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Exposition Martin Scorsese à la Cinémathèque Française: conférence de presse et vernissage

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Difficile de l’ignorer au regard de la médiatisation dont elle fait l'objet mais je ne résiste pas à l’envie de vous parler à mon tour de l’ exposition Scorsese qui a lieu à la Cinémathèque Française du 14 octobre 2015 au 14 février 2015 accompagnée d’une rétrospective (intégrale !) de l’œuvre du cinéaste du 14 octobre au 30 novembre 2015 d’autant plus que j’ai eu le plaisir d’assister au vernissage de l’exposition ainsi qu’à la passionnante conférence de presse de Martin Scorsese (à qui le Festival Lumière de Lyon décernera ce soir le prix Lumière comme l’a rappelé Serge Toubiana lors de la conférence de presse).

Cinéaste intrinsèquement new-yorkais, Martin Scorsese est aussi un cinéphile érudit qui a par ailleurs créé la Film Foundation pour préserver la mémoire du cinéma. C’est ainsi à ce titre que, en 2010, il avait présenté « Le Guépard » de Visconti projeté dans le cadre de Cannes Classics au Festival de Cannes, moment inoubliable dont vous pouvez retrouver mon récit, ici…La mission de la Film Foundation est ainsi la conservation du patrimoine cinématographique mondial.

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Scorsese revient ainsi à la Cinémathèque Française dix ans après y être venu lors de l’inauguration du bâtiment de Frank Gehry.

Que vous aimiez le cinéma de Scorsese ou non, que vous le connaissiez plus ou moins bien, je ne peux que vous encourager à découvrir cette exposition qui vous immergera dans son univers, ses racines, ses décors, ses thématiques récurrentes et vous (dé)montrera la cohérence et l’intelligence indéniables et admirables de son cinéma. Il s’agit en effet de la plus importante exposition jamais réalisée sur le cinéaste, une exposition conçue par la Deutsche Kinemathek, Museum for Film and Television, Berlin et retravaillée avec la complicité de Kristina Jaspers et Nils Warnecke, les deux commissaires, et par Matthieu Orléan.

L’exposition est divisée en 5 partie. La première intitulée «  de nouveau héros » vous immergera dans le clan familial qui a tant inspiré son cinéma, mais aussi dans le monde des gangs. La deuxième partie intitulée « Crucifixion » est consacrée à l’influence de l’Eglise catholique dans son cinéma (Scorsese souhaitait devenir prêtre dans sa jeunesse). Ne manquez pas les images de films mises en parallèle à l’entrée de l’exposition et qui montrent magnifiquement à quel point cette thématique est présente dans son œuvre.

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La troisième partie évoque un personnage incontournable de son oeuvre  : New York, théâtre fascinant de ses films (il a grandi dans le quartier de Little Italy qui imprègne tant son cinéma), dont, comme Woody Allen, pour reprendre les termes de Serge Toubiana il est « un des plus grands chroniqueurs de ses métamorphoses ». La quatrième partie évoque ses « inspirations » comme Hitchcock à qui il fait régulièrement référence allant aussi jusqu’à collaborer avec Bernard Herrmann, son compositeur dont le maître du suspense est indissociable, mais aussi des techniciens ayant collaboré avec Hitchcock. Cette partie évoque aussi ses nombreuses références au patrimoine cinématographiques a fortiori dans ses films qui y sont consacrés comme « Aviator » en 2004 ou encore « Hugo Cabret » en 2011. Enfin, la dernière partie intitulée « Maestria » est consacrée à l’habileté et la virtuosité de sa mise en scène et démontre la construction visuelle de ses films plan par plan, notamment à travers des story boards. Vous y croiserez bien sûr ses acteurs fétiches : De Niro, DiCaprio, Keitel.

Véritable caverne d’Ali Baba, cette exposition vous permettra de découvrir de nombreux documents fascinants : photographies, storyboards, costumes, affiches, objets culte… L’exposition Martin Scorsese s’appuie principalement sur sa propre collection privée à New York, ainsi que sur la collection de Robert De Niro et celle de Paul Schrader. Je vous laisse découvrir ci-dessous mes clichés de quelques-uns de ces documents qui vont feront écarquiller vos yeux de cinéphiles!

