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IN THE MOOD FOR CINEMA - Page 544

  • Réouverture du forum des images: caméras subjectives etc

    forum.jpg3 ans. Voilà 3 ans que les cinéphiles parisiens (et les autres...) attendaient la réouverture du Forum des images, situé au coeur d'une nouvelle "rue du cinéma" du Forum des Halles.

    Parmi de nombreuses nouveautés : une grande bibliothèque qui prolonge la rue du cinéma jusqu'à l'UGC Ciné Cité les Halles. Cette bibilothèque se nomme "François Truffaut". Rien que ça valait la peine que je vous en parle. Mais pas seulement...

    Parmi les nombreuses nouveautés, il y a aussi un partenariat avec le Master professionnel (Ciné-création) en scénario, réalisation, production de l'Université de Paris  1 Panthéon Sorbonne que je connais bien pour avoir fait partie de sa première promotion. Ces caméras subjectives, organisées par les étudiants de A à Z, et dont les précédentes éditions des transcriptions écrites ont été publiées aux Editions du Rocher, avaient jusqu'à présent lieu dans le cadre de l'Université, bien que déjà ouvertes à tous.

     forum2.jpgElles demeurent gratuites mais se dérouleront donc désormais au Forum des images. Chaque année, ces débats tournent autour d'un thème particulier, cette année "Cinéaste-producteur: un duo infernal".

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    Voici le programme des prochaines caméras subjectives (le jeudi, de 19H30 à 21H30):

    -le 11 décembre: Jean-Jacques Beinex, le 18 décembre: Benoït Jacquot, le 8 janvier: Bertrand Tavernier, le 15 janvier: Lucas Belvaux et Patrick Sobelman, le 5 février: Robert Guédiguian, le 12 février: Patrice Leconte

    Le Forum des images ce sont aussi: 5 salles de projections, plus de 2000 projections par an, 7 rendez-vous par mois (projections-débats), 12 festivals par an..., une Académie avec des cours de cinéma, "la Malle aux trésors de Bertrand Tavernier" (des films issus de sa dvdthèque qu'il commentera) et des master class inaugurées par une master class avec James Gray, le 14 décembre, à 15H30...

    Si vous voulez découvrir le Forum des images en avant-première, des journées portes ouvertes sont organisées du 5 au 7 décembre.

    Pour en savoir plus, quelques liens internet:

    Le Master pro Ciné-création (scénario, réalisation, production) de l'Université de Paris 1-Panthéon Sorbonne

    Le Groupe Facebook des caméras subjectives

    Le Forum des images

    Le blog du Forum des images

     

  • « Pour elle » de Fred Cavayé : pour lui…

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    Je vous en parlais à l’occasion de mon bilan de l’année cinéma 2008 : cette année a aussi été celle de l’émergence d’un cinéma français décomplexé qui s’est aventuré sur les terres considérées, à tort, comme celles, conquises et inaccessibles, des Américains. Avant « Largo Winch » de Jérôme Salle (Sortie en salles : le 17 décembre) et « Secret Défense » de Philippe Haïm (sortie en salles : le 10 décembre), cette semaine, c’est d’abord « Pour elle » de Fred Cavayé qui s’est inscrit dans cette dynamique.

    Lisa (Diane Krüger) et Julien (Vincent Lindon) forment un couple heureux et amoureux, avec leur fils Oscar. Un matin, brusquement, leur vie bascule dans l’absurdité et l’horreur lorsque la police débarque chez eux pour arrêter Lisa, accusée de meurtre puis condamnée à vingt ans de prison. Julien, professeur et fils mal aimé de son état, va alors être prêt à tout pour  la faire évader.

     Jusqu’où iriez-vous par amour ? Jusqu’où sera-t-il prêt à aller pour elle ? Loin. Très loin. Au-delà des frontières. De la raison. De la légalité. Du Bien et du Mal. Plutôt que de s’appesantir sur leur vie d’avant, Frec Cavayé (d’après une idée originale du scénariste Guillaume Lemans) choisit de nous montrer deux scènes assez courtes qui suffisent pour camper un couple amoureux comme au premier jour et une Lisa, lumineuse, deux scènes qui suffisent à expliquer le tourbillon infernal dans lequel va ensuite tomber Julien.

    Si on se demande un temps pourquoi Julien ne met pas toute cette énergie à essayer de trouver la véritable coupable (Lisa serait emprisonnée à tort) plutôt qu’à la faire évader, la force du montage et la force de l’interprétation parviennent à nous le faire oublier. Voir Lisa enfermée, se laissée dépérir, s’assombrir est pour Julien insupportable. Sa rage, son sentiment d’injustice et surtout son amour pour Lisa vont transformer le tranquille professeur en criminel, vont conduire à le faire basculer dans un univers a priori très éloigné du sien, dans une violence incontrôlable.

     La caméra au plus près des visages, nous enferme avec Julien dans sa folie (on ne voit d’ailleurs presque rien de sa vie étrangère à son plan d’évasion, il n’est montré qu’une seule fois dans sa salle de classe, cette –ir-réalité n’existe plus pour lui) ou avec Lisa dans sa prison, nous faisant occulter les invraisemblances du scénario et des moyens pour nous concentrer sur la force et la vraisemblance des motivations. Et pour que nous y croyions il fallait un acteur de la dimension de Vincent Lindon.  Vincent Lindon et qui d’autre ? Je ne vois pas. Je ne vois pas tellement le mélange de force et de fragilité, de détermination et de folie qu’il dégage pour ce rôle, qui occupe, consume, magnétise l’écran et notre attention, tellement le personnage qu’il incarne, à qui il donne corps (sa démarche, son dos parfois voûté ou au contraire droit menaçant, ses regards évasifs ou fous mais suffisamment nuancés dans l’un et l’autre cas ) et vie semblent ne pouvoir appartenir à aucun autre. Je ne vois pas qui d’autre aurait pu rendre crédible ce personnage et continuer à nous le rendre sympathique, du moins excusable, malgré tout.

