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  • 45ème Festival du Cinéma Américain de Deauville : affiche et nouvelle identité visuelle

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    AJOUT DU 27 AOÛT : MON ARTICLE SUR LE PROGRAMME DU FESTIVAL EST EN LIGNE, ICI :

    http://www.inthemoodforcinema.com/archive/2019/08/25/45eme-festival-du-cinema-americain-de-deauville-programme-co-6171859.html

    Avant de vous parler de ce mémorable 72ème Festival de Cannes, une petite incursion par Deauville pour vous parler de la nouvelle identité visuelle du Festival du Cinéma Américain.

    Pour son 45ème anniversaire, le Festival du cinéma américain de Deauville dévoile sa nouvelle identité visuelle, et son affiche, et "affirme le cinéma comme l’art de l’avenir". Une création graphique signée Slumberland.

    Comme chaque année, depuis une vingtaine d'années, vous pourrez me suivre en direct du festival, mon festival de prédilection, celui qui a changé le cours de mon existence. Comme chaque année, je vous ferai également gagner vos pass et invitations pour le festival en partenariat avec le CID.

    En attendant de vous dévoiler les premiers éléments de programmation, retrouvez mon compte rendu de l'édition 2018, ici, - et des précédentes éditions sur mon blog Inthemoodfordeauville.com entièrement consacré à Deauville.

    À très bientôt pour de nouvelles informations sur cette 45ème Édition que je me réjouis de vivre et couvrir du 6 au 15 septembre 2019.

    Et si ce n'est déjà fait, retrouvez aussi le Festival du Cinéma Américain de Deauville dans mon recueil de 16 nouvelles sur le cinéma "Les illusions parallèles" et dans mon roman "L'amor dans l'âme" (Éditions du 38).

  • Festival de Cannes 2019 – La palme d’or à PARASITE de Bong Joon-Ho (critique)

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    Le jury de ce Festival de Cannes 2019 a ce soir décerné la palme d’or (à l’unanimité !) au film « Parasite » de Bong Joon-Ho.

    Synopsis : Toute la famille de Ki-taek est au chômage, et s’intéresse fortement au train de vie de la richissime famille Park. Un jour, leur fils réussit à se faire recommander pour donner des cours particuliers d’anglais chez les Park. C’est le début d’un engrenage incontrôlable, dont personne ne sortira véritablement indemne...

    Il y a dix ans, avec son quatrième long-métrage, « Mother » Bong Joon-ho déjà nous envoûtait, nous intriguait, nous charmait, nous provoquait, nous inquiétait.  Déjà, la comédie déviait vers le thriller, progressivement, Bong Joon-ho instillant intelligemment de l'étrangeté menaçante dans des scènes quotidiennes alors à la tonalité décalée, par l'effet d'un savant sens du montage, de l'ellipse, du gros plan, du cadrage et par des plans d'une beauté redoutable. Bong Joon- ho entrelaçait tragédie du souvenir et bonheur de l'oubli, violence et amour inconditionnel, humour noir et folie, culpabilité suffocante et soleil. Film hybride, palpitant, étonnant, poignant qui n'épargnait ni les travers de la société coréenne ni les ombres et forfaits d'un inconditionnel amour maternel pour mieux encore en exalter la force renversante. Si je vous parle de « Mother » aujourd’hui c’est parce que dans son 7ème film, « Parasite » on retrouve cette habileté déconcertante du cinéaste à mêler les genres et à nous décontenancer.

    Cela commence dans un appartement spartiate, insalubre, situé en sous-sol. Seule une petite fenêtre en contrebas de la rue éclaire la pièce comme une lucarne sur le monde extérieur. Là où vit la famille de Ki-taek. Des chaussettes pendent. Le wifi ne fonctionne pas. Le père balaie brutalement un insecte de la main. A l’extérieur, des agents désinfectent la zone. Tout est dit. Ils vivent comme des cloportes. Des parasites. Nous voilà prévenus. A l’opposé, les Park vivent dans une immense maison à la décoration aseptisée, avec des tableaux bien rangés et d’immenses baies vitrées qui ouvrent sur un jardin parfaitement entretenu.

