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Par Sandra Mézière. Le 7ème art raconté avec passion depuis 2003. 4000 articles. Festivals de cinéma en direct : Deauville, La Baule, Cannes, Dinard...Critiques de films : avant-premières, à l'affiche, classiques. Actualité de romancière. Podcast.
Une note rapide pour vous annoncer que je ferai une entorse à mes vacances loin d'internet pour vous informer brièvement sur In the mood for Deauville du programme du 36ème Festival du Cinéma Américain de Deauville (dès qu'il sera mis en ligne) que je vous détaillerai à mon retour, le 15 août au plus tard. Un programme que vous pourrez par ailleurs trouver sur le site officiel du festival.
Comme je vais vous abandonner un petit bout de temps, lecteurs adorés, je laisse ici quelques images d'avance à mettre sous votre regard insatiable avec une nouvelle bande-annonce, celle du très beau film de Xavier Beauvois "Des hommes et des dieux" qui a reçu le Grand Prix du dernier Festival de Cannes et dont je vous avais parlé à cette occasion (retrouvez à nouveau ma critique ci-dessous publée lors de la projection cannoise, en plus de la bande-annonce et de ma vidéo des réactions de l'équipe du film).
15 ans après « N'oublie pas que tu vas mourir » (pour lequel il avait obtenu le prix du jury) Xavier Beauvois est donc de retour dans la compétition cannoise. Cette fois il s'est attelé à un sujet particulièrement sensible dont il s'est librement inspiré : le massacre des moins de Tibéhirine en Algérie en 1996. Sept moines trappistes de Tibéhirine avaient ainsi été enlevés et retrouvés assassinés deux mois plus tard. Ce massacre fut d'abord attribué au Groupe Islamiste Armé avant de l'être à une bavure de l'armée algérienne (selon un militaire algérien, les moines auraient été mitraillés par l'armée croyant que leur monastère était un repère de membres du GIA). C'est Lambert Wilson qui incarne le responsable de la communauté. La terreur commence ainsi à s'installer quand une équipe de travailleurs étrangers est massacrée par un groupe islamiste. L'armée propose une protection aux moines, mais ceux-ci refusent, vivant en bonne harmonie avec leurs voisins musulmans pour qui ils sont une présence précieuse. Doivent-ils partir ? Malgré les menaces grandissantes qui les entourent, la décision des moines de rester coûte que coûte, se concrétise jour après jour...
Après « Le petit Lieutenant » et son immersion dans l'univers policier, c'est dans l'univers monastique, avec la même ferveur , que nous plonge Xavier Beauvois par le biais d'une mise en scène sobre , rigoureuse, modeste et lumineuse à l'image de l'impression qui émane de ces sept moines. Au lieu de nous tenir à distance la lenteur accompagne la montée en puissance jusqu'à une scène paroxystique sur la musique du lac des cygnes de Tchaïkovski d'une beauté redoutable. La caméra qui se resserre sur les visages, les expressions de chacun, leurs visages qui passent d'une expression de bonheur et de plénitude à celle de l'effroi à la résignation est celle, poignante, d'un grand metteur en scène. Mais il ne faudrait pas réduire ce film à cette scène qui, du début à la fin, fait preuve de ce même sens de la grâce et de l'épure.
Au-delà de l'aspect formel, c'est le message, universel et pacifiste, qui fait de ce film un sérieux prétendant à la palme d'or. C'est en effet un appel à la tolérance, à l'harmonie entre les peuples et les religions, une dénonciation de l'obscurantisme sous de fallacieux prétexte religieux, une ode au courage qui touche autant les croyants que les athées et les agnostiques. C'est aussi le portrait magnifique de 8 hommes avec leurs doutes et leurs convictions, qui donnent tout, y compris leur vie, pour les autres (sans que cela soit bien évidemment un appel au martyr, bien au contraire).
La phrase de Pascal cité par Michael Lonsdale (absolument remarquable et particulièrement ému hier soir) : : "Les hommes ne font jamais le mal si complètement et joyeusement que lorsqu'ils le font par conviction religieuse" est plus que jamais d'actualité et malheureusement universelle et intemporelle. Le lieu n'est d'ailleurs pas vraiment précisé. Le tournage a ainsi eu lieu au Maroc et non en Algérie, pour raisons de sécurités liées à la sensibilité du sujet. C'est Michel Barthélémy, le décorateur césarisé pour « Un Prophète » qui a reconstitué le Monastère. Plutôt que de désigner des responsables, Xavier Beauvois évoque ainsi implicitement les deux thèses sur leurs morts, sur leur belle sérénité ensanglantée, leur message de paix souillé, là n'étant pas finalement le sujet.
Des hommes et des dieux : un titre finalement très laïque qui met sur un pied d'égalité les uns et les autres et dénonce ce « mal » qu'ils font au nom de leurs convictions religieuses faisant ainsi écho à la citation d'exergue du film extraite de la bible : "Vous êtes des dieux, des fils du Très-Haut, vous tous ! Pourtant, vous mourrez comme des hommes, comme les princes, tous, vous tomberez".
