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cinema - Page 200

  • Avant-première – Critique d’Avatar de James Cameron

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    Avatar. Des mois que l'on annonce ce film évènement, un projet que James Cameron porte depuis 15 ans. Le film le plus cher de tous les temps avec un budget de plus de 300 millions de dollars, un projet pharaonique sur lequel pas moins de  1000 personnes ont travaillé. Un buzz savamment orchestré avec 15 minutes projetées dans le monde entier le 21 août dernier. La contrepartie de tout cela : une attente énorme et une quasi-obligation d'être la hauteur des sommes colossales investies (le rêve n'a pas de prix me direz-vous et ce n'est pas moi qui vous contredirai sur ce point) et surtout de l'attente suscitée. C'est une des deux raisons qui font que (pour moi en tout cas) le buzz a davantage nui au film qu'il ne l'a servi, plaçant la barre de l'attente d'emblée extrêmement haut. La deuxième étant la façon dont a été présenté ce film : avant tout comme une prouesse technique et visuelle et une histoire hollywoodienne (avec ce que cela comporte de gigantisme mais aussi de potentiel fédérateur). Or, ce qui m'a d'abord et avant tout passionnée, c'est son sens, et même sa pluralité de sens, et sa manière de faire sens. Un sens qui aurait aussi bien pu lui valoir de faire l'ouverture du sommet de Copenhague ou d'introduire la remise du prix nobel de la paix à Barack Obama mais avant d'expliciter ce point de vue, présentons d'abord l'intrigue dont l'originalité est incontestable.

    C'est par la voix off du protagoniste Jake Sully (Sam Worthington) que nous pénétrons dans cet univers. Année 2154.  Jake Sully est d'abord un ancien marine cloué dans un fauteuil roulant. Après la mort de son frère jumeau, Jake est recruté pour le remplacer et se rendre sur la planète Pandora où des groupes industriels exploitent un minerai pour résoudre la crise énergétique sur terre. A des années lumières de la terre, l'atmosphère de Pandora est toxique pour les humains, c'est la raison pour laquelle a été créé le programme Avatar qui permet à des pilotes humains de lier leur esprit à un avatar, un corps biologique commandé à distance, épousant les caractéristiques physiques de ses habitants (les Na'vis, créatures bleutées longilignes qui se meuvent avec beaucoup d'agilité et de grâce)  et capables de survivre dans cette atmosphère.  Ces avatars sont donc des hybrides créés génétiquement en croisant l'ADN humain avec celui des Na'vi. Sous la forme de son avatar, Jake retrouve donc l'usage de ses jambes. Sa mission consiste à infiltrer la population des Na'vi devenus des obstacles à l'exploitation du minerai. Sous la forme de son avatar, Jake va alors faire la connaissance d'une très belle Na'vi qui va lui sauver la vie...

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    Le principal atout d' « Avatar » c'est pour moi sa puissance métaphorique. Contre toute attente, cette explosion visuelle et budgétaire qui aurait pu n'être qu'un éblouissement sans fond vaut au contraire presque davantage pour son sens que pour sa forme. La forme n'est ainsi peut-être pas aussi spectaculaire que ce à quoi on aurait pu s'attendre (ce qui ne veut pas dire qu'elle ne l'est pas, elle l'est même prodigieusement à certains passages, nous donnant l'impression de nous envoler et survoler Pandora) en revanche le fond est d'une très intéressante polysémie. Sans doute d'abord un des plus beaux, originaux, vibrants  plaidoyers pour la défense de la planète. La planète Pandora ressemble ainsi à  une sorte d'Amazonie luxuriante où le végétal et l'animal règnent en maîtres, sorte de jardin d'Eden aussi fascinant que menaçant où des arbres gigantesques surplombent les autochtones. Un monde à la fois lointain et exotique et paradoxalement proche de nous. Un monde surtout très convoité pour ses ressources. Un monde en péril. Un monde qui, à l'image des synapses reliant nos neurones, est constitué  d'organismes vivants reliés les uns aux autres fonctionnant comme un système harmonieux et interdépendant.  Son centre, son cœur, son âme est un saule sublime et gigantesque appelé « Arbre des Âmes ».  L'arbre évidemment symbole de la respiration de notre propre planète dont il est le souffle et l'âme. Un arbre menacé comme l'est l'Amazonie. Comme l'est la planète Pandora (qui, telle une boîte de Pandore, libère ses maux quand on l'attaque, la nature se rebellant alors contre l'homme). Comme l'est notre planète. Le bleu et le vert, couleurs principales de Pandora contrastent ainsi avec cette atmosphère grisonnante qu'apportent les terriens et qui règne dans leur camp de base. L'harmonie  relie les Na'vi entre eux et à leur planète, à la nature  et a contrario les Terriens vivent dans l'affrontement.  

