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cinéma - Page 209

  • "L'Enfer" d'Henri-Georges Clouzot : critique du film

     

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    Le Corbeau. La Vérité. Quai des Orfèvres. Les Diaboliques. Le Salaire de la Peur. Cinq films de Clouzot qui font partie de mon panthéon cinématographique et qui ont bercé mon enfance. Cinq films qui montrent à quel point Clouzot était un brillant directeur d'acteurs : Vera Clouzot, Simone Signoret,  Charles Vanel, Yves Montand, Louis Jouvet... et Brigitte Bardot à qui il offrit son plus beau rôle dramatique dans le splendide « La Vérité ». A quel point il était un grand metteur en scène (malgré l'étiquette de « qualité française » qu'on a voulu lui accoler). A quel point ses films témoignent d'audace et de modernité, de suspense auquel Hitchcock même n'aurait rien eu à envier, d'intensité dramatique rare, de cynisme réjouissant... mais ce n'est rien à côté du film qui ne vit jamais le jour et qui, sans nul doute, aurait été un chef d'œuvre. Un film unique et singulier intitulé « L'Enfer » sur la piste duquel Serge Bromberg s'est retrouvé suite aux aléas parfois bienheureux du destin : une panne d'ascenseur qui le conduisit à rester bloqué avec Inès Clouzot, la dernière femme du cinéaste...

     Avec Ruxandra Medrea, il retrace l'histoire de ce film mêlant témoignages de protagonistes de l'époque mais aussi images du film ou des essais. Et si le documentaire s'intitule « L'Enfer de Clouzot » (et non documentaire de Serge Bromberg sur L'Enfer) c'est parce qu'il est avant tout un hommage au film qu'il tente de reconstruire (même si cette reconstruction d'un film qui s'est en quelque sorte lui-même sabordé était vouée à l'échec) avant même d'être un documentaire sur celui-ci et son tournage. Serge Bromberg a choisi de se mettre en retrait pour mettre en valeur l'œuvre de Clouzot, sans pour autant édulcorer le caractère entier (c'est un euphémisme...) du cinéaste que le perfectionnisme (mais avec quel brillant résultat dans ses précédents films !) poussait à exiger le meilleur de ses acteurs, et à les épuiser.

    Ces images époustouflantes, de beauté, d'inventivité, d'audace, ont été bloquées pendant des années pour raisons juridiques essentiellement puis ont été considérées comme perdues. Elles datent de 1964...et pourtant en 2009 on se demande quel film a su concilier avec autant de perfectionnisme et d'imagination  le fond et la forme : « l'Enfer » est ainsi l'histoire d'un homme, Marcel Prieur (Serge Reggiani), patron d'un modeste hôtel de province, saisi par le démon de la jalousie. Chaque plan, chaque son (un travail considérable qui exploite toutes les pistes sonores de la folie) témoigne de cette folie dévastatrice et aveugle avec des images d'une force hypnotique rarement (jamais ?) atteinte...

    Son travail, à la confluence des arts, frôle l'expérimental et l'abstraction (lèvres bleutées : on songe à Warhol, distorsion des images qui rappelle les surréalistes...), certains photogrammes pourraient être exposés dans une galerie d'art moderne sans en rougir. Les tentatives sur les couleurs, les impressions : tout semble inédit, tout est fascinant. Si ce film est, pour les yeux, une réjouissance parfois éprouvante  ( le spectateur se retrouvant à éprouver cette impression de folie, de déconstruction du réel, étant destiné à vivre une expérience autant qu'à assister à un film) autant qu'envoûtante, c'est aussi un crève-cœur de voir qu'une telle œuvre n'a jamais véritablement vu le jour par une suite de déconvenues que je vous laisse découvrir, ce tournage pour lequel la Miramax éblouie par les premières images lui avait donné budget illimité (150 techniciens, trois chefs opérateurs...), s'étant lui aussi véritablement transformé en « Enfer ». Costa-Gavras, Catherine Allégret, Bernard Stora et quelques autres apportent leur témoignage sur le déroulement des évènements.

