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  • Critique - "Pour elle" de Fred Cavayé, ce soir, sur TF1

    Pour ceux qui auraient manqué "Pour elle" lors de sa sortie en salles, sachez qu'il sera diffusé ce soir, sur TF1, à 20H45. Plutôt que le désolant deuxième film du même Fred Cavayé "A bout portant", je vous recommande donc l'excellent "Pour elle" dont vous pourrez trouver ma critique, ci-dessous.

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    Lisa (Diane Krüger) et Julien (Vincent Lindon) forment un couple heureux et amoureux, avec leur fils Oscar. Un matin, brusquement, leur vie bascule dans l’absurdité et l’horreur lorsque la police débarque chez eux pour arrêter Lisa, accusée de meurtre puis condamnée à vingt ans de prison. Julien, professeur et fils mal aimé de son état, va alors être prêt à tout pour  la faire évader.

     Jusqu’où iriez-vous par amour ? Jusqu’où sera-t-il prêt à aller pour elle ? Loin. Très loin. Au-delà des frontières. De la raison. De la légalité. Du Bien et du Mal. Plutôt que de s’appesantir sur leur vie d’avant, Frec Cavayé (d’après une idée originale du scénariste Guillaume Lemans) choisit de nous montrer deux scènes assez courtes qui suffisent pour camper un couple amoureux comme au premier jour et une Lisa, lumineuse, deux scènes qui suffisent à expliquer le tourbillon infernal dans lequel va ensuite tomber Julien.

    Si on se demande un temps pourquoi Julien ne met pas toute cette énergie à essayer de trouver la véritable coupable (Lisa serait emprisonnée à tort) plutôt qu’à la faire évader, la force du montage et la force de l’interprétation parviennent à nous le faire oublier. Voir Lisa enfermée, se laissée dépérir, s’assombrir est pour Julien insupportable. Sa rage, son sentiment d’injustice et surtout son amour pour Lisa vont transformer le tranquille professeur en criminel, vont conduire à le faire basculer dans un univers a priori très éloigné du sien, dans une violence incontrôlable.

     La caméra au plus près des visages, nous enferme avec Julien dans sa folie (on ne voit d’ailleurs presque rien de sa vie étrangère à son plan d’évasion, il n’est montré qu’une seule fois dans sa salle de classe, cette –ir-réalité n’existe plus pour lui) ou avec Lisa dans sa prison, nous faisant occulter les invraisemblances du scénario et des moyens pour nous concentrer sur la force et la vraisemblance des motivations. Et pour que nous y croyions il fallait un acteur de la dimension de Vincent Lindon.  Vincent Lindon et qui d’autre ? Je ne vois pas. Je ne vois pas tellement le mélange de force et de fragilité, de détermination et de folie qu’il dégage pour ce rôle, qui occupe, consume, magnétise l’écran et notre attention, tellement le personnage qu’il incarne, à qui il donne corps (sa démarche, son dos parfois voûté ou au contraire droit menaçant, ses regards évasifs ou fous mais suffisamment nuancés dans l’un et l’autre cas ) et vie semblent ne pouvoir appartenir à aucun autre. Je ne vois pas qui d’autre aurait pu rendre crédible ce personnage et continuer à nous le rendre sympathique, du moins excusable, malgré tout.

    L’intrigue va à l’essentiel : la détermination furieuse, parfois aveugle, de Julien (à l’image de la surdité de la justice vis-à-vis de Lisa). Le scénario est épuré comme les murs d’une prison. Ce qui ne veut pas dire que le style est dénué d’émotion. Au contraire. Il la suscite sans la forcer. En nous montrant cet homme seul, fragilisé, aux forces décuplées. En nous montrant cet homme lui aussi dans une prison, celle de la caméra, celle de sa folie amoureuse (pléonasme ou antithèse : à vous de voir), celle de son incommunicabilité de sa douleur (avec son père, Olivier Perrier, parfait dans la retenue et la froideur). La relation paternelle est aussi au centre de l’histoire. Ce sont aussi deux pères qui vont très loin par amour. A leur manière.

    La musique, irréprochable ( de Klaus Badelt, qui a notamment travaillé avec Terrence Malick et Micheal Mann) ajoute ce qu’il faut quand il faut pour accroître la tension, déjà palpable.