    « Un examen, c’est se frayer un chemin dans la jungle. », « Il faut que tu te fraies un chemin à travers l’examen et que tu le maitrises. Une seule chose compte, ta détermination. La détermination. », « Je respecte les gens qui ne dévient pas de la route », « Elle ressemble à un agneau mais à l’intérieur c’est un loup » .« Je n’aime pas les gens qui franchissent la ligne ». « Ils sentent pareil ». « Il fuirait et se cacherait comme un cafard ».

    Les dialogues nous annoncent d’emblée la couleur de sorte que le virage horrifique ne nous surprend pas vraiment lorsque la famille Ki-taek est parvenue à s’infiltrer dans la famille Park par un judicieux enchainement de mensonges et stratagèmes dignes d’un palpitant thriller.

    Et puis il y a cette ouverture obscure et intrigante dans la salle à manger qui semble mener vers un univers interlope et mystérieux et dont on se doute surtout qu’elle ne mène pas au paradis même si Bong Joon-Ho, là encore, nous surprend ingénieusement par ce revirement à mi-parcours. Je vous laisse le découvrir lequel.

    « L’argent est un bon fer à repasser. Il efface tous les plis » peut-on notamment attendre. Comme « Mother », « Parasite » est aussi une critique acerbe de la société coréenne, mais aussi une critique plus universelle de l’uberisation et la précarisation du travail.

    Chronique sociale, thriller, film d’horreur, comédie, film déroutant, drôle, violent, cruel, burlesque, film noir, « Parasite » est tout cela à la fois et plus encore. La virtuosité de la mise en scène est indéniable et épouse la folie de cette fable satirique sur les inégalités sociales. Comme si Hitchcock, Clouzot, Chabrol, Ozon s’étaient réunis pour écrire un film coréen. Bref, un film inclassable si ce n’est dans la « case » de la palme d’or que le jury vient de lui décerner.

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  • Palmarès et remise de prix de la Cinéfondation 2019

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    C’est un évènement auquel j’assiste chaque année et qui, chaque année, permet de découvrir de grands cinéastes en devenir (nombreux sont ceux à être passés par la Cinéfondation et à recevoir aujourd’hui des prix éminents dans les plus grands festivals du monde). Quatre films figiraient au palmarès cette année et pour ma part quatre coups de cœur a fortiori le premier Prix "Mano a Mano" de Louise Courvoisier -dont nous avons pu admirer le talent des comédiens acrobates lors de la remise de prix- , qui porte les prémisses de ce qui pourrait être un passionnant long-métrage que nous avons hâte de découvrir. Elle filme les visages et les corps avec une rare acuité. Bravo aussi à Richard Van (2ème prix), Wisam Al Jafari (3ème prix ex-æquo) et Barbara Rupik (3ème Prix ex-æquo). Je vous reparlerai de ces films.

    La Cinéfondation dont c’était déjà la 22ème édition (créée en 1998 à l’initiative de Gilles Jacob) était présidée cette année par la réalisatrice Claire Denis.

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  • Festival de Cannes 2019 – Séance spéciale - « Ice on fire » de Leila Conners Petersen

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    Synopsis : Le film, Ice on Fire, avec Leonardo DiCaprio, pose la question suivante : allons-nous laisser le changement climatique détruire la civilisation ou allons-nous utiliser des technologies capables de l’inverser ? Ice on Fire propose des solutions inédites quant aux nombreuses façons de réduire le carbone, préservant ainsi la civilisation. Avec une cinématographie époustouflante, nous explorons le profond espoir de pouvoir nous détourner du bord du précipice. Le film présente une science arctique de méthane dans la glace. « Est-ce que le jeu est terminé ? Ou allons-nous l’emporter ? Nous avons la créativité, l'ingéniosité et la vision nécessaires pour inverser le changement climatique. » 11 ans après The 11th Hour, nous savons maintenant comment résoudre le problème du changement climatique.