    Le sens est multiple puisque l'armée qui ravage Pandora pour en exploiter la terre fait aussi évidemment penser à l'intervention américaine en Irak, certaines scènes de combat et certaines armes rappelant aussi celles d'une autre guerre et notamment le napalm (on se croirait même par moment dans « Apocalypse now », la redoutable force de Wagner, en accompagnement, en moins). Cela pourrait aussi être la métaphore d'un monde dominé par le virtuel, ce dernier, paradoxalement coloré et exotique, prenant le pas sur un réel grisonnant, et le supplantant. Mais c'est aussi un hymne au rêve qui transcende les difficultés et handicaps, un hymne au pouvoir de l'imagination, cette imagination qui fait que, mêmes les deux jambes immobilisés, on peut faire un voyage des plus trépidants, voler et s'envoler vers une ailleurs fascinant, cette imagination qui peut donner corps, âme, vie à un peuple et une planète imaginaires.

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    Si paradoxalement le fond m'a plus intéressée que la forme, cela ne signifie évidemment pas pour autant que la seconde est inintéressante. Je ne sais pas si la 3D apporte forcément quelque chose, l'univers visuel étant suffisamment fort pour que nous nous y sentions immergés et la technique (la « performance capture » qui , grâce à un dispositif spécial, une sorte de casque de football américain sur lequel est posé une petite caméra et orientée vers les visages des comédiens enregistre ainsi avec une précision extrême les expressions et mouvements de leurs muscles faciaux donnant ainsi une bluffante impression de réalité aux Na'vi en images de synthèse et aux personnages sous leurs formes d'avatars) suffisant à les rendre vivants, et à ce que nous nous attachions à eux, à ce que leur combat devienne le nôtre (il est d'ailleurs le nôtre).  J'ai été moins sensible aux scènes de combat, certes explosives qu'aux scènes montrant ce peuple « communiant » (très beau plan où ils sont reliés les uns aux autres comme les racines d'un arbre, symbole de ce souffle de vie que l'arbre nous apporte et qui nous lie également) et en harmonie et possédant une force et une amplitude lyriques, épiques, et émotionnelles irrésistibles.

     Finalement, Avatar aurait pu être le plus spectaculaire des films d'auteurs si n'avait fait quelques concessions aux codes et à la morale hollywoodiens, si son scénario n'avait parfois été jalonné d'ellipses incrongrues, de raccourcis faciles et surtout si manichéen : le méchant colonel ( vraiment trop caricatural) qui extermine une population sans le moindre état d'âme, le rival jaloux qui cède sa place trop facilement, ou encore Neytiri qui succombe un peu trop vite au charme de Jake, de même que ce dernier est trop rapidement conquis par la planète Pandora et ses habitants. Par exemple, sans doute la facilité de compréhension a-t-elle rendu nécessaire que les Na'vi parlent plus souvent Anglais que leur propre langage dont rien que l'invention a dû pourtant nécessiter beaucoup de travail, mais je crois que Cameron avait donné suffisamment de force à ce monde pour que nous continuions ensuite à suivre et à nous intéresser à ses habitants même s'ils avaient continué à parler cette langue imaginaire qui au contraire contribuait davantage encore à les singulariser .

