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  • Critique de SCOOP de Woody Allen à 20H45 sur Ciné + Emotion

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    Après "Match point", perfection du genre, film délicieusement immoral au scénario virtuose totalement et magnifiquement scénarisé en fonction de son dénouement et de la balle de match finale, quel film pouvait donc bien  ensuite réaliser Woody Allen ? Evidemment pas un film noir qui aurait inévitablement souffert de la comparaison. Si, à l’image de "Match point", Woody Allen a de nouveau délaissé New York -qu’il a tellement sublimée et immortalisée- pour Londres, si comme dans "Match point", il a de nouveau eu recours à Scarlett Johansson comme interprète principale,  il a donc néanmoins délaissé le film noir pour retourner à la comédie policière à l’image d’"Escrocs mais pas trop" ou du "Sortilège du scorpion de Jade". Si le principal atout de son précèdent film "Match point" était son scénario impeccable, c’est ailleurs qu’il faut aller chercher l’intérêt de ce "Scoop."

    L’intrigue est ainsi délibérément abracadabrantesque et improbable. Le célèbre journaliste d'investigation Joe Strombel, arrivé au Purgatoire, y rencontre la secrétaire de l’aristocrate Peter Lyman, également politicien à l’image irréprochable de son état. Elle lui révèle qu’elle aurait été empoisonnée par ce dernier après avoir découvert que Peter serait en réalité le tueur en série surnommé « le Tueur au Tarot » qui terrorise Londres. Professionnel et avide de scoops jusqu’à la mort et même après, Joe Strombel, va se matérialiser à une jeune étudiante en journalisme (et accessoirement en orthodontie), la jeune Sondra (Scarlett Johansson) lorsqu’elle est enfermée dans une boîte lors du tour de magie de l’Américain Splendini (Woody Allen). Croyant avoir trouvé le scoop du siècle elle décide de faire la connaissance de Peter Lyman (charismatique et mystérieux Hugh Jackman) pour le démasquer, avec, comme « perspicace » collaborateur, Splendini. Evidemment elle va tomber amoureuse (de Peter Lyman, pas de Woody, celui-ci ayant ici renoncé au rôle de l’amoureux, dans un souci de crédibilité, ou dans un sursaut de lucidité, pour jouer celui du protecteur). Elle n’aurait peut-être pas dû…

    Woody Allen est donc passé de la noirceur à la légèreté. C’est agréable la légèreté, aussi, surtout après la noirceur, aussi parfaite soit-elle. Woody Allen nous revient aussi en tant qu’acteur, fidèle à lui-même, balbutiant, maladroit, chaplinesque, woodyallenesque plutôt, adepte de l’ironie et de l’autodérision, et narcissique de religion (si, si, vous verrez, ça existe). Intrigue abracadabrantesque donc mais c’est aussi ce qui fait le charme de ce scoop. Preuve que légèreté et noirceur ne sont pas totalement incompatibles, Woody Allen a saupoudré son scoop d’humour exquisément noir avec notamment une mort presque sympathique en  grande faucheuse embarquant ses défunts et bavards voyageurs. Woody Allen lui aussi nous embarque, dans un jeu, dans son jeu. Il ne nous trompe pas. Nous en connaissons les règles, les codes du genre : la désinvolture et la loufoquerie sont de mise.

    La mise en scène reste cependant particulièrement soignée, Scarlett Johansson est de nouveau parfaite, cette fois en étudiante naïve  et obstinée. Comme la plupart des bonnes comédies, ce Scoop  fonctionne sur les contrastes  d’un duo impossible, celui de la journaliste écervelée et obstinée et de son protecteur farfelu. Certes, vous n’explosez pas de rire mais vous avez constamment le sourire aux lèvres entraînés par l’entrain communicatif et l’humour décalé de Woody Allen qui montre à nouveau que l’on peut être un réalisateur particulièrement prolifique sans rien perdre de son enthousiasme et de sa fraîcheur. Une bonne humeur tenace et contagieuse vaut après tout mieux qu’un rire explosif, non ?

    Un film rythmé, léger, burlesque, ludique à la mise en scène soignée avec une touche d’humour noir même si on peut regretter que la morale soit sauve et même si on peut donc regretter l’immoralité jubilatoire de Match point. Ce scoop-là n’est ni sidérant, ni inoubliable, mais néanmoins il vaut la peine d’être connu.