    Au final, un thriller sentimental que la force de l’interprétation, magistrale, de son acteur principal (« Pour elle » vaut donc le déplacement, ne serait-ce que pour lui à qui le film doit de captiver, capturer notre attention et empathie), la vigueur, le rythme et l’intelligence du montage rendent haletant, nous faisant oublier les invraisemblances du scénario, croire et excuser toutes les folies auxquelles son amour (le, les) conduit.  Un premier long particulièrement prometteur…

     
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  • Gérard Depardieu, prix Lumière du Festival de Lyon 2011 - Critique de "La Femme d'à côté" de François Truffaut

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    Photo ci-dessus, copyright: site officiel du Festival Lumière de Lyon 2011

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    Après Clint Eastwood pour sa première édition puis Milos Forman pour la deuxième, c'est à Gérard Depardieu qu'a été décerné cette année le prix Lumière du Festival de Lyon, hier soir, en présence de Fanny Ardant.  A cette occasion, pour clore la rétrospective des plus grands films de Gérard Depardieu, a été projeté "La Femme d'à côté" de François Truffaut, acccessoirement un de mes films préférés dont vous pourrez retrouver ma critique ci-dessous, avant que je vous livre mon compte rendu de ces trois belles journées dans ce festival qui met si bien la cinéphilie à l'honneur.

    Critique de "La Femme d'à côté" de François Truffaut : l'amour à mort

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     François Truffaut, avec Alain Resnais, Claude Sautet,  Woody Allen, Alfred Hitchcock fait partie de ces cinéastes dont j’aime tous les films sans exceptions. J’ai d’abord découvert « Le Dernier Métro », « La Femme d’à côté », « L’Histoire d’Adèle.H »,  « La Mariée était en noir » avant la série des Antoine Doinel, puis « La Peau douce »  et je me souviens encore à quel point « La Femme d’à côté » m’avait marquée la première fois. Je l’ai revu bien souvent depuis et notamment avant-hier, à l’occasion de sa rediffusion sur Arte. Cette critique est la première d’une série que je consacrerai au cinéaste.

    Bernard Coudray (Gérard Depardieu) et Mathilde Bauchard (Fanny Ardant) se sont connus et aimés follement, passionnément, douloureusement, et séparés violemment, sept ans plus tôt. L’ironie tragique du destin va les remettre en présence lorsque le mari de Mathilde, Philippe Bauchard (Henri Garcin), qu’elle a récemment épousé, lui fait la surprise d’acheter une maison dans un hameau isolé, non loin de Grenoble, dans la maison voisine de celle qu’occupent Bernard, son épouse Arlette (Michèle Baumgartner), et leur jeune fils. (Une fenêtre sur cour que l’admirateur et grand connaisseur d’Hitchcock qu’était Truffaut n’a d’ailleurs certainement pas choisie innocemment.) Bernard et Mathilde taisent leur  passé commun à leurs époux respectifs et vont bientôt renouer avec leur ancienne passion.

    A mon sens,  personne d’autre que Truffaut n’a su aussi bien transcrire les ravages de la passion, sa cruauté sublime et sa beauté douloureuse, cette « joie » et cette « souffrance » entremêlées. Si : dans un autre domaine, Balzac peut-être, dont Truffaut s’est d’ailleurs inspiré, notamment pour « Baisers volés » (« Le Lys dans la vallée ») ou « La Peau douce » (Pierre Lachenay y donne ainsi une conférence sur Balzac). L’amour chez Truffaut est en effet presque toujours destructeur et fatal.

    La femme d’à côté est cette étrange étrangère au prénom d’héroïne de Stendhal, magnifiquement incarnée par la classe, l’élégance, le mystère, la voix ensorcelante et inimitable de Fanny Ardant, ici impétueuse et fragile, incandescente, ardente Fanny.

    Truffaut dira ainsi : "J'ai volontairement gardé les conjoints à l'arrière-plan, choisissant d'avantager un personnage de confidente qui lance l'histoire et lui donne sa conclusion : "Ni avec toi, ni sans toi ".  De quoi s'agit-il dans la "La Femme d'à côté" ? D'amour et, bien entendu, d'amour contrarié sans quoi il n'y aurait pas d'histoire. L'obstacle, ici, entre les deux amants, ce n'est pas le poids de la société, ce n'est pas la présence d'autrui, ce n'est pas non plus la disparité des deux tempéraments mais bien au contraire leurs ressemblances. Ils sont encore tous deux dans l'exaltation du "tout ou rien" qui les a déjà séparés huit ans plus tôt. Lorsque le hasard du voisinage les remet en présence, dans un premier temps Mathilde se montre raisonnable, tandis que Bernard ne parvient pas à l'être. Puis la situation, comme le cylindre de verre d'un sablier, se renverse et c'est le drame."

