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Critique de "De rouille et d'os" de Jacques Audiard

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 Ali (Matthias Schoenaerts)  se retrouve avec Sam, 5 ans son fils qu’il connaît à peine. Sans domicile, sans argent et sans amis, Ali trouve refuge chez sa sœur (Corine Masiero) à Antibes. Elle les héberge dans le garage de son pavillon, elle s’occupe du petit. A la suite d’une bagarre dans une boîte de nuit, son destin croise celui de Stéphanie (Marion Cotillard). Il la ramène chez elle et lui laisse son téléphone. Stéphanie est dresseuse d’orques au Marineland. Il faudra que le spectacle tourne au drame, que Stéphanie perde ses jambes, pour qu’un coup de téléphone dans la nuit les réunisse à nouveau. Lors de la conférence de presse Jacques Audiard a ainsi évoqué des « destins simples magnifiés par les accidents », « une histoire d’amour des années de crise », « deux personnages qui tentent de s’extraire de leurs conditions. »

Jacques Audiard revient ainsi sur la Croisette et en compétition officielle avec « De rouille et d'os », adapté d’une nouvelle de Craig Davidson après avoir remporté le prix du Meilleur Scénario pour « Un héros très discret » lors de l'édition 1996 du festival, et le Grand Prix du Jury pour « Un prophète », il y a 3 ans. Cette fois, il revient avec une histoire d’amour entre deux êtres blessés (mais les personnages d’Audiard le sont finalement toujours), et comme toujours chez Audiard, pas forcément immédiatement aimables mais emportant progressivement notre adhésion. Son cinéma est à l’image de ce film et de ces deux personnages : un mélange habile et poignant de rudesse et de délicatesse. C’est un film de sensations, de chair, de corps, de sang. Le corps meurtri de Stéphanie face à celui presque animal d’Ali. Le corps brutalisé et filmé avec délicatesse, caressé presque par la caméra de Jacques Audiard (comme par le regard de Stéphanie). La dureté sublimée par une douce lumière et une chaleureuse atmosphère qui atténuent la violence (sociale) ravageuse du film. « J’ai horreur de la violence. Curieux de dire que j’ai horreur de la violence et d’y revenir tout le temps » a ainsi déclaré Jacques Audiard, ce midi, en conférence de presse.

Bien qu’ils soient très différents dans leurs manières de filmer, ce film d’Audiard en particulier m’a fait penser au cinéma des Dardenne qui, eux aussi, mettent en scène des êtres cabossés par la vie et la société (avec certes beaucoup plus de réalisme, évidemment), dont les enfants sont souvent les involontaires victimes, et ils ont bien sûr en commun une remarquable direction d’acteurs, et une force de la mise en scène, aussi différentes soient-elles.

C’est un film de contrastes et d’évolutions. De l’arrogance, ou du moins du contrôle à l’abandon. De l’impossibilité de s’exprimer à la possibilité de dire les plus beaux mots qui soient. Et surtout de la solitude à la réconciliation avec leurs proches (sœur, enfant) et avec eux-mêmes.

Un film âpre et plein d’espoir. De rouille et d’os. De chair et de sang. De rudesse et de délicatesse. De douceur et de violence. De troublants paradoxes pour un troublant film. Des contrastes à l’image de ceux de l’esthétique du film. Le (magnifique montage) met en exergue et oppose les sons, les silences, les corps, le contrôle, l’abandon. Ajoutez à cela une bande originale réussie, de la musique de Desplat à « Firework » de Katy Perry. Deux acteurs extraordinaires et extraordinairement dirigés. Comme dans « Bullhead », c’est l’animalité de son personnage que fait ressortir ici Matthias Schoenaerts, mais ici, au contraire de son personnage dans le film qui l’a révélé, il va aller vers la parole, l’humanité. Son personnage concentre aussi les contrastes du film, de même que celui de Marion Cotillard. Tous deux sont bouleversants de justesse, de dureté et de douceur, d’humanité et d’animalité, et en tout cas de fragilité masquée.

Marion Cotillard était ainsi visiblement très heureuse d’être à Cannes. Lors de la conférence de presse, elle a ainsi déclaré : « C’est ma première fois dans un film en compétition officielle à Cannes. Je ne pensais pas que ça allait me rentre si joyeuse. C’est un festival mythique qui a vu tellement de grandes histoires, de grands acteurs, de grands artistes et je suis particulièrement heureuse d’y être avec le film de Jacques» tandis que Matthias Schoenaerts a déclaré à son propos « C’est une comédienne exceptionnelle. On va dans l’absolu ». Pour Jacques Audiard, « Marion est une actrice très virile et sensuelle en même temps. Elle a une autorité dans le jeu. Elle est capable de passer de l’autre côté du mur ». Signalons enfin la présence de Corinne Masiero (dans le rôle de la sœur d’Ali), révélée par le personnage de Louise Wimmer dans le film éponyme de Cyril Mennegin.

Le Festival de Cannes commençait très fort avec ce film qui aurait pu prétendre à tous les prix, ou presque. Un film coup de poing qui fut aussi mon premier coup de cœur de cette édition 2012. Un film sensoriel magistralement monté, joué, pensé et mis en scène.

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Lien permanent Imprimer Catégories : CRITIQUES DES FILMS A L'AFFICHE EN 2011/2012 Pin it! 0 commentaire

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