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  • Sortie DVD (le 15.07) - UN HOMME IDEAL de Yann Gozlan avec Pierre Niney - Critique

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    Le 20 février dernier, des mains de Kristen Stewart et Juliette Binoche, Pierre Niney recevait le César du meilleur acteur pour « Yves Saint Laurent » de Jalil Lespert (pour lequel il avait déjà reçu le prix Patrick Dewaere), après avoir été nommé deux fois comme meilleur espoir pour « J’aime regarder les filles » de Frédéric Louf en 2012 et « Comme des frères » de Hugo Gélin en 2013.  Cette cérémonie des César 2015 à laquelle j’assistais comme chaque année (mon compte rendu, ici), fut  riche en émotions, d’abord parce que « Timbuktu » (LE film de l’année 2014) en a été le grand vainqueur, ensuite parce que s’y entrelaçaient le cinéma d’hier (Truffaut, Resnais) et celui d’aujourd’hui, parce que la cérémonie était menée par Edouard Baer qui, piquant mais jamais cruel, faussement désinvolte et jamais cynique, tout au long de celle-ci, a fait preuve d’un humour  joyeusement décalé (irrésistible tournage de « Panique aux César » auquel se sont pliés avec humour plusieurs comédiens, l’humour décalé et réjouissant était également au rendez-vous dans le sketch de « Casting(s) », la série d’ailleurs écrite et réalisée par… Pierre Niney ), et enfin parce que cette soirée a été jalonnée de quelques moments de grâce qui nous en ont fait occulter la longueur comme l’hommage tout en pudeur des acteurs d’Alain Resnais  à cet immense cinéaste, l’étourdissante musique de « Timbuktu » interprétée en live qui m’a touchée en plein cœur, et l’hommage musical et magnifique à Truffaut pour les 30 ans de sa mort par M et Ibrahim Maalouf ( par ailleurs auteur, notamment, de la magnifique musique du film « Yves Saint Laurent » de Jalil Lespert) qui ont interprété « L’amour en fuite » de Souchon parvenant ainsi à faire danser les spectateurs du Châtelet mais surtout le discours de Pierre Niney par lequel j’ai été particulièrement touchée.  Par son émotion en parlant de sa famille. Par ses remerciements, aux techniciens notamment, ses mots pour  Gaspard Ulliel (L’autre Saint-Laurent que certains amateurs d’un monde simpliste et dichotomique ont voulu opposer à Pierre Niney alors que ces deux films, comme le jeu de ces deux acteurs, sont différents et complémentaires) mais aussi pour les autres nommés ou pour son talentueux partenaire dans « Yves Saint Laurent », Guillaume Gallienne. Et surtout en faisant l’éloge de cette notion si noble et rare : la bienveillance dont, par ces mots, il a lui-même fait preuve. « Je le lis comme une bienveillance profonde. Et cette bienveillance elle est tellement importante pour jouer, le regard bienveillant des gens. Alors merci pour cette bienveillance. Je crois qu’aujourd’hui, j’ai grandi avec cette bienveillance, elle m’a permis de rêver, d’avoir des rêves depuis que je suis petit et ce soir je suis devant vous. Cette bienveillance elle est nécessaire parce qu’on a besoin aujourd’hui, au-delà des artistes, au-delà des acteurs, d’une jeunesse qui rêve et qu’on leur en donne les moyens. Merci encore une fois. Merci de ce César, merci de ce souvenir et merci aux bienveillants. »

     

    J’ai été émue enfin parce que je me souviens encore de cette projection du film de Frédéric Louf « J’aime regarder les filles » au Festival du Film de Cabourg 2011, un film dans lequel son talent  crevait l’écran (de même que celui de Lou de Lâage  -moins chanceuse lors de ces César mais époustouflante dans « Respire » de Mélanie Laurent- et celui Audrey Bastien). Dans ce film, la littérature cristallisait les sentiments des personnages et, déjà, le personnage incarné par Pierre Niney s’inventait une vie qui n’était pas la sienne. Après d’autres passages remarqués et remarquables au cinéma (notamment dans « Comme des frères »), c’est grâce au film « Yves Saint Laurent » de Jalil Lespert qu’il a donc obtenu son premier César, amplement mérité, incontestable. Une histoire d’amour et de création. Une autre. Finalement, « Un homme idéal » est aussi une histoire d’amour et de création. La comparaison s’arrête là, ce dernier film était aussi et avant tout un thriller haletant.

     

    L’homme (en apparence) idéal incarné par Pierre Niney se prénomme Mathieu. Il a 25 ans et travaille comme déménageur. 25 ans, l’âge, encore, de tous les possibles. L’âge de croire à une carrière d’auteur reconnu. Malgré tous ses efforts, Mathieu n’a pourtant jamais réussi à être édité. C’est lors de l’un de ces déménagements qu’il tombe par hasard sur le manuscrit d’un vieil homme solitaire qui vient de décéder. Un livre sur la guerre d’Algérie qu’il va signer de son nom et envoyer à un éditeur qui va le rappeler, enthousiaste. Ellipse. Mathieu est publié et est devenu le nouvel espoir de la littérature française. Les critiques sont dithyrambiques. Ellipse. Trois ans plus tard, son éditeur attend toujours son nouveau roman. Mathieu vit avec la femme (Ana Girardot) pour laquelle il a eu un véritable coup de foudre alors qu’il n’était encore qu’un inconnu, et il fait désormais partie intégrante de sa riche famille. C’est lors d’un été dans leur magnifique villa dans le sud que les premières menaces vont apparaître, que la façade lisse de l’homme idéal risque de se fissurer. Mathieu va alors devoir plonger dans une spirale mensongère et criminelle pour préserver son secret. A tout prix. Jusqu’où peut-on aller pour réussir  à une époque où la réussite se doit d’être éclatante, instagramée, twittée, facebookée? Pour Mathieu, au-delà des frontières de la légalité et de la morale, sans aucun doute…et pour le plus grand plaisir du spectateur.

