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"La vie des autres" de Florian Henckel von Donnersmarck

medium_vie2.JPG1984. RDA. La STASI, les services secrets de la RDA, depuis 1950,  espionne quiconque est soupçonné du moindre murmure contre le régime à l’exemple du  dramaturge George Dreymann, à leurs yeux (ou leurs œillères), trop irréprochable pour l’être réellement, ainsi  que sa compagne, l’actrice Crista-Maria Sieland. Le Ministre de la Culture charge un agent secret de les surveiller, officiellement parce que Dreymann est ami d’un metteur en scène interdit de travailler, officieusement parce que ledit ministre est épris de Crista-Maria Sieland à qui il fait subir un odieux chantage. C’est à Wiesler,  fonctionnaire zélé, apparemment irréprochable selon les critères du régime, c’est-à-dire d’une déférence inconditionnelle et aveugle au régime, irréprochable lui aussi donc, qu’incombe cette tâche obscure par laquelle il accèdera, pourtant, aux Lumières : de la raison, de l’art et de la liberté de penser…

Pas de générique. Dès le premier plan, nous voilà emprisonnés dans l’univers glacial de la vie de Wiesler (pas encore celle des autres) par un long couloir, impersonnel, verdâtre, angoissant. Puis, nous le retrouvons,  dans son bureau aussi austère, impassible, inhumain que celui qui mène l’interrogatoire. Immergés et captivés, déjà. Par la tension et l’enjeu de l’interrogatoire.  Dès les premiers plans, un univers s’impose à nous. Celui du, d’un vrai cinéaste. Avec ses couleurs, ternes, maussades,  vertes et oranges en réalité. Avec ses lignes horizontales et verticales qui rappellent Playtime de Tati(et notamment la première scène  qui rappelle celle du long couloir), son univers kafkaïen et fantomatique. Des lignes à l’image du régime. Obtus. Rigide. Cadenassé. Carcéral. Celui de ces sombres années aussi. Puis,  en guise de générique, juste le titre : La vie des autres. Ouverture sur le regard de Wiesler  qui regarde la pièce de théâtre écrite par Dreymann et dans laquelle joue Crista-Maria Sieland. Ouverture, pour lui, sur la vie des autres. Une lueur dans son regard. De curiosité. De suspicion. De fascination ? Non pas encore. Qu’importe, une lueur. Ses gestes sont mécaniques : il agit, marche, s’exécute comme un robot sans âme auquel son mutisme, sa tenue, ses attitudes, sa démarche le font ressembler, un parfait exécutant du régime. Les hommes ne changent pas assène le Ministre de la Culture. Le film est la démonstration, implacable, subtile, magnifique, que, si, les hommes peuvent changer. Dreymann va changer. Wiesler, surtout, va changer.  Il va s’éveiller, se réveiller. Il va lire Brecht en cachette, s’émouvoir en écoutant Beethoven, ou en écoutant l’histoire d’amour dont il doit violer l’intimité sous de fallacieux prétextes. Pendant 2H17, si courtes finalement, nous sommes suspendus aux lèvres, aux silences, aux gestes, à la naissance de l’émotion  (à l’art, à l’amour) de Wiesler. Il va revivre par procuration, s’humaniser surtout. Cela donne lieu a des scènes d’une intensité hitchcockienne : scène de la cantine, scène de la feuille ou telle encore cette scène dans l’ascenseur avec l’enfant, jouant avec son ballon, rappelant une jeune proie d’un M. Le Maudit d’un autre temps. W. le Maudit. Et puis, non… il ne va pas dénoncer son père. Premier acte de l’homme libre qu’il n’est pas encore. Le spectateur est dans la même situation vis-à-vis de Wiesler, dans sa salle obscure, que Wiesler vis-à-vis de ceux qu’il espionne, dans son sombre sous-sol, à la différence qu’il peut intervenir en véritable démiurge et artiste-metteur en scène de la vie des autres. Fascinés nous aussi, nous certainement.

Faut-il se vendre pour l’art ? Peut-on tout faire pour l’amour de l’art? Chacun à leur manière: Dreymann, Crista-Maria, Wiesler, et même le metteur en scène vont répondre à cette passionnante question, Wiesler devenant lui-même artiste en recréant la réalité de ceux qu’il espionne.    Sous nos yeux Wiesler va passer de l’état de robot à celui d’homme. De l’ombre à la lumière. De l’obéissance à la résistance. De l’inhumanité à l’humanité. Jusqu’au sourire final, esquissé et si sublime. Le sien, le nôtre. Et cette dernière phrase « C’est pour moi » : il s’assume, s’affirme, existe enfin et la vie des autres rencontre la sienne, par le biais de l’art, toujours. Libre enfin comme ce pays dont le mur est tombé. Son sourire comme une musique ou une sonate pour un homme bon, un visage enfin mélodieux. Et les applaudissements dans la salle. Spontanés. Rares. Du grand art.