    Bérénice Béjo et Jacques Gamblin interprètent quant à eux quelques scènes qui n'ont jamais été tournées  dans le dépouillement le plus total qui ne pardonne pas la moindre fausse note : on retient notre souffle et si les deux acteurs sont irréprochables on ne peut s'empêcher de songer au supplément d'âme  que leur auraient apporté Romy Schneider et Serge Reggiani. Progressivement on imagine ainsi ce qu'aurait été ce film aussi improbable que magistral. Mais était-ce bien nécessaire de couper ainsi le rythme tant les images de Clouzot suffisent à nous laisser imaginer ce que son film aurait été... ?

    Et puis il y a Romy Schneider... Romy qui hante, capture, captive, éblouit, séduit l'écran alors qu'elle n'avait que 26 ans, Romy dont le jeu, les attitudes et le regard témoignaient d'une fascinante modernité, et pourtant à l'époque, elle n'avait pas encore tourné « La Piscine » et n'était encore que l'ingénue « Sissi » dans l'esprit des spectateurs. Face à elle, Serge Reggiani épouse le visage de la folie maladive avec une rage bouleversante. Le tout dans ce cadre à la fois familier inquiétant du Cantal et du Viaduc de Garabit.

    Ce film, d'une étrange beauté, sans nul doute, aurait à jamais permis à Henri-Georges Clouzot de décoller l'étiquette de « qualité française »à laquelle on l'a injustement associé. Cela aurait été bien dommage que ce qui subsiste de ce film reste dans les limbes de l'enfer et d'en être privés. Le titre du film est ainsi sous-titré: "la légende d'un film inachevé", cela pourrait aussi être "un film légendaire inachevé...  Chabrol s'en est ainsi certes inspiré pour son film  « L'Enfer » en 1994, indéniablement un très grand film qui n'est cependant pas cette expérience visuelle et sonore sensuelle, novatrice et éblouissante qu'aurait été le film de Clouzot, un chef d'œuvre qui revient de loin et que je vous engage à découvrir... et comme dirait Henri-Georges Clouzot :

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     Sortie en salles : le 11 novembre 2009

    A suivre sur inthemoodforcinema.com: un concours vous permettant de remporter 5 places pour 2 pour voir "L'Enfer" d'Henri-Georges Clouzot!

  • Avant-première exceptionnelle au Théâtre du Châtelet pour «Le Concert» de Radu Mihaileanu

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    Le Théâtre du Châtelet était jusqu'alors pour moi associé au souvenir d'une épique soirée des César, en 2006, (cliquez ici pour en lire le récit), il sera désormais indissociable de ce moment où Tchaïkovski m'a fait frissonner d'émotion et a, en un instant où fiction et réalité se sont rejointes et où la beauté de la seconde a éclipsé celle de la première, imposé un silence respectueux et admiratif et suspendu le souffle de cette salle magistrale.

    Europacorp, pour l'avant-première du film « Le Concert » de Radu Mihaileanu  dont l'intrigue se déroule en partie au Théâtre du Châtelet, avait donc, en toute simplicité :-), réservé le Théâtre du Châtelet et convié une bonne partie du cinéma français (et évidemment toute l'équipe du film: Radu Mihaileanu, Alexei Guskov,  Mélanie Laurent, François Berléand, Ramzy, Miou Miou...) dont l'arrivée était retransmise sur écran géant, à l'intérieur de la salle mais aussi dans une cinquantaine de cinémas, dans toute la France, dont les spectateurs ont également pu suivre l'avant-première et ce qui a suivi, retransmis en intégralité. Evidemment l'émotion était décuplée par le fait de se retrouver dans l'endroit même où le film a été tourné...

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    C'est la toujours très professionnelle Marie Drucker (une des rares à faire sortir des sentiers battus les traditionnelles interviews de fin de JT et à écouter les réponses davantage que ses questions) qui a d'abord présenté le déroulement de la soirée avant de laisser place à la projection.