     

    Cela commence sur les chapeaux de roue. Sur une route déserte, bouleversé, Mathieu roule à vive allure. La caméra le filme au plus près. Elle l’encercle. Elle l’enserre. D’emblée, nous sommes avec lui. D’emblée, le film est placé sous le sceau de la vitesse, de l’urgence, de la solitude, de la prison, de la menace, de la noirceur, du drame. Il n’en faudra pas beaucoup plus pour que le spectateur soit en empathie avec lui. Les plans suivants le montrent dans son travail de déménageur et surtout acharné à écrire, envoyant ses manuscrits à des maisons d’édition, rappelant, voire harcelant, les maisons d’édition qui lui envoient la traditionnelle lettre (« Le comité de lecture est au regret de… »). Les films s’évertuent souvent à nous montrer à quel point la création, en particulier littéraire, est un acte jubilatoire et un symbole de réussite (nombreux sont les films à se terminer par l’envol d’un personnage qui, de mésestimé, voire méprisé, devient estimable et célèbre en publiant son premier roman), ce qu’elle est (aussi), mais ce film a l’intelligence de montrer que cela peut également être une terrible souffrance, notamment lorsque le talent et/ou le succès ne sont pas au rendez-vous. La vitre de son appartement cassée par Mathieu dans un mouvement de rage, son obstination forcenée, sa hargne nous laissent dès le début entendre que le solitaire et travailleur Mathieu, face à ses échecs, ne va peut-être pas rester aussi lisse et irréprochable qu’il le paraît…

     

    Dès ce premier plan dans cette voiture, Yann Gozlan et Pierre Niney attrapent littéralement le spectateur pour ne plus le lâcher. Les séquences se suivent, d’une précision et d’une efficacité redoutables, souvent séparées par de judicieuses ellipses. Le spectateur est enfermé avec Mathieu, dans le mensonge, dans le cadre. Pierre Niney est de tous les plans ou presque. L’identification est immédiate. La réalisation de Yann Gozlan l’enferme physiquement pour souligner son enfermement mental.

     

    Yann Gozlan (qui a coécrit le scénario avec Guillaume Lemans et Grégoire Vigneron) est indéniablement cinéphile et les multiples références à des classiques du 7ème art sont autant de clins d’œil intégrés au récit (et bien sûr il ne s’agit pas ici de s’y mesurer ou de prétendre à la comparaison avec ces chefs d’œuvres) : « Plein soleil » pour l’usurpation d’identité, le désir de réussite sociale et même une scène très précise qui rappelle la fin du film de René Clément, « La Piscine » pour le cadre trompeusement idyllique du sud de la France, une scène autour de la piscine et le « combat » insidieux des deux hommes pour une femme, « Match point » pour la chance et la famille bourgeoise qui intègre comme un des siens un gendre en apparence (seulement) idéal, « Tess » pour une tâche de sang, Hitchcock pour l’atmosphère… Deray, Clément, Allen, Hitchcock, Polanski : de brillantes références qui imprègnent la mise en scène d’élégance fallacieuse à l’image de celle du personnage principal, sombre et solaire. Alternance de scènes dans la lumière éblouissante, sensuelle, de la chaleur estivale du sud de la France et de scènes dans l’obscurité nocturne, glaciale. La lumière change au gré des émotions de Mathieu. Je vous laisse découvrir laquelle des deux, l’ombre ou la lumière, gagnera…

     

    Le talent qu’il n’a pas pour écrire, Mathieu l’a pour mettre en scène ses mensonges, se réinventant constamment, sa vie devenant une métaphore de l’écriture. N’est-elle pas ainsi avant tout un arrangement avec la réalité, un pillage ? De la vie des autres, de soi-même. Ne faut-il pas avoir réellement écrit et souffert (peut-être de « faux-semblants » ou d’autres choses) pour écrire ? Au-delà de l’aspect thriller palpitant, vraiment réussi (certes jalonné d’invraisemblances mais à l’image du MacGuffin chez Hitchcock, peu importe qu’il y ait des leurres pourvu que le spectateur soit embarqué et que cela y contribue, et en l’occurrence le rythme frénétique procuré par un montage habile ne nous laisse pas le temps de réfléchir), « Un homme idéal » est aussi un film sur l’écriture, plus largement sur la création, et c’est aussi ce qui m’a embarquée (et passionnée) dès le début. Sans oublier cette référence à un de mes livres de chevet, « Martin Eden », sans aucun doute le plus beau roman sur la fièvre créatrice et amoureuse, celles qui emprisonnent, aveuglent et libèrent tout à la fois.