    L’intrigue va à l’essentiel : la détermination furieuse, parfois aveugle, de Julien (à l’image de la surdité de la justice vis-à-vis de Lisa). Le scénario est épuré comme les murs d’une prison. Ce qui ne veut pas dire que le style est dénué d’émotion. Au contraire. Il la suscite sans la forcer. En nous montrant cet homme seul, fragilisé, aux forces décuplées. En nous montrant cet homme lui aussi dans une prison, celle de la caméra, celle de sa folie amoureuse (pléonasme ou antithèse : à vous de voir), celle de son incommunicabilité de sa douleur (avec son père, Olivier Perrier, parfait dans la retenue et la froideur). La relation paternelle est aussi au centre de l’histoire. Ce sont aussi deux pères qui vont très loin par amour. A leur manière.

    La musique, irréprochable ( de Klaus Badelt, qui a notamment travaillé avec Terrence Malick et Micheal Mann) ajoute ce qu’il faut quand il faut pour accroître la tension, déjà palpable.

    Au final, un thriller sentimental que la force de l’interprétation, magistrale, de son acteur principal (« Pour elle » vaut donc le déplacement, ne serait-ce que pour lui à qui le film doit de captiver, capturer notre attention et empathie), la vigueur, le rythme et l’intelligence du montage rendent haletant, nous faisant oublier les invraisemblances du scénario, croire et excuser toutes les folies auxquelles son amour (le, les) conduit.  Un premier long particulièrement prometteur…

     Sandra.M

  • 61ème Journée dédicaces à SciencesPo: le polar à l'honneur

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    Samedi prochain, 6 décembre, aura lieu la 61ème journée dédicaces de SciencesPo, au 27 rue Saint-Guillaume, à Paris. Près de 120 écrivains seront présents cette année et le polar sera à l'honneur.

    De 16H à 17H, dans l'amphithéâtre Emile Boutmy  aura lieu un débat sur les enjeux et les risques de l'adaptation littéraire autour de la question: "l'adaptation tue-t-elle le livre"? Pour y répondre sont invités : Josée Dayan : "réalisatrice" (Les rois maudits, Le comte de Monte-Cristo, Sous les vents de Neptune…)
    - Paulo Branco : producteur (La fidélité, Le temps retrouvé, Ma mère…)
    - Mamadou Mahmoud N’Dongo : scénariste et écrivain (el Hadj et de Bridge Road)
    - Laurent Aknin : universitaire et auteur d’Analyse de l’image : Cinéma et Littérature

    Le débat sera animé par Hubert Artus, journaliste littéraire (Au Field de la Nuit (TF1), rue89.com, Radio Nova…)

    Sont invités à cette 61ème journée dédicaces:

     David Abiker, Laurent Aknin, Julien Almendros , Karim Amellal , Jérôme Attal , Jacques Attali, Jean-Pierre Azéma , Salim Bachi , Bertrand Badie , Jean-François Batellier , Patrick Bedier , Tonino Benacquista , Delphine Bertholon , Guy Birenbaum , Tiery Bourquin,Marc Bressant, Pascal Bruckner ,Jean-Paul Caracalla , Jean Paul Carminati, Dominique Chryssoulis , Frédéric Ciriez , Philippe Copinschi et Delphine Placidi, Catherine Cusset , Jean D'Ormesson, Thierry Dancourt , Bruno De Cessole , Maylis De Kerangal , Philippe De La Genardière, Camille De Peretti , Blanche De Richemont , Thibaut de Saint Pol , Emilie De Turckheim , Marin De Viry , Jean-Louis Debré , Jean-Baptiste Del Amo , Dilem , Fatou Diome , Bruno Dive , Roger-Pol Droit , Olivier Duhamel , Roxane Duru , Olivia Elkaim, Jean-Paul Enthoven , Raphaël Enthoven , Alice Ferney , Lucette  Finas , Georges Flipo , David Foenkinos, Dominique Forma , Joëlle Gardes , Jacques Généreux , Alain Germain , Mara Goyet , Valérie Grall , Jules Grasset , Claude Habib , Grégoire Hervier , Sophie Jabès , Dominique Jamet , Isabelle Jarry , Serge Joncour , Tristan Jordis , André Kaspi , Michel Kichka , Nathalie Kuperman , Alexis Lacroix, P.J. Lambert , Sylvie  Laurent , Renaud Leblond , Denis Lépée ,Christian Lequesne, Thierry Lévy ,Clarisse et Laurent Liautaud ,Virginie Linhart , Frank Martin Laprade , Jean Mattern,Catherine Millet ,Alain Minc ,Miss Tic , Donald Morrison , Mamadou Mahmoud N'Dongo , Claire Oger , Jean Pailler, Charles Pepin , Jean-Marie Périer , Jean Peyrelevade , Delphine Placidi & Philippe Copinschi, Plantu , Fabrice Pliskin, Patrice Pluyette , Stéphane Ribeiro , Christian Roux , Didier Schlachter , Guy Scarpetta , Colombe Schneck , Boris Sirbey , Martin Solanes , Jean Marc Souvira , Ted Stanger , Yvan Stefanovitch , Danielle Thiéry, Christophe Traïni, Hubert Védrine , Philippe Vilain , Aude Walker , Daniel Zagury, Florian Zeller , Salomé Zourabichvili

    Cliquez ici pour accéder au site de la 61ème journée dédicaces de SciencesPo

     

  • "Je veux voir" de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige: à ne manquer sous aucun prétexte!

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    Je vous en ai déjà parlé de nombreuses fois, et tout d'abord en Mai dernier, suite à la projection de ce film magnifique dans la section "Un Certain Regard" du  61 ème Festival de Cannes.

    Ce film à ne manquer sous aucun prétexte, tourné seulement en 6 jours (!), qui ne devait être au départ qu'un court-métrage, est probablement un des meilleurs de l'année, voire le meilleur de l'année.

    Il sort en salles demain, mercredi 3 décembre. Je vous encourage vivement à y aller.

    Cliquez ici pour lire ma critique de "Je veux voir" de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige intitulée "Je veux voir: un certain regard" et écrite lors du 61ème Festival de Cannes et pour voir ma vidéo de la présentation du film à Cannes.