    Le rapport entre les deux  va en effet se renverser à deux reprises. Bernard va peu à peu se laisser emporter par la passion, à en perdre ses repères sociaux, professionnels et familiaux, à en perdre même la raison, toute notion de convenance sociale alors bien dérisoire. Le tourbillon vertigineux de la passion, leurs caractères exaltés, leurs sentiments dans lesquels amour et haine s’entremêlent, se confondent et s’entrechoquent vont rendre le dénouement fatal inévitable.  Chaque geste, chaque regard, chaque parole qu’ils échangent sont ainsi empreints de douceur et de douleur, de joie et de souffrance, de sensualité et de violence.

    Truffaut y démontre une nouvelle fois une grande maîtrise scénaristique et de mise en scène. Après « Le Dernier Métro » , la fresque sur l’Occupation avec ses nombreux personnages, il a choisi ce film plus intimiste au centre duquel se situe un couple, sans pour autant négliger les personnages secondaires, au premier rang desquels Madame Jouve (Véronique Silver), la narratrice, sorte de double de Mathilde, dont le corps comme celui de Mathilde porte les stigmates d’une passion destructrice. Elle donne un ton apparemment neutre au récit, en retrait, narrant comme un fait divers cette histoire qui se déroule dans une ville comme il y en a tant, entre deux personnes aux existences en apparence banales, loin de la grandiloquence d’Adèle.H, mais qui n’ en a alors que plus d’impact, de même que ces plans séquences dans lesquels le tragique se révèle d’autant plus dans leur caractère apparemment anodin et aérien. A l’image des deux personnages, la sagesse de la mise en scène dissimule la folie fiévreuse de la passion, et ce qui aurait pu être un vaudeville se révèle une chronique sensible d’une passion fatale. D’ailleurs, ici les portes ne claquent pas: elles résonnent dans la nuit comme un appel à l’aide, à l’amour et à la mort.

     Deux personnages inoubliables, troublants et attachants, interprétés par deux acteurs magnifiques. Truffaut aurait songé à eux pour incarner cette histoire, en les voyant côte-à-côte lors du dîner après les César lors desquels  « Le Dernier Métro » avait été largement récompensé.

    Il fallait un talent démesuré pour raconter avec autant de simplicité cette histoire d’amour fou, de passion dévastatrice, qui nous emporte dans sa fièvre, son vertige étourdissant et bouleversant, comme elle emporte toute notion d'ordre social et la raison de ses protagonistes. Un film qui a la simplicité bouleversante d’une chanson d’amour, de ces chansons qui « plus elles sont bêtes plus, elles disent la vérité ».

    Ce film sorti le 30 septembre 1981 est l’avant-dernier de Truffaut, juste avant « Vivement Dimanche » dans lequel Fanny Ardant aura également le rôle féminin principal.

    Un chef d’œuvre d’un maître du septième art : à voir et à revoir.

     Pour retrouver d’autres critiques de classiques du septième art sur « In the mood for cinema », rendez-vous dans la rubrique « Gros plan sur des classiques du septième art ».

     

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  • Palmarès du Festival du Film Britannique de Dinard 2011 : "Tyrannosaur" doublement primé

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    Même si, exceptionnellement, je n'étais pas au Festival du Film Britannique de Dinard, Festival Lumière de Lyon oblige (douce obligation, néanmoins, je vous raconte cela demain), je vous en livre cependant le palmarès.

    « Tyrannosaur »,  premier film réalisé par l'acteur anglais Paddy Considine (« Submarine », « La Mémoire dans la peau »…),  vient de remporter le"Hitchcock d'Or" du 22ème Festival du Film britannique de Dinard mais aussi le prix du scénario délivrés par le jury présidé par Nathalie Baye avec Petula Clark, Emmanuelle Devos, Jacqueline Bisset, Sami, Jaime Winstone, Hayley Atwell et Stephen Clarke côté britannique.

    Ce film avait déjà reçu le prix du meilleur réalisateur et ceux de la meilleure interprétation pour ses deux acteurs principaux, à Sundance.

