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IN THE MOOD FOR CINEMA - Page 394

  • Avant-première - Critique de « Biutiful » d’Alejandro Gonzalez Inarritu avec Javier Bardem

    C'est mercredi prochain que sortira en salles "Biutiful" pour lequel Javier Bardem a obtenu le prix d'interprétation dans le cadre du dernier Festival de Cannes.

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    Pendant tout le festival, la rumeur selon laquelle Javier Bardem obtiendrait le prix d'interprétation n'a cessé de courir. C'est le dernier jour, en séance de rattrapage que j'ai pu découvrir ce dernier film du réalisateur de « Babel » primé  du prix de la mise en scène pour celui-ci à Cannes en 2006, de retour sur la Croisette en compétition, cette fois sans son scénariste Guillermo Arriaga.

    Premier des films d'Alejandro Gonzales Inarritu écrit sans  Guillermo Arriaga, scénariste de ses célèbres films choraux, "Biutiful" n'en était pas moins attendu notamment parce que Javier Bardem, lui aussi habitué de la Croisette (membre du jury d'Emir Kusturica en 2005, en compétition avec "No country for old men" en 2007 et hors compétition pour "Vicky Cristina Barcelona" de Woody Allen l'an passé) en incarne  le rôle principal.

    Synopsis de "Biutiful": Uxbal (Javier Bardem), un homme solitaire, jongle entre la difficulté d'un quotidien en marge de la société et sa détermination à protéger ses enfants, qui devront apprendre à voler de leurs propres ailes, ce dernier venant d'apprendre qu'il est atteint d'un mal incurable...

    Difficile d'imaginer un autre acteur dans le rôle d'Uxbal tant Javier Bardem porte et incarne le film, tant l'intérêt et la complexité de son personnage doivent tout à son jeu à la fois en forces et nuances. Pas de film choral et de multiplicité des lieux cette fois mais une seule ville, Barcelone, et un personnage central que la caméra d'Inarritu encercle, enserre, suit jusqu'à son dernier souffle. Unité de temps, de lieu, d'action pour renforcer l'impression de fatalité inéluctable.

    Ceux qui comme moi connaissent et aiment Barcelone auront sans doute du mal à reconnaître en ces rues pauvres, tristes, sombres, parfois même sordides, la belle et lumineuse ville de Gaudi.  Ce pourrait être n'importe où ailleurs, cette histoire, tristement universelle, pourrait se dérouler dans tout autre endroit du monde.

    Epouse bipolaire, trahison du frère, maladie incurable, morts causées par sa faute et par accident, orphelin : rien n'est épargné à Uxbal. Certes, le scénario y va un peu fort dans le drame mais la force du jeu de Javier Bardem est telle que tout passe, et que cet homme qui vit pourtant de trafics peu recommandables, prêt à tout pour assurer un avenir meilleur à ses enfants et en quête de rédemption, finit par être attachant. En arrière plan, l'immigration et l'exploitation des travailleurs clandestins dont la peinture de l'âpre réalité nous fait davantage penser à des cinéastes plus engagés qu'aux précédents films d'Inarritu même si on trouvait déjà ces thématiques dans « Babel ».

    Evidemment « Biutiful » déconcertera comme moi les habitués d'Inarritu, époque Arriaga, non seulement en raison de cette construction plus linéaire mais aussi en raison d'incursions oniriques dans un film par ailleurs extrêmement réaliste comme si le seul espoir possible était dans un ailleurs poétique mais irréel. Certes le nom « Biutiful » désigne les enfants d'Uxbal qui, à l'image de ce mot, égratigné, blessé, représentent un avenir bancal, incertain, mais bel et bien là. La vie est là malgré tout même imparfaite.

     « Biutiful » reste un film suffocant ne laissant entrevoir qu'une mince lueur d'espoir, un film dont les excès mélodramatiques au lieu de nous agacer nous touchent grâce au jeu d'un acteur au talent sidérant et grâce à la réalisation qui insuffle un  troublant réalisme. Scénaristiquement moins éblouissant que « Babel » ou même « 21 grammes », par le talent de celui qui incarne son personnage principal et par la complexité de ce personnage, condamné et digne, « Biutiful » ne lâche pas notre attention une seule seconde. Un prix d'interprétation d'une incontestable évidence.

