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FESTIVAL PARIS CINEMA 2011

  • Palmarès et vidéos de la clôture du Festival Paris Cinéma 2011

     

     

     

    Hier soir, au mk2 bibliothèque, a été décerné le palmarès du 9ème Festival du Festival Paris Cinéma, des prix décernés par le jury de professionnels, par le jury des étudiants, par le jury de blogueurs et par le public.

    Sans grande surprise, "La guerre est déclarée" de Valérie Donzelli (qui avait déjà remporté le grand prix au dernier Festival de Cabourg et enchanté les festivaliers à Cannes où il était présenté dans le cadre de la Semaine de la Critique) a remporté le prix du jury, le prix des blogueurs et celui du public, un film inspiré du combat que la réalisatrice a mené avec son compagnon contre la maladie de son fils.  Une déclaration de guerre mais surtout d’amour. Un hymne à la vie, au courage, à la fugacité du bonheur, un film plein de douce fantaisie, avec une inspiration toujours très truffaldienne, et jamais mièvre. Un film bouleversant (critique ici ultérieurement). 

    Le jury a tenu à attribuer une mention spéciale à "Sur la planche" de Leïla Kilani dont vous pouvez retrouver ma brève critique ci-dessous. Enfin, le prix du jury des étudiants est revenu à "The Prize" de Paul Markovitch.

    La cérémonie de clôture a été suivie de la projection du film "Le Moine" de Dominik Moll, une adaptation sans âme (réalisation et interprétation) d'un sujet en or et dans laquelle un vrai scénario fait cruellement défaut, ce qui était pourtant la richesse des précèdents films de Dominik Moll, certes en cela précedemment aidé par Gilles Marchand... Découvrez également la présentation du film dans la vidéo ci-dessus.

    "La guerre est déclarée" sera à nouveau projeté, ce soir, à 20H, au Mk2 Bibliothèque.

    Critique de "Sur la planche" : mention spéciale du jury

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     Direction la zone portuaire de Tanger où Badia et son amie Inane travaillent comme « filles crevettes » (dans une usine où elles trient des crevettes) tout en rêvant de devenir « filles textiles », en tout cas d’échapper à leur condition.  Badia est écorchée vive et même enragée, obsédée par la propreté de son corps qui, pour elle, porte constamment l’odeur de sa condition qu’elle juge dégradante. Elles vont rencontrer deux autres jeunes filles qui comme elles, le soir venu, séduisent des hommes que Badia et Inane ont pour habitude de voler ensuite. Le quatuor va alors faire équipe…

     Ex-journaliste indépendante, et réalisatrice de documentaires, Leila Kilani réalise ici son premier long-métrage de fiction, déjà présenté à la Quinzaine des Réalisateurs (mais alors qu’il avait déjà été sélectionné par Paris Cinéma).

     Sa caméra traque, débusque, encercle la rage, la détresse folle, la détermination furieuse de Badia, épousant sa révolte, son combat contre la résignation, et sa folie désespérée.

     La jeune actrice (débutante !) qui interprète Badia est impressionnante et révèle autant une actrice qu’une réalisatrice remarquables dont le cinéma qui donne le sentiment d’être pris sur le vif, profondément humain mais aussi sans concession, la vivacité, la nervosité de la réalisation, cette fatalité ( pente irrémédiablement glissante : « sur la planche »), le sentiment d’urgence qui s’en dégage et la qualité de la direction d’acteurs rappellent les Dardenne. Un cinéma pareillement centré sur ses personnages, fragiles et déterminés, écorchés vifs.

     Autre personnage du film : Tanger dont elle occulte la blancheur pour en révéler la noirceur (la seule blancheur est celle clinique, carcérale et redoutable de l’usine où travaillent Badia et son amie), Tanger filmée non pas sous un soleil éclatant mais constamment sous des pluies diluviennes, horizon obscurcie comme celui de ces jeunes filles.

     Un film d’autant plus troublant, que sa rage, sa révolte sont en résonance avec les récentes révolutions arabes qu’il précède pourtant. Un film coup de poing qui, après cette course contre une âpre réalité, nous laisse « à bout de souffle » comme son écriture hachée, faussement désordonnée qui résonne comme un cri de colère et de douleur. Un film qui mériterait de figurer au palmarès.

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  • Concours spécial Festival Paris Cinéma: 5x2 places pour l'avant-première des "Mythos" de Denys Thybaud au Gaumont Parnasse

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    Un petit concours dans le cadre du Festival Paris Cinéma 2011 que vous pouvez suivre en direct ici depuis l'ouverture.  Je vous propose de remporter 5X2 places pour "Les Mythos" de Denys Thibaud au Gaumont Parnasse ce lundi 11 à 19H.  Les gagnants devront se présenter 20 minutes avant le début du film au desk invités du Gaumont Parnasse. Comme il reste très peu de temps  et que les gagnants seront désignés dimanche, je vais donc faire très simple. Les 5 premiers à m'envoyer leurs noms et prénoms à inthemoodforcinema@gmail.com avec pour intitulé de l'email le titre du film, recevront ces places.  Je contacterai directement les gagnants par email.

    Présentation du film par le festival: "Moussa, Nico et Karim, trois jeunes de banlieue, se font virer de leur job d'agents de sécurité de grande surface et décident de se lancer dans la protection rapprochée. Un concours de circonstance, alors qu’ils écument les palaces pour proposer leurs services de gardes du corps, les amènent à devoir protéger Marie Van Verten, jeune héritière de la plus grosse fortune de Belgique. Les trois (anti)héros accumulent les bourdes et découvrent alors un métier qui ne laisse pas place à l'improvisation... Denis Thybaud signe une comédie originale et loufoque menée tambour battant. Ses quatre antihéros, incarnés à la perfection par de jeunes acteurs au comique explosif, servent de prétexte à la confrontation de deux mondes que tout oppose. Alban Ivanov, William Lebghil et Ralph Amoussou forment un trio potache et attachant face à Stéphanie Crayencourt, hilarante en sosie plus vrai que nature d’une Paris Hilton belge, capricieuse et fantasque. "

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  • Festival Paris Cinéma – « The look » avec Charlotte Rampling, « Sur la planche » de Leïla Kilani et « Melancholia » de Lars von Trier

    Après le pseudo-documentaire de Casey Affleck "I'm still here" (dont je vous parlais hier, ici) qui mettait à « l’honneur » Joaquin Phoenix, le festival présentait hier un documentaire consacré à Charlotte Rampling, signé Angelina Maccarone et intitulé « The look, un autoportrait à travers les autres » où, d’ailleurs, la comédienne joue également beaucoup avec son image et construit là aussi, d’une certaine manière (certes très différente), son personnage.  Un documentaire également présenté dans le cadre de la section Cannes Classics du derniers Festival de Cannes.

