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  • Conférence de presse et critique de « Time out » de Andrew Niccol avec Justin Timberlake et Amanda Seyfried

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    En 1998, dans le cadre du jury jeunes du Festival du Film de Paris, je découvrais « Bienvenue à Gattaca » d’Andrew Niccol en sélection officielle du festival.  Un choc. Un film malin et passionnant, une brillante métaphore de l’eugénisme et des risques de la génétique servie par une mise en scène époustouflante et un scénario d’une rigueur implacable.
     
    Que ce soit dans « Le Terminal » ou « The Truman show » (deux films dont il avait écrit les scénarii), pour mettre en exergue les risques de déshumanisation de notre société, Andrew Niccol mettait en scène  une situation poussée à l’extrême, souvent métaphorique d’un mal de notre société, recourant à la science-fiction mêlant anticipation et réalité.

    C’est à nouveau le cas dans « Time out » dont il est à la fois scénariste, réalisateur et producteur. Le temps a remplacé l’argent. Les hommes ne vieillissent plus après 25 ans. Mais après cet âge, chaque minute compte et vaut de l’or, et il faut sans cesse gagner du temps (au sens propre) pour rester en vie. Alors qu’une partie de la société a accumulé du temps par dizaine d’années et ne compte dans sa population que des gens riches, jeunes et beaux pour l’éternité, l’autre partie dont elle est séparée par une frontière qui se franchit en donnant de son temps de vie, est condamnée à mendier, voler, emprunter pour quelques heures de vie supplémentaires et pour échapper à la mort. Accusé à tort de meurtre après qu’un inconnu à qui il a sauvé la vie lui ait donné des années, un des habitants du ghetto Will Salas (Justin Timberlake) prend alors la fuite avec une otage de « l’autre monde », Sylvia Weis (Amanda Seyfried). Elle va devenir son alliée dans cette course effrénée contre et pour le temps.

    Une nouvelle fois, l’idée était brillante : illustrer au sens propre l’expression « le temps c’est de l’argent » pour souligner les disparités d’une société capitaliste exacerbée où les uns s’enrichissent au profit des autres, où les uns détiennent le bien le plus précieux qui soit (l’immortalité) au détriment des autres qui ne luttent que pour quelques heures ou même minutes de vie supplémentaires. Certains ont des milliers d’années, d’autres 24 heures et des expressions comme « Vous avez deux minutes » prennent ironiquement un sens tout autre et vital. « Pour peu d’immortels beaucoup doivent mourir ». Le stock et le décompte du temps que chacun possède est marqué par un code sur le bras qui en rappelle un autre, dramatiquement célèbre, pour montrer la volonté d’extermination des habitants des ghettos par les immortels qui les exploitent, une autre forme d’eugénisme pour illustrer le culte de la jeunesse poussé à l’excès, de même que le cynisme de la société puisque la vie même y devient monnayable.

     Tous les ingrédients étaient donc là pour faire de ce film un thriller au suspense quasi hitchcockien et, au départ, Andrew Niccol nous donne l’illusion d’y parvenir, notamment dans cette scène trépidante où la mère de Will Salas (Olivia Wilde en réalité plus jeune que Justin Timberlake) voit le bus, le temps, la vie lui échapper sous les yeux de son fils qui arrive la fatidique ultime seconde trop tard. La première partie alterne judicieusement entre ironie tragique et scènes de suspense avant de basculer dans la seconde dans le blockbuster.

    La première partie du film est en effet haletante et la photographie de Roger Deakins (L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford, Les noces rebelles, True grit) illustre magnifiquement le propos du film opposant les couleurs du ghetto à l’univers grisâtre et aseptisé de ceux dont le temps n’est plus compté. Malheureusement le film reste un peu trop dans cette métaphore dichotomique qui ne cesse de se répéter : bourse de la vie etc. Dans la deuxième partie, ce qui aurait pu devenir une palpitante course contre la montre se transforme ainsi en blockbuster entre « Robin des bois » et « Bonnie and Clyde » avec un manichéisme un peu trop appuyé.

    On en ressort avec une impression d’inachevé, la déception que ce film ne soit pas à la hauteur de sa brillante idée de départ d’autant plus que la première partie était plutôt prometteuse. Un film qui mérite néanmoins d’être vu, étant bien au-dessus d’un grand nombre de blockbusters vides de sens et qui, s’il ne vous fera pas gagner de votre précieux temps, ne vous en fera pas perdre et vous fera au moins réfléchir sur la valeur inestimable du temps et de la jeunesse, sur cette course vaine pour repousser les stigmates finalement invincibles du temps et sur les vertus de la mortalité, finalement. Carpe diem.

    Je vous invite à découvrir la bande-annonce du film...vrai modèle du genre, particulièrement réussie.

    Sortie en salles : le 23 novembre 2011

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     Le film brassant de nombreux sujets passionnants, j’étais ravie de pouvoir assister à la Conférence de presse, à l’hôtel Bristol, avec Amanda Seyfried et Justin Timberlake. Je vous laisse découvrir ma vidéo ci-dessous.