    C’était l’évènement hier au Festival de Cannes, la projection en Séance spéciale de « Ice on fire », présenté par la réalisatrice et par son producteur et narrateur Leonardo Di Caprio.

    « Le changement climatique peut être inversé si nous agissons maintenant », affirme DiCaprio dans ce film produit par HBO et destiné à la télévision dans lequel Conners et DiCaprio sont en quête des solutions (qui, en plus, existent déjà !) pour réduire les émissions de gaz à effets de serre et enfin réellement inverser la tendance du réchauffement climatique parce que oui…non seulement réduire la tendance est possible mais l’inverser l’est aussi ! C’est le point optimiste de ce documentaire dont certaines images et réalités n’en demeurent pas moins effroyables comme celle de l’évaporation dans l’atmosphère du méthane contenu dans le permafrost (sols gelés en permanence), augmentant la pollution de l’air et la destruction de la couche d’ozone.

    Croatie, Islance, Alaska, Ecosse, nous voyageons dans le monde entier pour découvrir l’ampleur terrifiante des dégâts et des solutions qui, pourtant, bel et bien existent et dont on ne peut s’empêcher d’enrager à l’idée qu’elles tardent tant à être mises en œuvre d’autant qu’elles seraient aussi un atout économique selon le documentaire. Ces solutions seraient ainsi notamment des champs entiers de panneaux solaires, ou encore les cultures de varech, des machines qui filtreraient le dioxyde de carbone présent dans l’air.

    Pour des sujets aussi graves et urgents pour lesquels l’horloge tourne irrémédiablement, chaque voix compte mais il y en a qui, évidemment, portent plus que d’autres. C’est ce que nous pouvons espérer avec de documentaire pédagogique, édifiant, passionnant, et malgré tout porteur d’espoirs, qui dresse le tableau tragiquement réaliste mais aussi la liste de solutions inédites pour réduire les émissions de carbone : que cette voix porte jusqu’aux dirigeants inconscients pour qui la planète est devenue un jouet que l’on peut malmener à sa guise et sans se soucier des conséquences.

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  • Critique de MATTHIAS ET MAXIME de Xavier Dolan (compétition officielle - Festival de Cannes 2019)

    cinéma, Xavier dolan, Matthias et Maxime, Festival de Cannes 2019, 72ème Festival de Cannes, Gabriel D’Almeida Freitas

    L’émotion était au rendez-vous ce 22 Mai 2019 à Cannes dans le Grand Théâtre Lumière, pendant le film, et a fortiori lorsque la lumière s’est rallumée.  Comme le veut la nouvelle tradition à la fin de chaque projection officielle, un micro a été tendu au réalisateur pour qu’il prononce quelques mots. En larmes, Xavier Dolan, s’est ainsi exprimé : « Je ne pense pas que je pourrai parler longuement car je suis très ému. Cela fait tout de même 10 ans que je débarquais à Cannes avec « J’ai tué ma mère » et depuis cela a été tellement enrichissant, tellement de rencontres, tellement de moments comme ceux-ci…et merci, c’est tout… ». En larmes, je l’étais aussi après ce film pétri de tendresse, d’émotions, de vérité, d’audace. Et de talent.

    Présenté en compétition du 72ème Festival de Cannes, ce huitième film de Xavier Dolan est aussi son sixième présenté à Cannes. Ce huitième film de Xavier Dolan est reparti de Cannes sans prix. Il aurait pourtant pu prétendre à plusieurs d’entre eux, à commencer par celui du scénario. Cannes et Xavier Dolan, c’est déjà une longue histoire jalonnée de récompenses. En 2009, il réalise et produit à seulement vingt ans son premier long-métrage, « J’ai tué ma mère » présenté à la Quinzaine des Réalisateurs où il suscite un incroyable engouement en repartant avec 3 prix.  Suivront « Les amours imaginaires » et « Laurence anyways » en compétition à Un Certain Regard en 2010 et 2012. En 2013, « Tom à la ferme » ne sera pas à Cannes mais il reçoit le Prix Fipresci à la Mostra de Venise. « Mommy » a reçu le Prix du Jury du Festival de Cannes en 2014 et le César du meilleur film étranger. « Juste la fin du monde » en compétition en 2016 a reçu le Grand Prix.