    Dernière minute: Pour ceux que le sujet intéresse, Catherine Deneuve, très rare à la télévision est ce soir (d'ici 15 minutes) invitée de l'émission "Ce soir (ou jamais!)" sur France 3. (pour un entretien d'environ 1h).

    Suite à mon article précité, vous pourrez également trouver mon récit de la rencontre avec Catherine Deneuve à Sciences Po.

  • Avant-première- « Australia » de Baz Luhrmann : conte de noël

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    fox4.jpgComme je vous le disais il y a quelques jours (Cliquez ici pour accéder à mon précédent article à ce sujet et à la bande annonce d’Australia), jeudi dernier avait lieu l’unique projection presse d’Australia, quatrième long métrage de Baz Luhrmann après « Ballroom dancing », « Roméo+Juliette » et « Moulin Rouge ». Un film que j’avais très envie de voir, le cinéma étant de plus en plus avare de ces grandes fresques romanesques épiques et romantiques que laissait présager la bande annonce.

     

    L’histoire se déroule à la fin des années 30. Lady Sarah Ashley, une aristocrate anglaise hautaine, capricieuse et arrogante (Nicole Kidman) -qui ressemble à s’y méprendre à Meryl Streep lorsqu’elle arrive au Kenya dans « Out of Africa »- arrive au cœur des paysages sauvages de l’Australie pour rejoindre son mari qu’elle soupçonne d’adultère, lequel tente, en vain, de vendre l’immense domaine qu’ils possèdent sur place : Faraway Dones. Elle ne tarde pas à découvrir que l’exploitation est au bord de la ruine et menacée par son propre contremaître, Neil Fletcher (David Wenham). Pour sauver le domaine, Sarah n’a d’autre choix que de s’allier à un cow-boy local, plutôt rustre, connu sous le nom de « Drover » (Hugh Jackman), et de parcourir avec lui des milliers de kilomètres à travers les terres aussi magnifiques qu’inhospitalières du pays afin de mener jusqu’à Darwin 1500 têtes de bétail.

    fox8.jpgL’histoire nous est contée en voix off par un enfant aborigène  à travers le regard duquel, enfantin et naïf, nous voyons toute l’histoire mais ce qui marque d’abord ce n’est pas cette voix enfantine, ce sont ces paysages à couper le souffle, ces images flamboyantes, cette photographie majestueuse et ces amples panoramiques et divers mouvements de caméra qui nous embarquent avec eux dans cette Australie rude et somptueuse, inhospitalière et enchanteresse. C’est un fascinant et éblouissant tourbillon pour nos yeux davantage aguerris à un cinéma de plus en plus et essentiellement réaliste.

    Le film porte bien son nom : c’est un véritable spot publicitaire pour l’office de tourisme australien sans compter que les deux acteurs principaux et le réalisateur sont, eux aussi, australiens. C’est pourtant au cinéma de l’âge d’or hollywoodien que Baz Luhrmann fait ouvertement référence, notamment à « Autant en emporte le vent » mais aussi à des films plus récents comme « Out of Africa » de Sydney Pollack. Les points communs et les références ne manquent pas : des caractères des personnages (Lady Sarah Ashley ressemble beaucoup, dans ses traits de caractère, à l’impétueuse Scarlett d’ « Autant en emporte le vent » et le viril, sauvage et romantique « Drover » à Rhett Buttler), à l’attachement à la terre, au discours sur l’émancipation de populations opprimées, en passant par les paysages grandioses, les scènes à grand spectacle (l’incendie de Darwin rappelant ainsi celui d’Atlanta), le mélange d’aventure et de drame.

    Le projet est donc particulièrement ambitieux et cela fonctionne parfaitement dans la première partie. On se laisse d’abord emporter avec bonheur par cette aventure exotique, rafraichissante, délicieusement naïve, empreinte de magie aborigène. Les personnages sont certes stéréotypés mais Baz Luhrmann, joue de ces stéréotypes (notamment lors d’une scène avec Hugh Jackman au ralenti que je vous laisse découvrir), anticipant et désamorçant les ricanements et les reproches qui pourraient lui être adressés, et gagnant ainsi notre complicité. Ni lui ni nous ne sommes dupes.

    fox10.jpgCe film qui voulait s’inscrire dans la lignée des « Lawrence d’Arabie », « Ben Hur » et autres « Titanic » avait donc a priori tout pour me plaire, et c’était d’ailleurs très bien parti, malheureusement il lui manque ce petit supplément d’âme ensorcelant dont l’absence résulte d’abord essentiellement de la facilité avec laquelle le couple de protagonistes franchit les obstacles, à commencer par ceux qui les séparent, et du trop grand nombre d’ellipses (malgré la durée du film). Leurs personnages évoluent, et même changent radicalement, si soudainement que nous avons du mal à y croire et à croire à leur histoire d’amour. Lady Sarah Ashley est aussi capricieuse, arrogante, égoïste, matérialiste, superficielle (rappelant Katharine Hepburn au début d’ «  African Queen ») qu’elle devient altruiste, compréhensive, désintéressée et généreuse. Son personnage évolue ( elle est transformée par la beauté dévastatrice des paysages mais aussi par sa rencontre avec le petit orphelin aborigène) et c’est tant mieux mais d’une manière si radicale que nous avons peine à y croire. Sans compter que le méchant est trop méchant pour être crédible mais en même temps…en même temps c’est aussi ce qui contribue au charme de ce film et j’ai alors rappelé à la rescousse fox2.jpgmon regard d’enfant, toujours prompte à se rallumer, pour voir ce film différemment : comme un conte de noël. D’ailleurs, il nous parle de magie, de magie aborigène mais aussi du magicien d’Oz (du même Victor Fleming qu’ « Autant en emporte le vent »). D’ailleurs il sort un 24 décembre. D’ailleurs il est tout public. D’ailleurs c’est aussi une leçon de géographie et d’Histoire. D’Histoire parce que nous apprenons beaucoup, d’abord sur la société ségrégationniste de l’Australie des années 30 et 40 qui interdisait les mariages entre blancs et aborigènes et dont les enfants n’avaient le droit de vivre ni parmi les blancs ni parmi leurs familles aborigènes. Ces enfants étaient alors placés dans des institutions d’Etat ou des missions religieuses et furent appelés les Générations Volées. Mais nous apprenons aussi que la ville de Darwin dut faire face aux bombardements japonais. En effet, en février 1942, les avions de guerre japonais, la flotte même qui avait attaqué Pearl Harbour, a attaqué Darwin, tuant 243 personnes et détruisant presque toute la ville.