     

  • Ouverture du Festival du Film de Sarlat 2011 avec "La Délicatesse" de David et Stéphane Foenkinos

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    Non, je ne suis pas encore partie dans de nouvelles pérégrinations festivalières, cette fois à Sarlat, mais je tenais néanmoins à vous parler de ce festival qui présente dans sa sélection de nombreux films récemment recommandés par inthemoodforcinema.com parmi ses 29 avant-premières, à commencer par le film d'ouverture, "La Délicatesse" de David et Stéphane Foenkinos-dont vous pourrez retrouver ma critique, ici-, projeté ce soir à 19H, un de mes grands coups de coeur de cette année.

     Parmi les films en sélection, d'autres grands coups de coeur de cette année comme "Une bouteille à la mer" de Thierry Binisti (primé à Saint Jean de Luz mais aussi récemment au Festival de La Réunion)  ou "Louise Wimmer" de Cyril Mennegun découverts au Festival de Saint Jean de Luz (retrouvez mon compte-rendu du festival, ici) mais aussi "17 filles" de Muriel et Delphine Coulin, prix Michel d'Ornano du dernier Festival du Cinéma Américain de Deauville ou "Elena" d'Andrei Zvianguintsev qui fait par ailleurs l'ouverture de la semaine du cinéma russe à Paris, également ce soir.

     Vous pourrez également y découvrir d'autres films très attendus comme "Les Lyonnais" d'Olivier Marchal ou encore "L'ordre et la morale" de Mathieu Kassovitz.

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  • Soirée hommage à Yves Montand sur France 2: documentaire et "César et Rosalie" de Claude Sautet (critique)

     

     

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    Demain, 8 novembre, sur France 2, à 20H35, sera diffusé le documentaire de Patrick Rotman « Ivo Livi, dit Yves Montand »  à l’occasion d’une soirée hommage consacrée à l’artiste pour les 20 ans de sa disparition, celui-ci étant décédé le 9 novembre 1991. Il fait partie de ces comédiens qui m’ont fait aimer le cinéma avec des films comme "Les Portes de la nuit" de Marcel Carné, "Le Salaire de la peur" d'Henri-Georges Clouzot, "Z" et "l'Aveu" de Costa-Gavras, "Le Cercle rouge" de Jean-Pierre Melville, "César et Rosalie" et "Vincent, François, Paul et les autres" de Claude Sautet, "Police python 357" d'Alain Corneau, "Jean de Florette" de Claude Berri...parmi tant d'autres qui montrent la diversité de son incroyable talent.

     Le documentaire raconte son parcours exceptionnel et « l'ascension d'un petit immigré italien qui devient une star internationale, l'extraordinaire carrière au music-hall, les dizaines de rôles sur grand écran, la rencontre avec des femmes qui sont elles-mêmes des mythes : Signoret, Piaf, Marilyn, l'engagement enfin dans les combats de son siècle. Faire un film sur Montand, c'est au fond parcourir un incroyable voyage depuis les collines de sa Toscane natale jusqu'aux cintres du Metropolitan Opera de New York. »

    Mais surtout, à 22H40, à la diffusion de ce documentaire succèdera celle d’un de mes films préférés « César et Rosalie » de Claude Sautet. Vous voilà donc prévenus : vous n’aurez plus aucune excuse et ne pourrez pas me dire que vous ne l’avez pas vu. Retrouvez ma critique du film, ci-dessous.

    Critique de "César et Rosalie" de Claude Sautet (1972)

     
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     Il y a les cinéastes qui vous font aimer le cinéma, ceux qui vous donnent envie d'en faire, ceux qui vous font appréhender la vie différemment, voire l'aimer davantage encore. Claude Sautet, pour moi, réunit toutes ces qualités.

     Certains films sont ainsi comme des rencontres, qui vous portent, vous enrichissent, vous influencent ou vous transforment même parfois.  Les films de Claude Sautet, pour moi, font partie de cette rare catégorie et de celle, tout aussi parcimonieuse, des films dont le plaisir à les revoir, même pour la dixième fois, est toujours accru par rapport à la première projection. J'ai beau connaître les répliques par cœur, à chaque fois César et Rosalie m'emportent dans leur tourbillon de vie joyeusement désordonné, exalté et exaltant.

     Claude Beylie parlait de « drame gai » à propos de César et Rosalie, terme en général adopté pour la Règle du jeu de Renoir, qui lui sied également parfaitement. Derrière l'exubérance et la truculence de César, on ressent en effet la mélancolie sous-jacente. César donc c'est Yves Montand, un ferrailleur qui a réussi, vivant avec Rosalie (Romy Schneider) divorcée d'Antoine (Umberto Orsini), et qui aime toujours David (Sami Frey), un dessinateur de bandes dessinées, sans cesser d'aimer César. Ce dernier se fâche puis réfléchit et abandonne Rosalie à David. Des liens de complicité et même d'amitié se tissent entre les deux hommes si bien que Rosalie, qui veut être aimée séparément par l'un et par l'autre, va tenter de s'interposer entre eux, puis va partir...