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Comme moi, je vous garantis que vous ressortirez avec une seule envie : revoir toute l’œuvre de Scorsese que cette exposition éclaire magnifiquement.

 Serge Toubiana inscrit « Le temps de l’innocence » parmi les 10 meilleurs films de l’histoire du cinéma, c’est aussi mon Scorsese préféré que je vous invite à revoir. Retrouvez également, ci-dessous, ma critique de « Shutter island » que vous pourrez également (re)voir dans le cadre de la rétrospective. Je vous recommande aussi d’aller faire un tour sur le site officiel de la Cinémathèque Française particulièrement bien agencé et sur quel vous retrouverez de  nombreux documents  liés à l’exposition : http://www.cinematheque.fr/   /

Vous pourrez également asssister aux projections et conférences suivantes :

Jeudi 22 octobre à 19H : « Scorsese, l’homme par qui le rock a envahi le cinéma »par Michka Assayas

Jeudi 5 novembre à 19H : « Taxi Driver » : un montage, dé-montages » par Bernard Benouel

Jeudi 19 novembre à 19H : « Martin Scorsese : vitesse trompeuse » par Jean-Baptiste Thoret

En ligne sur Cinematheque.fr : le New York de Martin Scorsese

Martin Scorsese recevra le prix Lumière ce vendredi à Lyon

Sur Arte : cycle Martin Scorsese du 12 au 18 octobre

Sur Canal + mardi 13 octobre à 20H55 : diffusion en première exclusivité du « Loup de Wall Street »(2013)

Sur Cine + club dimanche 25 octobre à 20H45 : « Les Nerfs à vif » (1991) suivi de « Casino »(1995)

Informations pratiques :

La Cinémathèque Française

Musée du Cinéma

51 rue de Bercy

75012 Paris

Informations : 0171193333

Martin Scorses, l’exposition

Du lundi au samedi (sauf fermeture mardi 25 décembre et 1er janvier) : de 13h à 19h, nocturne le jeudi jusqu’à 22H

Samedi, dimanche et vacances scolaires de Toussaint et Noël : de 10h à 20H

Plein Tarif : 12 euros – Tarif réduit : 9 euros – Moins de 18 ans : 6 euros – Libre Pass : accès libre

Quelques extraits vidéos de la conférence de presse et quelques citations extraites de celle-ci :

« C’est la première fois que je vois l’exposition et c’est assez bouleversant. »

« Avec De Niro comme avec DiCaprio la confiance est réciproque, c’est une amitié qui fait que le travail est facile. »

« Dans ma famille on ne lisait pas mais on racontait beaucoup d’histoires et on écoutait beaucoup de musiques. »

« Je me fais du souci pour les jeunes et pour ce que représente le cinéma pour eux. » (à propos des blockbusters)

« Aviatior est à part car on le voulait à très grande échelle mais pour les autres c’est seulement en cours de route qu’on a réalisé. »

« Pasolini a tourné la plus belle adaptation de l’Evangile, c’est le film que j’aurais voulu tourner . »

« J’ai vu Accatone à la projection presse en 1966 au Festival de New York, c’est un film bouleversant. »

« La première musique qui a provoqué des émotions en moi est celle de Django Reinhardt ».

« J’ai une relation directe avec les financiers qui investissent dans mes films. Il y a eu une traversée du désert dans les 80′. »

« L’idée de départ était lien entre le storyboard et l’art contemporain pour l’expo à Berlin avant de faire une expo plus large. »

« Depuis une quinzaine d’années mes dessins sont devenus des croquis plus petits et rapides ».

« J’ai l’habitude de penser en termes de séquences, d’anticiper en termes de séquences montées. »

 