     

    La mise en scène précise, signifiante, le scénario, terriblement efficace, allant à l’essentiel, ne laissant pas le temps de réfléchir, comme si nous étions dans le même étau inextricable que Mathieu, ne seraient pas aussi réussis si l’acteur pour incarner cet « homme idéal » n’avait été aussi judicieusement choisi. Pierre Niney possède l’élégance discrète et troublante et l’ingénuité mystérieuse apparente, essentielles au rôle. De lui émane le charme solaire, insondable, trouble et troublant de Tom Ripley (Alain Delon dans « Plein soleil »), la vulnérabilité de Jean-Paul (Delon bis dans « La Piscine »), l’ambition destructrice et machiavéliquement imaginative de Chris Wilton (Jonathan Rhys-Meyer dans « Match point »,) le tout grâce à une intelligence de jeu à part qui fait qu’il ne ressemble à aucun autre comédien, qu’il peut aussi bien incarner un personnage lunaire, un idéaliste, un menteur, un timide artiste, Hyppolite dans « Phèdre » et jongler avec les Alexandrins (j’espère d’ailleurs, après la démission de celui qui fut le plus jeune Pensionnaire de la Comédie Française, le revoir au théâtre tant j’avais été littéralement estomaquée par ses performances –le mot n’est pas trop fort pour son travail, intellectuel et physique, dans « Un chapeau de paille d’Italie »-) ou encore un héros de comédie romantique…avec la même élégance, justesse et modernité. Face à lui, Ana Girardot incarne comme il se doit l’objet de son amour fou, gracieuse et au charme évanescent.

     

    Avec ce deuxième long-métrage (après « Captifs » sorti en 2010), Yann Gozlan a réussi son pari d’un thriller à la Française (le cinéma français en a connu tant de brillants même si le genre est un peu délaissé : Clouzot, Chabrol hier…, Dominik Moll aussi aujourd’hui). Un film sombre et solaire haletant sur un homme fou d’amour et épris de succès qui, pour rester dans la lumière, va devoir puiser dans ses zones les plus sombres. Un film aussi truffé de références qui raviront les cinéphiles, porté par un acteur, Pierre Niney, qui par la justesse de son jeu, masquant habilement le mensonge derrière son élégance et son ingénuité, comme la caméra de Gozlan, captive et même capture le spectateur et son empathie, et, en filigrane, une passionnante réflexion sur la création. Amis bienveillants, faites-moi confiance, prenez dès aujourd’hui rendez-vous avec « l’homme idéal » bien plus sombre, complexe, mystérieux (et donc intéressant) que son titre le laisse penser (et n’oubliez pas de lire « Martin Eden » si ce n’est déjà fait). Un divertissement haut de gamme à voir et revoir.

     

    Autres critiques liées à celles-ci  :

     

    « Les Emotifs anonymes » de Jean-Pierre Améris

     

    « L’autre monde » de Gilles Marchand

     

    « J’aime regarder les filles » de Frédéric Louf

     

    « Comme des frères » de Hugo Gélin

     

    « Yves Saint Laurent » de Jalil Lespert

     

    « Tess » de Roman Polanski

     

    « Match point » de Woody Allen

     

    « La Piscine » de Jacques Deray

     

    « Plein soleil » de René Clément

     

    « Phèdre » de Racine (Comédie Française)

     

    « Un chapeau de paille d’Italie » d’Eugène Labiche et Marc-Michel (Comédie Française)

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  • Critique de BROTHERS de Jim Sheridan à 20H45 sur Ciné + Emotion

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    Sam (Tobey Maguire) et Grace (Natalie Portman) et leurs deux filles, Isabelle et Maggie, forment en apparence une famille américaine heureuse. Sam est envoyé à nouveau en mission en Afghanistan après être allé chercher son frère Tommy (Jake Gyllenhaal) tout juste sorti de prison. Grace n'aime pas vraiment Tommy mais elle le reçoit poliment. Lorsque Sam est porté disparu en Afghanistan et présumé mort, Tommy s'occupe de Grace et de ses filles. Plus le temps passe, plus Tommy et Grace se rapprochent. Seulement, alors que tout le monde le croyait mort, Sam refait surface et revient de l'enfer...