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     Plus de nuance dans l'écriture, de gradation, d'évolution, dans les sentiments des personnages, aurait donné encore plus d'âme à cet univers déjà si riche.  Avec « Titanic », James Cameron nous avait pourtant prouvé être capable de faire évoluer ses personnages, de faire évoluer subtilement les sentiments, à rendre poignants ses personnages et son histoire (qui sont ici certes attachants). Peut-être l'ampleur du projet l'a-t-il obligé à faire quelques concessions ou tout simplement à aller (trop) directement à l'essentiel. La structure est d'ailleurs assez similaire, les allers retours entre le présent et le passé de « Titanic » se rapprochant ici des allers retours entre le personnage « réel » et son avatar, avec une voix off du personnage principal comme élément liant entre les deux ( un personnage dont nous nous doutons donc qu'il survivra sous une forme ou une autre).

    Au final, « Avatar » n'est pas le film parfait, ni le film de la décennie tant attendu mais il reste une belle et forte expérience cinématographique, par moments visuellement vertigineuse,  une plongée palpitante dans un fascinant univers avec des personnages attachants (malgré et grâce au virtuel, à la technique), un vibrant et émouvant plaidoyer  pour que la planète conserve son âme et son souffle, un puissant message que la simplicité des rapports entre les personnages porte malgré tout (et peut-être d'ailleurs porté grâce à cela), et surtout  un voyage spectaculaire dans l'imaginaire qui en exalte la magnifique force, créatrice et salvatrice. Et c'est sans doute ce dernier élément qui m'a avant tout conquise...

    Et qui sait, à l'image de ce dernier plan, peut-être Pandora, en nous emmenant dans sa sublime (et menacée) nature nous ouvrira-t-elle les yeux sur la nôtre et ses périls ? Peut-être, en nous emmenant dans une autre réalité, nous ouvrira-t-elle les yeux sur la nôtre...et nous fera-t-elle prendre conscience du fait que, si la planète porte en elle ses propres ressources, sa propre sauvegarde, il nous appartient de veiller à sa si fragile harmonie...et de garder les yeux ouverts. Plus que jamais.

  • Avant-première- Critique de « Le Père de mes enfants » de Mia Hansen-Love

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    Peut-être vous en souvenez-vous : en 2005 quelques jours avant le triomphe aux César de « Quand la mer monte » de Yolande Moreau et Gilles Porte qu'il avait produit, le producteur de films indépendants (notamment de Youssef Chahine, Elia Suleiman, Sandrine Veysset...) Humbert Balsan se suicidait. Mia Hansen-Love l'avait rencontré, un an auparavant, ce dernier voulait en effet produire son premier film « Tout est pardonné ».  De sa rencontre avec cet homme passionné est né son désir de réaliser ce film... même s'il ne s'agit nullement (je vous rassure...) d'un biopic.

    Le producteur dont Mia Hansen-Love nous parle ici s'appelle Grégoire Canvel (Louis-Do Lencquesaing), il dirige avec passion sa société de production « Moon films ». Il  a, a priori,  tout pour lui. Une femme qu'il aime (Chiara Caselli), trois filles délicieuses, un métier qui le passionne, producteur de films donc. Pas le producteur caricatural avec cigares, limousines, cynique et désabusé mais un producteur de films indépendants pour qui le cinéma est la vie, sa vie, qui s'investit (et investit) pleinement dans chaque projet. Révéler les cinéastes, accompagner les films qui correspondent à son idée du cinéma, libre et proche de la vie, voilà sa raison de vivre, sa vocation. C'est un homme hyperactif qui ne s'arrête jamais à l'exception des week end, à la campagne, et en famille, et encore... les téléphones portables vissés aux oreilles. Mais à force de produire trop de films et de prendre trop de risques Grégoire va mettre en péril sa société... et surtout son propre équilibre.

