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  • Mes pronostics avant le palmarès du 64ème Festival de Cannes

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    C’est demain soir, déjà, à 19H15, dans le Grand Théâtre Lumière,  que sera délivré le palmarès de ce 64ème  Festival de Cannes après 11 jours dont je retiens une multitude d’émotions, réelles et cinématographiques, troublantes, indéfinissables, étourdissantes, grisantes qu’il me faudra sans doute plusieurs jours pour rationaliser et donc autant de temps avant que vous en trouviez le récit complet ici, afin également que je trie mes centaines de photos, dizaines de vidéos et milliers de souvenirs et afin de vous donner la juste (dé)mesure de ce que j’ai vécu pendant ces 11 jours particulièrement intenses. Je ferai également un bilan thématique de ce Festival 2011. Laisser le temps au temps sera d’ailleurs plus que jamais le parti pris de ce blog, qui se veut l’anti twitter, l’anti phrase lapidaire, avec pour objectif de privilégier de plus en plus la longueur et la qualité des articles à la fréquence.

    L’actualité, elle , n’attend pas et, quoiqu’il arrive , demain, le palmarès de cette édition 2011 sera délivré, une édition dont je peux vous dire qu’elle a entièrement tenu ses promesses, celle d’une sélection particulièrement diversifiée et de très haut niveau, moins sombre que d’habitude (même si certains films, et non des moindres, l’étaient particulièrement) et qui, plus que jamais, a célébré le cinéma, tous les cinémas, sans oublier d’être en phase avec l’actualité (même si celle-ci, cette année, était encore plus cinématographique et invraisemblable que les films projetés pendant le festival au point qu’elle les a même un peu éclipsés).

    Mais l’actualité était aussi à Cannes, avec les déclarations pathétiques (un euphémisme, évidemment) de Lars Van Trier qui lui a valu son éviction du festival, mais heureusement pas celle de son film dont je vous ai déjà parlé brièvement ici (et plus longuement bientôt) qui pour moi fait partie de ceux qui mériteraient la palme d’or. Même si le festival a eu l’excellente idée de dissocier l’œuvre du cinéaste de ses propos, le jury pourra-t-il primer la première sans donner l’impression de minimiser les propos de Lars von Trier ? Cela me parait difficile étant donné les résonances politiques du Festival de Cannes.  N’ayant vu que la moitié des films de la compétition mes pronostics seront bien évidemment tronqués mais les films m’ayant laissé les plus fortes impressions et qui, selon moi, mériteraient la palme d’or sont :

    -« Tree of life », le vertige sensoriel de Terrence Malick qui fait parfois surgir la grâce

    - « Melancholia » de Lars von Trier (habitué du palmarès, palme d’or en 2000 avec « Dancer in the dark »), allégorie éblouissante, audacieuse, pessimiste et cruelle sur la mélancolie d’une beauté, d’une cruauté, d’une lucidité remarquables.

    - « The Artist » de Michel Hazanavicius (un cinéaste au parcours et au style très différents des habituels « palmés »), film burlesque, inventif, humain, touchant, déclaration d’amour au cinéma, aux artistes, à leur orgueil et leur fragilité.

    - « This must be the place » de Paolo Sorrentino (qui avait reçu le prix du jury en 2008 pour « Il Divo »), déjà lauréat du prix œcuménique, petit bijou de sensibilité et d’humour noir à l’interprétation (bouleversant, singulier et méconnaissable Sean Penn), la BO et la mise en scène remarquables. Un des rares films à m’avoir profondément émue.

     « The Artist » serait sans doute le plus improbable pour une palme d’or, les jurys de ces dernières années ayant privilégié des films en résonance avec l’actualité, très différents de ce bel et atypique hommage au cinéma et aux artistes qui a réjoui les festivaliers.

    -Ajout du dimanche 22 mai après avoir vu "Habemus Papam" de Moretti en séance de rattrapage, un film irrésistible qui présente le Vatican comme une sorte de théâtre absurde avec le pape le plus humain qui ait (ou plutôt qui n'ait pas ) existé. Un sérieux prétendant au grand prix ou au prix du scénario selon moi (davantage qu'au prix d'interprétation, Piccolo ayant une rude concurrence dans cette catégorie et la force du film étant avant tout son scénario, et sa mise en scène, davantage que son interprétation).