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     Dans ce film de 1972, qui fut souvent comparé à Jules et Jim de Truffaut, on retrouve ce qui caractérise les films de Claude Sautet : les scènes de café, de groupe et la solitude dans le groupe, la fugacité du bonheur immortalisée, l'implicite dans ce qui n'est pas- les ellipses- comme dans ce qui est-les regards- (Ah, ces derniers regards entre les trois personnages principaux! Ah, le regard de David lorsque l'enfant passe des bras de Rosalie à ceux de César, scène triangulaire parfaitement construite!).

     Sur la tombe de Claude Sautet au cimetière Montparnasse, il est écrit : « Garder le calme devant la dissonance », voilà probablement la phrase qui définirait aussi le mieux son cinéma : d'abord parce que son cinéma est un cinéma de la dissonance, de l'imprévu, de la note inattendue dans la quotidienneté (ici, l'arrivée de David) et ensuite parce que cette épitaphe fait référence à la passion de Claude Sautet pour la musique. Claude Sautet a ainsi été critique musical au journal « Combat », un journal de la Résistance, il avait ainsi une vraie passion pour le jazz et pour Bach, notamment. Il a par ailleurs consacré un film entier à la musique, « Un cœur en hiver », (d'après un recueil de nouvelles de Lermontov : « Un héros de notre temps ») le meilleur selon moi tant les personnages y sont ambivalents, complexes, bref humains, et tout particulièrement le personnage de Stéphane interprété par Daniel Auteuil, le « cœur en hiver », pouvant donner lieu à une interprétation différente à chaque vision du film. Le tempo de ses films est ainsi réglé comme une partition musicale, impeccablement rythmée, une partition dont on a l'impression qu'en changer une note ébranlerait l'ensemble de la composition. C'est évidemment aussi le cas dans « César et Rosalie ».

    « L'unité dans la diversité ».  Pour qualifier le cinéma de Claude Sautet et l'unité qui le caractérise malgré une diversité apparente, nous pourrions ainsi paraphraser cette devise de l'Union européenne. Certes a priori, « L'arme à gauche » est un film très différent de « Vincent, François, Paul et les autres », pourtant si son premier film  « Classe tous risques »  est un polar avec Lino Ventura et Jean-Paul Belmondo («  Bonjour sourire », une comédie, a été renié par Claude Sautet qui n'en avait assuré que la direction artistique), nous pouvons déjà y trouver ce fond de mélancolie qui caractérise tous ses films. Tous ses films se caractérisent d'ailleurs aussi par le suspense (il était fasciné par Ford et Hawks ) : le suspense sentimental avant tout, concourant à créer des films toujours haletants et fascinants.  Claude Sautet citait ainsi souvent la phrase de Tristan Bernard : « il faut surprendre avec ce que l'on attend ». On ne peut certainement pas reprocher au cinéma de Claude Sautet d'être démesurément explicatif, c'est au contraire un cinéma de l'implicite, des silences et du non-dit. Pascal Jardin disait  de Claude Sautet qu'il « reste une fenêtre ouverte sur l'inconscient ».

    Dans « Nelly et M. Arnaud » se noue ainsi une relation ambiguë entre un magistrat à la retraite, misanthrope et solitaire, et une jeune femme au chômage qui vient de quitter son mari. Au-delà de l'autoportrait ( Serrault y ressemble étrangement à Sautet ), c'est l'implicite d'un amour magnifiquement et pudiquement esquissé, composé jusque dans la disparition progressive des livres d'Arnaud, dénudant ainsi sa bibliothèque et faisant référence à sa propre mise à nu. La scène pendant laquelle Arnaud regarde Nelly dormir, est certainement une des plus belles scènes d'amour du cinéma: silencieuse, implicite, bouleversante. Le spectateur retient son souffle, le suspense, presque hitchcockien y est à son comble. Sautet a atteint la perfection dans son genre, celui qu'il a initié: le thriller des sentiments.

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    Les films de Sautet ont tous des points communs : le groupe, (dont « Vincent, François, Paul et les autres » est le film emblématique), des personnages face à leurs solitudes malgré ce groupe, des scènes de café,( « A chaque film, avouait Sautet, je me dis toujours : non, cette fois tu n'y tournes pas. Et puis, je ne peux pas m'en empêcher. Les cafés, c'est comme Paris, c'est vraiment mon univers. C'est à travers eux que je vois la vie. Des instants de solitude et de rêvasseries. ») les personnages filmés à travers les vitres de ces mêmes cafés, des scènes de pluie qui sont souvent un élément déclencheur, des scènes de colère (peut-être inspirées par les scènes de colère incontournables dans les films de Jean Gabin, Sautet ayant ainsi revu « Le jour se lève » ...17 fois en un mois!), des femmes combatives souvent incarnées par Romy Schneider puis par Emmanuelle Béart, des fins souvent ouvertes et avant tout un cinéma de personnages : César, Rosalie, Nelly, Arnaud, Vincent, François, Paul, Max, Mado, ...et les autres, des personnages égarés affectivement et/ou socialement, des personnages énigmatiques et ambivalents.