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     C'est en Russie que débute ce concert-là, avec Andreï Filipov (Aleksei Guskov), désormais homme de ménage au Bolchoï, 30 ans après avoir été le plus grand chef d'orchestre de l'Union Soviétique et avoir dirigé ce même orchestre du Bolchoï. Mais voilà, il y a 30 ans c'était Brejnev qui était au pouvoir et Filipov avait vu son concert et sa carrière interrompus pour avoir refusé de se séparer de ses musiciens juifs. Resté tard pour faire le ménage, il tombe par hasard sur un fax adressé au directeur du Bolchoï : une invitation du Théâtre du Châtelet conviant l'orchestre du Bolchoï à venir jouer à Paris. Andreï a alors la folle idée de réunir ses anciens amis musiciens, qui (sur)vivent aujourd'hui de petits boulots et de les emmener à Paris en les faisant passer pour le Bolchoï...

    Un sujet en or ! Des thèmes (récurrents chez le cinéaste) propices à susciter l'empathie du spectateur : une révoltante injustice et une imposture pour prendre une revanche sur celle-ci. De nouveau le cinéaste explore ainsi le thème des persécutions dont les Juifs ont été victimes, cette fois donc dans la Russie de Brejnev qui rayait les différences et broyait les individualités, pervertissant les idées initialement nobles du communisme qu'elle prétendait appliquer.

    D'abord un peu déroutée par le style, à des années lumière du subtil et bouleversant « Va, vis et deviens », il me faut un peu de temps pour m'habituer à cette exubérance, à ces personnages hauts en couleur, à cette Russie grisée et grise, à ce genre, nouveau pour le réalisateur, celui de la comédie. Le personnage de Filipov plus nuancé et grave parvient pourtant à lui seul à captiver l'attention.

     La stigmatisation d'une partie de la Russie qui s'est enrichie sur les ruines du communisme (parfois avec les mêmes que ceux qui en étaient les garants) et dépense avec ostentation et  mauvais goût, croyant que l'argent peut tout corrompre et acheter, la nostalgie du communisme et d'un temps pourtant dramatique sont des pistes passionnantes que Radu Mihaileanu effleure avec humour, parfois extravagance et néanmoins justesse.

    Certains de ses personnages sont attachants et traités avec beaucoup de tendresse ... alors que d'autres le sont caricaturalement, avec un ton frôlant la condescendance vraiment dommageable, avec un résultat à l'opposé de celui envisagé réduisant certains personnages à des clichés douteux : une fois à Paris les Juifs ne pensent qu'à vendre des téléphones portables et à s'enrichir, et les Russes, grégaires, ne pensent qu'à boire...

    C'est d'autant plus dommage que lorsque Radu Mihaileanu aborde le registre dramatique, on retrouve toute la sensibilité dont il sait faire preuve notamment dans les scènes entre Mélanie Laurent et Aleksei Guskov. Cette dernière illumine l'écran et son visage lumineux contraste joliment avec la gravité de celui d'Aleksei Guskov, leur face à face oriente la fin du film vers le registre dramatique dont on se dit qu'il est dommage qu'il n'ait pas été employé dès le début. On se dit aussi que cette caricature, certes dommageable, est sans doute plus de la pudeur  maladroite que du mépris volontaire, la fameuse « politesse du désespoir ».

    La fin du film portée par l' émouvante exaltation de Mélanie Laurent, la gravité attendrissante d'Aleksei Guskov, la caméra virevoltante de Radu Mihaileanu (mais peut-être parfois trop, ne nous laissant pas  le temps de nous attarder sur un regard, un geste, une note bien suffisants pour susciter l'émotion), et la musique de Tchaïkovski nous laissent entrevoir le chef d'œuvre qu'aurait pu être ce film inégal parsemé de trop courts instants de grâces et de quelques bonnes idées humoristiques (l'irrésistible traduction du Russe en Français, le personnage de Berléand au débit impressionnant...), porté pourtant par une idée en or et un cinéaste dont nous ne doutons pas de la sensibilité et des bonnes intentions.