    Très prolifique, Xavier Dolan, quelques mois avant le Festival de Cannes sortait le magnifique « Ma vie avec John F. Donovan ». Un film intime et universel. Passionné et passionnant. Épique et personnel. Moderne et intemporel. Sensible et fougueux. Mélancolique et enivrant. Un film dans lequel la sincérité affleure, comme dans tous les films de Xavier Dolan d’ailleurs, et nous touche en plein cœur. Un long métrage qui nous dit que les rêves et les mensonges peuvent sauver (tuer parfois, aussi). Quel plus bel hommage encore au cinéma que cette nouvelle mise en abyme ? La forme épouse le fond et ceux qui n'y ont vu qu'esbroufe sous-estiment Dolan, les mensonges du personnage de Donovan s'illustrant ainsi magistralement dans cette flamboyance hypnotique. La correspondance est comme un miroir, un révélateur entre ces enfances. Ce sont donc des êtres qui se répondent et réfléchissent, les affres de l'un condamnées à l'ombre éclairant finalement la vie de l'autre. Ce film, comme les précédents de Dolan, brasse de multiples thèmes chers à l'auteur et recèle de nombreuses scènes d'anthologie poignantes et/ou électrisantes, une fois de plus : sous la pluie, dans une salle de bain ou lorsque la ville semble comme survolée par un super héros et vue par le prisme d'un enfant rêveur. Avec, comme toujours dans les films de Dolan, une BO remarquable au service de l'émotion.

    Changement d’univers avec « Matthias et Maxime ». Deux amis d’enfance, Matthias (Gabriel d’Almeida Freitas) et Maxime (Xavier Dolan) s’embrassent pour les besoins d’un court métrage amateur. Matthias a une brillante carrière d’avocat devant lui, des airs de gendre idéal. Maxime a une vie plus chaotique. Ils viennent de milieux différents et une profonde amitié les lie. Suite à ce baiser d’apparence anodine, un doute récurrent s’installe, confrontant les deux garçons à leurs préférences, bouleversant l'équilibre de leur cercle social et, bientôt, leurs existences. 

    Le film commence ainsi par une longue scène de soirée entre amis, bouillonnante, débordante de vie, soirée de joyeuse confusion lors de laquelle les plaisanteries fusent. Immédiatement notre attention est captée par le naturel de la scène. Subrepticement s’y glissent des regards fuyants, une sensation de non-dit, le sentiment impalpable qu’une dissonance va venir briser l’harmonie, que les silences qui ponctuent cette cacophonie sont peut-être annonciateurs d’un orage. Erika, la sœur d’un de leurs amis, Rivette, jeune fille survoltée veut réaliser un petit film pour son école. Il faut trouver deux remplaçants aux deux amis qui se sont désistés et qui devaient interpréter les rôles. Les remplaçants, ce seront donc Matthias et Maxime. La scène du baiser ne nous est alors pas montrée mais alors que Matthias, en couple avec Sarah, semble ne pas y avoir accordé d’importance, pour Maxime, plus rien ne semble pareil. A quelques jours de son départ pour deux ans pour l’Australie, la confusion est désormais celle des sentiments.

    Le plan du début, d’un panneau publicitaire, montrant une famille soi-disant parfaite;, annonçait d’emblée que ce schéma ne serait pas si facile à briser, que cela ne serait pas sans heurts et sans blessures.

    Un schéma qui, comme le cadre, ce cadre, semble  enfermer Matthias et Maxime. Malgré les plaisanteries qu’ils partagent, Matthias et Maxime semblent  soudain étrangers à eux-mêmes, seuls, ailleurs, dans une bulle chacun de leur côté puisque Dolan ensuite nous les fait suivre, les séparant, les montrant si fébriles chacun de leur côté. Ils sont distraits par ce désir irrépressible et inattendu dont Dolan filme magnifiquement les moindres vacillements. Matthias qui aime reprendre les fautes sémantiques des autres semble soudain sans voix, ne plus trouver les mots pour exprimer cette confusion des sentiments qu’il fuit.