La mise en scène est d’une rigueur et d’une efficacité remarquables pour un premier film, jamais gratuite.  Sans jamais tomber dans le manichéisme simplificateur et si facile. Sans jamais forcer l’émotion. Sans gros plans sur les larmes, les cris, sans violons pour souligner. Plus efficace qu’un film didactiquement historique. Un film riche aux personnages complexes (Ah ! Merci !), à la fois film d’amour, thriller, documentaire, film politique… auquel Costa-Gavras aurait même à envier. Film Z donc au sens costagavrassien et donc très noble du terme. Scénario ciselé, acteurs remarquables ( au premier rang desquels Ulrich Mühe –Wiesler-  ), réalisation irréprochable, musique sans grandiloquence mais toujours à propos de Gabriel Yared et de Stéphane Moucha, tout concourt à faire de ce premier  film une belle leçon d’Histoire et d’histoire, bref de cinéma. Du cinéma. Après Ping pong, La vie des autres ( qui persiste magnifiquement à l’affiche, fait notable pour un premier film et de surcroît allemand) prouve la vivacité et l’inventivité du cinéma allemand. Un prétendant sérieux à l’Oscar du meilleur film étranger. A suivre ce 25 février… Et surtout à courir épier en salles !

Sandra.M

Commentaires

  • Ah oui oui oui ! Quel film.
    C'est vrai, LA scène de la cantine : quel vertige, que de sueurs froides !!! Envie de le revoir.

    Et mon Tukur ? T'en fais quoi de mon Tukur, i peu l'paté peut-être !

    Mais que vois-je de mes yeux vois-je ??? Une nouvelle vie commence avec cette vie des autres ! Où est passé le mauve cimetière ? Mon dévouement à la cause d'un fameux jury valait-il ce sacrifice ?

    J'ai voté pour les Oscar et les Cesar (bon, chez moi avec Moit, mais ça compte quand même)... Je me suis bagarrée avec mon stylo et finalement pour le Film Etranger j'ai choisi "La vie des autres"... Mais c'est parce que j'ai voté "Indigènes" aux Cesar. Tout s'explique.

  • Tu vas pas voir MON Clint ????
    Tu ferais un bel article !

  • hello;

    De retour apres partiels et vacances ! vacances plutot cinematographique ( une dizaine de film) , je dois dire..... J'ai aussi de nouveaux cogiter a propos de votre projet a propos de saint germain des pres !

    1)La mome. En effet trop d 'emotion tue l 'emotion.Certe comme dans tout biopic, la reconstitution, le jeu des acteurs est tres bon mais en fait tout le film manque de surprise.La mome, c'est un peu "un plat avec du ketchup", on connait le gout a l avance ! en effet, comme dans tout biopic qui se respecte, invariablement, on a droit a l enfance misereuse, le trauma,la gloire, la decheance .....bref,les scenariste ont bien compris la lecon des yankee.Bref, on est en terrain connue du debut jusqu a la fin.une page wikipedia ce film....mais bon, n'est ce pas là l'objectif d'un biopic...Donc maintenant que le film est un succés : aurons nous droit au biopic sur "Mike brant " ( en projet) ? bah oui ! la vie colle a la recette : enfance en israel plutot modeste , l'armée, la celebrité,la decheance avec came et suicide ( comment sera film& la defenestration LOL pour que ce soit aussi pathos que la scene ou piaf apprend la mort de Cerdan).

    2)la vie des autres

    pourquoi ce film n'ait pas été selectionné à Cannes ? ( a la place de "quand j etais chanteur" par ex, (sympathique film au demeurant mais sans grande ambition)....

    Car ce premier film est tout simplement parfait ! autant dans la mise en scene qui ne verse jamais dans l'OSTALGIE ( facon goodbye Lenine) avec le coté sombre, blafard de la RDA ,le scenario completemement intemporel et universel.bref pour un premier film : beau carton....

    3) le dernier roi d'ecosse

    deception ! OUI Forest Whitaker est hallucinant dans le role de Dada et nous montre tout le coté bouffon, terrorisant de dada.Mais ou le film peche c'est du coté du scenario .Car a la vision du film, on sent nettement que les scenaristes ont hesité 1) a faire un biopic 2)faire une film de fiction imbriqué dans le réel
    ce qui fait que toute les parties ou le personnage de Dada est là son tres interessantes mais les parties scenarisés ( l histoire du doc ecossais) sont assez abracadabrantesque ( CF l'evasion lors de la prise d otage d 'entebbe) !le film merite d'etre vu uniquement pour la partition de Whitaker.....