    Claude Sautet, en 14 films, a imposer un style, des films inoubliables, un cinéma du désenchantement enchanteur, d'une savoureuse mélancolie, de l'ambivalence et de la dissonance jubilatoires, une symphonie magistrale dont chaque film est un morceau unique indissociable de l'ensemble. Il a signé aussi bien des "drames gais" avec « César et Rosalie », ou encore le trop méconnu, fantasque et extravagant « Quelques jours avec moi », un film irrésistible, parfois aux frontières de l'absurde, mais aussi des films plus politiques notamment le très sombre « Mado » dans lequel il dénonce l'affairisme et la corruption...

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     « Les films de Claude Sautet touchent tous ceux qui privilégient les personnages par rapport aux situations, tous ceux qui pensent que les hommes sont plus importants que ce qu'ils font (..). Claude Sautet c'est la vitalité. »,  disait Truffaut. Ainsi, personne mieux que Claude Sautet ne savait  et n'a su dépeindre des personnages attachants, fragiles mais si vivants (à l'exception de Stephan interprété par Daniel Auteuil dans Un cœur en hiver, personnage aux émotions anesthésiées quoique...) comme le sont César et Rosalie.

     Ici au contraire ce n'est pas « un cœur en hiver », mais un cœur qui bat la chamade et qui hésite, celui de Rosalie, qui virevolte avec sincérité, et qui emporte le spectateur dans ses battements effrénés. Et effectivement on retrouve cette vitalité, celle de la mise en scène qui épouse le rythme trépidant de César face au taciturne David. César qui pourrait agacer ( flambeur, gouailleur, lâche parfois) face à la fragilité et la discrétion de l'artiste David. Deux hommes si différents, voire opposés, dans leur caractérisation comme dans leur relation à Rosalie que Sautet dépeint avec tendresse, parfois plutôt une tendre cruauté concernant César.

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     Là se trouve la fantaisie, dans ce personnage interprété magistralement par Yves Montand, ou dans la relation singulière des trois personnages, si moderne. Un film qui n'est pas conventionnel jusque dans sa magnifique fin, ambiguë à souhait. Sans effets spéciaux. Simplement par la caractérisation ciselée de personnages avec leurs fêlures et leur déraison si humaines.

     On a souvent dit de Claude Sautet était le peintre de la société des années 70 mais en réalité la complexité des sentiments de ses personnages disséquée avec une rare acuité est intemporelle.  S'il est vrai que la plupart de ses films sont des tableaux de la société contemporaine, notamment de la société d'après 1968, et de la société pompidolienne, puis giscardienne, et enfin mitterrandienne,  ses personnages et les situations dans lesquelles il les implique sont avant tout universels, un peu comme « La Comédie Humaine » peut s'appliquer aussi bien à notre époque qu'à celle de Balzac.

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    « César et Rosalie » est un film à l'image de son personnage principal qui insuffle ce rythme précis et exalté : truculent et émouvant, mélancolique et joyeux, exubérant et secret. Un film intemporel et libre, qui oscille entre le rire et les larmes, dans lequel tout est grave et rien n'est sérieux (devise crétoise, un peu la mienne aussi). Un film délicieusement amoral que vous devez absolument voir ou revoir ne serait-ce que pour y voir deux monstres sacrés (Romy Schneider et Yves Montand, l'une parfaite et resplendissante dans ce rôle de femme riche de contradictions moderne, amoureuse, indépendante, enjouée, et triste, incarnant à elle seule les paradoxes de ce « drame gai » ; l'autre hâbleur, passionné, cabotin, bavard, touchant face à Samy Frey silencieux, posé, mystérieux, séduisant mais tous finalement vulnérables, et les regards traversés de voiles soudains de mélancolie  ) au sommet de leur art et pour entendre des dialogues aussi incisifs, précis que savoureux (comme pour le scénario également cosigné par Jean-Loup Dabadie)...

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     Claude Sautet disait lui-même que ses films n'étaient pas réalistes mais des fables. Son univers nous envoûte en tout cas, et en retranscrivant la vie à sa « fabuleuse » manière, il l'a indéniablement magnifiée. Certains lui ont reproché son classicisme, pour le manque de réflexivité de son cinéma, comme on le reprocha aussi à Carné dont Sautet admirait tant « Le jour se lève. » On lui a aussi reproché de toujours filmer le même milieu social (bourgeoisie quinquagénaire et citadine). Qu'importe ! Un peu comme l'ours en peluche du « Jour se lève » qui a un œil qui rit et un autre qui pleure, nous ressortons de ses films, entre rires et larmes, bouleversés, avec l'envie de vivre plus intensément encore car là était le véritable objectif de Claude Sautet : nous « faire aimer la vie »...et il y est parvenu, magistralement. Personne après lui n'a su nous raconter des « histoires simples » aux personnages complexes qui nous parlent aussi bien de « choses de la vie ».