    Rarement un film aura réussi à nous faire éprouver une telle empathie pour une famille et les personnages qui la composent et cela dès les premières minutes, la première séquence nous embarquant d'emblée dans l'enthousiasme, l'énergie du bouillonnant Grégoire. C'est néanmoins d'abord dû à l'humanité, la délicatesse avec laquelle Mia Hansen-Love les filme, nous plongeant dans leur intimité tout en leur laissant leur voile de mystère, mais surtout à la personnalité de son personnage principal, à sa façon de le filmer, et à l'acteur qui l'incarne.

    Grégoire vibre constamment pour le cinéma, il s'emballe, croit en des cinéastes que personne ne connaît, les défend contre vents et marées, contre la raison parfois, souvent. Il défend un cinéma qui prend le temps du sens, comme lui n'économise pas son temps pour le défendre. Charmant, charmeur, rayonnant, charismatique, de lui émane une impressionnante et séduisante prestance.  Il s'engage pleinement, inconditionnellement, il n'y a plus de distance entre le cinéma et la vie. Le cinéma est sa vie, même s'il a aussi une femme et trois filles aimantes. Plus que de nous montrer un homme outrancièrement déprimé, complètement anéanti, Mia Hansen-Love montre ses fêlures à peine perceptibles et comment son horizon  s'obscurcit subrepticement  au point qu'il en oublie, l'espace d'un fatal instant, celles qui l'entourent. Son geste restera mystérieux, il n'en est que plus bouleversant. Là encore Mia Hansen-Love a la délicatesse de la filmer de dos. Je suppose autant par pudeur que pour signifier le secret dont lui et sa mort resteront auréolés.

    Que dire de Louis-Do de Lencquesaing tant sa prestation est époustouflante ! Pas parce qu'il ferait de l'esbroufe. Non, parce qu'il donne un visage humain à ce producteur. Dans sa gestuelle bouillonnante, ses regards profondément empathiques qui parfois laissent entrevoir un voile d'ombre. Il EST ce producteur au point qu'on a vraiment l'impression de le voir exister. Il parvient à le rendre vivant, attachant, à la fois proche et mystérieux.

     Rien n'est jamais appuyé, tout est fait avec énormément de subtilité. Une simple boucle d'oreilles suffit à nous faire comprendre d'abord la distraction d'un père, obsédé par le cinéma, son amour aussi puis plus tard l'amour de sa fille qui prendra la relève.

    Même si la deuxième partie du film évoque un sujet sombre (la manière de vivre le deuil), le film est constamment éclairé d'une clarté rassurante, d'une belle luminosité, pas seulement formelle. Cette luminosité provient aussi de  la gaieté des enfants qui finit par prendre le dessus et qu'elle parvient à rendre si attachantes sans en faire des singes mièvres ou savants. C'est aussi la luminosité qui émanait de la personnalité de Grégoire qui semble subsister même après son décès mais aussi de son épouse (Chiara Caselli).

    D'ailleurs Mia Hansen-Love fait savamment jongler les contraires, son film étant lui-même coupé en deux parties, avant et après la mort, les deux étant finalement indissociables, la présence de l'absent se faisant toujours sentir (même mort il restera ainsi le père de ses enfants, bien évidemment), tout comme sont indissociables lumière et noirceur. Un film lumineux sur le secret et le deuil. Un homme solaire qui finira par se suicider, à la fois robuste et vulnérable, fort et fragile. Un film d'une belle clarté malgré le deuil et qui chemine ensuite vers une belle quête de lumière (comme en témoigne cette très belle scène avec les bougies qui ouvrent la voie). Son désir de vie, de construire, de créer et celui de mort qui s'affrontent. Sa mort étant ainsi la fin de quelque chose mais aussi le début d'une autre, de l'émancipation pour sa fille (forte présence d'Alice de Lencquesaing).

    C'est bien sûr un film sur le cinéma, sur l'engagement, l'investissement pécuniaire (Mia Hanse-Love n'élude pas la question et montre à quel point il peut être aliénant) et surtout personnel qu'il représente, le caractère indissociable entre vie professionnelle et privée quand la matière principale d'un métier comme celui-là est humaine, et donc si complexe et fragile.