    4) Blood DIamond..

    Heureuse surprise !Apres Lord of War par ex , encore un film """""""militant""""""" envellopé dans les draps du Blockbuster.Oui les "scenes d'action" sont efficaces mais derriere le film a gros budget et ses passages obligés ( amourette, repentance, mort du mechant, fin lacrymal), la denonciation du trafic du diamant pour financer la guerrila, les enfans soldats est vraiment tres efficace car le film presente le tout brut de decofrrage ( les scenes d embrigadement des enfants soldats par ex)...les acteurs sont egalement tres convaincant...

    5) INLAND EMPIRE

    que dire? oui le scenario est encore plus trouble que "mulholland drive", d'ailleurs faut il dans IE chercher un histoire ? oui l'image en DV est degeulasse! Oui Laura Dern est excellente ! Oui David Lynch a un grain ( les scenes avec les lapin) ! Oui c'est un fantastique metteur en scène !
    Bref un film tout en contraste ou il faut absolument se laisser guider et non pas attendre les scenes que l on espere voir afin de comprendre une once de ce qu on voit.....

    Pour ma part, le film me fait plus penser a un happening cinematographiqe experimental genre ecriture instantané chere au DADA ( pas amin lol)..Je ne m aventurerai a faire une comparaison avec MD bien que les themes soit similtaires ( les double par ex) mais on ressort de la salle encore plus perplexe....seul Hic, parfoit on sent vraiment les 2h48...

    Nota : Quand je vois les critiques dithyrambique du film,il y a un peu de snobisme là dessous quand meme....


    6)Truands

    Apres le tres remarqué "Ne le dis a personne",l'interessant " le serpent", j avais hate de voir ce " microcosmos chez les voyou" dixit le real.... A FUIR !!!! A part philippe Caubère qui tire son epingle du jeu en grand fauve, tout est moche dans ce film ; le scenario squelettique , une brochette d'acteur qui se la joue a la Scorcese ( magimel qui se la joue Robert de Niro") ; des dialogue qui depasse pas le stade de la vulgarité la plus crasse : "cette pute,je lui niquerai bien le fion, " tu vois les moules là bas, elle sente l'ukrainienne" (et j 'en passe)....en fait le coté "microcosmos " ressort dans les scene de violence tres crue ( le film est interndit - 16).....

    bref, au moins les truand 50's a la gabin il avait de la classe !!!!

    7) T4xi

    A samedi pluvieux ! film neuneu ! oui, je suis tres bon publique avec les nanard sympathique ! et T4xi assure bien ce role : comedie bon enfant sans réele vulgarité , une bernard farcy en roue libre, quelques dialogues qui font mouche, des situations cocasses...que demander de plus a un film qui n a que la pretention de divertir et qui je trouve le fait plutot avec brio ????

    8)Tu marcheras sur l'eau ( Eytan Fox)

    En reprise exceptionnel dans mon cinema A&e...Surtout ne pas se focaliser sur le résumé du film qui peut faire penser a un thriller : un agent du mossad doit recherche un criminel de guerre nazi...A partir de ce point de depart, nous avons un film qui embrasse les themes de l'identité sexuelle,la repentance des jeunes allemands vis a vis de la shoah, le probleme israelo palestinien, les israeliens et les allemands .....cela peut paraitre un gloubi goulba indigeste mais le film arrive a aborder tous ces sujets de manieres tres astucieuse...la BO est superbe ( nappe electro et musique tradi), mise en scene itou quand aux acteur isrelo allemand, rien a redire..

    je ne sais pas si vous l avez vu, mais c'est a decouvrir !

    9)THE good german

    Il est faux de dire que TGG est un remake raté de Casablanca, matiné de néo realisme italien.certe, toute la mise en scene s'est axé a retranscrire les films de ce genre tant dans les decors, posture et maniere de filmer..De ma part, j'y vois plus un hommage ( a la maniere tarantino avec kill bill vis a vis du cinema asiatique)matiné d'un leger pastiche ( pastiche qui apparait dans la crudité de certaines scene ou de dialogue e que les film d'epoque avec le code hays ne pouvait s autoriser)...une curiosité pour nostalgique cinephile en quelque sorte avec scenario aussi abracadabrant que "Gilda", femme fatale tout droit sortis du "grand sommeil"....