    "J'ai toujours préféré la folie des passions à la sagesse de l'indifférence" disait Xavier Dolan citant Anatole France dans son discours, lyrique et émouvant, en recevant son Grand Prix pour "Juste la fin du monde". Avec "Matthias et Maxime", il prouve une nouvelle fois qu'il est le cinéaste des élans du cœur, qu'ils soient passionnés, amicaux, filiaux, à la fois fidèle à son univers si singulier et se réinventant sans cesse.

    Avec ce film dont le titre avec ces deux prénoms juxtaposés fait penser à ceux de Claude Sautet (cinéaste qu'il cite souvent et notamment "Un cœur en hiver", un de mes films préférés dont je vous parle souvent et dont je vous propose aussi la critique ici), - sans compter que le surnom de Maxime est Max, autre surnom indissociable du cinéma de Claude Sautet. Comme Claude Sautet, Xavier Dolan filme comme personne l'amitié, les regards éludés, la passion contenue, puis qui explose. Ardente. Sublime. Un film électrique comme cette scène alors que règne l’orage à l’extérieur (ou est-ce seulement dans mon imaginaire, en écrivant cette critique plus d'un mois après avoir vu le film). Comme cette  pluie qui, dans les films de Sautet, accélère et exacerbe l’expression des sentiments. Tant pis pour les haineux systématiques (qui lui donnent tort avant même de le voir ou l'entendre, qui ne supportent pas le talent a fortiori allié à l'enthousiasme et la jeunesse), Xavier Dolan est mon Claude Sautet des années 2000 et chacun de ses films m'envoûte et m'émeut autant. Infiniment.

    Comme Claude Sautet, Xavier Dolan a construit de magnifiques personnages, émouvants, attachants, vibrants de vie, à l’image de Maxime,  jeune homme en mal d’amour qui fuit sa mère et en même temps recherche son amour, un rôle de mère complexe et irascible qui incombe une nouvelle fois à Anne Dorval, à l’opposé de la mère de son ami Matthias, son autre famille.

     Sur la tombe de Claude Sautet est écrit "Garder le calme devant la dissonance". Dolan filme aussi la dissonance avec maestria.  Comme Claude Sautet, il filme ses beaux personnages, Matthias, Maxime et les autres, avec sensibilité et empathie, pour signer une "histoire simple", en apparence, si profonde en réalité, chaque seconde, même en apparence anodine, semble suspendue et contenir le désir impalpable qui remet tout en question.

    Dans une société du cynisme dans laquelle elles sont souvent méprisées, Xavier Dolan n’a pas pleur de laisser les émotions prendre le dessus et surtout de rester fidèle aux siennes, ou encore pour les souligner d'utiliser une chanson de l'Eurovision, qui sied parfaitement à l'émotion de la scène, dont le choix est déjà décrié par les pseudo-détenteurs du politiquement correct et du bon goût.

    Une fois de plus Xavier Dolan nous envoûte, électrise, bouleverse, déroute.  Il se fiche des modes, du politiquement correct, de la mesure, de la tiédeur et c’est ce qui rend ses films si singuliers, attachants, bouillonnants de vie, lyriques et intenses.  Surtout, qu’il continue à filmer les personnages en proie à des souffrances et des passions indicibles, qu'il continue à les soulever ces passions, à préférer leur folie à « la sagesse de l’indifférence », c’est si rare…  Qu’il continue à oser, à délaisser la demi-mesure, la frilosité ou la tiédeur, à se concentrer sur ceux qui voient ce que dissimulent le masque, la fantasmagorie, l’excès, la flamboyance et à ignorer ceux que cela aveugle et indiffère. Qu’il continue à toujours exalter ainsi la force de la passion et de l'imaginaire, et de faire de chacun de ses films une déclaration d'amour fou au cinéma, ce cinéma qui permet d'affronter les désillusions de l'existence et à chaque fois de prouver comme il le disait à Cannes que "tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais ».