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La musique est un acteur indissociable du cinéma de Scorsese et en est même une composante essentielle. Pour prolonger le plaisir de l’exposition Scorsese à la Cinémathèque Française, je vous recommande vivement les 4 CD « The Cinema of Martin Scorsese » dans lesquels vous retrouverez les inoubliables musiques de ses films. La musique a bercé l’existence de Scorsese et a influé sur son cinéma, que ce soit le son et le «  rythme de la langue sicilienne, de l’anglais avec accent sicilien » ou des musiques qui flottaient dans le quartier de son enfance, le quartier new-yorkais de Little Italy. Des musiques qui se répondent et se font écho parfois d’un film à l’autre, prouvant à qui en douterait encore à quel point son cinéma est un impressionnant édifice d’une logique implacablement construite et à quel point Scorsese est cinéphile mais aussi mélomane. Preuve en est notamment sa collaboration avec Bernard Herrmann (LE compositeur d’Hitchcock qui a beaucoup influencé son cinéma) pour »Taxi driver ». « The Cinema of Martin Scorsese » vous permet d’écouter chronologiquement les musiques de ses films qu’elles soient originales ou non et ainsi de vous replonger dans leurs singulières ambiances. 5 heures de musique pour revisiter le cinéma de Scorsese, en appréhender la richesse et la construction musicales. Au programme donc notamment les musiques de Bernard Herrmann, Howard Shore, ou encore Peter Gabriel mais aussi Bach ou encore les voix de Tony Bennett ou Aretha Franklin. Une orfèvrerie musicale qui témoigne de l’éclectisme musical qui imprègne les films de Scorsese. Pour ma part, je suis totalement envoûtée par la musique du « Temps de l’innocence » (composée par Elmer Bernstein) à réécouter sans modération :

Une compilation Decca Records – Un label Universal Music France – A gagner prochainement sur Inthemoodforfilmfestivals.com et Inthemoodforcinema.com.

Critique de SHUTTER ISLAND de Martin Scorsese (critique publiée lors de la sortie du film) –

A voir à la Cinémathèque le lundi 19 octobre à 16H30/ le mercredi 4 novembre à 19H/ le samedi 28 novembre à 15H30

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Cela faisait longtemps. Longtemps que j’entendais parler de cette adaptation tant attendue du best seller de 2003 de Dennis Lehane (que je n’ai pas lu et qui est également l’auteur de best-sellers ayant donné lieu à d’excellentes adaptations cinématographiques comme « Mystic river » de Clint Eastwood et, dans une moindre mesure, « Gone baby gone » de Ben Affleck). Longtemps que je n’avais pas ressenti un tel choc cinématographique. Longtemps qu’un film ne m’avait pas autant hantée des heures après l’avoir vu… Un grand film, c’est en effet comme un coup de foudre. Une évidence. Une évidence qui fait que les mots à la fois manquent et se bousculent. Je vais essayer de trouver les plus justes pour vous faire partager mon enthousiasme sans trop en dévoiler.

Avant toute chose, il faut que je vous présente « Shutter island ». Shutter island est une île au large de Boston sur laquelle se trouve un hôpital psychiatrique où sont internés de dangereux criminels. Une île séparée en trois bâtiments : un pour les femmes, un pour les hommes et un pour les criminels les plus dangereux, enfin quatre si on compte son phare qui détient la clef de l’énigme. En 1954, l’une des patientes, Rachel Solando, a mystérieusement disparu… alors que sa cellule était fermée de l’extérieur, laissant pour seul indice une suite de lettres et de chiffres. Le marshal Teddy Daniels (Leonardo DiCaprio) et son coéquipier Chuck  Aule (Mark Ruffalo) sont envoyés sur place pour résoudre cette énigme… Alors qu’une forte tempête s’abat sur l’île isolée, une plongée dans un univers étrange, sombre, angoissant s’annonce alors pour Teddy qui devra aussi affronter ses propres démons.

Rarement un film aura autant et si subtilement fait se confondre la fond et la forme, le ressenti du personnage principal et celui du spectateur. Dès le premier plan, lorsque Teddy, malade, rencontre son coéquipier sur un ferry brinquebalant et sous un ciel orageux, Scorsese nous embarque dans l’enfermement, la folie, un monde mental qui tangue constamment, flou, brouillé. Tout est déjà contenu dans cette première scène : cette rencontre qui sonne étrangement, le cadre  qui enferme les deux coéquipiers et ne laisse voir personne d’autre sur le ferry, cette cravate dissonante, le mal de mer d’un Teddy crispé, le ciel menaçant, les paroles tournées  vers un douloureux passé.

Puis, c’est l’arrivée sur l’île et toute la paranoïa que Scorsese suggère en un plan : un visage informe, un regard insistant… En quelques plans subjectifs, Scorsese nous « met » dans la tête de Teddy, nous incite à épouser son point de vue, à ne voir et croire que ce que lui voit et croit. Nous voilà enfermés dans le cerveau de Teddy lui-même enfermé sur « Shutter island ». Avec lui, nous nous enfonçons dans un univers de plus en plus menaçant, sombre, effrayant, déroutant. L’étrangeté des décors gothiques, l’instabilité du climat coïncident avec cette fragilité psychique. Tout devient imprévisible, instable, fugace, incertain.