    Lien permanent Imprimer Catégories : CRITIQUES DES FILMS A L'AFFICHE EN 2010 Pin it! 6 commentaires
  • Golden Blog Awards Paris 2010 : votez pour In the mood for cinema

     golden.jpgLe cinéma, le théâtre et la télévision avaient leurs remises de prix. C'est désormais le tour des blogs. L'intérêt de cette remise de prix est qu'elle conjugue les votes de trois jurys: celui des internautes, celui composé d'experts des différentes catégories de blogs, celui composé des partenaires de l'opération.

     J'ai donc (pour l'instant) inscrit un seul de mes 4 blogs, Inthemoodforcinema.com pour lequel si vous lisez et appréciez ce blog, je vous invite à aller voter. 

    CLIQUEZ ICI POUR ACCEDER A LA PAGE POUR VOTER POUR INTHEMOODFORCINEMA.COM

     Et si vous voulez en savoir plus sur inthemoodforcinema.com cliquez ici pour en découvrir la genèse et les objectifs ainsi que le parcours de sa rédactrice.

    Découvrez également mes autres blogs In the mood: In the mood for Cannes, In the mood for Deauville, In the mood for luxe et n'oubliez pas que vous pouvez suivre le blog sur twitter et sur Facebook.

  • "Les petits mouchoirs" de Guillaume Canet: extraits et critique

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    Je vous ai déjà parlé du dernier film de Guillaume Canet "Les petits mouchoirs" (dont vous pouvez retrouver ma critique en bas de cet article). Je vous propose aujourd'hui d'en découvrir 5 nouveaux extraits... même si je vous conseillerais plutôt d'attendre pour les visionner et de garder le plaisir de la découverte pour sa projection en salles...

     

    Critique du film:

    Après les succès de « Mon idole » (dont j’avais aimé la causticité) et « Ne le dis à personne » (par lequel je n’avais pas été convaincue, voir ici) Guillaume Canet, comme beaucoup de réalisateurs, aurait pu se contenter d’adapter un best-seller avec une part de risque minimale. Il a au contraire choisi un sujet très personnel (pour lequel il a même refusé de travailler pour Scorsese) et c’est à la fois la grande force et la faiblesse du film.

     Direction le Cap-Ferret, une maison en bord de mer appartenant à Max (François Cluzet), une maison où chaque été se réunit une bande d’amis. Seulement cet été-là,  tout est comme d’habitude et à la fois différent car l’un d’entre eux, Ludo (Jean Dujardin) manque à l’appel, retenu sur un lit d’hôpital. Chacun va mettre un « petit mouchoir » sur la vérité. Le petit mouchoir c’est le voile du mensonge, le masque que chacun arbore pour ne pas dévoiler ses doutes, ses failles et ses angoisses. Les petits mouchoirs, ce sont les mensonges faits aux autres mais surtout à soi-même. 

    Cela commence au Baron, célèbre boîte de nuit du 8ème arrondissement. Un habile plan-séquence qui nous plonge dans cette frénésie et en capture la gravité masquée de bonne humeur excessive : la gaieté feinte et les rires factices et exubérants suscités par l’alcool, la drogue, la tristesse dissimulée.  Puis c’est le fracas de la réalité. Et le retour à la vie normale comme si de rien n’était… ou presque.

     Guillaume Canet nous immerge alors dans la vie de ces amis au Cap-Ferret avec la volonté délibérée de faire « un film de potes » comme il le dit lui-même. S’il évoque notamment « Mes meilleurs copains » de Jean-Marie Poiré, en inconditionnelle du cinéma de Claude Sautet, j’ai évidemment plutôt pensé à « Vincent, François, Paul et les autres ». D’ailleurs, Benoît Magimel s’appelle Vincent ; François Cluzet s’appelle ici Max (comme Michel Piccoli dans « Max et les ferrailleurs ») et il m’a  rappelé ce dernier dans la fameuse scène de colère de « Vincent, François, Paul et les autres ». Gabin aussi, si célèbre pour ses scènes de colère. Et la maison du Cap-Ferret m’a fait penser à celle de « César et Rosalie ».

     Même si Guillaume Canet/réalisateur n’atteint pas cette note parfaite, cette virtuosité à laquelle accédait Claude Sautet, mélomane averti, il y a dans ce film cette même quête de raconter la complexité derrière « une histoire simple », de quérir les frémissements de vie, les fléchissements en chacun, de dévoiler une part du mystère dans lequel chacun se drape.