    Mais, par-dessus-tout, ce film possède ce grand quelque chose si rare et indéfinissable qui s'appelle la grâce. Sans doute en raison de la profonde sensibilité de la réalisatrice et de celui qui a inspiré son film mais aussi par l'universalité des situations et le caractère si attachant des personnages malgré (et à cause de ) leurs mystères.

    Un film qui a l'ambivalence et les nuances de la vie : à la fois lumineux et mélancolique, tragique et plein d'espoir, mystérieux et séduisant. Un film qui m'a bouleversée comme je ne l'avais pas été depuis longtemps au cinéma. La musique de la fin qui vous rappellera un classique du cinéma m'ayant complètement achevée.

    Ce film a la malchance de sortir le même jour que le rouleau compresseur « Avatar ». Que le second ne vous empêche pas d'aller voir le premier. Je vous le recommande sans aucune réserve.  « Le Père de mes enfants » a reçu la mention spéciale Un certain regard à Cannes.

  • Interview de Bong Joon-ho ( réalisateur de « The Host », « Memories of murder », « Mother »)

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    Première (enrichissante) expérience d'intervieweuse "en live" avec le charmant et très loquace Bong Joon-Ho (réalisateur de « The Host », « Memories of Murder »...) hier soir, dans le cadre tamisé et chaleureux d'un hôtel du 6ème arrondissement. 

    Le film « Mother » dont il nous a essentiellement parlé sort en salles le 27 janvier 2010. Je vous le recommande vivement et vous pouvez lire ma critique en cliquant ici. « Mother » a été présenté dans la section « Un Certain Regard » du Festival de Cannes 2009 et vient d'être élu meilleur film au 30ème trophée « The Blue Dragon Awards » à Séoul (équivalent de nos César) . En 4 films, Bong Joon-Ho, au même titre par exemple que Park Chan-wook, a réussi à s'imposer comme une référence incontournable de cette nouvelle vague coréenne particulièrement inventive. Il connaîtra ainsi son premier succès (auprès du public comme de la critique et au-delà des frontières coréennes) avec "Memories of murder". "The Host" sera présenté à la Quizaine des Réalisateurs et récoltera une estime internationale. En 2008, il participe au triptyque "Tokyo" avec Leos Carax et Michel Gondry. Il adapte actuellement la bd "La Transperceneige" avec Park Chan-wook comme producteur.

    Merci à Diaphana ainsi qu'à Florian et à Jérôme de Cinefriends d'avoir instigué cette passionnante et instructive rencontre. En attendant la vidéo, voici un résumé de ses réponses. 

     Ma première question concernait la critique de la société coréenne, un aspect commun à ses différents films, celui-ci stigmatisant ainsi ici l'inefficacité de la police et la corruption de la justice, déjà brocardées de manière plus ou moins métaphorique dans ses précédents films. Je lui ai ainsi demandé dans quelle mesure réaliser était pour lui un acte politique.

    Selon lui en tant qu'être humain il est évidemment, par essence, amené à avoir une conscience politique mais il ne le fait pas forcément exprès. Pour Bong Joon-Ho, dans ce film en particulier, les policiers sont plus « mignons » qu'incompétents et s'ils commettent des fautes irréparables, ils le font comme tout être humain peut en commettre.

    Il a ajouté aimer "montrer des gens ordinaires dans des situations exceptionnelles".

    Pour lui « The Host » est une vitrine de la satire et dans « Mother », il voulait ainsi prendre le contrepied avec un film « plus intimiste ». Il voulait ainsi « mettre les individus dans une situation extrême pour montrer l'instinct de l'être humain » et voulait ainsi faire l'autoportrait de la société coréenne à travers eux.

    Je lui ai ensuite parlé de Kim Hye-Ja qui interprète brillamment le rôle de la mère, sidérante dans l'intensité de son jeu et sa diversité d'expressions. Je lui ai demandé si elle  avait été à la base du projet, si elle avait dicté son choix du sujet principal ou s'il avait dès le départ envie de traiter de cet amour fusionnel et obsessionnel et dans ce cas pour quelle raison il avait choisi ce sujet.