     

    Retrouvez également ma critique de "Un coeur en hiver" de Claude Sautet 

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  • Conférence de presse de "Time out" d'Andrew Niccol avec Justin Timberlake et Amanda Seyfried

    En attendant la critique, voici la vidéo de la conférence de presse de "Time out" d'Andrew Niccol avec Justin Timberlake et Amanda Seyfried.

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  • Critique de "Hors-la-loi" de Rachid Bouchareb: à ne pas manquer, ce soir, à 20H50, sur Canal plus

    Un petit ajout à la nouvelle rubrique "A voir à la télévision" du blog pour vous dire de ne pas manquer un film sujet à une polémique stérile -et injustifiée- lors de sa sortie et malheureusement décrié à tort. Je vous recommande vraiment de découvrir ce beau film qui n'a malheureusement pas reçu l'accueil qu'il aurait mérité.

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    horslaloi2.jpgRetrouvez ici ce que je vous disais à propos du film, suite à sa projection cannoise, et retrouvez mon interview de Bernard Blancan qui a eu la gentillesse de répondre à mes questions au lendemain de la projection cannoise du film (ci-dessous).

    Retrouvez également mon compte rendu de la conférence de presse cannoise en cliquant ici.

     

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  • Retrouvez ma chronique sur My Major Company Books sur le thème "Qu'est-ce qu'un bon livre?"

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    mmc2.jpgVous connaissez certainement le site My Major Company qui s'est d'abord fait connaître par les artistes qu'il a lancés dans le domaine musical (Grégoire, Irma, Joyce Jonathan notamment) sur le principe de la contribution des internautes.

    Depuis plus d'un an, le site a développé une déclinaison dans le domaine littéraire: My  Major Company Books, site  sur lequel je suis inscrite en tant qu '"auteur"  et pour lequel j'ai écrit une chronique sur un thème imposé "Qu'est-ce qu'un bon livre?" (depuis un mois, le site propose à des blogueurs et/ou auteurs de rédiger une chronique sur un thème, le mois dernier "Qu'est-ce qu'un bon auteur?")...et sur lequel, accessoirement, en furetant un peu sur le site, vous pourrez me retrouver en tant qu' auteur (ou du moins utopiste aspirant à le devenir officiellement). Si vous êtes curieux et téméraires, vous pourrez aussi lire et donner votre avis...

    Je vous invite en tout cas à lire ma chronique très personnelle en cliquant sur le lien suivant et à me dire éventuellement ce que vous en pensez et ce qu'est un bon livre pour vous:

    Lire ma chronique sur My Major Company Books 

     et retrouvez-la également désormais en intégralité ci-dessous et retrouvez ma page d'auteur sur My Major Company Books, là et n'hésitez pas à devenir "fan" et à donner votre avis!

    Lettre à un Inconnu

    Cher bon livre,

    Paradoxalement, cher Inconnu, je te « connais » depuis toujours ou presque. J’espère donc que tu ne me tiendras pas rigueur de ce tutoiement plus affectueux que familier. Imagines-tu que l’on me demande de parler de toi, toi le « bon livre » ! Je suis ravie d’avoir aujourd’hui un prétexte pour t’écrire ce que je n’ai jamais osé te dire, en usant des armes qui sont les tiennes, avec toute la modestie que m’inspirent la reconnaissance et l’admiration sans bornes que j’éprouve pour toi…

    Un bon livre.  Quel euphémisme pour décrire celui dont, à chaque relecture, je découvre une nouvelle facette, un nouveau pouvoir, et qui me procure une réflexion et une jubilation presque miraculeusement renouvelées ! Mes mots seront sans doute bien impuissants et faibles face au pouvoir indicible des tiens, j’essaierai néanmoins de partager ce que j’éprouve pour l’ami très cher et indéfectible que tu es avec tout l’enthousiasme et toute la délicatesse nécessaires. Quand d’autres découvraient les joies du patin à roulettes ou de la corde à sauter, c’est avec toi que, déjà, je passais le plus clair de mon temps. Plaisir coupable (de ne pas avoir ceux des enfants de mon âge) et à la fois d’une jubilation ineffable de voir défiler les mots jusqu’à l’amnésie de leur existence, de voir s’y substituer des êtres et des lieux plus vrais que nature, de découvrir d’autres réalités, d’autres possibles, d’oublier des peines d’enfant en dévorant des pages faisant défiler des destins, souvent d’adultes, et d’en peupler mon imaginaire. Bien sûr, parfois je me suis égarée avec certains de tes semblables moins recommandables, les médiocres, les ennuyeux (même si c’est là un autre débat, le bon livre ne devant pas être à tout prix divertissant, le livre récalcitrant ou retors n’étant pas synonyme de mauvais, parfois bien au contraire), les prétentieux, les sentencieux.