    fox11.jpgAlors évidemment, la fin à multiples rebondissements totalement improbables et  évidemment heureux  (si bien qu’un grand nombre de journalistes a quitté la salle au premier d’entre eux, croyant la projection terminée…ou estimant en avoir assez vu) s’inscrit dans cette lignée de conte qui,  certes, avec des regards d’adultes, paraît exagérément mélodramatique et prévisible. C’est sans doute ce qui rend aussi « Autant en emporte le vent », « Out of Africa » ou même « Titanic » crédibles et touchants : leurs fins ouvertes et/ou dramatiques. Mais, après tout, ce ne sont pas des contes de noël…

    On peut aussi regretter que Baz Luhrmann n’ait pas fait preuve ici de la même fantaisie et de la même excentricité que celles dont il avait fait preuve dans « Moulin Rouge » qui lui avait valu 8 nominations aux Oscar. Il en avait d’ailleurs remporté deux. Son épouse Catherine Martin avait en effet été oscarisée pour les décors et les costumes dont elle est aussi la créatrice dans « Australia » et pour lesquels elle mérite sans nul doute d’être à nouveau récompensée.

    Au final un film flamboyant (au budget, tout de même, de 130 millions de dollars, plus gros budget alloué à un film australien) qui a le mérite d’être particulièrement ambitieux, de mêler les genres (peut-être trop : à la fois comédie au début, film d’aventure, fresque romanesque, drame, western, comédie romantique, conte…), de nous faire découvrir l’Australie dont il exalte brillamment la magnificence et l’immensité vertigineuse des décors, une fresque grandiloquente et excessive, parfois mièvre et sirupeuse aux acteurs, aux paysages et à l’histoire trop beaux, lisses et héroïques pour être vrais ( mais après tout cherche-t-on ici à « être vrai » ?) à voir avec des yeux d’enfants, et avec le recul dont le réalisateur a lui-même su faire preuve.

    fox9.jpgUn film qui certes n’arrive pas à la hauteur des films auxquels il se réfère, par manque de complexité des personnages et de l’intrigue, mais qui, tout de même, nous fait oublier ses 2H35. Ce qui n’est déjà pas si mal. Et à voir ma voisine de salle (dont j’ignore malheureusement le media, j’aurais été curieuse de lire ou entendre sa critique…) qui, avant que la projection ne débute, disait avec désinvolture ne pas aimer « ce genre de film », a terminé la projection finalement complètement scotché à l’écran, je me dis qu’il n’a pas totalement échoué…

    « La seule chose que l’on possède c’est sa propre histoire. Alors vouloir en faire une bonne histoire, désirer avoir une existence bien remplie, vivre une belle aventure, accepter d’affronter la peur pour ne pas tourner le dos aux possibilités que vous offre la vie… ». Ainsi Baz Lurhmann résume-t-il « Australia ». A vous de voir si cette belle aventure vous embarquera « somewhere over the rainbow » ou en tout cas dans les décors majestueux de cette Australie qui donnent indéniablement envie de partir à la  découverte de son Outback qu’il amorce  et à laquelle il incite magistralement.

     Sortie en salles en France : le 24 décembre

    Site internet officiel du film : www.australia-lefilm.com

    Pour en savoir plus sur l’Australie : http://www.australia.com

     Sandra.M

  • Mon bilan (anticipé) de l'année cinéma 2008

    ena1.jpg Le directeur de la rédaction de la revue des anciens élèves de l’ENA intitulée « L’ENA hors les murs » m’a fait l’honneur de me confier la passionnante tâche d’effectuer le bilan de l’année cinématographique 2008.

     Ce bilan sera publié dans la revue "l’ENA hors les murs" (parution: le 20 décembre),  je vous en reparlerai.

     La version que je vous livre ci-dessous (condensé et résumé de l’année cinématographique « In the mood for cinema ») est plus exhaustive et diffère légèrement de celle qui sera publiée.

     N’hésitez pas à faire part de vos commentaires et/ou critiques. (Il manque forcément quelques films de cette fin d’année 2008 que je n’ai pas encore vus et j'ai forcément fait quelques impasses ).

     

    Bilan de l’année cinéma 2008

    ena2.jpgEn mai dernier, Sean Penn alors Président du Festival de Cannes déclarait que les cinéastes que son jury primerait devraient « être conscients du monde dans lequel ils vivent ». Des propos qui reflètent la dichotomie de cette année cinématographique entre, d’une part,  une majorité de films particulièrement engagés, à thématiques sociales, politiques, de nombreux documentaires ou fictions documentaires abolissant les frontières entre les genres, et d’autre part, de poignantes histoires simples ou des films plus légers n’ayant d’autre but que de nous évader de la réalité, une dichotomie à l’image des trois films qui ont symbolisé cette année faste pour le cinéma hexagonal.

    Le cinéma : miroir du monde

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    Waltz with Bashir.jpgCette année, une majorité de films a donc aspiré à disséquer, éclairer ou souligner des périodes de l’Histoire, des situations politiques ou sociales : un miroir du monde dans lequel se reflètent et s’influencent intelligemment sa beauté et sa laideur, sa vérité et sa mythologie, sa réalité et sa fiction, un mélange duquel résulte une impression troublante qui ne nuit le plus souvent pas au propos mais au contraire le renforce, paradoxalement le crédibilise.