    Avec un tel synopsis, le pire était à craindre : un énième mélodrame larmoyant et moralisateur sur un triangle amoureux avec pour arrière-plan la guerre en Afghanistan. Jim Sheridan s'en sort pourtant magistralement, toujours sur le fil du rasoir, nous étonnant avec ce qui est prévisible par l'intelligence du scénario, de la réalisation et de l'interprétation. Plutôt que d'insister sur des scènes attendues comme l'annonce du retour de celui que l'on croyait mort qui aurait pu donner lieu à une série de scènes convenues et de dialogues sirupeux, Jim Sheridan préfère les jeux de regards, les silences et le hors champ. Ainsi, lorsque Grace ouvre sa porte et découvre deux militaires, sans qu'une parole soit échangée, elle sait qu'ils viennent annoncer la mort de Sam.

    L'essentiel n'est pas là, ni dans la mort de Sam, ni dans sa réapparition puisque nous le savons d'emblée mais dans l'évolution des personnages et dans la complexité de leurs sentiments. Des rapports entre les deux frères (protecteur/ protégé, responsable/irresponsable) à leur place dans la famille qui vont progressivement s'inverser à ceux entre les deux filles de Sam qui reproduisent le schéma parental.

    Jim Sheridan filme au plus près des visages décuplant ainsi l'intensité provoquée par le jeu à fleur de peau des trois protagonistes. De Tobey Maguire que l'on a l'habitude de voir frêle et lisse et que l'on a d'abord du mal à imaginer en militaire et qui incarne pourtant ce capitaine véritablement habité faisant passer le bleu de son regard de la douceur à la folie et où semblent danser ses fantômes de la guerre, à Jake Gyllenhal qui se responsabilise peu à peu et qui, en un regard qui s'attendrit, se voile, ou se durcit, fait passer sa transformation ou son sentiment d'injustice ou sa révolte silencieuse, à Natalie Portman de qui émane une douceur vigoureuse.

    On ressent la profonde empathie du réalisateur pour chacun de ses personnages dont aucun n'est délaissé, du père de Sam et Tommy (Sam Shepard) qui exprimait par la violence l'indicible traumatisme de la guerre du Vietnam à une des filles de Sam qui, lors d'une scène magistrale d'une intensité inouïe, tente de faire comprendre son malaise tandis que chacun tente de dissimuler le sien. Cette scène fait écho à une scène du début et montre l'inversion des rapports entre les deux frères (celui qui perd son sang-froid étant celui qui tentait de raisonner l'autre au début) et en miroir les rapports entre les deux filles de Sam. Pas un regard, pas une parole qui ne soient superflus. La partition est celle d'un virtuose de la psychologie humaine qui à nouveau explore les thèmes de la famille et du pardon (les similitudes sont nombreuses notamment avec « In America » qui était moins nuancé et plus larmoyant mais néanmoins également très réussi.)

    Et puis il y a la guerre contre laquelle ce film est un vibrant plaidoyer. A l'image d'un film comme le Grand prix du Festival du Cinéma Américain de Deauville « The Messenger » d'Oren Moverman (ou encore l'excellent « American son » de Neil Abramson l'année précédente ), en montrant les plaies béantes d'une guerre qu'on essaie de cacher, le traumatisme de ceux qui en reviennent, l'incompréhension ou l'impuissance des familles qui ne peuvent savoir ce qui s'est réellement passé, Jim Sheridan stigmatise les conséquences tragiques d'une guerre qui accompagnent ceux qui l'ont vécue bien après qu'ils en aient quitté le terrain (dès le début Sam dit ainsi se sentir étrangement chez lui lorsqu'il retourne en Afghanistan).

    Jim Sheridan, avec ce remake du film éponyme danois réalisé en 2006 par Susanne Bier, nous livre à la fois un plaidoyer pacifiste tout en retenue et sa vision pudique et sensible, singulière mais universelle de la fratrie et de la complexité des rapports familiaux dont chaque regard ou chaque réplique sonnent incroyablement juste.

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  • Mode - Une marque très "in the mood for cinema" à découvrir: From Paris to by Floriane Fosso

    J’inaugure aujourd’hui  ici une nouvelle rubrique consacrée à la mode (une rubrique qui existait déjà sur mes blogs Inthemoodforluxe.com et Inthemoodforhotelsdeluxe.com -ici-mais que je souhaite ici mettre en avant et développer).

     

    mode, Floriane Fosso, Cannes, chic

     

     

     Je vous présenterai régulièrement des looks mais aussi des marques que je porte ainsi que des jeunes créateurs que j’apprécie.

     

    Je débute aujourd’hui avec une jeune créatrice que je souhaite mettre en avant, Floriane Fosso, qui, il y a six mois, a réalisé son rêve : lancer une collection de prêt-à-porter.  Un projet que cette dernière définit « à taille humaine » et judicieusement intitulé « From Paris to by Floriane Fosso ».