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     Entre Paris, Londres et New York se dessine ainsi un portrait de la comédienne à travers ses discussions et ses rencontres avec des artistes et des proches comme Paul Auster, Peter Lindbergh ou Juergen Teller qui en révèlent d’ailleurs peut-être plus sur ceux avec qui elle converse que sur elle-même comme lors de cette rencontre avec Peter Lindbergh où les rôles s’inversent, le modèle devenant photographe.  Le film débute sur son regard, ce célèbre regard qui peut-être mélancolique, perçant, malicieux, mystérieux,  redoutablement beau, envoûtant, dur même parfois. Il  est divisé en huit thématiques (mise à nu, démons, la mort, le désir, l’âge…) qu’elle aborde à chaque fois avec une personne différente et qui dévoile une facette de sa personnalité tout autant que cela épaissit le mystère.  Les conversations sont entrecoupées d’extraits de films (de Visconti, Allen, Chéreau, Ozon etc) témoignant de l’audace de ses choix cinématographiques, extraits judicieusement choisis, par exemple « Max mon amour », quand il est question de tabous, « Sous le sable » quand il est question de la mort etc.

    Au fil du documentaire, Charlotte Rampling apparait comme une femme libre que le cinéma de divertissement n’intéresse pas, qui préfère être « un monstre » plutôt qu’une actrice « sympa » (encore une manière, sans doute, de se draper dans un mystère finalement plus tranquillisant), iconoclaste, exigeante, mystérieuse donc…plus que jamais, et c’est tant mieux car si ce documentaire révèle quelque chose c’est finalement son profond mystère mais aussi sa lucidité et l’intelligence de ses choix.

    Une actrice éclatante dont le si célèbre et ensorcelant regard s’obscurcit certes parfois mais qui parait néanmoins loin de l’image figée dans laquelle on l’enferme ou derrière laquelle elle se dissimule et une passionnante réflexion sur le cinéma et sur la vie. Charlotte Rampling que vous pourrez retrouver dans LE grand film du Festival de Cannes 2011 également projeté en avant-première dans le cadre de Paris cinéma : « Melancholia », l’envoûtant film de Lars von Trier (à ne manquer sous aucun prétexte ce samedi au mk2 bibliothèque, à 21H15).

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    Mais comment aurais-je pu ne pas être envoûtée par ce film de Lars Von Trier, aux accents viscontiens (« Le Guépard » et « Ludwig » ne racontant finalement pas autre chose que la déliquescence d’un monde et d’une certaine manière la fin du monde) étant inconditionnelle du cinéaste italien en question ?

    Dès la séquence d’ouverture (une succession de séquences et photos sur la musique de Wagner mêlant les images de Justine –Kirsten Dunst et les images de la collision cosmique), j’ai été éblouie, subjuguée. Après cette séquence éblouissante, Lars von Trier nous emmène dans un château en Suède, cadre à la fois familier et intemporel, contemporain et anachronique, lieu du mariage de Justine, hermétique au bonheur. La première partie lui est consacrée tandis que la seconde est consacrée à sa sœur Claire (Charlotte Gainsbourg). La première est aussi mal à l’aise avec l’existence que la seconde semble la maitriser jusqu’à ce que la menaçante planète « Melancholia » n’inverse les rôles, cette planète miroir allégorique des tourments de Justine provoquant chez tous cette peur qui l’étreint constamment, et la rassurant quand elle effraie les autres pour qui, jusque là, sa propre mélancolie était incompréhensible.

    Melancholia, c’est aussi le titre d’un poème de Théophile Gautier et d’un autre de Victor Hugo (extrait des « Contemplations ») et le titre que Sartre voulait initialement donner à « La nausée », en référence à une gravure de Dürer dont c’est également le titre. Le film de Lars von Trier est la transposition visuelle de tout cela, ce romantisme désenchanté et cruel. C’est aussi  un poème vertigineux, une peinture éblouissante, un opéra tragiquement romantique, bref une œuvre d’art à part entière. Un tableau cruel d’un monde qui se meurt ( dont la première partie fait penser à « Festen » de Vinterberg) dans lequel rien n’échappe au regard acéré du cinéaste : ni la lâcheté, ni la misanthropie, et encore moins la tristesse incurable, la solitude glaçante face à cette « Mélancholia », planète vorace et assassine, comme l’est la mélancolie dévorante de Justine.

     Lars von Trier parvient de surcroît à instaurer un véritable suspense qui s’achève par une scène redoutablement tragique d’une beauté saisissante aussi sombre que poignante et captivante qui, à elle seule, aurait justifié une palme d’or. Un film inclassable, qui mêle les genres, à contre-courant, à la fois pessimiste et éblouissant, l’histoire d’une héroïne  incapable d’être heureuse dans une époque qui galvaude cet état précieux et rare avec cette expression exaspérante « que du bonheur ».

    Le jury en a d’ailleurs semble-t-il débattu. Ainsi, selon Olivier Assayas, lors de la conférence de presse du jury : « En ce qui me concerne, c’est un de ses meilleurs films. Je pense que c’est un grand film. Je pense que nous sommes tous d’’accord pour condamner ce qui a été dit dans la conférence de presse. C’est une œuvre d’art accomplie. » Kirsten Dunst incarne la mélancolie à la perfection dans un rôle écrit au départ pour Penelope Cruz. Lui attribuer le prix d’interprétation féminine était sans doute une manière judicieuse pour le jury de récompenser le film sans l’associer directement au cinéaste et à ses propos, lequel cinéaste permettait pour la troisième fois à une de ses comédiennes d’obtenir le prix d’interprétation cannois.