    Au premier rang de ces films hybrides se situe le grand oublié du palmarès du Festival de Cannes 2008, Valse avec Bashir d’Ari Folman : un documentaire d’animation d’une effroyable beauté sur la guerre du Liban (plus précisément sur le massacre de Palestiniens par les Phalangistes chrétiens en 1982) qui s’affranchit des règles qui séparent habituellement documentaire et fiction,  qui nous happe par la violence sublime des images, ces couleurs noires et ocre diaboliquement envoûtantes. Cette beauté insupportable  rend visible l’insoutenable et crée une distance salutaire, tout en soulignant l’ironie et l’amnésie (tragiques) et les échos (cyniques) de l’Histoire.

     C’est aussi au Liban, mais aujourd’hui, que nous emmène Khalil Joreige et Johanna Hadjithomas dans Je veux voir qui mêle avec beaucoup d’habileté fiction et documentaire, un film selon les propres termes des réalisateurs « éclairé par la présence improbable et onirique » de Catherine Deneuve qui « veut voir »  les stigmates de la guerre et qui, pour ce faire, part avec l’acteur Rabih Mroué sur les routes du Liban. Cette présence est à la fois un écho à la beauté du Sud et un contraste saisissant avec le spectacle de désolation des paysages en ruine, des vies dévastées : elle y est sublime de dignité et de courage. Le mélange si habile de fiction et documentaire mais aussi de mythologie cinématographique et de mémoire historique en font un film, un témoignage aussi, inclassable, captivant, troublant, jamais didactique dont le dernier plan et le dernier regard sont  sans doute parmi les plus beaux qu’il m’ait été donné de voir au cinéma.

     C’est aussi dans cette lignée que pourrait s’inscrire la lauréat de la palme d’or 2008, Entre les murs du Français Laurent Cantet qui, pourtant, est bel et bien une fiction mais qui donne brillamment l’illusion du documentaire, d’instants pris sur le vif.  Des murs qui renvoient des échos graves et poétiques, drôles et violents, d’une portée universelle, en alliant savamment humour et gravité. Un film « multiple, foisonnant, complexe » selon son réalisateur mais aussi une fenêtre ouverte sur les fracas du monde, l’exclusion culturelle et sociale qui ne stigmatise  ni les élèves ni les professeurs mais filme simplement deux réalités qui s’affrontent verbalement et qui dépassent parfois ceux qui les vivent.

     Pourrait aussi s’inscrire dans cette catégorie hybride : Johnny Mad Dog, le portrait sans concessions d’enfants soldats africains signé Jean-Stéphane Sauvaire ou dans un autre style, le documentaire/road movie truculent et épique d’Antoine de Maximy J’irai dormir à Hollywood qui, par ses rencontres insolites, inquiétantes, instructives touchantes  dresse un portrait des Etats-Unis,  d’un mythe confronté à la réalité et à ses blessures, ses craintes, ses failles.

     la vie moderne.jpgLe documentaire a aussi été à l’honneur cette année avec La vie moderne du maître du genre Raymond Depardon avec ses portraits de paysans saisissants de vérité mais aussi Je m’appelle Sabine le cri d’alarme et d’amour de Sandrine Bonnaire sur l’autisme.

     Parmi les fictions politiques et engagées figure également Hunger de Steve Mc Queen, lauréat de la Caméra d’or du Festival de Cannes 2008 : un  film réaliste et onirique, silencieux et si parlant, violent et idéaliste, sombre, carcéral, d’une radicalité éprouvante sur le « Blanket and No-Wash Protest » des prisonniers politiques de l’IRA dans lequel Mc Queen joue des contrastes avec un talent saisissant comme ces longs plans fixes qui augmentent encore l’impact du surgissement de la violence (et la crainte de ce surgissement) et celui du propos que la  froideur et le réalisme de la réalisation parsemée de moments d’onirisme souligne intelligemment.

     D’autres ont choisi de mettre en scène des personnalités politiques comme Paolo Sorrentino dans Il Divo : portrait d’Andreotti à l’humour noir décapant servi par une réalisation époustouflante et vertigineuse ou comme Oliver Stone dans W : l’improbable président dont la caméra, souvent placée là où ça fait mal,  n’ épargne rien au futur ex –président américain, soulignant souvent son ridicule, le montrant comme un enfant capricieux, plutôt rustre, pas très cultivé mais doté d’une mémoire considérable, un enfant dont la relation à son père  a bouleversé la face du monde, un enfant qui s’intéresse essentiellement au baseball mais qui, à 40 ans, trouve la foi, se convertit, cesse de boire, et se retrouve dans les pas historiques de son père, lequel aurait préféré y voir son frère qui, d’ailleurs, échouera.

    the visitor2.jpg C’est aussi parle biais de la fiction que d’autres thèmes « sociaux » ont été abordés comme la difficile condition des immigrés dans Le Silence de Lorna des frères Dardenne, prix du scénario du Festival de Cannes, douloureuse histoire d’amour entre deux êtres au bord du gouffre dans laquelle ces derniers montrent qu’ils restent les meilleurs cinéastes de l’instant, à la fois de l’intime et de l’universel, de ce basculement de l’existence en une précieuse et douloureuse seconde. Ken Loach, toujours aussi engagé,  dénonce aussi cette réalité sociale contemporaine dans le corrosif et percutant It’s a free world. C’est aussi le thème de The Visitor, grand prix du Festival du Festival du Cinéma Américain de  Deauville, film poignant sur l’amitié entre un professeur d’économie misanthrope et un jeune couple d’immigrés clandestins, un film qui ensorcelle doucement, parle de deuil, de retour à la vie, d’injustice, de tolérance, sans jamais être moralisateur, avec des personnages que nous laissons à leur rage et désespoir, avec regrets, mais que nous embarquons avec nous bien plus loin et bien après le générique de fin avec, en mémoire, le tempo douloureusement répétitif et le son sublimement retentissant du djembé, lors de la dernière scène, terrible et magnifique. Comme la plupart des films de ce 34ème Festival du Cinéma Américain de Deauville (parmi lesquels mon favori American Son de Neil Abramson) ce film reflète un visage sombre de l’Amérique. Inquiète. Vulnérable. Fébrile. Egarée. En recherche de figure paternaliste.