    Parmi tous les visages que tu empruntes, il y en a bien sûr de plus remarquables que je revois avec plus d’enthousiasme, sans doute ce dénommé bon livre, qualifié ainsi non pas pour ta bonté (je sais à quel point tu peux être cruel parfois, je me souviens ainsi de tes « Liaisons dangereuses » et des cruautés que j’avoue sans honte avoir lu avec délectation, et même parfois relu, sans parler des misères vécues par ce pauvre Jean Valjean ou par bien d’autres victimes de ta lucidité) mais par tes qualités littéraires qui recouvrent bien des réalités.

    J’aime ainsi tout aussi passionnément la célèbre musique des mots de Sagan qui, tant de fois, m’a conduite à relire plusieurs fois le même livre ou la même phrase (je devine ton ironie qui sait être cruelle, non pas que je n’avais pas compris mais parce que je souhaitais en ressentir pleinement la beauté sensuelle et clairvoyante) que les descriptions ciselées et somptueuses de Balzac (selon moi, celui qui a le plus souvent fait honneur à ta qualification), des descriptions d’une beauté vertigineuse, à l’affût du moindre frémissement des âmes, souvent tourmentées, et des lieux qui les reflètent créant ainsi une Comédie humaine époustouflante de justesse, d’humanité, de beauté, de lucidité, de modernité, d’intemporalité. La quintessence du bon livre.

    Tu peux, cher bon livre, recouvrir des phrases très longues ou très courtes, un langage cru ou poétique mais toujours émane de toi cette sorte de magie qui donne le sentiment de s’élever. Tu es comme un bon mets qui se déguste inlassablement sans jamais nous faire parvenir à l’écœurement, métaphore bien pauvre pour te rendre hommage à toi qui en recèles tant d’étourdissantes. Combien de fois grâce à toi ai-je eu l’impression que le vol du temps était suspendu ? Combien de fois ai-je dévoré tes pages avec gourmandise, avidité, au mépris du temps qui passe, de la réalité, d’une fatigue subitement indolore, tout en réalisant que tu nous la fais aimer et redécouvrir cette réalité, et parfois, il est vrai, aussi, tout en la rendant bien fade à côté des aventures palpitantes en lesquels tu nous conduis à croire ? C’est sans doute ce qui te distingue souvent de tes semblables, le commun des mortels des livres, face à toi l’immortel : cette capacité à nous emmener ailleurs par le simple pouvoir de tes mots…  Mais te résumer à cela serait aussi réducteur, ta complexité et ta rudesse font parfois aussi ton charme.

    Tu es aussi celui qui arrive à nous faire croire à l’impossible. Parfois même, te côtoyer relève de l’expérience plus que de la lecture. Je songe ainsi à cette « Belle du Seigneur », relue chaque année ou presque,  dont la satire si acerbe et juste d’une société avide d’ascension sociale- ah le pathétisme hilarant d’Adrien Deume et de sa médiocrité !- mais dont, surtout, l’histoire d’amour qui voit la passion étouffer ceux qui la vivent (sublimes et tragiques Ariane et Solal)  font de ce roman flamboyant, éblouissant et terrifiant, une expérience inoubliable revécue et ressentie à chaque relecture, qui décrit mieux que personne la naissance et la désagrégation d’une passion et qui nous emporte dans son tourbillon échevelé.

     Tu es aussi celui qui traverse le temps et les frontières, aussi universel qu’intemporel. L’ambition des Eugène de Rastignac, Lucien de Rubempré, Georges Duroy n’ont pas pris une ride. Tu es aussi celui qui inspire les autres arts. Combien de fois, parmi tant d’autres illustres exemples, tes « Crimes et châtiments » ont-ils été cités par le cinéma ?

    Tu es celui qui se déguste ou se dévore, se lit et se relit à l’infini, se dévoile et se découvre, et nous dévoile une part du monde ou de nous-mêmes. Tu es une réminiscence inexplicable : tu as indéniablement aussi un rapport avec et à l’enfance.

    Que ceux qui disent que tu n’es que temps perdu partent à sa recherche ou lisent Rainer Maria Rilke et ses « Lettres à un jeune poète » pour voir que tu peux être aussi une édifiante leçon de vie.

    Tu es aussi celui dont l’abandon s’apparente à un déchirement…comme ce fut le cas pour moi en refermant les pages de « Martin Eden » de Jack London, roman d’un romantisme désenchanté empreint de passion puis de désillusions, roman sur la fièvre créatrice et amoureuse qui emprisonnent, aveuglent et libèrent à la fois, un roman qui me bouleverse à chaque relecture. Là est ton secret, aussi, sans doute, dans les émotions, les sentiments même, ou les réflexions qui surgissent de cet assemblage prodigieux des mots.