     Plus qu’à Claude Sautet, il m’a d’ailleurs fait penser à Lelouch (même s’il reniera peut-être cette comparaison, lui qui lorgne davantage du côté du cinéma américain et cite plus volontiers Cassavetes) dans sa quête de « fragment de vérité », dans sa sincérité, dans sa façon de filmer au plus près des visages, d’effleurer presque amoureusement ses personnages, et de constamment chercher à tirer le meilleur de ses acteurs. Les virtuoses ce sont eux et c’est la raison pour laquelle il n’a pas voulu faire de l’esbroufe dans sa réalisation. Sa mise en scène se fait donc ainsi discrète. Le cadre à la fois étouffe et caresse les personnages et les  enserre, comme ils le sont dans leurs apparences et leurs mensonges.

    A l’exception de Laurent Lafitte (dont les rires et les larmes m’ont semblé parfois forcés), le casting est irréprochable. Chaque apparition de François Cluzet est un pur bonheur, à la fois irascible et touchant, volubile et secret. Benoît Magimel dégage un charme mélancolique irrésistible. Marion Cotillard n’a jamais été filmée aussi amoureusement, à la fois frontalement et délicatement. Valérie Bonneton est férocement drôle et Gilles Lellouche incarne avec beaucoup de nuances son personnage qui accepte enfin et trop tard de grandir. Quant à Joel Dupuch,  il est plus qu’il ne joue et le film y gagne en émotion et gravité.

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    La comparaison avec Lelouch s’arrête là, si ce n’est qu’elle explique sans doute aussi la virulence de certaines réactions suite à l’avant-première. Elle s’arrête là parce que Canet impose son propre rythme et son propre style et de films en films construit son propre univers.

     « Les petits mouchoirs » dure 2H25, beaucoup trop semble-t-il pour certains. Or, justement, c’est cette durée qui nous permet de créer la proximité avec les personnages, c’est une durée qui coïncide judicieusement avec le fond du film. Une durée nécessaire pour donner du temps au temps, pour laisser tomber les masques, pour prendre le temps de vivre, d’accepter la qualité des silences, du temps qui passe et en saisir la beauté et la violence fugaces. Il n’est pas dans le spectaculaire mais dans l’intime. Il ne cherche pas à nous en mettre plein la vue mais à ouvrir notre regard, lui laisser le temps de se poser, de regarder la vie qui passe et qu’il tente de capter. Certaines scènes peut-être auraient pu être écourtées voire supprimées –même si beaucoup l’ont déjà été puisque le montage initial faisait près de 4H-(et c’est là sans doute que le film est « trop » personnel, en totale empathie pour son sujet, ses personnages et ses acteurs, Guillaume Canet nous oublie un peu) mais il a en tout cas beaucoup de tendresse communicative pour ses personnages et ses acteurs et nous donne envie , malgré et à cause de leurs failles, de se joindre à eux.

    A l’issue de la projection, Guillaume Canet a demandé que nous n’évoquions ni la fin ni le début, tétanisé visiblement à l’idée qu’ils puissent être dévoilés, pourtant ce n’est pas là que réside le principal intérêt de son film. La fin est d’ailleurs attendue mais non moins bouleversante faisant surgir l’émotion contenue qui explose et  avec elle les masques de chacun, faisant voler en éclats les petits mouchoirs posés sur la vérité. Le rire n’a jamais  si bien illustré sa définition de « politesse du désespoir », tout son film étant jalonné de moments drôles et savoureux mais qui sont aussi touchants parce que le masque de la culpabilité et/ou de la tristesse qui affleurent dans un regard soudainement assombri.  Son film souffre  donc (un peu) mais s’enrichit (surtout) d’être très personnel. Pour moi, Guillaume Canet/réalisateur  est donc indéniablement meilleur quand il signe un sujet personnel que quand il adapte Harlan Coben. J’en attends beaucoup de son futur projet avec James Gray.

    Un film choral qui ne cherche pas à révolutionner le cinéma (et dont je n’ai d’ailleurs cessé de me dire pendant toute la projection qu’il ferait une excellente pièce de théâtre) mais qui vous donne envie de prendre le temps de vivre, de laisser choir le voile du mensonge, de regarder et voir, d’écouter et d’entendre. Et c’est finalement là sans doute la plus discrète des audaces et sa vraie réussite.  . Malgré quelques longueurs vous ne verrez pas passer les 2H25 de ce troisième long-métrage de Guillaume Canet qui enlace ses personnages avec une tendre lucidité et embrasse la vie et sa cruauté poignante et involontaire avec tendresse et qui, à son image, complexe et paradoxale, s’achève sur une touchante note de tristesse et d’espoir.