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    Egalement au programme de ma journée d’hier, un film de la compétition internationale : « Sur la planche » de la Marocaine Leïla Kilani. Direction la zone portuaire de Tanger où Badia et son amie Inane travaillent comme « filles crevettes » (dans une usine où elles trient des crevettes) tout en rêvant de devenir « filles textiles », en tout cas d’échapper à leur condition.  Badia est écorchée vive et même enragée, obsédée par la propreté de son corps qui, pour elle, porte constamment l’odeur de sa condition qu’elle juge dégradante. Elles vont rencontrer deux autres jeunes filles qui comme elles, le soir venu, séduisent des hommes que Badia et Inane ont pour habitude de voler ensuite. Le quatuor va alors faire équipe…

     Ex-journaliste indépendante, et réalisatrice de documentaires, Leila Kilani réalise ici son premier long-métrage de fiction, déjà présenté à la Quinzaine des Réalisateurs (mais alors qu’il avait déjà été sélectionné par Paris Cinéma).

     Sa caméra traque, débusque, encercle la rage, la détresse folle, la détermination furieuse de Badia, épousant sa révolte, son combat contre la résignation, et sa folie désespérée.

     La jeune actrice (débutante !) qui interprète Badia est impressionnante et révèle autant une actrice qu’une réalisatrice remarquables dont le cinéma qui donne le sentiment d’être pris sur le vif, profondément humain mais aussi sans concession, la vivacité, la nervosité de la réalisation, cette fatalité ( pente irrémédiablement glissante : « sur la planche »), le sentiment d’urgence qui s’en dégage et la qualité de la direction d’acteurs rappellent les Dardenne. Un cinéma pareillement centré sur ses personnages, fragiles et déterminés, écorchés vifs.

     Autre personnage du film : Tanger dont elle occulte la blancheur pour en révéler la noirceur (la seule blancheur est celle clinique, carcérale et redoutable de l’usine où travaillent Badia et son amie), Tanger filmée non pas sous un soleil éclatant mais constamment sous des pluies diluviennes, horizon obscurcie comme celui de ces jeunes filles.

     Un film d’autant plus troublant, que sa rage, sa révolte sont en résonance avec les récentes révolutions arabes qu’il précède pourtant. Un film coup de poing qui, après cette course contre une âpre réalité, nous laisse « à bout de souffle » comme son écriture hachée, faussement désordonnée qui résonne comme un cri de colère et de douleur. Un film qui mériterait de figurer au palmarès.

    Demain, petite pause dans l'actualité festivalière avec une reprise assidue samedi. D'ici là, vous retrouverez ma critique en avant-première de "Harry Potter et les reliques de la mort- 2ème partie" et un concours inédit.

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  • Avant-première et critique de « I’m still here - The lost year of Joaquin Phoenix » de Casey Affleck – Festival Paris Cinéma

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    Toujours dans le cadre du Festival Paris Cinéma, j’ai vu, hier, en avant-première, « I’m still here » de Casey Affleck (dont c’est le premier film en tant que réalisateur, acteur exceptionnel notamment dans « L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford » d’Andrew Dominik ou dans « Gone baby gone » de son frère Ben Affleck) et Tom Blomquist… quelques jours après avoir revu « Two lovers » de James Gray (ma critique en bonus en bas de cet article) dans le cadre de ce même festival.  « I’m still here » a déjà été présenté dans plusieurs festivals et non des moindres puisqu’il figurait en sélection officielle de la Mostra de Venise et du Festival International de Toronto.

    C’est justement après la fin du tournage de « Two lovers » que Joaquin Phoenix a (vraiment) annoncé qu’il voulait arrêter sa carrière pour… se consacrer à la musique. C’est son beau-frère Casey Affleck qui immortalise ces instants, pendant deux ans, de l’explication de ses motivations … à sa descente aux enfers…ou plutôt disons qu’il feint d’immortaliser ces instants puisque tout cela n’est que fiction même si pendant deux ans Joaquin Phoenix a tout fait pour (nous) laisser croire qu’il s’agissait de la réalité.

    Ce style hybride (apparent documentaire mais vraie fiction), ce jeu constant sur les frontières entre fiction et réalité ( il manipule la réalité comme les médias manipulent sa réalité) en font à la fois un film fascinant et agaçant, humble et présomptueux ; en tout cas un objet filmique singulier posant des questions passionnantes sur le statut de l’image (au double sens du terme d’ailleurs : image cinématographique et image de l’artiste).

     « I’m still here » est fascinant en ce qu’il dresse finalement bien moins le portrait d’un homme que celui de la société qui le regarde mais c’est en cela que c’est aussi effrayant d’ailleurs.  Barbe, cheveux hirsutes, tenue vestimentaire improbable et hygiène aléatoire : sa métamorphose physique s’accompagne d’une descente aux enfers mais,  plus que spectacle de sa propre déchéance, nous assistons  finalement davantage au spectacle de ceux qui regardent et se délectent de cette déchéance avec mépris, cynisme, voracité. Voracité médiatique mais aussi voracité du public. Une scène en est particulièrement significative : tandis que sur scène il ânonne tant bien que mal un pseudo rap aux paroles aussi nombrilistes qu’insultantes envers le public, et dramatiquement drôles, une marée de téléphones portables immortalise l’instant sans vergogne... et sans broncher.  Scène édifiante, cynique, dérangeante,  et finalement insultante pour le spectateur, miroir du public carnassier qui assiste à cette scène et se glorifie d’y assister. Parce que ne nous y trompons pas : s’il feint de se ridiculiser, de caricaturer l’artiste en pleine décadence,  c’est finalement lui, Joaquin Phoenix, qui en sort avec le beau rôle, paradoxalement le sien, celui de l’innocent broyé par un système face à notre inertie et notre délectation coupables.