    Tu es celui qui m’a donné cette envie viscérale d’écrire mais qui me fait rougir rien que d’y songer.

    Tu es tellement plus que cela encore, le compagnon des nuits d’insomnie, des jours d’ennui ou de tristesse (tu sais  «  ce sentiment inconnu dont l'ennui, la douceur m'obsèdent » *) mais aussi le complice ou l’instigateur des évasions exquises et des escapades imaginaires. Et puis parmi toutes tes vertus, tu possèdes celle, inestimable, de l’éternité, qui nous donne parfois à nous  aussi, ce fugace sentiment d’éternité. Tu restes un mystère, celui de l’habileté de ton auteur qui a su si bien jongler avec les mots, les habiller, les ordonner, les faire résonner en moi, en nous, lecteurs.

    J’ai bien conscience que tous ces exemples s’apparentent davantage à des chefs d’œuvre (terme galvaudé mais classification à laquelle, je crois, appartient chacun des livres précités) qu’à des bons livres, mais leurs caractéristiques sont souvent similaires, avec ce supplément d’âme et d’éternité pour les premiers.

    La passion m’emporte, je pourrais continuer ainsi longtemps à faire ton éloge. Pour toi qui as donné naissance à une fameuse et une merveilleuse « Lettre d’une inconnue », j’en achève ainsi une aujourd’hui à mon tour, à un Inconnu que je côtoie si fréquemment, évidemment sans commune mesure avec celle de Stefan Zweig. J’ai écrit cette lettre pour toi le bon livre, l’Inconnu si proche, héros immortel, ami fidèle et parfois délicieusement cruel, pour te dire simplement merci d’être ce que tu es, tour à tour ou tout à la fois : énigmatique, intemporel, réjouissant, instructif, universel et immortel. Et auréolé de l’exquis et insondable mystère de l’Inconnu.

    Affectueusement.

    Une lectrice éperdument reconnaissante.

    (*Phrase extraite du début de « Bonjour tristesse » de Françoise Sagan)

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  • Critique- "Les petits mouchoirs" de Guillaume Canet, demain, sur Canal plus, à 20H55

    Demain soir, sur Canal plus, à 20H55, retrouvez un des succès cinématographiques de l'an passé "Les petits mouchoirs" de Guillaume Canet. Retrouvez, ci-dessous, ma critique et cliquez ici pour retrouver mes vidéos publiés suite à l'avant-première Allociné du film, l'an passé.

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    Après les succès de « Mon idole » (dont j’avais aimé la causticité) et « Ne le dis à personne » (par lequel je n’avais pas été convaincue, voir ici) Guillaume Canet, comme beaucoup de réalisateurs, aurait pu se contenter d’adapter un best-seller avec une part de risque minimale. Il a au contraire choisi un sujet très personnel (pour lequel il a même refusé de travailler pour Scorsese) et c’est à la fois la grande force et la faiblesse du film.

     

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    Direction le Cap-Ferret, une maison en bord de mer appartenant à Max (François Cluzet), une maison où chaque été se réunit une bande d’amis. Seulement cet été-là,  tout est comme d’habitude et à la fois différent car l’un d’entre eux, Ludo (Jean Dujardin) manque à l’appel, retenu sur un lit d’hôpital. Chacun va mettre un « petit mouchoir » sur la vérité. Le petit mouchoir c’est le voile du mensonge, le masque que chacun arbore pour ne pas dévoiler ses doutes, ses failles et ses angoisses. Les petits mouchoirs, ce sont les mensonges faits aux autres mais surtout à soi-même. 

    Cela commence au Baron, célèbre boîte de nuit du 8ème arrondissement. Un habile plan-séquence qui nous plonge dans cette frénésie et en capture la gravité masquée de bonne humeur excessive : la gaieté feinte et les rires factices et exubérants suscités par l’alcool, la drogue, la tristesse dissimulée.  Puis c’est le fracas de la réalité. Et le retour à la vie normale comme si de rien n’était… ou presque.

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    Guillaume Canet nous immerge alors dans la vie de ces amis au Cap-Ferret avec la volonté délibérée de faire « un film de potes » comme il le dit lui-même. S’il évoque notamment « Mes meilleurs copains » de Jean-Marie Poiré, en inconditionnelle du cinéma de Claude Sautet, j’ai évidemment plutôt pensé à « Vincent, François, Paul et les autres ». D’ailleurs, Benoît Magimel s’appelle Vincent ; François Cluzet s’appelle ici Max (comme Michel Piccoli dans « Max et les ferrailleurs ») et il m’a  rappelé ce dernier dans la fameuse scène de colère de « Vincent, François, Paul et les autres ». Gabin aussi, si célèbre pour ses scènes de colère. Et la maison du Cap-Ferret m’a fait penser à celle de « César et Rosalie ».