    C’est "L'Irlandais"  de J.M. McDonagh qui a obtenu le Prix du public et le prix de la Photo. "L'Irlandais" doit sortir sur les écrans français le 21 décembre.

    PALMARES COMPLET:

    Le Hitchcock d’or est décerné à Tyrannosaur de Paddy Considine

    Le Prix Kodak de la meilleure photographie est attribué à L’Irlandais de J. M. McDonagh

    Le Prix Allianz du meilleur scénario est attribué à Tyrannosaur de Paddy Considine

    Le Prix Première du public est attribué à L’Irlandais de J. M. McDonagh

    Le Prix du court-métrage NFTS/Fémis est attribué à White Elephant de Kristof Bilsen

    Le Prix Coup de Coeur de la « Règle du Jeu » est attribué à L’Irlandais de J. M. McDonagh

    Mention spéciale pour Week End de Andrew Haigh

    Un Hitchcock d’honneur a également été décerné à John Hurt.

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  • La cinéphilie et internet au coeur du Festival Lumière de Lyon

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    Je vous parle chaque année depuis sa création de ce festival qui met la passion cinématographique et la cinéphilie à l'honneur et je vous ai parlé à plusieurs reprises de l'édition 2011, notamment ce matin à propos de la projection de "The Artist" en ouverture, à ne manquer sous aucun prétexte!

    J'ai cette année le plaisir d'être invitée au festival qui a eu la bonne idée d'organiser des rencontres et master class autour des nouvelles formes de cinéphilie...

    Je vous donne donc rendez-vous vendredi soir sur ce blog pour le compte rendu ou sur place pour le prmeier débat entre blogueurs ou le second avec "les professionnels de la profession" (Bertrand Tavernier, Waintrop, Aurélien Ferenczi, Thomas Sotinel) et les blogueurs!

    A très vite à Lyon donc ou à vendredi soir sur ce blog!

    Retrouvez la programmation détaillée du festival, ici: http://www.inthemoodforcinema.com/archive/2011/09/23/programme-complet-du-festival-lumiere-de-lyon-2011.html ou sur le site officiel du festival http://www.festival-lumiere.org/lumiere-2011.html .

    Et en attendant mon retour, retrouvez ma critique du film de la semaine "Drive" qui sort en salles ce 5 octobre et au sujet duquel je suis beaucoup plus réservée que l'ensemble de la critique, dithyrambique...

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  • "The Artist" de Michel Hazanavicius, film d'ouverture du Festival Lumière de Lyon 2011, ce soir

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    Après Cannes (où il était présenté en compétition et où Jean Dujardin a reçu un prix d'interprétation amplement mérité), après Deauville où il était projeté en avant-première lors de la soirée du palmarès, ce sont les festivaliers lyonnais qui vont avoir le plaisir de découvrir le film de Michel Hazanavicius, en avant-première, ce soir, Halle Tony Garnier, à 20H, en ouverture du Festival Lumière 2011. Je serai au festival à partir de demain, je vous en reparle cet après-midi. En attendant, ne manquez pas la projection de ce soir (en présence de Jean Dujardin, Bérénice Béjo et Michel Hazanavicius) et retrouvez ma critique du film, ci-dessous.

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    Photo ci-dessus : crédits inthemoodforcinema.com . Conférence de presse des lauréats du Festival de Cannes 2011.

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    Photo ci-dessus : crédits inthemoodforcinema.com . Conférence de presse des lauréats du Festival de Cannes 2011.

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    Photo ci-dessus : crédits inthemoodforcinema.com . Conférence de presse du Festival de Cannes 2011 du film "The Artist".

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    Photo ci-dessus : crédits inthemoodforcinema.com . Conférence de presse du Festival de Cannes 2011 du film "The Artist".

    C’était un dimanche matin de mai 2011, le début du Festival de Cannes encore, en projection presse. Pas encore vraiment l’effervescence pour le film qui obtint la palme d’or mais un joli bruissement d’impatience parmi les regards déjà las, ou obstinément sceptiques. 1H40 plus tard, la salle résonnait d’applaudissements, pendant dix minutes, fait rare en projection presse. Le soir même, je suis retournée le voir en projection officielle. L’émotion fut la même, redoublée par la présence de l’équipe du film, terriblement émue elle aussi par les réactions enthousiastes du public, par les rires tendres, par cette cavalcade d’applaudissements qui a commencé lors de la dernière scène et ne s’est plus arrêtée pour continuer pendant un temps qui m’a paru délicieusement long. Un beau, rare et grand moment du Festival de Cannes.