Commence alors la quête de vérité pour Teddy alors que surgissent des images du passé : des images de sa femme défunte et des images de l’horreur du camp de concentration de Dachau dont Teddy est un des « libérateurs », images qui se rejoignent et se confondent parfois. L’hôpital, autre univers concentrationnaire  rappelle alors les camps, avec ses êtres moribonds, décharnés, ses barbelés…, d’autant plus qu’il est dirigé par l’Allemand Dr Naehring. La guerre froide pendant laquelle se déroule l’intrigue, période paranoïaque par excellence, renforce de climat de suspicion. L’action est par ailleurs concentrée sur quatre jours, exacerbant encore l’intensité de chaque seconde, le sentiment d’urgence et de menace.

Chaque seconde, chaque plan font ainsi sens. Aucun qui ne soit superflu. Même ces images des camps dont l’esthétisation à outrance m’a d’abord choquée mais qui en réalité sont le reflet de l’esprit de Teddy qui enjolive l’intolérable réalité. Même (surtout) cette image envoûtante d’une beauté poétique et morbide qui fait pleuvoir les cendres.

A travers la perception de la réalité par Teddy, c’est la nôtre qui est mise à mal. Les repères entre la réalité et l’illusion sont brouillées.  A l’image de ce que Teddy voit sur Shutter island où la frontière est si floue entre l’une et l’autre, nous interrogeons et mettons sans cesse en doute ce qui nous est donné à voir, partant nous aussi en quête de vérité. Le monde de Teddy et le nôtre se confondent : un monde de cinéma, d’images trompeuses et troublantes qui ne permet pas de dissocier vérité et mensonge, réalité et illusion, un monde de manipulation mentale et visuelle.

Pour incarner cet homme complexe que le traumatisme de ses blessures cauchemardesques et indélébiles et surtout la culpabilité étouffent, rongent, ravagent, Leonardo DiCaprio, habité par son rôle qui, en un regard, nous plonge dans un abîme où alternent et se mêlent même parfois angoisse, doutes, suspicion, folie, désarroi (interprétation tellement différente de celle des « Noces rebelles » mais tout aussi magistrale qui témoigne de la diversité de son jeu). La subtilité de son jeu  fait qu’on y croit, qu’on le croit ; il est incontestablement pour beaucoup dans cette réussite. De même que les autres rôles, grâce à la duplicité des interprétations (dans les deux sens du terme): Mark Ruffalo, Ben Kingsley, Michelle Williams, Emily Mortimer, Patricia Clarkson, Max von Sydow…

Le maître Scorsese n’a pas son pareil pour créer une atmosphère oppressante, claustrophobique, pour déstabiliser les certitudes. Une œuvre pessimiste d’une maîtrise formelle et scénaristique impressionnante, jalonnée de fulgurances poétiques, dont chaque plan, jusqu’au dernier, joue avec sa et notre perception de la réalité. Un thriller psychologique palpitant et vertigineux. Une réflexion malicieuse sur la culpabilité, le traumatisme (au sens éthymologique, vcous comprendrez en voyant le film)  et la perception de la réalité dont le film tout entier témoigne de l’implacable incertitude. Ne cherchez pas la clef. Laissez-vous entraîner. « Shutter island », je vous le garantis, vous emmènera bien plus loin que dans cette enquête policière, bien plus loin que les apparences.

Un film multiple à l’image des trois films que Scorsese avait demandé à ses acteurs de voir  avant le tournage: « Laura » d’Otto Preminger, « La griffe du passé » de Jacques Tourneur, « Sueurs froides » d’Alfred Hitchcock.  Un film noir. Un film effrayant. Un thriller. En s’inspirant de plusieurs genres, en empruntant à ces différents genres, Martin Scorsese a créé le sien et une nouvelle fois apposé la marque de son style inimitable.

 Un film dont on ressort avec une seule envie : le revoir aussitôt. Un film brillant. Du très grand Scorsese. Du très grand cinéma. A voir et encore plus à revoir.

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