     Certes, avant le spectateur, c’est le flux dévorant d’images médiatiques qui se nourrit sans recul de ses excès (drogue, sexe, humiliations : rien ne nous est épargné), qui absorbe sans s’interroger ou se remettre en questions, que stigmatise cette fiction aux airs trompeurs de documentaire mais c’est aussi le spectateur ou le citoyen lambda avec son téléphone portable qui en devient le complice ou l’instigateur. C’est alors faire preuve d’une certaine condescendance à l’égard du public : un public aveugle, crédule, manipulateur (d’images) manipulé et doublement manipulé. Manipulé dans le spectacle que Joaquin Phoenix lui a donné à voir pendant deux ans mais aussi manipulé dans celui qui se déroule sur l’écran. Seulement, si pour la première manipulation la supercherie a parfaitement fonctionné, la seconde (même pour un spectateur ignorant de l’histoire et du caractère fallacieux du documentaire) laisse trop souvent entrevoir son dispositif (rôle trop écrit de Puff Daddy et présence préalable de la caméra alors que celui-ci feint la surprise devant la présence de Joaquin Phoenix) pour que la manipulation fonctionne parfaitement puisque volonté de manipulation il y a bel et bien, le film étant qualifié de « documentaire ».   Il fallait en tout cas beaucoup d’audace, de détermination, de folie (ou plutôt au contraire de raison) pour continuer à jouer le jeu même pendant la promotion d’un sublime film comme « Two lovers » dont on ne peut s’empêcher de penser que ce buzz médiatique lui a nui.

     N’en demeure pas moins un film très malin dont le début fait intelligemment écho à la fin mais aussi au dernier rôle Joaquin Phoenix (de Leonard dans « Two lovers » qui au début du film se jette à l’eau) qui se jette aussi à l’eau (là aussi dans les deux sens du terme), accentuant les résonances entre fiction et (semblant de) réalité. Et si dans la fiction « Two lovers » cela a fait revenir  son personnage à la réalité, ici cela lui permet de tuer ce personnage qu’il a endossé pendant deux ans lors d’une très belle scène finale. D’ailleurs « I’m still here » contient plusieurs très beaux plans de cinéma qui signent la naissance d’un vrai cinéaste.

     Le scénario est finalement très habile, et même cyniquement drôle, parfois au détriment de ceux qui en sont les complices plus ou moins volontaires Malgré son narcissisme, sa condescendance, « I’m still here » est une œuvre passionnante, audacieuse, un saut dans le vide , une mascarade, une manipulation, une « performance artistique », un pied-de-nez à un afflux abêtissant d’images qu’il interroge intelligemment d’autant plus à une période où une affaire dont on ne sait plus très bien si elle est fiction ou réalité se déroule là aussi sur les yeux lunatiques, dévorants, carnassiers des médias et de citoyens devenus public.   Un film aussi malin que le « Pater » d’Alain Cavalier (même si je préfère et de loin celui de Casey Affleck), l’un et l’autre mettant en scène la réalité, un simulacre de réalité dont le réalisateur est le manipulateur et le spectateur la marionnette, victime d’images dont il est d’habitude le coupable, vorace et impitoyable filmeur. Une brillante inversion des rôles. Une démonstration implacable. A voir.

    Sachez enfin que Joaquin Phoenix (est-il besoin de l’ajouter, ici, remarquable) sera prochainement à l’affiche des films de James Franco, Steven Shainberg, Paul Thomas Anderson.

     Sortie en salles : le 13 juillet.

    Critique de "Two lovers" de James Gray

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     « Two lovers » sera également projeté au mk2 bibliothèque, vendredi 8  juillet, à 14H45.

     Direction New York, ville fétiche du cinéma de James Gray, où, après avoir tenté de se suicider,  un homme hésite entre suivre son destin et épouser la femme que ses parents ont choisie pour lui, ou se rebeller et écouter ses sentiments pour sa nouvelle voisine, belle, fragile et inconstante, dont il est tombé éperdument amoureux, un amour dévastateur et irrépressible.

    L’intérêt de « Two lovers » provient avant tout des personnages, de leurs contradictions, de leurs faiblesses. Si James Gray est avant tout associé au polar, il règne ici une atmosphère de film noir et une tension palpable liée au désir qui s’empare du personnage principal magistralement interprété par Joaquin Phoenix avec son regard mélancolique, fiévreux, enfiévré de passion, ses gestes maladroits, son corps même qui semble  crouler sous le poids de son existence, sa gaucherie adolescente.

    Ce dernier interprète le personnage attachant et vulnérable de Leonard Kraditor (à travers le regard duquel nous suivons l’histoire : il ne quitte jamais l’écran), un homme, atteint d'un trouble bipolaire (mais ce n'est pas là le sujet du film, juste là pour témoigner de sa fragilité) qui, après une traumatisante déception sentimentale, revient vivre dans sa famille et fait la rencontre de deux femmes : Michelle, sa nouvelle voisine incarnée par Gwyneth Paltrow, et Sandra, la fille d’amis de ses parents campée par l’actrice Vinessa Shaw. Entre ces deux femmes, le cœur de Leonard va balancer…

    Il éprouve ainsi un amour obsessionnel, irrationnel, passionnel pour Michelle. Ces « Two lovers » comme le titre nous l’annonce et le revendique d’emblée ausculte  la complexité du sentiment amoureux, la difficulté d’aimer et de l’être en retour, mais il ausculte aussi les fragilités de trois êtres qui s’accrochent les uns aux autres, comme des enfants égarés dans un monde d’adultes qui n’acceptent pas les écorchés vifs. Michelle et Leonard ont, parfois, « l’impression d’être morts », de vivre sans se sentir exister, de ne pas trouver « la mélodie du bonheur ».

    Par des gestes, des regards, des paroles esquissés ou éludés, James Gray  dépeint de manière subtile la maladresse touchante d’un amour vain mais surtout la cruauté cinglante de l’amour sans retour qui emprisonne ( plan de Michelle derrière des barreaux de son appartement, les appartements de Leonard et Michelle donnant sur la même cour rappelant ainsi « Fenêtre sur cour » d’Hitchcock de même que la blondeur toute hitchcockienne de Michelle), et qui exalte et détruit.