    Bong Joon-Ho a répondu qu'elle avait été à l'origine du film. En Corée c'est une sorte d'icône mais il voyait en elle presque une « sorte de folie dans son jeu », une « sorte de psychopathe » alors qu'elle incarne toujours les mères vertueuses et généreuses. Avec beaucoup d'humour il a répondu qu'elle était aussi folle dans la vie que dans le film.

    Je lui ai ensuite demandé s'il souhaitait renouveler l'expérience de « Tokyo » et tourner ainsi à l'étranger, pourquoi pas en France.

    Pourquoi pas a-t-il répondu à condition de pouvoir garder le contrôle à 100%, et d'avoir le final cut comme c'est le cas pour lui en Corée.  L'expérience à Tokyo a ainsi été pour lui « très satisfaisante ». Quant au cinéma français, sa rencontre avec Laurent Cantet la veille de cette interview avec lequel il a évoqué vaguement un projet lui a apparemment donné quelques idées. 

    Bong  Joon-ho est ensuite revenu sur le personnage de la mère, sur lequel il voulait « vraiment se concentrer », la « regarder en gros plan. » Il faisait entièrement confiance à son interprète. Dans certains plans, très larges, elle ressemble ainsi à un grain de sable afin de montrer le caractère « acharné » de sa lutte.

    Concernant le caractère très soigné de sa réalisation, Bong Joon-Ho a précisé avoir écrit le scénario et le storyboard et avoir toujours une idée précise des plans quand il va sur le tournage  tout en se demandant ensuite comment se détacher du story-board une fois sur le tournage. Tout ce qui est technique respecte ainsi le story-board.

    Je lui ai enfin demandé de parler du  thème de la culpabilité autour duquel son film s'articule notamment. Ainsi « Memories of murder » traitait déjà du thème d'un serial killer qui ne fut jamais arrêté, dans « Mother », Do-joon sera finalement aussi relâché, et sa mère jamais jugé pour le meurtre qu'elle a commis, ma question consistait donc à savoir s'il avait une tendresse particulière pour les coupables innocentés ou s'il s'agissait pour lui avant tout d'un moyen de traiter du thème de la culpabilité.

     Bong Joon-Ho a répondu que pour lui le sentiment de culpabilité était très important, ainsi que la notion de châtiment, se demandant ainsi si on est toujours condamné pour un crime qu'on a commis, trop d'innocents étaient jugés coupables. La mère se retrouve ainsi confrontée à un dilemme moral face à un innocent accusé.

    J'aurais eu encore beaucoup de questions à lui poser... une demi-heure étant forcément trop courte pour aborder tous les aspects  d'un film aussi hybride, d'une réjouissante complexité, à la fois teinté d'humour noir, de poésie, mais créant aussi un véritable suspense pour aboutir à un film indéfinissable mêlant les genres (policier, mélodrame, comédie...)  avec énormément d'habileté.

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  • Inthemoodforcinema.com vous offre 50 places pour "Arthur et la vengeance de Maltazard" de Luc Besson!

    C'est déjà noël sur Inthemoodforcinema.com puisque j'ai la chance de pouvoir vous offrir 50 places pour "Arthur et la vengeance de Maltazard", un film pour petits et grands, cadeau idéal en cette période de fêtes. Dépêchez-vous, les premiers à s'inscrire seront les premiers servis! Les places vous seront envoyées directement à votre domicile. Cliquez ci-dessous pour obtenir vos places. Bonne chance et bon film! Vous trouverez la bande annonce en bas de cette note.

     

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  • Robert Guédiguian, invité d'honneur du 13ème Festival International des Scénaristes

    arméeducrime2.jpgAprès Pascale Ferran en 2009, Robert Guédiguian sera l'invité d'honneur du 13e Festival International des Scénaristes qui se déroulera à Bourges du 24 au 28 mars 2010, après avoir présidé le jury de ce même festival.