     C’est à une autre réalité politique que s’attaque Matteo Garrone dans Gomorra, fresque brutale et violente : celle de la Camorra Napolitaine.

     C’est par la comédie sociale que Pierre Jolivet, dans La très très grande entreprise a souhaité raconter le combat de citoyens ordinaires contre une entreprise tentaculaire et impersonnelle. Et même les studios Pixar avec le poétique, drôle et émouvant Wall-E s’affranchissent des frontières entre les genres en faisant une film d’animation politique et écologiste.

    parlez.jpg Avec Parlez-moi de la pluie c’est à l’engagement politique, qu’Agnès Jaoui, quant à elle, rend hommage. L’écriture de Bacri et Jaoui n’a pas son pareil pour faire danser l’humanité sous nos yeux et établir la météorologie des âmes en faisant s’enlacer pluie et soleil, force et faiblesse. Un hommage salutaire à l’engagement politique, à l’encontre de la mode poujadiste. Si, comme l’écrivait Kirkegaard cité dans le film, "l’angoisse est le possible de la liberté", la pluie sur les âmes, sans doute est-elle le possible de son soleil, teinté d’une bienheureuse mélancolie à l’image de ce film réconfortant, brillamment écrit et réalisé.

     Même Clint Eastwood, dans  L’Echange, recourt à la fiction pour évoquer  un problème contemporain à travers le combat d’une femme pour retrouver son fils face à l’injustice d’institutions corrompues, un film qui n’échappe malheureusement pas au manichéisme mais d’une beauté formelle renversante.

     miracle à.jpgCette liste ne serait pas complète sans évoquer le lyrique et mystique hommage de Spike Lee aux GI’S afro-américains dans Miracle à Santa  Anna ni sans évoquer le couple sulfureux Osvaldo Valenti et Luisa Ferida dans Une histoire italienne de Marco Tullio Giordana, mêlant l’histoire italienne trouble et troublante de ces deux acteurs  à l’Histoire italienne, surtout celle du fascisme pendant la Seconde Guerre Mondiale. 

    Le cinéma français à l’honneur 

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     Avec Entre les murs et sa palme d’or ( Pialat était le dernier cinéaste français à l’avoir obtenue avec Sous le soleil de Satan en 1987), et  deux autres films radicalement différents de ce dernier, 2008 a donc été l’année du cinéma français. Il est bien entendu impossible de ne pas évoquer l’écrasant et irrationnel  succès de Bienvenue chez les Ch’tis aux box office, plus gros succès du cinéma français de tous les temps avec 20,4 millions de spectateurs, un film qui a séduit le public par ses personnages et son histoire simples, même enfantins, dépourvus de méchanceté et de cynisme qui mettent la solidarité et l’amitié à l’honneur, film fédérateur, rassurant car sans surprises et sans aspérités, donnant au spectateur une image noble de lui-même ; sans doute davantage que par ses qualités scénaristiques et de mise en scène.

    Le mélodramatique  La Môme d’Olivier Dahan a également mis le cinéma français à l’honneur puisque Marion Cotillard, parmi une pluie de récompenses, a reçu le César mais aussi l’Oscar (succédant à Signoret qui l’avait obtenu en 1950 mais étant la première française à l’obtenir dans un film en langue française) : tourbillon vertigineux (admirable plan de la mort de Cerdan) aux images néanmoins hypnotiques, avec une caméra qui emprisonne, dicte l’émotion  et reflète une société impatiente, consumériste qui ne prend plus le temps. D’analyser. De la distance.  De se laisser envoûter par une émotion subreptice et non tapageuse.

     La Môme a donc accru la mode du biopic avec également cette année Sagan de Diane Kurys, un film empreint de liberté, de mélancolie, de cynisme, d’oisiveté, de solitude ravageuse à l’image de la vie tumultueuse et intense de l’écrivain mais aussi de la petite musique, si mélodieuse et mélancolique de ses mots. Il y eut aussi le très appliqué Coluche : l’histoire d’un mec, dépourvu de l’iconoclastie de son inspirateur éponyme mais porté par  un François-Xavier Demaison sidérant dévorant l’écran faisant revivre Coluche avec sa gestuelle et sa démarche si particulières, sa voix inimitable. Enfin avec le diptyque Mesrine de Jean-François Richet (et Sans arme ni haine ni violence de Jean-Paul Rouve)  c’est le symbole d’une époque, la nôtre, où la gloire apparaît comme la qualité ultime. Une époque où les médias sont fascinés par ce qu’ils dénoncent. Une époque où le pouvoir des images  l’emporte sur celui de la raison, ce que nous voyons sur ce que nous savons. L’illustration du besoin vorace et irrationnel du public  de tout savoir, de s’identifier, même à la vanité.

    Secret Défense.jpg Cette année, pour le cinéma français, a aussi été celle d’un cinéma décomplexé, qui n’hésite plus à pénétrer sur les terres d’un cinéma de genre dont les Américains avaient le monopole : que ce soit avec la comédie d’action Cash, avec l’adaptation de la bande dessinée Largo Winch, avec le thriller Pour elle, ou avec Secret défense  qui, grâce à la construction symétrique du scénario (qui met en parallèle le destin d’une jeune femme recrutée par la DGSE et celui d’un jeune homme embrigadé dans un mouvement terroriste, sans que cela soit caricatural ou artificiel), l’admirable travail de documentation et la consultation qui a précédé le tournage, la mise en scène aussi nerveuse qu’efficace, initie en France un film de genre haletant, populaire et exigeant, aux interprètes irréprochables. On observe aussi une multiplication des films utilisant un montage nerveux, une multiplicité de plans et de lieux, très inspirés de la saga des Jason Bourne.