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  • Critique de AWAY WE GO de Sam Mendes à 20H45 sur Ciné + Club

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    Quel film peut-on bien réaliser après le chef d'œuvre "Les Noces Rebelles" (si vous ne l'avez pas encore vu, précipitez-vous sur le DVD,  et rendez-vous à la fin de cet article pour lire ma critique en espérant vous convaincre de voir ce qui est sans doute un des trois meilleurs films de cette année et qui frôle la perfection) ? Plutôt que de réaliser un film semblable qui aurait forcément souffert de la comparaison,  Sam Mendès a eu la bonne idée de réaliser un film qui est quasiment le contrepied du précèdent...

     Certes, Verona (Maya Rudolph) et Burt (John Krasinski), cherchent ici aussi un ailleurs, pas pour échapper à leur vie de couple étouffante, mais pour trouver l'endroit parfait pour fonder une famille. Ils viennent en effet d'apprendre qu'ils vont devenir parents et la seule raison pour laquelle ils vivaient dans la ville de province dans laquelle ils habitaient était la présence des parents de Burt qui ont brusquement décidé de déménager. Ils vont donc partir rendre visite à leurs familles et amis  pour trouver le bon endroit. Le bon modèle.

    Aux antipodes du glamour hollywoodien, Sam Mendes a choisi deux acteurs non auréolés de tout le mythe qui entourait ceux de son précèdent film (Kate Winslet et Leonardo Di Caprio), un couple ordinaire  auquel chacun est censé pouvoir s'identifier. Une autre histoire de couple. Un couple d'amoureux qui se suffisent l'un à l'autre et pour qui trouver le bon endroit est le moyen de se retrouver et non d'échapper à son alter ego. D'ailleurs, la protagoniste féminine du couple s'appelle Verona. La ville des amoureux immortalisée par Shakespeare. Tout un symbole... même si ici pas de Capulet et Montaigu pour mettre à mal leur amour. Simplement des questionnements, un cheminement vers l'âge adulte. A travers les rencontres qu'ils vont effectuer, les lieux qu'ils vont visiter, ils vont grandir, prendre la mesure de la responsabilité qui va bientôt leur incomber.

    Leur parcours est divisé en saynètes sur un schéma assez semblable. Ces saynètes sont séparées par des panneaux indiquant le nom de l'endroit où ils arrivent et la vérité (du couple qui les accueille et de leur attitude avec leurs enfants) apparaît le plus souvent lors de scènes de repas, là aussi propices à créer l'identification, aussi excentriques soient les réalités auxquelles ils sont alors confrontés : du couple qui se moque de ses propres enfants au couple hippie aux principes éducatifs improbables où l'enfant trône comme un roi en bout de table mais est finalement nié. Ils vont alors être confrontés à tous les modèles pour trouver le leur : de la mère qui s'en va à celle qui adopte parce qu'elle ne peut pas avoir d'enfants.

    Mais ne vous y trompez pas, il s'agit aussi et avant tout d'une comédie. Parfois décalée, et surtout rafraîchissante comme peut l'être un premier film qui ne démériterait pas dans la compétition des films indépendants du Festival du Cinéma Américain de Deauville. Les deux acteurs principaux, à la fois ordinaires et originaux et surtout talentueux, y sont aussi pour beaucoup. Ce long-métrage qui est le cinquième de Sam Mendes  a pourtant la fraîcheur d'un premier film !

    Derrière ce road movie rafraîchissant, plus grave qu'il n'y paraît, Sam Mendes débusque à nouveau les faux-semblants et met de nouveau en scène ses thèmes de prédilection : l'hypocrisie sociale du couple et ce qu'il dissimule derrière une apparence de respectabilité (et cela commence avec les parents de Burt, dans une scène irrésistible dans laquelle ils témoignent de leur redoutable égoïsme), la sensation d'étouffement (à l'intérieur du couple ou d'un lieu, ici) et l'envie d'y échapper.

    A l'image du film, ses personnages principaux sont attachants par leur simplicité, fauchés mais amoureux et heureux. Ce road movie va être leur parcours initiatique.

    Sam Mendes filme  au plus près des visages pour aller au-delà des apparences.  La musique d'Alexi Murdoch baigne l'ensemble dans une mélodie envoûtante et le scénario original de Dave Eggers et Vendela Vida, s'il ne nous époustoufle pas, nous charme incontestablement, par sa tendresse et son humour.

    Ailleurs nous irons, signifie le titre. Ailleurs Sam Mendes nous a emmenés. Tout en nous rappelant que le bonheur c'est souvent non pas d'échapper à son destin mais de s'y confronter. Et que, le  plus souvent, il ne se situe pas ailleurs, mais bel et bien là, juste à côté de nous.

     Je ne vous surprendrai pas en vous disant que j'ai, et de loin, préféré la complexité, la noirceur, la subtilité, la beauté cruelle des « Noces Rebelles » mais je vous recommande également ce « Away we go » qui, en vous emmenant ailleurs avec un mélange d'apparente et séduisante légèreté et de touchante gravité, vous parlera sans doute aussi, d'ici et de vous. Alors... sur mes recommandations, avec Sam Mendès, ailleurs vous irez !