    Cliquez ici pour lire ma critique de "L'armée du crime" le dernier film de Robert Guédiguian

  • Valérie Lemercier et Gad Elmaleh présenteront la cérémonie des César 2010

    césar23.jpgComme chaque année, Inthemoodforcinema.com essaiera de vous apporter une information aussi exhaustive que possible concernant les César.

    Après vous avoir communiqué la liste des Espoirs 2010 potentiels en avant-première, ici, je vous informe aujourd'hui que la cérémonie des César 2010 sera présentée par Valérie Lemercier et Gad Elmaleh, un duo de choc pour présenter en tandem la 35ème cérémonie des César.

    L'un et l'autre ont déjà présenté les César en 2004 et 2005 pour Gad Elmaleh et, en 2006 et 2007 pour Valérie Lemercier.

    En attendant la cérémonie le 27 février, vous pourrez connaître la liste définitive des nominations le 22 janvier.

    Cliquez ici pour accéder à tous mes articles concernant les éditions précédentes des César (de 2005 à 2009)

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  • Critique de "Casino Royale" de Martin Campbell avec Daniel Craig, Eva Green, Simon Abkarian ...

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    Hier soir France 2 diffusait « Casino royale » de Martin Campbell. L'ayant déjà vu deux fois,  cette troisième immersion dans l'univers de James Bond pour la première fois incarné par Daniel Craig, n'en a pas été moins palpitante. Et que n'a-t-on pourtant pas entendu lors de ce choix et lorsqu'il a été annoncé qu'il succèderait à Pierce Brosnan, un choix (après plus de 200 comédiens auditionnés !), il est vrai, plutôt osé tant son physique et son jeu contrastent voire tranchent avec ceux de ses prédécesseurs : Pierce Brosnan, Sean Connery, Roger Moore, Timothy Dalton, George Lazenby. Sixième à incarner James Bond depuis 1962, Daniel Craig est le premier à sortir du personnage du svelte dandy au sourire ravageur et carnassier, aussi collectionneur des gadgets dernier cri que des James Bond girls.

    James Bond (Daniel Craig donc) qui vient d'obtenir le double zéro, c'est-à-dire le permis de tuer, doit ici affronter le puissant banquier privé du terrorisme international, surnommé Le Chiffre (Mads Mikkelsen). Pour le ruiner et démanteler son immense réseau criminel, James Bond doit le battre lors d'une partie de poker au Casino Royale.  C'est la très mystérieuse et sublime Vesper (Eva Green), attachée au Trésor britannique qui l'accompagne afin de veiller à ce qu'il prenne soin de l'argent britannique avec lequel il va jouer. Mais rien ne va se passer comme prévu, James Bond va en effet devoir faire face à une situation qui va le rendre inhabituellement vulnérable...

    Ce 21ème James Bond est l'adaptation du premier opus écrit par Ian Fleming en 1953 et son adaptation signe aussi le vrai retour à l'univers de Fleming. Rien à voir donc ici avec la version parodique de 1967 également intitulée « Casino Royale ».

    Dès les premiers plans nous sommes plongés dans un univers brutal, au rythme effréné, aux scènes aussi spectaculaires que trépidantes avec dès le départ une course poursuite avec paroxysme sur grue vertigineuse puis une seconde dans un aéroport. Changement de décor avec l'arrivée au Casino Royale du Montenegro après une jouissive joute verbale entre Bond et Vesper.

    Ce film est une réjouissance et une surprise continuelles d'abord avant tout dues au scénario de Robert Wade et Neal Purvis magistralement réécrit par Paul Haggis (notamment scénariste de « Million Dollar baby » et « Mémoires de nos pères », réalisateur de « Collision » et « Dans la vallée d'Elah ») alternant intelligemment les scènes d'action pure, de suspense (aussi bien dans les scènes d'action que celles de poker, véritable combat intellectuel), de romance mais aussi les décors aussi exotiques les uns que les autres des Bahamas à Venise.