    BONUS: Mes vidéos du débat à l'issue de la projection en avant-première avec Guillaume Canet et Gilles Lellouche

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  • Découvrez le nouveau numéro de Clapmag avec un dossier consacré à "The social network"

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    Je vous ai déjà parlé de cet excellent magazine "seul magazine multimédia gratuit" dont vous pouvez retrouver la forme numérique en cliquant ici avec, notamment, ce mois-ci un dossier consacré à "The social network" et une interview de Sami Bouajila. Je vous encourage à nouveau à le découvrir!

    Retrouvez également la critique de "The social network" de David Fincher sur inthemoodforcinema.com .

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  • Découvrez le teaser et le making-of de "Myrihandes, la légende des âmes-soeurs", la saga littéraire et cinématographique de Guilhem Meric

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    mi1.jpgPeut-être vous souvenez-vous de ce projet dont je vous avais parlé suite au concours de pitchs du Salon du Cinéma  auquel j'avais assisté et à l'occasion duquel j'avais remarqué un très beau projet "Myrihandes, la légende des âmes-soeurs", une saga littéraire et cinématographique signée Guilhem Méric. Preuve en est qu'il faut toujours persévérer quand on croit viscéralement à ses projets puisque "Myrihandes" est aujourd'hui publié au Diable Vauvert et puisque le teaser et le making-of du projet d'adaptation cinématographique sont disponibles. Vous pourrez y déceler le potentiel romanesque et le souffle épique de cette histoire que je vous laisse découvrir.

     

     

    Synopsis:

    Au coeur des Trois Cités d'Oesion, Sisam et Helya se retrouvent après 15 ans de séparation, pour apprendre qu'ils sont deux âmes-soeurs capables de devenir Myrihande : un être unique et entier aux pouvoirs de légende, traqué depuis toujours par un mystérieux seigneur nommé Kryom. Pour libérer toutes les autres âmes-soeurs prisonnières des Cités, ils vont devoir tout apprendre du lien secret qui les unit, qui pourrait faire d'eux le plus sage et plus puissant des Myrihandes...

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  • Comme John Lennon, vous êtes né(e) un 9 octobre? Participez au concours "Nowhere boy".

    Je vous ai déjà parlé du film "Nowhere boy" de Sam Taylor-Wood présenté en ouverture du 21ème Festival du Film Britannique de Dinard (et d'ailleurs un de mes coups de coeur de cette édition 2010) et qui relate les tourments de jeunesse de John Lennon et ce qui le conduira vers la musique.

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    A l'occasion de la sortie de Nowhere Boy, Mars Distribution offre des cadeaux à toutes les personnes nées un 9 octobre comme John Lennon. Le principe est simple : si comme John Lennon, vous êtes né un 9 octobre, il suffit d'envoyer une copie ou une photo de votre carte d'identité à l'adresse concours@nowhereboy-lefilm.com . Les 10 premières réponses recevront une part PeopleforCinema pour Nowhere Boy et les 50 suivantes, une place de cinéma pour voir le film en salle. Le jeu est aussi accessible sur la page officielle du film : http://www.facebook.com/NowhereBoy.lefilm?v=app_4949752878

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  • Critique de "L'avocat de la terreur" de Barbet Schroeder (ce soir, sur Arte)

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    Présenté en sélection officielle (Un Certain Regard) du Festival de Cannes , "L'avocat de la terreur" avait obtenu le César du meilleur documentaire en 2008, un prix entièrement mérité pour ce qui fut un des meilleurs film de cette année-là et que je vous recommande. Il sera ainsi diffusé à 20H40, ce soir, sur Arte. Retrouvez ci-dessous ma critique de ce documentaire qui dresse le portrait de d'un avocat aussi énigmatique que médiatique : Jacques Vergès. 