    James Gray a délibérément choisi une réalisation élégamment discrète et maîtrisée et un scénario pudique et  la magnifique photographie crépusculaire de Joaquin Baca-Asay qui procurent des accents lyriques à cette histoire qui aurait pu être banale,  mais dont il met ainsi en valeur les personnages d’une complexité, d’une richesse, d’une humanité bouleversantes.  James Gray n’a pas non plus délaissé son sujet fétiche, à savoir la famille qui symbolise la force et la fragilité de chacun des personnages (Leonard cherche à s’émanciper, Michelle est victime de la folie de son père etc).

     Un film d’une tendre cruauté, d’une amère beauté, et parfois même d'une drôlerie désenchantée,  un thriller intime d’une vertigineuse sensibilité à l’image des sentiments qui s’emparent des personnages principaux, et de l’émotion qui s’empare du spectateur. Irrépressiblement. Ajoutez à cela la bo entre jazz et opéra ( même influence du jazz et même extrait de l’opéra de Donizetti, L’elisir d’amore, « Una furtiva lagrima » que dans  le chef d’œuvre de Woody Allen « Match point » dans lequel on retrouve la même élégance dans la mise en scène et la même "opposition" entre la femme brune et la femme blonde sans oublier également la référence commune à Dostoïevski… : les ressemblances entre les deux films sont trop nombreuses pour être le fruit du hasard ), et James Gray parvient à faire d’une histoire a priori simple un très grand film d’une mélancolie d’une beauté déchirante qui nous étreint longtemps encore après le générique de fin. Trois ans après sa sortie : d’ores et déjà un classique du cinéma romantique.

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  • 3ème compte rendu du Festival Paris Cinéma 2011 : 3 avant-premières et Isabella Rossellini au programme

    Après mon compte rendu de l’ouverture privée du Festival et de ma première journée, suite du programme avec trois films en avant-première qui témoignent là encore de la diversité de la programmation du festival avec une comédie franco-londonienne, un western espagnol et un drame (viticole) français.

    Le festival rend cette année hommage à Isabella Rossellini et, en plus d’une rétrospective de films dans lesquels elle a joué, comme « Two lovers » de James Gray dont je vous parlais avant-hier, ici, le festival programmait en avant-première « 3 fois 20 ans » de Julie Gavras qui sort en salles demain, un film que j’attendais d’autant plus qu’il est réalisé par Julie Gavras qui avait obtenu le prix Michel d’Ornano au Festival du Cinéma Américain de Deauville 2007 pour « La faute à Fidel ». Quelques mots sur la « faute à Fidel » avant de vous parler de ce deuxième long métrage de Julie Gavras.   Film écrit par Julie Gavras avec Arnaud Cathrine d’après le roman « Tutta Colpa di Fidel » de Domitilla Calamai, « La faute à Fidel » a été produit par la veuve de Pialat, Sylvie Pialat.  C’est l’histoire d’Anna, neuf ans. Pour elle, la vie est simple, faite d’ordres et d’habitudes. Une vie  qui se déroule confortablement entre Paris et Bordeaux. Sur une période d’un an, entre 1970 et 1971, Anna voit sa vie bouleversée par l’engagement politique de ses parents. Le film commence par un mariage, dans un cadre bourgeois, autour d’une table d’enfants sagement assis, bien droits, bien coiffés, respectueux des convenances, séparés les uns des autres par un silence assourdissant. Il s’achève dans une cour d’école. Les enfants portent des vêtements colorés, dansent en rond et se tiennent la main. Une année sépare ces deux scènes, une année de bouleversements pour cette petite fille qui assiste, incrédule puis furieuse puis révoltée puis complice aux bouleversements de son existence. Des espoirs, une révolte aussi, naissent pour ses parents, le monde change pour eux, le monde s’écroule pour elle.  A travers son regard à la fois clairvoyant et d’une touchante naïveté pour qui tout ça c’est « la faute à Fidel », défile toute une époque : le franquisme, l’émancipation féminine, la prise de pouvoir par Allende au Chili etc. Un film qui évolue peu à peu vers la lumière portée par une musique elle aussi très lumineuse. Le film d’une cinéaste très prometteuse. Un film émouvant, intelligent, drôle aussi, aux dialogues incisifs et jamais « enfantins ».

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    D’où ma déception avec ce « 3 fois 20 ans » au sujet pourtant prometteur. Mary (Isabelle Rossellini) et Adam (William Hurt) ont presque soixante ans. Ils sont élégants, dynamiques, et gèrent impeccablement leur famille jusqu’au jour où, suite à une perte de mémoire passagère et sans gravité, Mary réalise qu’ils font partie de la catégorie des seniors. Ils vont réagir de manière opposée. Adam en s’entourant de jeunes gens, s’investissant dans de nouveaux projets …, Mary en se préparant à la vieillesse. La séparation est inéluctable. Leurs enfants vont alors tout faire pour les réconcilier. Le sujet était attrayant : traiter avec légèreté de cet âge qui n’a plus rien à voir avec ce qu’il était il y a vingt ou trente ans mais que l’entourage ou que « les autres » continuent à traiter avec gravité et inquiétude et montrer que la fantaisie est un état d’esprit et pas une question d’âge (très beau personnage de la grand-mère Nora incarnée par Doreen Mantle).