    Le pari était pourtant loin d’être gagné d’avance. Un film muet (ou quasiment puisqu’il y a quelques bruitages). En noir et blanc. Tourné à Hollywood. En 35 jours. Par un réalisateur qui jusque là avait excellé dans son genre, celui de la brillante reconstitution parodique, mais très éloigné de l’univers dans lequel ce film nous plonge. Il fallait beaucoup d’audace, de détermination, de patience, de passion, de confiance, et un peu de chance sans doute aussi, sans oublier le courage -et l’intuition- d’un producteur (Thomas Langmann) pour arriver à bout d’un tel projet. Le pari était déjà gagné quand le Festival de Cannes l’a sélectionné d’abord hors compétition pour le faire passer ensuite en compétition, là encore fait exceptionnel.

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    Le film débute à Hollywood, en 1927, date fatidique pour le cinéma puisque c’est celle de l’arrivée du parlant. George Valentin (Jean Dujardin) est une vedette du cinéma muet qui connait un succès retentissant…mais l’arrivée des films parlants va le faire passer de la lumière à l’ombre et le plonger dans l’oubli. Pendant ce temps, une jeune figurante, Peppy Miller (Bérénice Béjo) qu’il aura au départ involontairement  placée dans la lumière, va voir sa carrière débuter de manière éblouissante. Le film raconte l’histoire de leurs destins croisés.

    Qui aime sincèrement le cinéma ne peut pas ne pas aimer ce film qui y est un hommage permanent et éclatant. Hommage à ceux qui ont jalonné et construit son histoire, d’abord, évidemment. De Murnau à Welles, en passant par Borzage, Hazanavicius cite brillamment ceux qui l’ont ostensiblement inspiré. Hommage au burlesque aussi, avec son mélange de tendresse et de gravité, et évidemment, même s’il s’en défend, à Chaplin qui, lui aussi,  lui surtout, dans « Les feux de la rampe », avait réalisé un hymne à l'art qui porte ou détruit, élève ou ravage, lorsque le public, si versatile, devient amnésique, lorsque le talent se tarit, lorsqu’il faut passer de la lumière éblouissante à l’ombre dévastatrice. Le personnage de Jean Dujardin est aussi un hommage au cinéma d’hier : un mélange de Douglas Fairbanks, Clark Gable, Rudolph Valentino, et du personnage de Charles Foster Kane (magnifiques citations de « Citizen Kane ») et Bérénice Béjo, avec le personnage de Peppy Miller est, quant à elle, un mélange de Louise Brooks, Marlène Dietrich, Joan Crawford…et nombreuses autres inoubliables stars du muet.

    Le cinéma a souvent parlé de lui-même… ce qui a d’ailleurs souvent produit des chefs d’œuvre. Il y a évidemment « La comtesse aux pieds nus » de Mankiewicz, « La Nuit américaine de Truffaut », « Sunset Boulevard » de Billy Wilder, enfin « Une étoile est née » de George Cukor et encore « Chantons sous la pluie » de Stanley Donen et Gene Kelly auxquels « The Artist », de par son sujet, fait évidemment penser. Désormais, parmi ces classiques, il faudra citer « The Artist » de Michel Hazanavicius. Ses précèdents films étaient d'ailleurs déjà des hommages au cinéma. On se souvient ainsi des références à "Sueurs froides" ou "La Mort aux trousses" d'Hitchcock dans "OSS 117 : Rio ne répond plus".

    Hazanavicius joue ainsi constamment et doublement la mise en abyme : un film muet en noir et blanc qui nous parle du cinéma muet en noir et blanc mais aussi qui est un écho à une autre révolution que connaît actuellement le cinéma, celle du Numérique.

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    Le mot jubilatoire semble avoir été inventé pour ce film, constamment réjouissant, vous faisant passer du rire aux larmes, ou parfois vous faisant rire et pleurer en même temps. Le scénario et la réalisation y sont pour beaucoup mais aussi la photographie (formidable travail du chef opérateur Guillaume Schiffman qui, par des nuances de gris, traduit les états d’âme de Georges Valentin), la musique envoûtante (signée Ludovic Bource, qui porte l’émotion à son paroxysme, avec quelques emprunts assumés là aussi, notamment à Bernard Herrmann) et évidemment les acteurs au premier rang desquels Jean Dujardin qui méritait amplement son prix d’interprétation (même si Sean Penn l’aurait également mérité pour « This must be the place »).