    Dommage que des notes dissonantes faussent cette partition si prometteuse, ce bel hymne au pouvoir rédempteur et fédérateur de la musique... et que l'intensité captivante soit uniquement celle du dénouement(certes réussi) -le concert du faux Bolchoï au Théâtre du Châtelet- pour délaisser le reste qui a certainement aussi pâti du mélange, parfois incongru, des genres. (Sortie en salles: le 4 novembre)

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    Générique. La salle applaudit. Le rideau se lève sur les 55 musiciens de l'orchestre Lamoureux. La salle est envahie par une vague de silence et d'émotion. Les notes mélodieuses,  tantôt joyeuses et bouleversantes, mélancoliques et exaltantes, romantiques et tourmentées du concert pour violon et orchestre opus 35 de Tchaïkovski s'élèvent (et nous élèvent) dans le Théâtre du Châtelet comme dans la fiction quelques secondes plus tôt. Le lieu, les autres n'existent plus. Le temps non plus. Peut-être sommes-nous à la fin du  19ème? Peut-être Tchaïkovski va-t-il apparaître sur scène comme par miracle et magie ?  Paraît-il que ce concert n'a duré que 10 minutes.  Pour moi une brève éternité. Un sublime moment d'éternité éphémère...

     Ensuite il a bien fallu revenir. Au présent. A la foule. Au monde réel. A la lumière éblouissante. Aux voix dissonantes de la réalité. Toute l'équipe du film est montée sur scène interviewée par Marie Drucker, je vous laisse découvrir ces instants en photos et vidéos : vous entendrez les acteurs principaux du film comme Mélanie Laurent et François Berléand mais aussi le réalisateur Radu Mihaileanu... (dont vous pourrez aussi lire le résumé sur Filmgeek, La Cité des Arts et Buzzmygeek).

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  • De retour de "l'Enfer"... en partance pour "Le Concert"

    En partance pour l'exceptionnelle avant-première du "Concert" au théâtre du Châtelet, une note rapide pour vous dire que, venant de voir "L'Enfer" de Clouzot, je vous ferai gagner des places dès demain (vous pourrez bien sûr aussi trouver ma critique, le principe étant désormais de ne vous proposer des places que pour des films que j'ai  vus et appréciés).

     Vous trouverez aussi ces jours prochains ma critique en avant-première de "Away we go", le dernier Sam Mendès qui avait signé le chef d'oeuvre de l'année "Les Noces Rebelles" (cliquez ici pour lire ma critique des "Noces Rebelles") et bien sûr mon récit de cette soirée  au Châtelet ainsi que la critique du film de Radu Mihaileanu. A suivre donc!

    Et en attendant je vous propose l'envoûtante et hypnotique bande annonce de "L'Enfer" ci-dessous (enfin plutôt du film de Serge Bromberg et Ruxandra Medrea écrit ét réalisé à partir des rushes de "L'Enfer" d'Henri-Georges Clouzot.)

    Lien permanent Imprimer Catégories : IN THE MOOD FOR NEWS (actualité cinématographique) Pin it! 3 commentaires
  • Soirée Courrier international (1ère partie) : exposition "Fellini La Grande Parade", au musée du Jeu de Paume

     

    courrier1.jpgPour le lancement du second numéro de son Cahier de tendances, le Courrier International a eu l'excellente idée de célébrer l'évènement au musée du Jeu de Paume avec au programme l'exposition Fellini, un concert du groupe Girbig (voir article suivant ci-dessus), et avec la présence du lauréat du prix Courrier international du meilleur livre étranger 2009 ( Zoyâ Pirzâd pour « Le Goût âpre des kakis »); et l'idée encore plus excellente de m'y inviter...