    La critique internationale, avec le prix Fipresci, a choisi de récompenser la fable sociale de Kaurismäki (le jury œcuménique lui a également attribué une mention spéciale) qui, si elle dégage un charme indéniable, ne m’a pas émue, charmée, impressionnée comme les films précédemment cités. Ce film entre davantage dans la lignée des palmes à caractère « social »remises ces dernières années.

    « Le Gamin au vélo » des frères Dardenne a été unanimement bien accueilli par les festivaliers mais, à mon avis, ne devrait pas valoir une troisième palme d’or aux Dardenne, étant selon moi en-deçà de leurs précédents films, et certes plus « grand public ».

    Tilda Swinton revient souvent citée parmi les prétendantes au nom de meilleure actrice d’ailleurs moins nombreuses que les prétendants au titre de meilleur acteur (Sean Penn qui, une nouvelle fois,  m’a époustouflée,-pourra-t-il recevoir – à nouveau le prix d’interprétation ? Pourquoi pas Michel Piccoli dans le film de Morretti que j’essaierai de voir tout à l’heure ? Pourquoi pas Vincent Lindon ET Alain Cavalier pour leur travail d’improvisation ? ).

    Les prix ex-aquo ou collectifs sont également à la mode, pourquoi pas deux prix d’interprétation masculine pour deux films très différents : Sean Penn et l’acteur de « Michael » (Michael Fuith) ? Michel Piccoli et Jean Dujardin ? Alain Cavalier et Vincent Lindon donc (manière de récompenser aussi le travail du cinéaste et le parti pris de son film ?  Ou un acteur moins attendu au jeu délibérément théâtral : André Wilms (dans « Le Havre ») ?

    La sélection française a d’ailleurs déjà gagné à l’applaudimètre qu’il s’agisse de « Polisse », « Pater » (que j’ai malheureusement manqué), ou « The Artist » (dont je vous ai raconté l’accueil exceptionnel lors de la séance officielle).

    La maîtrise d’Almodovar dans ce film qui a déstabilisé ses inconditionnels, « La Piel que habito » mais qui n’en est pas moins aussi « horrible » que fascinant ne devrait pas être celui qui lui permettra enfin de décrocher cette palme d’or qu’il convoite toujours malgré ses nombreuses récompenses cannoises mais pourrait lui valoir un grand prix, un prix d’interprétation féminine pour Elena Anaya, ou masculine pour Antonio Banderas. Il mériterait en tout cas, encore une fois, une place au palmarès.

    Je verrais bien « Michael » recevoir le prix du jury ou de la caméra d’or, étonnant premier film, qui dissèque presque cliniquement la vie d’un pédophile, en parvenant avec beaucoup de talent, à ne jamais le rendre sympathique. Un film comme « Footnote », injustement méprisé par les festivaliers, pourrait également recevoir ce prix.

    « Polisse » est souvent cité comme susceptible de recevoir le Grand prix. Il pourrait également recevoir le prix scénario pour le travail réalisé en amont. Ou pourquoi pas « The Artist » pour  Le Grand prix  avec, comme palme d’or, un film plus âpre ou pessimiste, mettant ainsi en valeur la diversité du festival ? Pour ma part, comme pour « Polisse », je lui décernerais plutôt le prix du scénario.

    Je précise encore une fois que je n’ai vu que la moitié des films en compétition… d’où le caractère approximatif de ces pronostics et commentaires.

    Réponse demain soir pour savoir quel film aura choisi le jury de Robert De Niro comme successeur d’ « Oncle Boonmee, celui qui se souvient de ses vies antérieures »d’Apichatpong Weerasethakul.

    Voici les prix qui seront décernés demain soir (exception faîte d’éventuels prix spéciaux). Vous retrouverez bien entendu ici le palmarès détaillé dès demain soir et, mercredi ou jeudi, mon bilan détaillé de ce festival 2011, avec de nombreuses photos à l’appui.

    Palme d'Or

    Grand Prix

    Prix de la mise en scène

    Prix du Jury

    Prix d'interprétation masculine

    Prix d'interprétation féminine

    Prix du scénario

    COURTS METRAGES EN COMPETITION

    Palme d'Or

    Prix du Jury

    CAMERA D'OR

     
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  • "Le Havre" de Aki Kaurismäki , prix Fipresci (de la presse) du 64ème Festival de Cannes

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    Le jury de la Fédération Internationale de la Presse Cinématographique, FIPRESCI, a, comme chaque année, remis ses prix dans les différentes sélections du 64ème festival de Cannes.
    En Compétition : "
    Le Havre" de Aki Kaurismaki

    Un Certain Regard : "L'exercice de l'Etat" de pierre Schoeller

    Autres sections parallèles : "Take Shelter" de Jeff Nichols

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  • Prix oecuménique du Festival de Cannes 2011 pour "This must be the place" de Paolo Sorrentino

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    Le jury œcuménique était cette année composé de :

    Le critique de cinéma suisse et ancien pasteur Daniel Grivel, la Française Françoise Lods, le prêtre argentin Martin Bernal Alonso , le pasteur et docteur en théologie suédois Mikaël, de Christiane Hofmann, responsable française de ciné-clubs, , le critique de cinéma italien Gianluca Arnone .

