année 2009 après le très beau « Melle Chambon » de Stéphane Brizé  avec lequel il n'est d'ailleurs pas exempt de points communs.

    A Carthagène, en Colombie, Léo (Christophe Lambert) passe son temps à boire pour oublier. Un ami le recommande à Muriel (Sophie Marceau) une jeune femme tétraplégique qui recherche un garde malade et qui en a auparavant découragé un certain nombre. Peu à peu des liens vont se tisser entre ces deux êtres que tout aurait pu opposer... a priori.

    A priori parce que, au fond, ces deux personnages se ressemblent. Tous deux dépendants. Elle de son corps, à jamais immobilisé. Lui de l'alcool. Tous deux broyés par l'existence, accidentés de la vie.

    Femme libre et indépendante avant son accident de voiture, Muriel se retrouve prisonnière de son corps et de sa chambre d'où elle ne sort pas, avec pour seule compagnie Lucia (très convaincante Margarita Rosa de Francisco) son autre garde malade dont elle est la raison de vivre et de se lever, et ses livres.

    Avant même d'être une histoire d'amour « L'homme de chevet » est un film sur le corps. Le corps prisonnier de Muriel. Le corps maigre, presque désarticulé, de Léo qu'il abîme par l'alcool, lequel, ancien boxeur, vivait d'ailleurs de son corps. Le corps de Linnett, une jeune boxeuse qu'il entraîne (moyen aussi physique pour lui d'exprimer une rage que Muriel ne peut que verbaliser) qui elle-même se prostitue et vit de son corps. Ou encore un autre corps martyrisé, par la drogue, celui de Lucia. Le corps que  Linnett exhibe dans une robe  flamboyante s'oppose à celui que Muriel cache derrière ses draps blancs. Un corps qui va se réapproprier l'espace. Des corps malmenés qui vont retrouver la dignité et l'estime d'eux-mêmes ( à l'exception de Lucia.)

    Pour incarner ces corps et leur donner une âme, Sophie Marceau et Christophe Lambert sont absolument parfaits et bouleversants. La première, physiquement broyée, d'abord cassante, aigrie, usant d'un humour provocateur et cynique qui s'illumine peu à peu. Tout passe dans sa voix, l'expression de son regard qui se modifient progressivement et tout en restant immobile elle parvient à faire passer avec beaucoup de justesse une grande palette d'émotions, de la colère à l'attendrissement. Le second avec sa voix cassée, ses gestes las qui peu à peu reprend confiance, se redresse.

    Alors bien sûr ce film n'est pas parfait mais là où on aurait crié au film d'auteur brillant si les deux acteurs principaux avaient été inconnus, leur notoriété  rend le film suspect de mièvrerie (et même coupable sans avoir eu droit à la présomption d'innocence à laquelle Alain Monne pourrait d'autant plus prétendre qu'il s'agit d'un premier film), ce que le film évite constamment.

    Alain Monne filme en effet avec énormément de pudeur et dignité, sachant user de l'ellipse et du plan large avec délicatesse là où d'autres auraient abusé du gros plan et des violons. Et puis il y a la Colombie, sa moiteur, ses couleurs chaudes et brûlantes, ses êtres de là-bas ou d'ailleurs qui s'y égarent, victimes des fracas de l'existence.

    C'est l'histoire de trois belles renaissances, d'êtres qui se raccrochent les uns aux autres qui retrouvent la sensibilité aux autres, à la belle lumière de Carthagène,  et le goût de la vie.

    Alain Monne avait obtenu le Grand Prix du Meilleur Scénariste  pour ce film. J'assistais hier soir à la cérémonie 2009 (Alain Monne était d'ailleurs présent), je vous en parle demain. Il a également obtenu le prix du public au Festival d'Angoulême.

    Un beau film, sensible et émouvant, que je vous recommande.

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