    Flamboyant puis sombre et poignant, parfois les trois en même temps, il fait passer dans son regard (et par conséquent dans celui du spectateur), une foule d’émotions, de la fierté aux regrets,  de l’orgueil à la tendresse, de la gaieté à la cruelle amertume de la déchéance.  Il faut sans doute beaucoup de sensibilité, de recul, de lucidité et évidemment de travail et de talent pour parvenir à autant de nuances dans un même personnage (sans compter qu’il incarne aussi George Valentin à l’écran, un George Valentin volubile, excessif, démontrant le pathétique et non moins émouvant enthousiasme d’un monde qui se meurt). Il avait déjà prouvé dans « Un balcon sur la mer » de Nicole Garcia qu’il pouvait nous faire pleurer.  Il confirme ici l’impressionnant éclectisme de sa palette de jeu et d'expressions de son visage.

     Une des plus belles et significatives scènes est sans doute celle où il croise Peppy Miller dans un escalier, le jour  du Krach de 1929. Elle monte, lui descend. A l’image de leurs carrières. Lui masque son désarroi. Elle, sa conscience de celui-ci, sans pour autant dissimuler son enthousiasme lié à sa propre réussite. Dujardin y est d’une fierté, d’une mélancolie, et d’une gaieté feinte bouleversantes, comme à bien d’autres moments du film. Et je ne prends guère de risques en lui prédisant un Oscar pour son interprétation, ou en tout cas un Oscar du meilleur film étranger pour Hazanavicius.  Bérénice Béjo ne démérite pas non plus dans ce nouveau rôle de « meilleur espoir féminin » à la personnalité étincelante et généreuse, malgré un bref sursaut de vanité de son personnage. Il ne faudrait pas non plus oublier les comédiens anglo-saxons : John Goodman, Malcolm McDowell et John Cromwell (formidablement touchant dans le rôle du fidèle Clifton).

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    Il y aura bien quelques cyniques pour dire que ce mélodrame  est plein de bons sentiments, mais Hazanicius assume justement ce mélodrame. « The Artist » est en effet aussi une très belle histoire d’amour simple et émouvante, entre Peppy et Georges mais aussi entre Georges et son cabot-in Uggy : leur duo donne lieu à des scènes tantôt drôles, tantôt poétiques, tantôt touchantes, et là encore parfois au trois en même temps. Hommage aussi à ce pouvoir magique du cinéma que de susciter des émotions si diverses et parfois contradictoires.

    Michel Hazanavicius  évite tous les écueils et signe là un hommage au cinéma, à sa magie étincelante, à son histoire, mais aussi et avant tout aux artistes, à leur orgueil doublé de solitude, parfois destructrice. Des artistes qu’il sublime, mais dont il montre aussi les troublantes fêlures et la noble fragilité.

    Ce film m’a éblouie, amusée, émue. Parce qu’il convoque de nombreux souvenirs de cinéma. Parce qu’il est une déclaration d’amour follement belle au cinéma. Parce qu’il ressemble à tant de films du passé et à aucun autre film contemporain. Parce qu’il m’a fait ressentir cette même émotion que ces films des années 20 et 30 auxquels il rend un vibrant hommage. Parce que la réalisation est étonnamment inspirée (dans les deux sens du terme d’ailleurs puisque, en conférence de presse, Michel Hazanavicius a revendiqué son inspiration et même avoir « volé » certains cinéastes). Parce qu’il est burlesque, inventif, malin, poétique, et touchant.  Parce qu’il montre les artistes dans leurs belles et poignantes contradictions et fêlures.

    Il ne se rapproche d’aucun autre film primé jusqu’à présent à Cannes…et en sélectionnant cet hymne au cinéma en compétition puis en le  primant,  le Festival de  Cannes a prouvé qu’il était avant tout le festival qui aime le cinéma, tous les cinémas, loin de la caricature d’une compétition de films d’auteurs représentant toujours le même petit cercle d’habitués dans laquelle on tend parfois à l’enfermer.