    Pour ces derniers, Paolo Sorrentino "donne à suivre le voyage intérieur et l'odyssée d'un homme à la recherche de ses racines juives, de la maturité, de la réconciliation et de l'espérance ». C'est la raison pour laquelle ils lui ont attribué ce prix du jury oecuménique.

    Une mention spéciale a été attribuée à Le Havre de Aki Kaurismaki et à «  Et maintenant, on va où ? » de Nadine Labaki.

    Retrouvez bientôt ma critique de "This must be the place" de Paolo Sorrentino (un de mes favoris pour la palme d'or).

     
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  • Palmarès - Quinzaine des Réalisateurs 2011

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    Cette année, parce que, comme tous les ans, il fallait bien faire des choix, je n'ai vu qu'un film de cette sélection, celui d'André Téchiné, un cinéaste dont je suis pourtant habituellement une inconditionnelle mais qui, en l'occurrence, m'a déçue. (Là encore, j'y reviendrai). En attendant, voici le palmarès:

    Label Europa Cinemas
    ATMEN de Karl Markovics

    Art Cinema Award
    LES GEANTS de Bouli Lanners

    Prix SACD
    LES GEANTS de Bouli Lanners

    Séance "Coup de coeur"
    PLAY de Ruben Östlund

     
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  • Palmarès Un Certain Regard 2011

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    Ce soir, dans le cadre du théâtre Debussy, était délivré le palmarès Un Certain Regard de ce Festival de Cannes 2011, une soirée toujours moins informelle que la remise de prix de la compétition officielle, le tout présenté par un Thierry Frémaux toujours aussi enthousiaste même après 11 jours de festival et qui partage avec Gilles Jacob , outre la passion du cinéma, un véritable sens de l'humour.  C'est Kusturica, réalisateur présentant la particularité d'avoir deux fois reçu la palme d'or à Cannes qui, le premier, a pris la parole évoquant avec humour ses 25 ans de Festival de Cannes sans jamais y voir un seul film: "Depuis 25 ans que je viens ici, je n'ai jamais vu un seul film", "Un Certain Regard est vraiment une bonne section", a-t-il ajouté. Le jury a remis cette année dux prix Ex-aquo pour le prix Un Certain Regard, à Andreas Dresen et à Kim Ki Duk qui a chanté une chanson du film pour l'occasion (sous le regard interloqué de Kusturica). Mohammad Rasoulof a reçu le prix de la mise en scène.

    Le film d'Andrey Zvyagintsev, Elena, récompensé d'un prix spécial était projeté en clôture

    , en voici le synopsis:

    Synopsis : Elena et Vladimir forment un couple d’un certain âge. Ils sont issus de milieux sociaux différents. Vladimir est un homme riche et froid, Elena une femme modeste et docile. Ils se sont rencontrés tard dans la vie et chacun a un enfant d’un précédent mariage.
    Le fils d’Elena, au chômage, ne parvient pas à subvenir aux besoins de sa propre famille et demande sans cesse de l’argent à sa mère. La fille de Vladimir est une jeune femme négligente, un peu bohème, qui maintient son père à distance.
    Suite à un malaise cardiaque, Vladimir est hospitalisé. A la clinique, il réalise qu’il pourrait mourir prochainement. Un moment bref mais tendre, partagé avec sa fille le conduit à une décision importante : c’est elle qui héritera de toute sa fortune. De retour à la maison, Vladimir l’annonce à Elena. Celle-ci voit soudain s’effondrer tout espoir d’aider financièrement son fils.
    La femme au foyer timide et soumise élabore alors un plan pour offrir à son fils et ses petits-enfants une vraie chance dans la vie.
    Un Certain Regard 2011 a proposé 21 films réalisés par 22 réalisateurs venus de 19 pays différents. Deux d’entre eux sont des premiers films.