     Même si Guillaume Canet/réalisateur n’atteint pas cette note parfaite, cette virtuosité à laquelle accédait Claude Sautet, mélomane averti, il y a dans ce film cette même quête de raconter la complexité derrière « une histoire simple », de quérir les frémissements de vie, les fléchissements en chacun, de dévoiler une part du mystère dans lequel chacun se drape.

     

    Plus qu’à Claude Sautet, il m’a d’ailleurs fait penser à Lelouch (même s’il reniera peut-être cette comparaison, lui qui lorgne davantage du côté du cinéma américain et cite plus volontiers Cassavetes) dans sa quête de « fragment de vérité », dans sa sincérité, dans sa façon de filmer au plus près des visages, d’effleurer presque amoureusement ses personnages, et de constamment chercher à tirer le meilleur de ses acteurs. Les virtuoses ce sont eux et c’est la raison pour laquelle il n’a pas voulu faire de l’esbroufe dans sa réalisation. Sa mise en scène se fait donc ainsi discrète. Le cadre à la fois étouffe et caresse les personnages et les  enserre, comme ils le sont dans leurs apparences et leurs mensonges.

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     A l’exception de Laurent Lafitte (dont les rires et les larmes m’ont semblé parfois forcés), le casting est irréprochable. Chaque apparition de François Cluzet est un pur bonheur, à la fois irascible et touchant, volubile et secret. Benoît Magimel dégage un charme mélancolique irrésistible. Marion Cotillard n’a jamais été filmée aussi amoureusement, à la fois frontalement et délicatement. Valérie Bonneton est férocement drôle et Gilles Lellouche incarne avec beaucoup de nuances son personnage qui accepte enfin et trop tard de grandir. Quant à Joel Dupuch,  il est plus qu’il ne joue et le film y gagne en émotion et gravité.

     

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     La comparaison avec Lelouch s’arrête là, si ce n’est qu’elle explique sans doute aussi la virulence de certaines réactions suite à l’avant-première. Elle s’arrête là parce que Canet impose son propre rythme et son propre style et de films en films construit son propre univers.

     « Les petits mouchoirs » dure 2H25, beaucoup trop semble-t-il pour certains. Or, justement, c’est cette durée qui nous permet de créer la proximité avec les personnages, c’est une durée qui coïncide judicieusement avec le fond du film. Une durée nécessaire pour donner du temps au temps, pour laisser tomber les masques, pour prendre le temps de vivre, d’accepter la qualité des silences, du temps qui passe et en saisir la beauté et la violence fugaces. Il n’est pas dans le spectaculaire mais dans l’intime. Il ne cherche pas à nous en mettre plein la vue mais à ouvrir notre regard, lui laisser le temps de se poser, de regarder la vie qui passe et qu’il tente de capter. Certaines scènes peut-être auraient pu être écourtées voire supprimées –même si beaucoup l’ont déjà été puisque le montage initial faisait près de 4H-(et c’est là sans doute que le film est « trop » personnel, en totale empathie pour son sujet, ses personnages et ses acteurs, Guillaume Canet nous oublie un peu) mais il a en tout cas beaucoup de tendresse communicative pour ses personnages et ses acteurs et nous donne envie , malgré et à cause de leurs failles, de se joindre à eux.

     

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    A l’issue de la projection, Guillaume Canet a demandé que nous n’évoquions ni la fin ni le début, tétanisé visiblement à l’idée qu’ils puissent être dévoilés, pourtant ce n’est pas là que réside le principal intérêt de son film. La fin est d’ailleurs attendue mais non moins bouleversante faisant surgir l’émotion contenue qui explose et  avec elle les masques de chacun, faisant voler en éclats les petits mouchoirs posés sur la vérité. Le rire n’a jamais  si bien illustré sa définition de « politesse du désespoir », tout son film étant jalonné de moments drôles et savoureux mais qui sont aussi touchants parce que le masque de la culpabilité et/ou de la tristesse qui affleurent dans un regard soudainement assombri.  Son film souffre  donc (un peu) mais s’enrichit (surtout) d’être très personnel. Pour moi, Guillaume Canet/réalisateur  est donc indéniablement meilleur quand il signe un sujet personnel que quand il adapte Harlan Coben. J’en attends beaucoup de son futur projet avec James Gray.

    Un film choral qui ne cherche pas à révolutionner le cinéma (et dont je n’ai d’ailleurs cessé de me dire pendant toute la projection qu’il ferait une excellente pièce de théâtre) mais qui vous donne envie de prendre le temps de vivre, de laisser choir le voile du mensonge, de regarder et voir, d’écouter et d’entendre. Et c’est finalement là sans doute la plus discrète des audaces et sa vraie réussite.  . Malgré quelques longueurs vous ne verrez pas passer les 2H25 de ce troisième long-métrage de Guillaume Canet qui enlace ses personnages avec une tendre lucidité et embrasse la vie et sa cruauté poignante et involontaire avec tendresse et qui, à son image, complexe et paradoxale, s’achève sur une touchante note de tristesse et d’espoir.

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