     « The Artist » fait partie de ces films qui ont fait de cette édition cannoise 2011 une des meilleures de celles auxquelles j’ai assisté, pour ne pas dire la meilleure…avec des films  aussi différents et marquants que  « This must be the place » de Paolo Sorrentino, « Melancholia » de Lars von Trier, « La piel que habito » de Pedro Almodovar.

     Un film à ne manquer sous aucun prétexte si, comme moi, vous aimez passionnément et même à la folie, le cinéma. Rarement un film aura aussi bien su en concentrer la beauté simple et magique, poignante et foudroyante. Oui, foudroyante comme la découverte  de ce plaisir immense et intense que connaissent les amoureux du cinéma lorsqu’ils voient un film pour la première fois, et découvrent son pouvoir d’une magie ineffable, omniprésente ici.

    Sortie en salles : le 12 octobre 2011. Un dernier petit conseil : ne regardez pas la bande-annonce (dont je n’ai pas peur de dire qu’elle m’a émue, comme le film), pour conserver le plaisir de la découverte.

    En bonus :

    - Ma critique de « La Comtesse aux pieds nus » de Mankiewicz

    -Ma critique de « OSS 117 : Rio ne répond plus » de Michel Hazanavicius

    -Ma critique d’ « Un balcon sur la mer » de Nicole Garcia

    -Ma critique des « Feux de la rampe » de Charlie Chaplin

     

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  • Critique de "Munich" de Steven Spielberg, ce soir à 20H35 sur France 2

    France 2 diffusera ce soir "Munich" de Steven Spielberg, un film à ne pas manquer.

    Cliquez ici pour retrouver ma critique  de "Munich" publiée en 2006.

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  • Festival du Film Britannique de Dinard 2011 : le programme complet, jury et informations pratiques

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    -Depuis ma participation au jury du Festival du Film Britannique de Dinard (en 1999!), j'y retourne et vous en parle chaque année avec plaisir.  Cette année, étant intervenante au Festival Lumière de Lyon, je ne pourrai probablement y venir qu'une journée ou deux. En attendant, je vous invite à découvrir une programmation qui, plus que jamais, ferait pâlir d'envie les plus grands festivals (catégorie à laquelle Dinard peut d'ailleurs s'enorgueillir d'appartenir désormais).

     Comme toujours, dans cette programmation 2011, de belles découvertes en perspective, le meilleur du cinéma britannique mais aussi les incontournables du festival comme la leçon d'image, l'atelier de scénario etc.

    -Découvrez ci-dessous en détails les avant-premières, la compétition (toujours de grande qualité), l'hommage à John Hurt (en sa présence!), l'hommage à Harold Pinter etc . Et retrouvez la grille de programmation complète en cliquant ici.

    -Retrouvez également ci-dessous les liens vers mes articles sur d'autres éditions du festival. Retrouvez également mon texte publié dans "Flashback", le livre des 20 ans du festival en cliquant ici.

     

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    LE JURY 2011:

     

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    Le grand intérêt de ce festival est sa compétition officielle, toujours de qualité. Découvrez le programme 2011, ci-dessous.

     

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    Les organisateurs ont pour ambition de faire découvrir au public de Dinard une cinématographie britannique particulière. Ainsi, après l'Irlande en 2010, le Festival s'ouvre à l'Ecosse en 2011 avant le Pays de Galles en 2012.

    AVANT-PREMIERES « So Scottish ! »

    You Instead (2011) de David Mackenzie

    Avec Luke Treadaway, Natalia Tena, Matthew Baynton

    The Edge of Dreaming (2011) documentaire de Amy Hardie

    Jig (2011) documentaire de Sue Bourne

    Perfect Sense (2011) de David Mackenzie

    Avec Ewan McGregor, Eva Green

    + 10 courts métrages écossais en partenariat avec The Edinburgh College of Art

    HOMMAGE A JOHN HURT en sa présence

    1984 (1984) de Michael Radford

    Avec John Hurt, Richard Burton, Rozanna Hamilton

    Elephant Man (1980) de David Lynch

    Avec John Hurt, Anthony Hopkins, Anne Bancroft

    The Field (1990) de Jim Sheridan

    Avec John Hurt, Richard Harris, Sean Bean

    The Hit (1984) de Stephen Frears

    Avec John Hurt, Terence Stamp, Tim Roth

    Amour et Mort à Long Island (1997) de Richard Kwietniowski

    Avec John Hurt, Jason Priestley, Fiona Loewi

    Shooting Dogs (2005) de Michael Caton-Jones

    Avec John Hurt, Hugh Dancy

    44-Inch Chest (2009) de Malcolm Venville

    Avec Ray Winstone, Ian McShane, John Hurt, Tom Wilkinson

    Lou (2011) de Belinda Chayko

    Avec John Hurt, Emily Barclay, Lily Bell- Tindley

    The Plague Dogs (1982) Film d’animation de Martin Rosen

    Avec les voix de John Hurt, Christopher Benjamin et James Bolam

    HOMMAGE A HAROLD PINTER (1930-2008)