Impossible de ne pas parler des acteurs qui incarnent ces personnages, à la fois mystiques et si humains, humbles et grandioses , Michael Lonsdale et Lambert Wilson en tête, lequel Lambert Wilson était également le meilleur interprète et le personnage le plus intéressant de « La Princesse de Montpensier » de Bertrand Tavernier, autre film en compétition de ce Festival 2010. Tout juste remis de son opération de l'appendicite (à cause de laquelle il n'avait pu être présent pour la projection cannoise du film de Tavernier) il a assuré le spectacle hier entre baisers de cinéma à Sabrina Ouazani (qui pendant la montée des marches tenait la photo d'un comédien décédé après le tournage) et Xavier Beauvois lors du photo call, et fumant ostensiblement sur les marches .
Après le mystique « sous le Soleil de Satan », palme d'or 1987, ces hommes et ces dieux sous le soleil du Maghreb pourraient bien subir le même sort. C'est tout le mal que l'on peut souhaiter à cet hommage à ces hommes de bien, un hommage pétri de grâce. Des humains avant tout. Bref, les vrais dieux ce sont eux.
Comme le temps me manque pour vous parler de ce film qui m'a particulièrement touchée, je vous livre ci-dessous la vidéo de sa présentation par son réalisateur lors de la projection en avant-première dans le cadre du Festival Paris Cinéma ainsi qu'un très bel extrait du film.
Je retournerai le voir pour vous en parler, à l'occasion de sa sortie en salles, le 29 septembre 2010. Il a obtenu le prix du jury au dernier Festival de Cannes, un prix amplement mérité.
Encore une petite vidéo d' "Inception" de Christopher Nolan qui sort en salles le 21 juillet prochain...je ne m'en lasse pas! Cette fois il s'agit de la bande-annonce avec Marion Cotillard.
Ma dernière critique avant de voguer vers d’autres horizons (mais rassurez-vous, ou pas, avant de revenir le mois prochain) sera celle d’un film argentin… et non des moindres.
Synopsis : Depuis trois jours la pluie tombe inlassablement sur Buenos Aires. Alma (Valeria Bertuccelli) est bloquée dans les embouteillages. Roberto, (Ernesto Alterio) qu’elle ne connaît pas, va se réfugier dans sa voiture. Presque par effraction. Les routes de ces deux êtres solitaires et vulnérables vont se croiser à un moment où ils sont l’un et l’autre en quête de réponses. Une rencontre fortuite qui va bouleverser le cours des événements.
« LLuvia » c’est la grande et belle surprise de cet été. Dès les premiers plans la caméra caressante de Paula Hernandez qui enlace ses personnages avec beaucoup de chaleur, de douceur, d’empathie nous entraîne avec eux avec force et subtilité. Leurs portraits se dessinent par petites touches, la caméra glisse sur certains gestes sans jamais forcer notre regard comme ce test de grossesse acheté furtivement ou cette scène de l’hôpital où Roberto se trompe de père. Par le décor, par un geste Paul Hernandez nous suggère tout ce qu’ils ne disent pas et use de toutes les potentialités du hors champ et du bord cadre avec beaucoup de pudeur pour donner un caractère faussement anodin à l’essentiel, comme deux mains qui se touchent fugacement.
Comme dans les films de Claude Sautet dans lesquels les scènes de pluie accélèrent toujours le cours des événements, la pluie, inexorable et inlassable, qui s’abat sur Buenos Aires fait écho aux émotions qui envahissent Alma et Roberto et va ainsi les rapprocher. Encerclés par la pluie, par leurs pensées, perdus entre leur passé et leur avenir, cette pluie qui s’abat comme le malheur, menaçante, obsessionnelle, va progressivement créer une sorte de bulle protectrice, une parenthèse pour ces deux êtres en fuite, un voile onirique.
Le film se déroule à Buenos Aires mais ce pourrait être n’importe où, dans n’importe quelle ville impersonnelle, tentaculaire où des solitudes s’égarent et se croisent, où rien ne semble pouvoir briser la morne indifférence de chacun. D’ailleurs on ne voit qu’eux. Le reste du monde ne les voit pas comme nous ne le voyons pas.
Parfois trois jours, une rencontre peuvent changer le cours du destin, donner un sens à une existence désordonnée, donner de la force à une existence fragilisée. Trois jours à la fois furtifs et inoubliables comme un doux rêve. L’histoire d’une parenthèse magnifiquement filmée qui nous enveloppe, nous ensorcelle et nous conduit vers le soleil, avec pudeur et grâce. L’interprétation délicate d’Ernesto Alterio et Valeria Bertuccelli est aussi pour beaucoup dans cette réussite.
De ces films, précieux, qui nous font croire que tout peut arriver et qui savent donner à une histoire intime et singulière un écho universel. Que la pluie ne vous rebute pas, elle vous conduira vers un inestimable rayon de soleil. Ne passez pas à côté !
Je vous ai déjà parlé à plusieurs reprises de touscoprod , un site grâce auquel j'ai eu le plaisir de pouvoir faire deux reportages au dernier Festival de Cannes (là et là) et qui permet également et surtout aux internautes de coproduire de nombreux films comme "L'Autre monde" de Gilles Marchand actuellement à l'affiche que je vous recommande d'ailleurs (voir ma critique ici).
Touscoprod en plus de son site possède un blog,"L'écho des coprods", sur lequel figure une nouvelle rubrique "le blog de la semaine" qui présente des blogueurs via une interview, une rubrique que j'ai l'honneur d'inaugurer cette semaine.
Je vous recommande d'ailleurs vivement ce blog "L'écho des coprods" très complet sur lequel vous trouverez de nombreuses informations, non seulement sur les films touscoprod mais aussi sur le cinéma, ses coulisses et ses différentes filières (production, réalisation, distribution).