    C'est un Bond, à la fois amoureux et donc vulnérable mais aussi plus violent, viril et glacial, plus sombre et plus musclé qui use de son « permis de tuer ». Daniel Craig lui apporte une dureté, une intensité, une classe inédites et à côté de lui les précédents acteurs l'ayant incarné font bien pâle figure.    Certains seront sans doute décontenancés par ce James Bond qui a perdu certaines caractéristiques qui contribuaient à sa spécificité : il n'utilise (temporairement) plus ou si peu de gadgets, a perdu une partie son flegme et son humour britanniques (même si les dialogues et le détachement dont il sait toujours faire preuve dans les situations les plus dramatiques ou face à M sont particulièrement savoureux), et se rapproche davantage de Jason Bourne que du héros de Ian Fleming dans ses précédentes adaptations même si la situation le fera évoluer vers davantage de raffinement. Il a aussi su s'adapter à l'époque complexe dans laquelle il vit, l'ennemi n'étant plus le bloc soviétique, fin de la guerre froide oblige, mais les financiers du terrorisme international. On assiste ainsi à une véritable surenchère : dans les scènes d'action (leur nombre et leur aspect spectaculaire), dans leur violence (Bond est soumis à la torture), dans le nombre de plans, mais aussi dans le nombre de lieux, James Bond nous embarquant ainsi aux Bahamas, en République Tchèque, à Venise, à Madagascar, en Ouganda, au Montenegro. C'est aussi d'ailleurs pour cela qu'on se rue dans les salles à chaque nouveau volet : pour ce  voyage auquel il nous invite, il nous emmène ailleurs dans tous les sens du terme et de ce point de vue aussi ce James Bond est particulièrement réussi.

    Mais le principal atout qui sans doute ralliera ceux qui juste-là étaient allergiques à son univers, c'est le duo qu'il forme avec Vesper, un duel sensuel qui apporte beaucoup de piquant à l'intrigue, et plus d'humanité au personnage de Bond, aussi brutal soit-il.  Mystérieuse, impertinente, voire arrogante mais aussi vulnérable, Vesper lui ressemble trop pour qu'il lui reste insensible. Certaines scènes rappellent ainsi certains drames romantiques parmi les meilleurs ( la musique rappelle celle d' « Out of Africa » et les dernières scènes à Venise font penser à « Titanic » ) et contrebalancent ainsi cette nouvelle brutalité.  Et cette alliance du romanesque avec l'univers sombre et brutal de ce James Bond  donne un résultat aussi étonnant que détonant, à la fois moderne et complexe à l'image de Bond et Vesper, un film au rythme haletant qui sait aussi prendre le temps des dialogues et de l'émotion.

    Eva Green est aussi pour beaucoup dans cette réussite, incarnant à la perfection et avec beaucoup de classe ce premier amour de Bond à l'esprit vif, à la vulnérabilité touchante et à l'arrogance mystérieuse. Face à eux Le Chiffre incarne « le méchant » qui ne cherche plus à dominer le monde.

    La réalisation de Martin Campbell( qui avait déjà réalisé Golden Eye) est d'une efficacité redoutable et la musique du chanteur américain Chriss Cornell (ancien leader du groupe « Soundgarden ») qui interprète « You know my name », la chanson-phare de Casino Royale achève d'en faire une réussite totale.

    Ajoutez à cela un brillant retournement final, et vous obtiendrez un film sombre, spectaculaire, réjouissant, haletant dont vous avez l'impression que le terme jubilatoire a été inventé pour le qualifier.  2H20 dont je vous garantis que vous ne les verrez pas passer et après lesquelles vous n'aurez qu'une envie : refaire le voyage ou voir la suite des aventures de ce Bond écorché vif, trahi, et avide de vengeance.

    James Bond confirmera ensuite son entrée dans cette nouvelle ère avec  « Quantum of Solace » que je vous recommande également même s'il n'a pas atteint la perfection du genre que représente « Casino Royale ».

    A noter: la présence remarquée et remarquable de Simon Abkarian que vous pouvez actuellement retrouver dans la série "Pigalle la nuit" sur Canal plus.

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