    De poignantes histoires simples

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     Il n’y a sans doute rien de plus compliqué que de raconter une histoire simple, de la transcender par la sensibilité et le talent de son auteur, et cette année le cinéma a foisonné de poignantes histoires simples : Philippe Claudel, tout d’abord, avec Il y a longtemps que je t’aime , peinture bouleversante d’âmes grises et enfermées, a signé un véritable hymne à la vie.

     premier.jpgEnsuite James Gray avec Two lovers :  par des gestes, des regards, des paroles esquissés ou éludés, il dépeint de manière subtile la maladresse touchante et la cruauté cinglante d’un amour vain , un film d’une vertigineuse sensibilité à l’image des sentiments qui s’emparent des personnages  principaux, évidemment Joaquin Phoenix avec son regard mélancolique, fiévreux, enfiévré de passion, ses gestes maladroits, son corps même qui semble crouler sous le poids de l’existence, sa gaucherie adolescente. Un thriller intime qui exalte et respire  la beauté déchirante d’un amour contrarié, qui réinvente la comédie romantique en magnifiant une histoire simple, nous donnant presque à ressentir les battements de cœur tourmentés de ses protagonistes,  un film lumineux et douloureux, intense et inoubliable, profond et mélancolique comme la nouvelle de Dostoïevski dont il s’inspire mais aussi un film sur le poids de la famille, thème fétiche de James Gray que l’on retrouve dans un autre succès de cette année Le premier jour du reste de ta vie de Rémi Bezançon. 5 personnages. 5 membres d’une même famille. 5 journées déterminantes. 12 ans : ce film aurait pu se réduire à ce concept mais, surtout, il exhale l’inestimable parfum de l’enfance et la beauté cruelle de l’existence, fait s’entrelacer ces moments d’une beauté redoutable où bonheur et horreur indicibles semblent se narguer, et témoigne de toute l’ironie parfois d’une cruauté sans bornes de l’existence.

     Le cinéma affectionne d’ailleurs toujours autant les œuvres chorales et la famille comme Desplechin avec sa tragédie légère Un conte de noël ou avec Une histoire de famille, premier film très réussi d’Helen Hunt. Klapisch, un habitué du film choral  y est aussi revenu cette année avec Paris dans lequel il sublime et confronte l’éphémère dans la ville éternelle, un film qui chante, danse et célèbre la ville et la vie qu’elle incarne et contient.

    Avec Deux jours à tuer Jean Becker, lui aussi,  nous fait prendre conscience du poids de chaque seconde par ce film qui nous laisse à bout de souffle tout en nous insufflant un magistral souffle de vie.

     C’est par un conte poétique et désenchanté intitulé  La Frontière de l’aube que Philippe Garrel , injustement hué à Cannes,  nous ensorcelle et par une lenteur qui donne le temps au temps, le temps de s’imprégner de ses personnages,  son romantisme sans concessions, son aspect surréaliste et sa façon de saisir et juxtaposer des instants.  Un film aux frontières de la réalité, de la folie, de la mort, sur la passion dévastatrice, un amour fatal porteur d’une beauté à la fois sombre et lumineuse.

    Les habitués et les surprises du box office

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     Une année cinématographique ne serait pas digne de ce nom sans film de Woody Allen, cette année Vicky Cristina Barcelona : un moment unique et réjouissant, un vaudeville qui ne se contente pas de faire claquer les portes mais qui ouvre sur les âmes toujours tourmentées, du moins alambiquées, de ses protagonistes, un mélange de dérision, de sensualité, de passion, de mélancolie, de gravité, de drôlerie, de cruauté, de romantisme, d’ironie. Un hymne à la beauté et à l’art, réflexion sur l’amoralité amoureuse, les atermoiements du corps et du cœur. Une comédie romantiquement sulfureuse et mélancoliquement légère, alliant avec toute sa virtuosité  ces paradoxes et s’éloignant des clichés ou de la vulgarité qui auraient si faciles pour signer un film  aussi élégant que sensuel. Malgré ses 72 ans, le cinéaste fait preuve d’une acuité, d’une jeunesse, d’une insolence, d’une inventivité toujours étonnantes, remarquables et inégalées.

    quantum of solace.jpg Cette année était aussi celle du très attendu 22ème volet de la saga James Bond, Quantum of Solace transition réussie et nécessaire vers de nouvelles aventures dont une scène réussie sur un air de Tosca mérite à elle seule le détour, même si le scénario n’était pas à la hauteur du magistral Casino Royale,  présentant une véritable surenchère  (nombre de plans, scènes d’action, nombre de lieux) et un James Bond, beaucoup plus sombre et plus violent,  porté par un Daniel Craig néanmoins toujours irréprochable qui a su renouveler le mythe sans l’écorner.

     Un autre héros mythique très attendu était de retour cette année : Indiana Jones avec Indiana Jones et le Royaume du Crâne de Cristal, cette fois-ci en pleine guerre froide  mais ayant conservé son humour sarcastique, ses scènes d’action trépidantes, époustouflantes, tonitruantes, sa désinvolture élégante, même dans les situations les plus dramatiques.

     Christophe Barratier après le triomphe de son premier film Les Choristes était lui aussi très attendu avec son deuxième film Faubourg 36 qui n’a pas remporté le même succès en salles, un  hommage au cinéma d’hier avec un style joliment désuet, musical, mélancolique, sentimental, photogénique et enthousiaste avec une résonance sociale finalement très actuelle.

      Astérix aux Jeux Olympiques avec son budget record de 78 millions n’a pas non plus atteint les sommets du box office attendus malgré un nombre de spectateurs dépassant les 6 millions.

     La comédie musicale Mamma mia !  adapté d’une comédie musicale à succès, film enchanté et enchanteur sur un air joliment suranné et naïf d’Abba, porté par une Meryl Streep époustouflante et à l’enthousiasme communicatif, a en revanche remporté un vif succès en salles.

     Cette année a également réservé son lot habituel de suites de comédies faciles qui n’ont pas connu le même succès que les films initiaux que ce soit Disco (Oteniente avait connu le succès avec Camping), ou Les Randonneurs à St Tropez (qui faisaient suite aux  Randonneurs de Philippe Harrel) .

     Mes amis, mes amours la (trop) gentille adaptation du roman éponyme de Marc Lévy n’a pas plus rencontré le public,  prouvant bien qu’il n’y a pas de recettes tout comme le prouvent les surprises du box office grâce au bouche à oreille comme Séraphine de Martin Provost.