    Je vous reparlerai de ce film d'une rigueur mélancolique aussi bien dans le fond que dans la forme qui obéissent à la même logique froide, implacable, mais reflètant aussi un regard d'une profonde humanité.

    Présidé par Emir KUSTURICA (Réalisateur, acteur et musicien - Serbie), le Jury était composé de : Elodie BOUCHEZ (Actrice - France), Peter BRADSHAW (Critique-The Guardian - Royaume Uni), Geoffrey GILMORE (Directeur artistique-Tribeca Enterprises - Etats-Unis), Daniela MICHEL (Directrice du Festival de Morelia - Mexique).

    PRIX UN CERTAIN REGARD Ex-æquo

    ARIRANG de KIM Ki-Duk

    HALT AUF FREIER STRECKE (Arrêt en pleine voie) d’Andreas DRESEN

    PRIX SPECIAL DU JURY

    ELENA d’Andrey ZVYAGINTSEV

    PRIX DE LA MISE EN SCENE

    BÉ OMID É DIDAR (Au revoir) de Mohammad RASOULOF

    Le cinéma d’art et d’essai parisien le Reflet Médicis accueillera les films de la Sélection officielle 2011 sélectionnés à Un Certain Regard du mercredi 25 mai au mardi 31 mai 2011.

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  • Compétition - Critique de "Drive" de Nicolas Winding Refn

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    Drive est l'adaptation du livre éponyme écrit par James Sallis ; c’est  le scénariste Hossein Amini qui a  transformé le roman en scénario.

     C’est l’histoire d’un jeune homme solitaire, "The Driver" (Ryan Gosling),  qui conduit le jour à Hollywood pour le cinéma en tant que cascadeur et la nuit pour des truands. Il a pour « principe » de ne participer aux crimes de ses employeurs qu’en conduisant et de n’être jamais armé. Sa  route croise celle d’Irene (Carey Mulligan) et de son jeune fils, ses voisins, et il succombe rapidement au charme de l’un et l’autre, et réciproquement. Lorsque le mari d’Irene sort de prison et se retrouve enrôlé de force dans un braquage pour s’acquitter d’une dette, il décide pourtant de lui venir en aide. L’expédition tourne mal… Doublé par ses commanditaires, et obsédé par les risques qui pèsent sur Irene, il n’a dès lors pas d’autre alternative que de les traquer un à un…

    Cela commence sur les chapeaux de roue : une mise en scène époustouflante, flamboyante et crépusculaire, qui nous fait ressentir les sensations trépidantes, périlleuses et vertigineuses de ce chauffeur hors pair et  mutique, au sourire retenu, dans une ville de Los Angeles tentaculaire, éblouissante et menaçante. Mais « The Driver » porte un masque, au propre comme au figuré (symbolisme un peu simpliste pour nous dire de nous méfier des apparences qui ne reflètent pas la réalité et pour symboliser la fragile frontière entre cinéma et réalité) et derrière ce chauffeur mutique d’allure plutôt sympathique va se révéler un vengeur impitoyable, sournois et trompeur comme le scorpion qu'il arbore sur sa veste, prêt à tous les excès pour protéger ceux qu’il « aime ».

     La violence psychologique s’annonce palpitante : pris dans un étau, il n’a d’autre solution que de commettre un méfait pour le mari d’Irène, pour sauver celle-ci … malheureusement ce qui dans la première partie s’annonçait comme un film à suspense se transforme en règlement de compte sanguinolent dans lequel l’intrigue devient inexistante et simple prétexte à une suite de scènes sanglantes, invraisemblables et vaines sans parler du personnage féminin totalement velléitaire.

     Là où un cinéaste comme James Gray -même si la mise en scène de Nicolas Winding Refn lorgne plus du côté de celle de Michael Mann- sublime une ville, en l’occurrence New York, et traite lui aussi de vengeance et d’amour, mais sans jamais mettre le scénario de côté, ou sans qu’un de ces aspects prennent le pas sur les autres, Nicolas Winding Refn se laisse entraîner par une sorte de fascination pour la violence (me rappelant ainsi la phrase de Coppola lors de sa master class deauvillaise « Montrer la guerre c’est déjà faire l’éloge de la guerre »), montrant pourtant le temps d’un meurtre sur la plage qu’il savait très bien filmer la mort, avec une force prenante, sans que cela tourne à la boucherie ridicule.