    La réussite doit beaucoup aux choix de Gabriel D’Almeida Freitas et Xavier Dolan dans les rôles respectifs de Matthias et Maxime, dans leurs différences (dans l’apparence, la manière de parler, bouger) qui semblent aussi les rendre complémentaires et dans le choix d'Anne Dorval, une nouvelle fois dans un rôle de "Mommy".

    Un film empreint de beaucoup de douceur et de tendresse, de passion aussi, d’audace visuelle et sonore, jalonné de ces scènes fortes indissociables des films de Dolan qui imprègnent notre mémoire comme ce plan final. Un moment suspendu. Un moment à retenir son souffle.  Et à continuer à vivre avec Matthias et Maxime dans nos imaginaires que Xavier Dolan sait tant titiller et enrichir. Un film enfiévré et mélancolique, électrique et nostalgique, porteur d’illusions et d’espoirs, comme une amitié amoureuse, ou comme un été qui s’achève, cet été qui s’achève.

    Il vous faudra patienter jusqu'au 16 octobre 2019 pour le découvrir en salles en France.

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  • Critique de ONCE UPON A TIME IN... HOLLYWOOD de Quentin Tarantino (compétition officielle)

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    Synopsis : En 1969, la star de télévision Rick Dalton et le cascadeur Cliff Booth, sa doublure de longue date, poursuivent leurs carrières au sein d’une industrie qu’ils ne reconnaissent plus. 

    Ce n’est pas un scoop : Tarantino, cinéphile érudit, aime le cinéma. A la folie.  Et chacun de ses 9 films rend un vibrant hommage au 7ème art et à ceux qui le lui ont fait aimer ainsi, passionnément. Et pour cela, la fin (en prouver avec obstination film après film le pouvoir fabuleux) justifie les moyens (jongler avec la réalité à sa guise, en faisant fi des faits et de la morale -mais l’art doit-il être moral ou la liberté des uns s’arrête-t-elle là où commence celle des autres même en art, vous avez deux heures-, comme un enfant capricieux et attachant qui veut nous persuader que son fabuleux cinéma dispose du pouvoir magique de remonter le temps, de réécrire l’Histoire avec son histoire).

    C’est un cinéma de réminiscences qui joue avec nos souvenirs de cinéphile, ce qui, sans doute, explique les sentiments exaltés qu’il suscite. Ceux qui ont été bercés par ces genres cinématographiques avec lesquels il s’amuse brillamment (western, film de guerre, fable, farce, comédie, films spaghetti, séries B, films d’horreur) feront abstraction des faiblesses (le passionné n’est pas objectif et c’est bien parfois de se laisser éblouir et entraîner par la passion après tout, non ?). Les autres resteront de marbre et n’y verront qu’interminable logorrhée.

    J’aime follement le western, genre qui a bercé mon enfance et ma cinéphilie, et j’aurais aimé aimer ce film à la folie, comme cela avait été le cas avec Inglourious basterds inspiré d’un film italien réalisé par Enzo G.Castellari qui  rendait déjà hommage au genre (et aux films de John Ford, de Sergio Leone avec ce mélange de mélancolie, d’humour, de pesanteur, comme c’est aussi le cas dans ce neuvième film), tout comme Kill Bill et a fortiori Django unchainded. Django était en effet un personnage emblématique des westerns spaghettis et évidemment du film éponyme de Sergio Corbucci de 1966.

    Mais peut-être justement parce qu’il y a eu Inglourious basterds ce film-ci perd-il un peu de sa saveur puisqu’il en reprend les codes (un conte aux accents de western qui se termine comme une farce) et surtout la trouvaille du dénouement. Malgré cette déception relative, pourtant, ce film me revient comme un parfum entêtant, mélancolique et puissant.

    Comme les images de cette époque qu’il reconstitue, avec deux acteurs hors norme dont Tarantino sublime le talent et l’art.  « Once upon a time in… Hollywood » nous replonge en 1969, les néons s’allument sur les frontons des cinémas d’Hollywood comme ceux d’un manège qui nous embarque pour un tour dans le passé.