    Les inclassables: des expériences sublimes et éprouvantes

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     Dans cette catégorie, je voulais surtout inclure deux films magistraux : There will be blood de Paul Thomas Anderson  et plus encore Into the wild de Sean Penn qui ont en commun d’être autant des expériences que des œuvres cinématographiques.

     There will be blood traite de la folie fiévreuse de l’or noir : une expérience captivante et éprouvante, étrange, dérangeante, cruelle, fascinante, hypnotique, vertigineuse, dans laquelle la sublime photographie dichotomique  reflète le combat interne de Plainview, grâce aussi à une musique intelligemment discordante où le sublime côtoie le grotesque  à l’image du personnage principal dont la construction scénaristique et visuelle épouse la folie au-delà des frontières du désenchantement. Un face à face de l’homme avec la nature,  une ascension puis descente aux enfers qui rappellent un autre film aussi éprouvant que sublime,  Into the wild de Sean Penn, véritable expérience sensorielle qui transgresse les codes habituels de la narration filmique procurant une sensation de liberté absolue, enivrante, créant une atmosphère sauvage et envoûtante, la photographie d’Eric Gautier révélant la beauté et la somptuosité mélancolique de la nature  comme elle révèle le personnage principal à lui-même confrontant l’intime au grandiose. Un road movie atypique et universel, tragique et lumineux animé d’un souffle lyrique. Un voyage aux confins du monde, de l’être, de nous-mêmes.

     Après le retour du western l’an passé avec le chef d’œuvre L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford, il faut souligner le très  beau western signé Ed Harris, Appaloosa, véritable hommage au genre, ode à l’amitié, drôle et passionnante.

    Des images indélébiles

     

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    LornaB.jpg De cette année resteront aussi des images, d’acteurs remarquables (en plus de tous ceux précités): le regard de Catherine Deneuve (prix spécial du 61ème festival de Cannes avec Clint Eastwood) égaré puis reconnaissant puis passionné puis ouvrant sur un  océan d’histoires et de possibles dans Je veux voir, le talent de Sylvie Testud et de François-Xavier Demaison ou Josh Brolin pour épouser les personnalités qu’ils ont incarnées, le jeu criant de vérité d’Arta Dobroshi dans Le silence de Lorna, Catherine Frot virevoltante, rayonnante et malicieuse dans la comédie policière réjouissante de Pascal Thomas Le crime est notre affaire, Gérard Lanvin, impressionnant de froideur, de maîtrise de détermination, de charisme dans Secret Défense , mais encore  Kristin Scott Thomas dans Il y a longtemps que je t’aime, Albert Dupontel dans Deux jours à tuer, Samuel.L Jackson dans Harcelés, Nathalie Baye en aventurière égocentrique et fantasque à la fragilité qui affleure dans Passe-passe, et puis tous les acteurs de Musée haut, musée bas , la comédie chorale baroque de Jean-Michel Ribes sur la beauté de l’art qui peut joliment ravager, qui ronge et qui porte, qui fait de la rencontre avec l’art un véritable rendez-vous amoureux  qui perturbe, émeut, ébranle les certitudes, renforce, enrichit, nous élève, un film dont on ressort aussi étourdie par tant d’images, de visages désordonnés, ne parvenant pas à en retenir une seule comme ce zapping que Ribes semble vouloir pourtant aussi dénoncer.

     out.jpgResteront de cette année des images infiniment plus tristes avec la disparition de monstres sacrés du cinéma avec tout d’abord deux acteurs (deux légendes du cinéma américain) qui laissent derrière eux des filmographies impressionnantes, Paul Newman et Charlton Heston, et avec deux autres qui n’en ont pas eu le temps malgré leurs talents si prometteurs que ce soit celui de Heath Ledger ou de l’écorché vif et non moins talentueux Guillaume Depardieu. Et puis bien sûr, le maître du cinéma épique,  lyrique aussi doué pour le suspense  (Les 3 jours du Condor) que les fresques romanesques (Out of Africa) ou le western (Jeremiah Johnson) ou la comédie (Tootsie) : l’irremplaçable Sydney Pollack.

     Comme le disait Truffaut : « La vie a beaucoup plus d’imagination que nous ». La preuve en est le film, magnifique et poignant, que pourrait être la vie de celui, si charismatique,  qui incarne désormais l’American dream, de celui (entre autres symboles tellement cinématographiques, d’un indéniable potentiel dramatique ) dont la grand-mère qui l’a élevé expire son dernier souffle (non sans avoir voté !) la veille du jour où son petit-fils en donne un nouveau au monde. Mais c’est là déjà une toute autre Histoire…

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    Pour tous les autres films ou pour lire les critiques détaillées des films précités, je vous invite à consulter la rubrique « Critiques des films à l’affiche en 2008 » (dans le sommaire, dans la colonne de gauche du blog), la liste de mes films incontournables de cette année 2008 (colonne de gauche du blog) et mes deux autres blogs « In the mood for Cannes » et « In the mood for Deauville ».

    fox3.jpg Je dresserai un bilan (encore) plus subjectif de cette année 2008 à la toute fin de l’année. En attendant, vous pourrez prochainement trouver d’autres films de cette année 2008 en avant-première sur ce blog : Australia de Baz Luhrmann, I feel good de Stephen Walker…

    J’en profite pour vous recommander l’instructive interview du directeur de la rédaction de « L’ENA hors les murs » sur « La figure présidentielle dans le cinéma français ».

    Sandra.M

  • Dernière de "Love letters" avec Alain Delon et Anouk Aimée, au théâtre de la Madeleine, ce 29 novembre

    loveletters.jpgCe samedi 29 novembre 2008, au théâtre de la Madeleine, aura lieu la dernière de "Love letters", la pièce de A.R. Gurney dont  Anouk Aimée et Alain Delon ont donné 20 représentations exceptionnelles.

    Cliquez sur le lien suivant pour lire mon article consacré à la Première de "Love letters" avec Anouk Aimée et Alain Delon sur lequel vous trouverez également tous les renseignements pratiques pour assister à la pièce. Il reste encore des places pour demain et après-demain...

     

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