    Sortie en salles: le 4 novembre 2009

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  • Festival du Film Britannique de Dinard 2015 : le programme (premiers éléments)

    Cliquez sur l'affiche du 26ème Festival du Film Britannique de Dinard ci-dessous pour découvrir les premiers éléments de programmation de cette édition 2015, à lire sur mon blog http://inthemoodforfilmfestivals.com.

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  • Critique de MATCH POINT de Woody Allen à 20H45 sur Ciné + Emotion

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    Un film de Woody Allen comme le sont ceux de la plupart des grands cinéastes est habituellement immédiatement reconnaissable, notamment par le ton, un humour noir corrosif, par la façon dont il (se) met en scène, par la musique jazz, par le lieu (en général New York).

    Cette fois il ne s'agit pas d'un Juif New Yorkais en proie à des questions existentielles mais d'un jeune irlandais d'origine modeste, Chris Wilton (Jonathan Rhys-Meyer), qui se fait employer comme professeur de tennis dans un club huppé londonien. C'est là qu'il sympathise avec Tom Hewett (Matthew Goode), jeune homme de la haute société britannique avec qui il partage une passion pour l'opéra. Chris fréquente alors régulièrement les Hewett et fait la connaissance de Chloe (Emily Mortimer), la sœur de Tom, qui tombe immédiatement sous son charme. Alors qu'il s'apprête à l'épouser et donc à gravir l'échelle sociale, il rencontre Nola Rice (Scarlett Johansson), la pulpeuse fiancée de Tom venue tenter sa chance comme comédienne en Angleterre et, comme lui, d'origine modeste. Il éprouve pour elle une attirance immédiate, réciproque. Va alors commencer entre eux une relation torride...

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    Je mets au défi quiconque n'ayant pas vu le nom du réalisateur au préalable de deviner qu'il s'agit là d'un film de Woody Allen, si ce n'est qu'il y prouve son génie, dans la mise en scène, le choix et la direction d'acteurs, dans les dialogues et dans le scénario, « Match point » atteignant d'ailleurs pour moi la perfection scénaristique.

    Woody Allen réussit ainsi à nous surprendre, en s'affranchissant des quelques « règles » qui le distinguent habituellement : d'abord en ne se mettant pas en scène, ou en ne mettant pas en scène un acteur mimétique de ses tergiversations existentielles, ensuite en quittant New York qu'il a tant sublimée. Cette fois, il a en effet quitté Manhattan pour Londres, Londres d'une luminosité obscure ou d'une obscurité lumineuse, en tout cas ambiguë, à l'image du personnage principal, indéfinissable.

    Dès la métaphore initiale, Woody Allen nous prévient (en annonçant le thème de la chance) et nous manipule (pour une raison que je vous laisse découvrir), cette métaphore faisant écho à un rebondissement (dans les deux sens du terme) clé du film. Une métaphore sportive qu'il ne cessera ensuite de filer : Chris et Nola Rice se rencontrent ainsi autour d'une table de ping pong et cette dernière qualifie son jeu de « très agressif »...

    « Match point » contrairement à ce que son synopsis pourrait laisser entendre n'est pas une histoire de passion parmi d'autres (passion dont il filme d'ailleurs et néanmoins brillamment l'irrationalité et la frénésie suffocante que sa caméra épouse) et encore moins une comédie romantique (rien à voir avec « Tout le monde dit I love you » pour lequel Woody Allen avait également quitté les Etats-Unis) ; ainsi dès le début s'immisce une fausse note presque imperceptible, sous la forme d'une récurrente thématique pécuniaire, symbole du mépris insidieux, souvent inconscient, que la situation sociale inférieure du jeune professeur de tennis suscite chez sa nouvelle famille, du sentiment d'infériorité que cela suscite chez lui mais aussi de sa rageuse ambition que cela accentue ; fausse note qui va aller crescendo jusqu'à la dissonance paroxystique, dénouement empruntant autant à l'opéra qu'à la tragédie grecque. La musique, notamment de Verdi et de Bizet, exacerbe ainsi encore cette beauté lyrique et tragique.

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    C'est aussi le film des choix cornéliens, d'une balle qui hésite entre deux camps : celui de la passion d'un côté, et de l'amour, voire du devoir, de l'autre croit-on d'abord ; celui de la passion amoureuse d'un côté et d'un autre désir, celui de réussite sociale, de l'autre (Chris dit vouloir « apporter sa contribution à la société ») réalise-t-on progressivement. C'est aussi donc le match de la raison et de la certitude sociale contre la déraison et l'incertitude amoureuse.