     Isabelle Rossellini insuffle toute son élégance, sa belle folie, son énergie, sa grâce à son personnage, et William Hurt incarne parfaitement ce jeune sexagénaire qui refuse d’affronter le temps qui passe, un architecte qui construit des édifices, sorte de double du père de la réalisatrice (le cinéaste Costa-Gavras) qui construit des films… Et heureusement qu’ils sont là… car qu’a-t-il bien pu se passer pour que Julie Gavras qui, dans « La faute à Fidel » témoignait de la singularité de son regard et de son univers, signe ce film au scénario (coécrit avec Olivier Dazat) totalement inabouti (projet de musée sur lequel travaille le personnage de William Hurt, une intrigue secondaire qui n’aura pas de dénouement et dont on se demande donc à quoi elle sert sans parler du personnage d’Arta Dobroshi et de l’amant du personnage d’Isabelle Rossellini qui là aussi disparaissent de l’intrigue comme par magie, dommage quand on sait à quel point Arta Dobroshi était intense dans « Le silence de Lorna » des frères Dardenne) et sans personnalité malgré celles si charismatiques de William Hurt et Isabelle Rossellini ? Dommage…, un trop court instant, dans une scène tragicomique, on retrouve l’univers et la fantaisie réjouissante de la cinéaste qui semble ici crouler sous le poids (des ans ?) de son sujet pourtant prometteur.

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    Ensuite, petite madeleine de Proust avec un western au programme, le genre cinématographique avec lequel est née ma passion pour le cinéma. Il s’agit de « Blackthorn » de Mateo Gil qui réécrit l’histoire d’une légende : Butch Cassidy, le célèbre hors-la-loi qui, passé pour mort depuis 1908, se cache en réalité en Bolivie depuis 20 ans sous le nom de James Blackthorn. Au crépuscule de sa vie, il n’aspire plus qu’à rentrer chez lui pour rencontrer ce fils qu’il n’a jamais connu. Lorsque, sur sa route, il croise un jeune ingénieur qui vient de braquer la mine dans laquelle il travaillait, Butch Cassidy démarre alors sa dernière chevauchée…

    Le western, genre malheureusement sans doute jugé désuet, se fait particulièrement rare…même si deux films récents « L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford » (un véritable chef d’œuvre, expression que j’emploie pourtant avec parcimonie) et « True grit » lui ont fait retrouver ses lettres de noblesse. La comparaison était donc inévitable et malheureusement « Blackthorn » n’arrive à la hauteur ni de l’originalité ni de la photographie envoûtant de ces deux films. Si le scénario est plutôt bien construit (rien d’étonnant à cela : Mateo Gil est le scénariste notamment de « Vanilla sky », « Mar Adentro » et « Agora ») avec le présent et le passé mis en parallèle pour créer judicieusement rythme et suspense, visuellement « Blackthorn » est particulièrement classique avec panoramiques et chevauchées au soleil couchant de rigueur…et non moins fascinant d’ailleurs pour une amatrice de western comme ces plans dans le désert de sel, d’une beauté redoutable. Le western est désormais trop rare au cinéma pour que je boude mon plaisir et il faut avouer que le jeu de Sam Shepard en bandit qui pousse l’amitié et la loyauté au-dessus de tout (surtout la loi et la morale… et même l’argent qui lui aura fait commettre tant de crimes), l’atmosphère crépusculaire et nostalgique, les sublimes paysages boliviens suffisent à ce que je vous le recommande…surtout si le western est aussi votre madeleine de Proust.

    Sortie en salles : le 31 août 2011

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    Enfin, troisième avant-première avec « Tu seras mon fils » de Gilles Legrand, dans une salle malheureusement aux ¾ vide pour ce film qui méritait pourtant le déplacement ne serait-ce que pour  Lorant Deutsch et Niels Arestrup  qui incarne ici Paul de Marseul, propriétaire d’un prestigieux vignoble à Saint Emilion. Son fils Martin (Lorant Deutsch donc)  travaille avec lui sur le domaine familial. Mais Paul, vigneron exigeant et passionné, ne supporte pas l’idée que son fils puisse un jour lui succéder. Il rêve d’un fils plus talentueux, plus charismatique… plus conforme à ses fantasmes. Son régisseur (Patrick Chesnais) est atteint d’un cancer incurable, Paul en profite pour rappeler le fils de ce dernier Philippe (Nicolas Bridet) … pour lui le fils idéal. Une situation qui devient de plus en plus insupportable pour tout le monde…

    Une fois de plus, Niels Arestrup, incarne un personnage irascible, imbuvable, impitoyable, un père écrasant et une fois de plus, il excelle dans ce genre de rôle, plus imposant et redoutable que jamais. Face à lui Lorant Deutsch est parfait en fils frêle, velléitaire, bégayant, qui cherche vainement à s’imposer et trouver sa place. Ce duo-duel est la première bonne idée du film de même que l’autre duo père-fils Patrick Chesnais, Nicolas Bridet. Une véritable partie d’échecs va alors s’engager avec pour cadre les magnifiques vignobles bordelais, terre fertile et âpre, lumineuse et menaçante. Terre de paradoxes comme la force et la fragilité, l’autorité et la soumission qui opposent père et fils. Les dialogues sont soigneusement écrits et  le scénario coécrit avec l’écrivain Delphine de Vigan instille ce qu’il faut de noirceur, de malaise et de menace hitchcockiens. Le tout doublé d’une réflexion sur la transmission sans parler du vin, dont le parfum, la sensualité et le rôle ici déterminant en font un personnage à part entière…

    Sortie en salles : le 24 août 2011.

    A ne pas manquer notamment aujourd’hui à Paris Cinéma : l’avant-première de « We need to talk about Kevin » de Lynne Ramsay présenté par la comédienne Tilda Swinton (sous réserve), « Abel » de Diego Luna dont je vous parlais hier, et pour ma part ce sera « I’m still here » de Casey Affleck et Tom Blomquist présenté en avant-première. Ne manquez pas non plus "Monsieur Klein" de Losey, demain, à 21H55, au Champo.

     

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  • Festival Paris Cinéma - Gael Garcia Bernal à l'honneur - Projection de "Abel" de Diego Luna

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    En attendant de vous parler des dernières avant-premières découvertes dans le cadre de ce Festival Paris Cinéma, je vous recommande "Abel" de Diego Luna projeté demain à 15h au MK2 blibliothèque, un film projeté en avant-première du dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville où il figurait en compétition et sorti en salles en janvier dernier . Ce film est présenté dans le cadre de l'hommage à Gael Garcia Bernal, producteur du film. Retrouvez ci-dessous mes vidéos de la conférence de presse du Festival du Cinéma Américain de Deauville.