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    Communiste, anticolonialiste, d’extrême droite ?  Quelle(s) conviction(s) guide(nt) Jacques Vergès ? Barbet Schroeder mène l’enquête pour élucider le mystère. Au départ de la carrière de cet avocat énigmatique : la guerre d’Algérie et Djamila Bouhired, la pasionaria qui porte la volonté de libération de son peuple. Le jeune homme de loi épouse la cause anticolonialiste (procès mémorable où il fait le procès de la justice, Djamila Bouhired sera ainsi condamnée à mort puis graciée !), et la femme. Puis, entre 1970 et 1978, il disparaît. 8 longues années de clandestinité qui suscitent les rumeurs les plus folles. A son retour, il défend les terroristes de tous horizons et des monstres historiques tels que Klaus Barbie, le tristement célèbre ancien chef de la Gestapo de Lyon (là, il ne fera pas le procès de la justice mais… celui de la Résistance !).

    Le documentaire commence donc en Algérie, là où débute aussi la carrière de l’avocat qui y défendit Djamila Bouhired puis qui l’épousa.  Les images d’archives alternent avec l’interview de l’avocat, et les entretiens avec des proches de ce dernier, des fréquentations souvent peu recommandables (il revendique ainsi son amitié avec un ancien nazi notoire : le banquier suisse François Genoud).

     A travers le portrait de cet homme ambigu passant de l’extrême gauche à l’extrême droite, de la défense des persécutés à celle des persécuteurs, de la clandestinité à l’exposition médiatique, de l’opposition à l’Etat Français à une éventuelle collaboration avec les services secrets, ses 8 années de disparition n’ayant jamais réellement été élucidées (même si on évoque un exil au Cambodge…), c’est celui du terrorisme du 20ème siècle qu’effectue Barbet Schroeder.

     Dictateurs africains,  Khmers rouges et Pol Pot, Klaus Barbie…tout ce que le 20ème siècle a compté de terroristes semble avoir un jour ou l’autre croisé la route de Jacques Vergès qui, loin de s’en défendre, le revendique avec cynisme, suffisance et bravade.  L’Algérie, la Palestine, l’Afrique, le Cambodge, aucune partie du globe où règne ou où a régné la violence ne lui est inconnue.

    Si la longueur de ce documentaire vous rebute, sachez que le parcours de cet avocat de la terreur se regarde comme un thriller palpitant, qu’il nous paraît trop court tant Barbet Schroeder fait preuve d’habileté dans sa mise en scène et dans son montage. Il  ne recourt ainsi jamais à la voix off mais à une musique qui donne des allures de films d’espionnage à ce documentaire  qui ressemble à s’y méprendre à une fiction qui nous permet de reconstituer les pièces du parcours mystérieux de l’avocat, puzzle aux multiples et dangereuses ramifications.

    Il révèle l’ambiguïté d’un homme dont il explique l’engagement autant par ses origines desquelles résulterait son horreur de la soumission et de l’oppression que par ses histoires d’amour ( Djamila Bouhired puis la femme de Carlos) : l’ambiguïté de celui qui pleure dans les prisons des combattants algériens et qui défend Klaus Barbie sans un remord en déclarant, avec une jubilation délibérément ostentatoire qui ne peut que susciter le malaise du spectateur (et qui la suscite à dessein, la provocation étant l’arme favorite de l’avocat), que c’est « euphorisant de le défendre seul contre 39 avocats », l’épicurien parfois enfantin qui tire avec un pistolet à eau sur les passants et qui se déclare capable de tuer…

    Barbet Schroeder (qui a eu le final cut) ne prend pas parti, mais certains plans sont particulièrement éloquents comme ceux des interviews de Vergès qui se met lui-même en scène avec une vanité stupéfiante, jouant du silence entre deux bouffées de cigare, entre deux paroles délibérément provocatrices, dans un décor aussi fastueux qu’était misérable celui de certains de ses clients, des paroles parfois démenties par les interviews qui leur succèdent grâce à un montage astucieux. Le générique de fin est ainsi un clin d'oeil ingénieux, il énumère les noms des clients de Jacques Vergès et défilent sous nos regards effarés les plus grands criminels du 20ème siècle.

     Plus qu’un documentaire, c’est une plongée passionnante et instructive dans l’Histoire du 20ème siècle, dans ses zones d’ombre à travers celles d’un homme (ses années de disparition, son énigmatique enrichissement…),  qui donne parfois froid dans le dos et est tellement réussie qu’elle nous fait presque oublier qu’elle relate des faits dramatiquement réels dont Vergès a tour à tour été le protagoniste, l’avocat et parfois la victime autoproclamée… Fascinant et terrifiant à l’image de son protagoniste, un documentaire qui est aussi une réflexion sur la vérité et la sincérité d’un engagement. A voir absolument !

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