    A travers le regard de l'étranger à ce monde, Woody Allen dresse le portrait acide de la « bonne » société londonienne avec un cynisme chabrolien auquel il emprunte d'ailleurs une certaine noirceur et une critique de la bourgeoisie digne de La cérémonie que le dénouement rappelle d'ailleurs.

    Le talent du metteur en scène réside également dans l'identification du spectateur au (anti)héros et à son malaise croissant qui trouve finalement la résolution du choix cornélien inéluctable, aussi odieuse soit-elle. En ne le condamnant pas, en mettant la chance de son côté, la balle dans son camp, c'est finalement notre propre aveuglement ou celui d'une société éblouie par l'arrivisme que Woody Allen stigmatise. Parce-que s'il aime (et d'ailleurs surtout désire) la jeune actrice, Chris aime plus encore l'image de lui-même que lui renvoie son épouse : celle de son ascension.

    Il y a aussi du Renoir dans ce Woody Allen là qui y dissèque les règles d'un jeu social, d'un match fatalement cruel ou même du Balzac car rarement le ballet de la comédie humaine aura été aussi bien orchestré.

    Woody Allen signe un film d'une férocité jubilatoire, un film cynique sur l'ironie du destin, l'implication du hasard et de la chance. Un thème que l'on pouvait notamment trouver dans « La Fille sur le pont » de Patrice Leconte. Le fossé qui sépare le traitement de ce thème dans les deux films est néanmoins immense : le hiatus est ici celui de la morale puisque dans le film de Leconte cette chance était en quelque sorte juste alors qu'elle est ici amorale, voire immorale, ...pour notre plus grand plaisir. C'est donc l'histoire d'un crime sans châtiment dont le héros, sorte de double de Raskolnikov, est d'ailleurs un lecteur assidu de Dostoïevski (mais aussi d'un livre sur Dostoïevski, raison pour laquelle il épatera son futur beau-père sur le sujet), tout comme Woody Allen à en croire une partie la trame du récit qu'il lui « emprunte ».

    Quel soin du détail pour caractériser ses personnages, aussi bien dans la tenue de Nola Rice la première fois que Chris la voit que dans la manière de Chloé de jeter négligemment un disque que Chris vient de lui offrir, sans même le remercier . Les dialogues sont tantôt le reflet du thème récurrent de la chance, tantôt d'une savoureuse noirceur (« Celui qui a dit je préfère la chance au talent avait un regard pénétrant sur la vie », ou citant Sophocle : « n'être jamais venu au monde est peut-être le plus grand bienfait »...). Il y montre aussi on génie de l'ellipse (en quelques détails il nous montre l'évolution de la situation de Chris...).

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    Cette réussite doit aussi beaucoup au choix des interprètes principaux : Jonathan Rhys-Meyer qui interprète Chris, par la profondeur et la nuance de son jeu, nous donnant l'impression de jouer un rôle différent avec chacun de ses interlocuteurs et d'être constamment en proie à un conflit intérieur ; Scarlett Johansson d'une sensualité à fleur de peau qui laisse affleurer une certaine fragilité (celle d'une actrice en apparence sûre d'elle mais en proie aux doutes quant à son avenir de comédienne) pour le rôle de Nola Rice qui devait être pourtant initialement dévolu à Kate Winslet ; Emily Mortimer absolument parfaite en jeune fille de la bourgeoisie londonienne, naïve, désinvolte et snob qui prononce avec la plus grande candeur des répliques inconsciemment cruelles(« je veux mes propres enfants » quand Chris lui parle d'adoption ...). Le couple que forment Chris et Nola s'enrichit ainsi de la fougue, du charme électrique, lascif et sensuel de ses deux interprètes principaux.

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    La réalisation de Woody Allen a ici l'élégance perfide de son personnage principal, et la photographie une blancheur glaciale semble le reflet de son permanent conflit intérieur.

    Le film, d'une noirceur, d'un cynisme, d'une amoralité inhabituels chez le cinéaste, s'achève par une balle de match grandiose au dénouement d'un rebondissement magistral qui par tout autre serait apparu téléphoné mais qui, par le talent de Woody Allen et de son scénario ciselé, apparaît comme une issue d'une implacable et sinistre logique et qui montre avec quelle habileté le cinéaste a manipulé le spectateur (donc à l'image de Chris qui manipule son entourage, dans une sorte de mise en abyme). Un match palpitant, incontournable, inoubliable. Un film audacieux, sombre et sensuel qui mêle et transcende les genres et ne dévoile réellement son jeu qu'à la dernière minute, après une intensité et un suspense rares allant crescendo. Le témoignage d'un regard désabusé et d'une grande acuité sur les travers et les blessures de notre époque. Un chef d'œuvre à voir et à revoir !

    « Match point » est le premier film de la trilogie londonienne de Woody Allen avant « Scoop » et « Le rêve de Cassandre ».

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