    Abel est ainsi un enfant de 9 ans qui ne parle plus depuis que son père a quitté la maison. Un jour il retrouve la parole et se prend pour son père. Tout le monde se plie à ses volontés et joue le jeu jusqu’au jour où le père d’Abel réapparait. (Vous trouverez ci-dessus deux vidéos de la conférence de presse dans laquelle Diego Luna explique la genèse du film).  « Abel » a été présenté hors compétition dans le cadre du  Festival de Cannes 2010. Filmé la plupart du temps à hauteur d’Abel, le regard, frondeur, déterminé, si touchant du petit garçon, nous saisit dès le début pour ne plus nous quitter et pour, finalement, arracher au nôtre quelques larmes. Avec beaucoup de pudeur et de drôlerie, parfois pour désamorcer des scènes qui auraient pu se révéler glauques, Diego Luna nous embarque dans son histoire qu’il filme et conte avec beaucoup de tendresse, nous surprend avec ce qu’on attend. Tendresse pour ce petit garçon, un peu celui qu’il a été comme il l’a expliqué en conférence de presse, mais aussi d’une certaine manière pour cette mère, aimante et courageuse, à laquelle son film rend hommage (Diego Luna a perdu sa mère dans sa petite enfance) à travers le personnage de la mère d’Abel. Pour son premier film, Diego Luna a réussi sans doute ce qu’il y a de plus compliqué : donner l’apparence de la simplicité à une histoire qui est loin de l’être et susciter l’émotion, sans jamais la forcer, par le ton du film, burlesque et poignant, par la puissance du sujet et de son (réellement extraordinaire) jeune acteur principal dont, en conférence de presse, Diego Luna a ainsi souligné à quel point (presque effrayant) il avait un comportement adulte, voire paternaliste, à l’image du personnage qu’il a incarné.

    Retrouvez également  ma critique du film d’ouverture « Polisse » de Maïwenn et mes vidéos de l’ouverture, ici, et ma critique de  « Monsieur Klein » de Joseph Losey projeté à plusieurs reprises dans le cadre de l’hommage à Michael Lonsdale, là. Retrouvez également mon compte rendu de ma première journée du Festival Paris Cinéma 2011.

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  • Compte rendu de ma 1ère journée au Festival Paris Cinéma 2011 : Nicolas Echevarria, « Two lovers » de James Gray et avant-première de « La Fée »

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     Avant de repartir pour le MK2 Bibliothèque où, ce soir,  j’assisterai aux projections en avant-première « Blackthorn » de Mateo Gil (présenté par le comédien Sam Sherpard) et « Trois fois vingt ans » de Julie Gavras présenté par la réalisatrice et par Isabella Rossellini à qui le festival rend hommage cette année, un petit bilan de ma première journée de festival tout en vous rappelant que vous pouvez retrouver ma critique du film d’ouverture « Polisse » de Maïwenn et mes vidéos de l’ouverture, ici, et que vous pouvez retrouver ma critique de  « Monsieur Klein » de Joseph Losey projeté à plusieurs reprises dans le cadre de l’hommage à Michael Lonsdale, là.

    Ma journée d’hier a été à l’image de la programmation de ce festival : particulièrement éclectique, entre un film projeté dans le cadre de la rétrospective Isabelle Rossellini, un film lié au pays à l’honneur cette année, à savoir le Mexique, et une avant-première.

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     J’ai débuté ma journée par « Two lovers » de James Gray, découvert lors de sa sélection en compétition officielle du Festival de Cannes 2008 et que j’avais envie de revoir, ayant le souvenir d’un film d’une noirceur troublante et d’une rare beauté mélancolique.

     « Two lovers » sera également projeté au mk2 bibliothèque, vendredi 8  juillet, à 14H45.

     Direction New York, ville fétiche du cinéma de James Gray, où, après avoir tenté de se suicider,  un homme hésite entre suivre son destin et épouser la femme que ses parents ont choisie pour lui, ou se rebeller et écouter ses sentiments pour sa nouvelle voisine, belle, fragile et inconstante, dont il est tombé éperdument amoureux, un amour dévastateur et irrépressible.

    L’intérêt de « Two lovers » provient avant tout des personnages, de leurs contradictions, de leurs faiblesses. Si James Gray est avant tout associé au polar, il règne ici une atmosphère de film noir et une tension palpable liée au désir qui s’empare du personnage principal magistralement interprété par Joaquin Phoenix avec son regard mélancolique, fiévreux, enfiévré de passion, ses gestes maladroits, son corps même qui semble  crouler sous le poids de son existence, sa gaucherie adolescente.

    Ce dernier interprète le personnage attachant et vulnérable de Leonard Kraditor (à travers le regard duquel nous suivons l’histoire : il ne quitte jamais l’écran), un homme, atteint d'un trouble bipolaire (mais ce n'est pas là le sujet du film, juste là pour témoigner de sa fragilité) qui, après une traumatisante déception sentimentale, revient vivre dans sa famille et fait la rencontre de deux femmes : Michelle, sa nouvelle voisine incarnée par Gwyneth Paltrow, et Sandra, la fille d’amis de ses parents campée par l’actrice Vinessa Shaw. Entre ces deux femmes, le cœur de Leonard va balancer…

    Il éprouve ainsi un amour obsessionnel, irrationnel, passionnel pour Michelle. Ces « Two lovers » comme le titre nous l’annonce et le revendique d’emblée ausculte  la complexité du sentiment amoureux, la difficulté d’aimer et de l’être en retour, mais il ausculte aussi les fragilités de trois êtres qui s’accrochent les uns aux autres, comme des enfants égarés dans un monde d’adultes qui n’acceptent pas les écorchés vifs. Michelle et Leonard ont, parfois, « l’impression d’être morts », de vivre sans se sentir exister, de ne pas trouver « la mélodie du bonheur ».