    Ryan Gosling est certes époustouflant (et il a confirmé dans "Crazy, stupid love," la large palette de son jeu et sa capacité à tourner son image en dérision, au passage comédie romantique qui détourne puis respecte habilement les codes du genre) et derrière sa gueule d’ange dissimule une violence froide, se transformant en un vengeur impitoyable qu’il est pourtant difficile de prendre en sympathie ou même en empathie alors que tout au début s'y prêtait pourtant.

    Dommage car la première partie était jubilatoire, réellement, de par la mise en scène qui nous fait éprouver ses sensations de vitesse et de mélancolie vertigineuses (sombre et belle alliance) mais aussi de par les contradictions du personnage principal et des conflits que cela annonçait. Dommage encore car la première partie était particulièrement prometteuse  avec des scènes plus calmes d’une beauté saisissante  comme ce face-à-face entre Irène et The Driver, dans l’appartement d’Irène, scène dans laquelle le temps est suspendu et dans laquelle les échanges évasifs de regards et les silences d’une douce sensualité en disent tellement. Sans parler évidemment d’une bo remarquable qui contribue fortement au caractère jubilatoire de la première partie.

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    Un film à l'opposé de celui d'Almodovar (qui a brillamment raconté une histoire cruelle, terrible, effroyable où toute la finesse de la mise en scène réside justement dans ce qui n’est pas montré et qui n’en a que plus de force) mais qui pourrait être un sérieux concurrent pour le prix de la mise en scène.

    A voir néanmoins pour les amateurs de séries B auxquelles le film rend hommage, pour ceux pour qui la virtuosité de la mise en scène prédomine sur un scénario bancal, voire vide (dans la deuxième partie), ce qui n’enlève certes rien à la force de l’univers visuel de Nicolas Winding Refn mais ce qui pour moi a gâché tout le plaisir engendré par la première partie. La violence absurde et les excès du personnage principal (qui promettait là aussi d'être d'une complexité passionnante), sans parler des réactions invraisemblablement vélléitaires du personnage féminin, le manichéisme des méchants du film, l’ont emporté ainsi sur une première partie prometteuse comme rarement avec des images et une musique qui, encore maintenant, me restent en tête. Un magnifique clip, à défaut du grand film que la première partie annonçait pourtant. Surtout, un beau gâchis.

     
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  • Un Certain Regard - Critique de "L'Exercice de l'Etat" de Pierre Schoeller

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    Hasard ou coïncidence : ce Festival de Cannes 2011 aura été aussi celui du retour des films politiques, à la veille d’une année riche en échéances électorales primordiales. Trois films et trois regards sur la politique.  « Pater » d’Alain Cavalier (en compétition) : une réflexion déroutante et ludique sur le jeu et les jeux de pouvoirs (entre un président de la République et son Premier ministre, entre deux hommes, entre un père et son fils, entre un réalisateur et un acteur mais aussi entre un réalisateur et le spectateur ici allègrement manipulé) qui,  témoigne d’une belle audace et liberté. « La Conquête » de Xavier Durringer, présenté hors compétition, que je n’ai pas vu mais qui me semble tout de même être le contraire du premier, notamment en ce qu’il n’est pas une représentation mais une imitation. Et enfin « L’Exercice de l’Etat » de Pierre Schoeller, présenté dans la sélection Un Certain Regard.

    Olivier Gourmet y incarne le ministre des Transports Bertrand Saint-Jean. Réveillé en pleine nuit par son directeur de cabinet (Michel Blanc) suite à un accident (un car avec des enfants a basculé dans un ravin), il n’a d’autre choix que de se rendre sur les lieux du carnage. C’est le début du parcours d’un homme qui apparaît d’abord guidé par ses convictions mais dans un Etat qui dévore ceux qui le servent, où une urgence et une actualité chassent l’autre, les idéaux sont mis à rude épreuve surtout quand on le choisit, lui, le défenseur du service public, pour réformer les gares et les privatiser.

    Le film débute par une séquence onirique et inquiétante. Une femme se glisse languissamment dans la gueule d’un crocodile qui la dévore, sous les apparats d’un bureau ministériel. L’homme est un animal politique pétri de désirs et de pouvoir(s) qui dévore ce qu’il désire et ce qui l’entrave. Le ton est donné. Bertrand Saint-Jean est alors brusquement sorti de son rêve par son directeur de cabinet. L’actualité fracassante et tonitruante, l’actualité qui ne le lâchera plus le rattrape dans ses évasions nocturnes et prémonitoires.