    C’est cela aussi le cinéma, un tour de magie fabuleux qui permet de réécrire la fin (cette fin de carrière qui fait peur aux personnages incarnés par Pitt et DiCaprio, cette fin inéluctable pour le spectateur qui connait l’histoire tragique de Sharon Tate, cette fin de carrière peut-être redoutée par Tarantino, et la fin du cinéma d’hier qu’il vénérait). Le cinéma qui donc défie la réalité, la fin, et la mort. Magique, décidément. Et rien que pour cette raison, cela vaut la peine de prendre un ticket pour se laisser conter cette histoire à condition d’avoir été et d’être restés des enfants cinéphiles avides d’illusions.

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  • Critique de FRANKIE de Ira Sachs (compétition officielle du Festival de Cannes 2019)

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    Synopsis : Frankie (Isabelle Huppert), célèbre actrice française, se sait gravement malade. Elle décide de passer ses dernières vacances entourée de ses proches, à Sintra au Portugal.

     "Frankie" est un bijou de délicatesse et de sensibilité qui suspend le vol du temps, celui de la mort, omniprésente, omnisciente, dans une ville de Sintra devenue Jardin d'Eden. Un premier et un dernier plan qui se répondent et s'opposent, tragiquement lumineux. Un‪ film d'une douceur apparente émaillé de cruelles fulgurances, celles de la vie qui pour les autres continue quand pour Frankie elle s'en va. Je vous en parlerai plus en détails prochainement. Un énorme coup de coeur. Et peut-être un prix du scénario en perspective pour ce film à l'écriture ciselée et implacable. 

    En attendant de vous en parler plus en détails, quelques mots sur un autre chef-d'oeuvre d'Ira Sachs, « Brooklyn village » :


    Une famille de Manhattan y hérite d’une maison dont le rez-de-chaussée est occupé par la boutique de Leonor, une couturière latino-américaine. Les relations sont d’abord très cordiales entre les deux familles, notamment grâce à l’insouciante amitié qui se noue entre Tony et Jake, les enfants des deux foyers qui ont le même âge. Mais le loyer de la boutique (fixé par un arrangement amical par le grand-père de Jake, son père venant d’en hériter à la mort de celui-ci) s’avère bien inférieur aux besoins des nouveaux arrivants. Les discussions d’adultes vont bientôt perturber la complicité entre voisins.
    Alors que beaucoup de films du Festival de Deauville 2016 réglaient ou exorcisaient les conflits par la violence ou l’excès, Ira Sachs fait ici preuve d’une rare bienveillance envers ses personnages qui y gagnent en profondeur, en intérêt, en crédibilité, en émotion. La seule violence est une grève de la parole que les deux enfants mettent en place pour protester contre les décisions d’adultes qu’ils réprouvent.

    Plutôt que d’opposer la pauvre couturière authentique aux voraces propriétaires qui ne cherchent qu’à s’enrichir et plutôt que de stigmatiser les seconds, Ira Sachs porte un regard plein d’humanité, de compréhension et d’indulgence sur chaque partie, les propriétaires ne vivant que sur un seul salaire, le père étant un comédien de théâtre désargenté.
    En vo le film s’intitule Little Men, et s’il désigne les enfants, ces « petits hommes » peuvent aussi désigner les adultes, tels qu’ils sont dans le regard de leurs enfants, ou tels que chaque adulte reste finalement à jamais, portant simplement le masque de l’adulte mais demeurant aussi perdu, écartelé, et parfois démuni devant les difficultés de l’existence. Sans doute s’agit-il des deux.
    Ajoutez à cela Theo Taplitz et Michael Barbieri, deux jeunes comédiens exceptionnels (magnifique scène ou l’un des deux s’exerce à la comédie pendant laquelle on retient son souffle) et vous obtiendrez un film pudique, délicat, sensible avec des personnages humains, pas des super-héros mais des êtres faillibles et attachants écrits avec une extrême délicatesse, nuancés comme la vie.

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