    En présence de Lady Antonia Fraser

    L’Auteur de Vous partez déjà? Ma vie avec Harold Pinter (Editions Baker Street) échangera avec Philippe Pilard.

    Le Gardien (1963) de Clive Donner

    Avec Donald Pleasance, Alan Bates, Robert Shaw...

    The Servant (1963) de Joseph Losey

    Avec Dirk Bogarde, Sarah Miller, Wendy Craig...

    Le Mangeur de citrouilles (1964) de Jack Clayton

    Avec Anne Bancroft, Peter Finch, James Maron...

    Accident (1967) de Joseph Losey

    Avec Dirk Bogarde, Stanley Baker, Jacqueline Sassard...

    Le Messager (1970) de Joseph Losey

    Avec Julie Christie, Edward Fox, Alan Bates ...

    Le Dernier nabab (1976) de Elia Kazan

    Avec Robert de Niro, Tony Curtis, Robert Mitchum ...

    La Maîtresse du lieutenant français (1981) de Karel Reisz

    Avec Meryl Streep, Jeremy Irons, Hilton Mac Roe

    Le Limier (2007) de Kenneth Brannagh

    Avec Michael Caine, Jude Law, Harold Pinter

    LA LECON D’IMAGE

    «A quoi sert la musique de film? Quels sont les pouvoirs du son sur l’image? » Débat et rencontre en présence d’invités.

    SEANCE "J'écoute le cinéma"

    Le public, installé dans des transats, sur la digue de l’Ecluse face à la mer, pourra écouter « Les grandes partitions classiques britanniques »

    L'ATELIER DE SCENARIO FRANCO-BRITANNIQUE

    8 jeunes scénaristes français et britanniques participeront à l’atelier organisé par l’association Regards Croisés. Ils présenteront leur projet devant un panel de producteurs français et britanniques.

    COMPETITION NFTS / FEMIS

    Deux écoles de cinéma prestigieuses viendront s'affronter au Festival par courts métrages interposés. La NFTS (National Film and Television School) et la FEMIS (Ecole Nationale des Métiers de l'Image et du Son) présenteront chacune trois courts métrages et concourront pour le Prix du meilleur court-métrage

    Le célèbre agent devenu producteur Dominique Besnehard donnera également une Master class, le 8 octobre à 10H30.

     Site officiel du Festival du Film Britannique de Dinard : http://www.festivaldufilm-dinard.fr/

    Sachez enfin que la place de cinéma ne coûte que 5,50 euros...une raison de plus pour ne pas vous priver de ce festival convivial proposant chaque année une sélection de qualité.

     

    Agenda

     

    Festival Dinardais : du 2 au 4 octobre

     

    En partenariat avec VOCABLE :

     

    Festival des scolaires : du 3 au 7 octobre

     

    Festival du Film Britannique : du 5 au 9 octobre

     

    Accueil pendant le Festival

     

    Palais des Arts et du Festival

     

    2, boulevard Wilson

     

    35800 Dinard

     

    T. : + 33 (0) 2 99 88 19 04

     

    Lieux des projections

     

    Cinéma les 2 Alizés

     

    2, bd Albert 1er (2 salles)

     

    Palais des Arts et du festival

     

    2, bd Wilson (1 salle)

     

    Salle Stephan Bouttet

     

    Rue Sadi Carnot (1 salle)

     

    Salle Alfred Hitchcock

     

    Structure amovible, parking Raphaël Veil (1 salle)

     

    Hébergement

     

    Office de Tourisme

     

    2, boulevard Féart

     

    35800 Dinard

     

    T. : + 33 (0) 2 99 46 94 12

     

    Accès

     

    Par la route : Paris - Rennes - Dinard

     

    Par le train : Paris - Dinard par St-Malo

     

    Par avion : Aéroport de Dinard - Pleurtuit ou Rennes

     

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