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    courrier4.jpgDans le cadre de « Tutto Fellini ! » , le musée du Jeu de Paume (par une exposition conçue par Sam Stourdzé ouverte au public depuis ce 20 octobre jusqu'au 17 janvier 2010), en association avec la Cinémathèque Française (rétrospective intégrale jusqu'au 20 septembre 2009 de Fellini cinéaste mais aussi scénariste, notamment pour des films de Rossellini, mais aussi conférences et notamment une conférence intitulée « La Strada, le temps de l'effroi », le jeudi 5 novembre) et l'Institut culturel italien de Paris ont décidé de rendre hommage au Maestro Fellini.

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    Ci-dessus, Anita Ekberg et Marcello Mastroianni dans "La Dolce vita"

     A l'instar de Tati à qui la Cinémathèque a récemment consacré une magnifique exposition (lire mon article ici), s'il est bien un cinéaste dont l'univers était tellement significatif, reconnaissable et en même temps mystérieux qu'il impliquait une exposition, c'est Fellini.  Un univers tel que le nom de son créateur est devenu un adjectif : fellinien. Synonyme d'étrangeté, d'exubérance, d'impertinence, de formes généreuses, d'onirisme, de poésie, de personnages improbables, d'êtres effroyables, de beauté visuelle flamboyante, de fantasmagorie cauchemardesque, ou de rêves sordides, cruels, mélancoliques, tendres.

    L'exposition nous plonge dans les origines de son univers retraçant sa carrière depuis ses débuts de caricaturiste de presse (premiers dessins publiés dans des hebdomadaires satiriques, gags comiques et sketchs pour émissions radiophoniques, puis collaboration avec Rossellini...) et nous fait parcourir les méandres de son processus créatif et de son débordant imaginaire. Ses thèmes de prédilection y sont ainsi explorés et éclairés : les rêves, l'illusion, le cirque, les médias, et bien sûr les femmes dont le sublime était parfois à la frontière du grotesque et inversement...

    "Son psychanalyste le  lui avait ainsi dit: Vous dessinez très bien, vous rêvez beaucoup : dessinez donc vos rêves ! ».  Cette plongée dans son inconscient matérialisée par ses rêves qu'il dessinait  est une des clefs de son univers. On décortique ainsi sa déconstruction du réel qui devint cette « Grande Parade ». Le monde devient un cirque onirique.   L'exploration de son contexte de création éclaire (un peu) son univers obscur et flamboyant dans lequel la magnificence ou l'extravagance de l'image primaient, avant le jeu des acteurs (qu'il faisait plus souvent compter que jouer pour postsynchroniser  les voix, parfois avec d'autres) avant le scénario (qu'il qualifiait d'"odieusement indispensable").

    Comme toute grande œuvre, cette exposition consacrée  à celle de Fellini nous montre l'intemporalité de son travail et à quel point il pouvait être clairvoyant et visionnaire  dans sa critique de l'hypertrophie médiatique, la publicité, la télé-poubelle, la société du spectacle... même si lui-même les a utilisés notamment en réalisant des publicités que l'exposition diffuse d'ailleurs.

    Des extraits de films et des images inoubliables devenues scènes mythiques jalonnent l'exposition : le visage de clown triste et malicieux de Giuletta Masina, inoubliable Gesolmina, la célèbre scène de la fontaine de Trevi avec Mastroainni et Anita Ekberg dans « La dolce vita »... Et puis évidemment ses acteurs : Anita Ekberg, son double Mastroianni, Giuletta Masina, Claudia Cardinale... et cette musique de Nino Rota qui accompagne l'exposition et nous immerge dans son univers joyeusement cauchemardesque, une folie délirante qui n'imprègne peut-être pas suffisamment l'exposition même si à travers cette judicieuse et complète sélection de photographies, d'extraits de films, de dessins, d'affiches, de magazines, de films amateurs, d'actualités d'époque et interviews parfois inédits (comme des photographies couleur de la « Dolce vita » ou de « 8 ½ ») c'est une véritable plongée dans l'univers iconoclaste et si reconnaissable de Fellini. Plus de 400 pièces qui en font la première grande exposition dédiée au Maestro.