    Par des gestes, des regards, des paroles esquissés ou éludés, James Gray  dépeint de manière subtile la maladresse touchante d’un amour vain mais surtout la cruauté cinglante de l’amour sans retour qui emprisonne ( plan de Michelle derrière des barreaux de son appartement, les appartements de Leonard et Michelle donnant sur la même cour rappelant ainsi « Fenêtre sur cour » d’Hitchcock de même que la blondeur toute hitchcockienne de Michelle), et qui exalte et détruit.

    James Gray a délibérément choisi une réalisation élégamment discrète et maîtrisée et un scénario pudique et  la magnifique photographie crépusculaire de Joaquin Baca-Asay qui procurent des accents lyriques à cette histoire qui aurait pu être banale,  mais dont il met ainsi en valeur les personnages d’une complexité, d’une richesse, d’une humanité bouleversantes.  James Gray n’a pas non plus délaissé son sujet fétiche, à savoir la famille qui symbolise la force et la fragilité de chacun des personnages (Leonard cherche à s’émanciper, Michelle est victime de la folie de son père etc).

     Un film d’une tendre cruauté, d’une amère beauté, et parfois même d'une drôlerie désenchantée,  un thriller intime d’une vertigineuse sensibilité à l’image des sentiments qui s’emparent des personnages principaux, et de l’émotion qui s’empare du spectateur. Irrépressiblement. Ajoutez à cela la bo entre jazz et opéra ( même influence du jazz et même extrait de l’opéra de Donizetti, L’elisir d’amore, « Una furtiva lagrima » que dans  le chef d’œuvre de Woody Allen « Match point » dans lequel on retrouve la même élégance dans la mise en scène et la même "opposition" entre la femme brune et la femme blonde sans oublier également la référence commune à Dostoïevski… : les ressemblances entre les deux films sont trop nombreuses pour être le fruit du hasard ), et James Gray parvient à faire d’une histoire a priori simple un très grand film d’une mélancolie d’une beauté déchirante qui nous étreint longtemps encore après le générique de fin. Trois ans après sa sortie : d’ores et déjà un classique du cinéma romantique.

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    Changement radical d’univers pour un film qui, justement, l’est (radical) avec « Cabeza de vaca » de Nicolas Echevarria projeté dans le cadre du focus sur le cinéaste et de la thématique mexicaine du Festival Paris Cinéma 2011.  Ce film date de 1991 mais est sortie en salles en France seulement l’hiver dernier.  C’est l’histoire extraordinaire d’Alvar Nunez Cabeza de Vaca, conquistador espagnol devenu chaman…

    « Cabeza de Vaca » sera à nouveau projeté au mk2 Bibliothèque le lundi 4 juillet à 21H30. Il sera également présenté par le réalisateur. Retrouvez ma vidéo de la présentation du film par son réalisateur,  ci-dessous.

     Premier film du réalisateur qui n’avait auparavant réalisé que des documentaires, le style est ici  d'inspiration documentaire, d’un naturalisme d’autant plus troublant que les maquillages sont exceptionnels (signés Guillermo del Toro), et qu’il s’allie avec un fantastique paradoxalement réaliste. Etrange alliance entre âpreté et mysticisme, réalisme et symbolisme, dans un film tantôt très cru, tantôt presque poétique. Un film intense d’une force indéniable à l’image de l’interprétation de Juan Diego. Une expérience viscérale et hallucinée (et visuellement hallucinante) qui, en tout cas, ne pourra vous laisser indifférents.

     

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    A nouveau, changement radical d’univers avec l’avant-première de « La Fée » de Dominique Abel, Fiona Gordon, Bruno Romy, que j’étais d’autant plus impatiente de découvrir que j’en avais eu d’élogieux échos au Festival de Cannes où il était présenté dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs et au Festival de Cabourg où il était également présenté en avant-première.

     Dom est veilleur de nuit dans un petit hôtel du Havre. Un soir Fiona se présente à l’accueil et dit être une fée. Elle lui accorde trois souhaits. Le lendemain, deux vœux de Dom se sont réalisés. Il la recherche, tombé amoureux de cette dernière. Peut-être en attendais-je trop de cette fée dont la magie m’avait été tant de fois louée mais, même si, certes, le film est inclassable, un conte joyeusement délirant et décalé, tendrement burlesque, plein de fantaisie, d’humour absurde, et riche de multiples influences qui l’écrasent malheureusement plus qu’elles ne le portent (Tati –décidément…, déjà source d’inspiration de « Ni à vendre ni à louer » actuellement à l’affiche-, Laurel et Hardy, Buster Keaton etc), les gags s’étirent parfois en longueur (chorégraphie sous l’eau et danse sur le toit) et sont parfois un peu trop répétitifs et le film s’apparente plus à une suite de saynètes, certes souvent drôles, qu’à un film avec un scénario construit, nous laissant un peu sur notre faim.

     Préférez-lui « Le Havre » de Kaurismaki avec un ton et un lieu similaires… mais un vrai scénario et ce petit plus inexplicable qui s’appelle la magie et dont cette fée, dans le scénario comme dans la réalisation, paradoxalement, est un peu trop avare.  (Sortie en salles : le 14 septembre)

    Après ce voyage cinématographique entre mélancolie, féérie, fantastique, et (un peu de) réalisme, retour à la réalité sous un doux et poétique soleil  parisien propice à la rêverie et à déambuler dans ses rues ainsi illuminées comme dans un film de Woody Allen, en se réjouissant du plaisir de vivre un festival dans la ville la plus mélancolique, féérique, fantastique qui soit, décor qui n’a pas encore dévoilé toutes ses ressources cinématographiques et ses mystères.

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    Je vous signale enfin que Paris cinéma dispose cette année d’un espace sur l’esplanade devant le MK2 Bibliothèque, une judicieuse nouveauté. Vous pourrez y retirer vos badges, vous renseigner sur le festival, y trouver le programme, y consulter les dossiers de presse des films présentés au festival, ou des magazines de cinéma, et même faire un tour à la toute nouvelle boutique du festival…

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    Rendez-vous demain pour un nouveau compte rendu…

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