    Ce film a priori rugueux, qui ne cherche pas à être à tout prix sympathique (au contraire de celui dont il dresse le portrait, manière habile de nous dire ce que doit être la politique ?) est aussi palpitant qu’un thriller. Après tout, l’enjeu aussi est de sauver sa peau. Au prix de ses idéaux. De ses illusions. De la vie des autres.

     Il fallait un acteur de la trempe d’Olivier Gourmet pour incarner ce rôle. Connu mais assez peu pour que sa personnalité ne parasite pas celle de son personnage.  Homme politique complexe (pléonasme) tour à tour mécanique, humain, imbuvable, cynique, altruiste, égoïste, idéaliste, ambitieux et finalement surtout ambitieux, notre attention ne le quitte pas une seconde partagée entre l’empathie, le rejet, l’incompréhension.

    La tension est constante car la caméra traque ses faiblesses et ses sursauts d’humanité, nous fait suivre son parcours qui ne lui laisse, pas plus qu’à nous, aucun répit, guidé par une actualité et un Etat voraces.

    Le film ne s’appelle pas (et à dessein) l’Exercice du pouvoir, mais de l’Etat car il s’agit d’ailleurs plutôt d’un renoncement au premier dévolu à d’autres entités (privé, économie, médias). Le manège qui l’entoure est alors essentiel et en partie responsable : des médias carnassiers, une chargée des communication qui lui dicte aussi bien sa cravate que ses réponses pour créer l’image de cet « objet non identifié », « flou » qui a une histoire à écrire pour un peuple, semble-t-il, avide d’histoires (par exemple celle d’un homme qui survit à un accident –dont il est d’ailleurs en partie responsable, ironie de l’histoire et de l’Histoire-) plus que de compétences. Le tout appuyé par une musique aux sonorités ironiques.

    La réalisation, nerveuse, constamment sous tension, épouse son rythme de vie trépidant, tendu, grisant, vertigineux, périlleux, étouffant aussi. Le piège se referme comme une mâchoire de crocodile. L’obstacle auquel se retrouve confronté l’Exercice de l’Etat n’est pas tant une hiérarchie (quelle qu’elle soit) que l’ambition personnelle qui, forcément semble-t-on nous dire, dicte ses actes à l’homme politique, au mépris de ses convictions, de l’intérêt général, de la sécurité, de ses citoyens instrumentalisés (idée démagogique des chômeurs employés au service des ministères, fascinant personnage du chauffeur qui incarne ce citoyen silencieux partagé entre scepticisme, fascination, désapprobation) .  Les choix s’imposent au ministre plus qu’il ne les impose : c’est cela l’Exercice de l’Etat, ici.

    Dommage  que la conclusion aboutisse à ce constat aux frontières poujadistes (d’autant qu’aucun homme ou parti politique n’est clairement identifiable, et ce qui en fait une qualité du film au début, contribue finalement à cet amer constat ) dont le film avait pourtant brillamment évité l’écueil (nous montrant au départ Saint-Jean dans toute son ambigüité, guidé par ses idéaux qu’il abandonne ensuite par ambition, tout comme il abandonnera son directeur de cabinet et ami lors d’une scène d’autant plus effroyablement cruelle qu’elle se déroule au calme, dans un cadre doré, avec sourires et politesses de rigueur) et surtout que son renoncement semble être la seule solution possible dans un monde politique décrit avec cynisme (« pas là pour refaire les mondes mais pour reprendre 5 points de sondage »,  qui « brasse du vent, n’a rien dans les mains, à part sa petite ambition »).

    Brillant exercice de style ( avec un symbolisme parfois appuyé comme le début ou cette route que Saint-Jean remonte après son accident, comme tout homme politique qui « remonte la pente » parce que « ce qui ne [le] tue pas [le] rend plus fort »), démonstration implacable (mais contestable) du renoncement inéluctable à ses idéaux, de l’ambition dévorante et dévoreuse de l’homme (animal) politique. Le seul qui n’y renoncera pas (très beau personnage de Michel Blanc qui vaut une des plus belles scènes du film, lorsque celui-ci écoute le discours d’André Malraux sur Jean Moulin, presque avec ferveur, comme le témoignage d’un idéalisme révolu) sera broyé avec une ferme et impitoyable douceur.

    Reste un film passionnant, parfois aussi cruel et âpre, cynique ou réaliste, selon les points de vue. Vous aurez compris le mien, sans doute idéaliste mais assumé. Une vision de l’exercice de l’Etat, contestable, mais indéniablement personnelle, et traitée avec rigueur et originalité, à voir en tout cas !

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