    Une exposition qui, à défaut de la satisfaire entièrement suscite davantage encore notre curiosité et notre envie de voir « Tutto Fellini » ! Et puis surtout cette exposition  nous fait réaliser à quel point il était unique, fantasque, brillamment inimitable et singulier et dans une époque parfois un peu grise, et en manque de rêves, de poésie, d'imaginaire, cette exposition est un bonheur salutaire... que je vous recommande donc !

    Fellini, la Grande Parade -du 20 octobre 2009  au 17 janvier 2010

    À Concorde Mardi de 12h à 21h
    Du mercredi au vendredi de 12h à19h
    Samedi et Dimanche de 10h à 19h
    Fermeture le lundi
    Tél. 01 47 03 12 50

    www.jeudepaume.org

     

  • "La Strada" de Fellini (1954)

    A l'occasion de l'exposition actuellement consacrée à Fellini au musée du Jeu de Paume, en association avec la Cinémathèque française et l'Institut culturel italien de Paris, et avant de vous parler de cette exposition cet après-midi, je vous renvoie vers mon analyse de "La Strada"  publiée sur ce blog suite à une projection-débat dans le cadre du ciné-club du cinéma l'Arlequin, en 2006.

    Cliquez ici pour lire mon analyse de la Strada de Fellini

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    Lien permanent Imprimer Catégories : CRITIQUES DE CLASSIQUES DU SEPTIEME ART Pin it! 0 commentaire
  • "Sin nombre" de Cary Joji Fukunaga: le prix du jury du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2009 en salles aujourd'hui

     

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    Cary Joji Fukunaga, réalisateur de "Sin nombre"' entouré du jury palmarès du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2009 présidé par Jean-Pierre Jeunet
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    Si, aujourd'hui, je vous recommande d'abord et avant tout, la palme d'or du Festival de Cannes 2009 ("Le ruban blanc" de Michael Haneke, cliquez ici pour lire ma critique), je vous recommande également un autre lauréat d'un Festival de cinéma en 2009: "Sin nombre" de Cary Joji Fukunaga qui a reçu le prix du jury du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2009.(Cliquez ici pour en savoir plus)

  • "Le ruban blanc" de Michael Haneke: à ne pas manquer mercredi!

    Sans doute trop impatiente de vous le recommander, je me suis trompée sur sa date de sortie et vous ai parlé de ce film une semaine trop tôt , c'est pourquoi je vous en parle de nouveau aujourd'hui. Il sort donc en salles mercredi prochain, ne le manquez pas!

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    Photo: inthemoodforcannes.com (clôture du Festival de Cannes 2009)
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    pariscinema.jpgDans le cadre de Paris Cinéma, était projetée la palme d’or du Festival de Cannes 2009 : « Le ruban blanc » de Michael Haneke qui sort en salles ce mercredi. N’ayant pas pu le voir sur la Croisette, j’étais impatiente de voir ce film que le jury avait préféré au magistral « Un Prophète » de Jacques Audiard (cliquez ici pour lire mes commentaires) et surtout à « Inglourious  Basterds » de Quentin Tarantino (cliquez ici pour lire ma critique), mon coup de cœur de ce Festival de Cannes 2009.

     

    En raison de l’inimitié ou de la potentielle rancœur subsistant entre Isabelle Huppert et Quentin Tarantino suite à leurs dissensions lors du casting d’ « Inglourious Basterds » et du lien particulier qui unit cette dernière à Haneke  ( « La Pianiste » du même Haneke lui a valu un prix d’interprétation cannois), je supposais  que « Le ruban blanc » devait être un chef d’œuvre tel que ce prix mettait la présidente du jury 2009 hors du moindre soupçon d’avoir favorisé le réalisateur autrichien, pour des raisons autres que cinématographiques.

     

    Alors, « un ruban blanc » est-il ce chef d’œuvre irréfutable faisant de cette palme d’or une évidence ?

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    Haneke est aussi outrancier dans l’austérité que Tarantino l’est dans la flamboyance. Leurs cinémas sont à leurs images, extrêmes. Alors difficile de comparer deux films aussi diamétralement opposés même si pour moi l’audace, l’inventivité, la cinéphilie de Tarantino le plaçaient au-dessus du reste de cette sélection 2009. Audace, inventivité, cinéphilie : des termes qui peuvent néanmoins tout autant s’appliquer à Haneke même si pour moi « Caché » (pour lequel il avait reçu un prix de la mise en scène en 2005) méritait davantage cette palme d’or (et celui-ci un Grand Prix) qui, à défaut d’être une évidence, se justifie et se comprend aisément.
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    Synopsis : Un village de l’Allemagne du Nord à la veille de la Première Guerre Mondiale. Un instituteur raconte l’histoire d’étranges incidents qui surviennent dans la petite communauté protestante formée par les élèves et leurs familles. Peu à peu, d’autres accidents surviennent et prennent l’allure d’un rituel primitif.

     

    Quel qu’en soit l’enjeu  et aussi âpre soit-elle, Haneke a le don de créer une atmosphère quasi hypnotique, et de vous y plonger. L’admiration pour la perfection formelle  l’emporte toujours sur le rejet de l’âpreté, sur cette froideur qui devrait pourtant nous tenir à distance, mais qui aiguise notre intérêt, notre curiosité. La somptuosité glaciale  et glaçante de la réalisation, la perfection du cadre et des longs plans fixes où rien n’est laissé au hasard sont aussi paralysants que l’inhumanité qui émane des personnages qui y évoluent.

     

    Derrière ce noir et blanc, ces images d’une pureté étrangement parfaite,  à l’image de ces chérubins blonds symboles d’innocence et de pureté (que symbolise aussi le ruban blanc qu’on leur force à porter) se dissimulent la brutalité et la cruauté.

     

    L’image se fige à l’exemple de cet ordre social archaïquement hiérarchisé, et de cette éducation rigoriste et puritaine dont les moyens sont plus cruels que les maux qu’elle est destinée prévenir et qui va provoquer des maux plus brutaux encore que ceux qu’elle voulait éviter. La violence, au lieu d’être réprimé, s’immisce insidieusement pour finalement imposer son impitoyable loi. Cette violence, thème cher à Haneke, est toujours hors champ, « cachée », et encore plus effrayante et retentissante.

     

    Ce ruban blanc c’est le symbole d’une innocence ostensible qui dissimule la violence la plus insidieuse et perverse. Ce ruban blanc c’est le signe ostentatoire d’un passé et de racines peu glorieuses qui voulaient se donner le visage de l’innocence. Ce ruban blanc, c’est le voile symbolique de l’innocence qu’on veut imposer pour nier la barbarie, et ces racines du mal qu’Haneke nous  fait appréhender avec effroi par l’élégance moribonde du noir et blanc.

     

    Ces châtiments que la société inflige à ses enfants en évoquent d’autres que la société infligera à plus grande échelle, qu’elle institutionnalisera même pour donner lieu à l’horreur suprême, la barbarie du XXème siècle. Cette éducation rigide va enfanter les bourreaux du XXème siècle dans le calme, la blancheur immaculée de la neige d’un petit village a priori comme les autres.

     

    La forme démontre alors toute son intelligence, elle nous séduit d’abord pour nous montrer toute l’horreur qu’elle porte en elle et dissimule à l’image de ceux qui portent ce ruban blanc.

     

    Que dire de l’interprétation ? Elle est aussi irréprochable. Les enfants jouent avec une innocence qui semble tellement naturelle que l’horreur qu’ils recèlent en devient plus terrifiante encore.

     

    Avec une froideur et un ascétisme inflexibles, avec une précision quasi clinique, avec une cruauté tranchante et des dialogues cinglants, avec une maîtrise formelle fascinante,  Haneke poursuit son examen de la violence en décortiquant ici les racines du nazisme, par une démonstration implacable et saisissante. Une œuvre inclassable malgré ses accents bergmaniens.

     

    Un film à voir absolument. L'oeuvre austère, cruelle, dérangeante, convaincante, impressionnante d'un grand metteur en scène.

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