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    Concernant, votre projet SGDP, il m'est venue une idée en lisant betement la derniere page de 'lexpress mag" qui est un interview d un people ...je vous m explique : les auteurs de livres doivent tous avoir un film fétiche. donc a partir de là, pourquoi ne pas faire un festival ou des auteurs presenterait leur film fetiche, en expliquant le pourquoi du comment, la maniere dont ils vu le film, pkoi le film les a si marqué etc....

    en partant de cette idée,on peut trouver une variante : exemple ; si le theme est " cinema et litterature policiere" : des auteurs de polars presenteront leur film policier fetiche....

    l'experience peut etre interessante car l image est souvent source d inspiration d 'ecrivain ex les dernier phillipe DJian qui a ecrit 3 livres selon les codes d'une serie télé americaine : decoupage en saison etc

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    a plus ( sans doute a Panasia)

    vg

  • @victor:
    -concernant "La Mome", j'ignore si ce style mélodramatique à l'excès est indissociable du biopic...
    - pour "la vie des autres" à Cannes, peut-être tout simplement n'a -t-il pas été envoyé et n'était-il pas prêt à temps. Concernant "quand j'étais chanteur", c'est certes un film classique mais je ne serais pas aussi sévère que vous. La présence de Depardieu à l'affiche a certainement aidé à sa sélection cannoise mais ce film est à la fois bien écrit et émouvant. La simplicité est parfois ce qu'il y a de plus compliqué à faire...-Je n'ai malheureusement pas eu le temps d'aller voir 3, 4 et 5 mais je soupçonne aussi un peu de snobisme concernant le 5 et d'ailleurs tout ce qui a un lien avec Lynch dont je ne nie pas le talent par ailleurs.6: je ne l'ai pas vu non plus mais oui, en effet, Gabin est inimitable, ce n'est pas moi qui suis une inconditionnelle qui dirai le contraire. 7: ni l'envie, ni le courage d'y alleR. Quelque chose m'échappe dans le succès de ce film. Quelqu'un peut-il m'expliquer? 8: pas vu. 9: très envie de le voir: ai hâte de le voir pour ses brillantes références.

    Concernant le projet de festival de cinéma à SAint-GErmain des Prés, merci de vos idées que je trouve d'ailleurs très bonnes. En effet, ce serait bien qu'un écrivain vienne parler de son film fétiche et d'ailleurs plutôt d'organiser un débat sur ce film en question même si je ne pense pas que cette seule thématique suffise pour tout un festival. Pour l'heure, faute de temps, j'ai un peu -momentanément- laissé de côté ce projet mais je ne l'abandonne pas pour autant.

    @ PAscale Eastwood- Douglas: J'ai lu ta très belle critique sur le film de Clint et j'ai très envie de le voir mais "écrire du cinéma" ou "sur le cinéma", il faut parfois choisir...
    Ton dévouement valait ce sacrifice...temporaire.
    Le "tout court" a moins de mérite que l'autre Ulrich.
    J'avais fait mes pronostics avant de voir "La vie des autres" mais c'est vrai que maintenant entre les deux mon coeur balance! Verrai-je les César de mon salon ou du Châtelet, le suspense n'est pas encore totalement levé...

  • Bleu et mauve : ça va pas ensemble...

    C'est le nom de mon Ulrich qui ne te plaît pas ?

    Au Chatelet : tu mets pas tes bottes en moumoute, tu vas te faire refouler !

  • @Pascale: Allshort encore c'était mieux, non?

    C'est pour ça que j'ai préféré ne pas y aller...Ce sont les bottes et moi ou rien!

  • Je suis allé le voir, et c'est un peu grâce à vous. C'était très bien. Alors je vous dis merci. :)

    J'ai trouvé que la musique était bien utilisée. La scène de la prostituée est particulièrement bonne je trouve. En elle-même mais surtout elle marque quelque chose dans le processus de Wiesler au moment même où la relation entre Dreymann et Sieland commence à le toucher (et je crois me souvenir d'une montée chromatique qui tout à coup s'arrête pour déboucher sur le silence et l'intérieur froid de Wiesler).
    Je l'ai trouvé très sobre, mais parfois le recours au second degré pas toujours pertinent.

    Sinon le film s'appelle "la vie des autres"... le récit est très chronologique et les psychologies, je crois, assez linéaires. J'ai l'impression qu'il se trame autre chose. En effet: quels autres ? Parce que Wiesler n'est pas très vivant (j'y reviendrai), d'autres meurent, d'autres perdent leur identité (c'est un peu difficile de ne pas raconter l'histoire, je suis obligé de rester vague). En fait qu'est-ce qui existe ? Je crois que c'est la relation acteur-voyeur. Wiesler dit être le public mais c'est un public un peu spécial. Il n'existe que lorsqu'il est en surveillance. L'acteur (Sieland) et le metteur en scène sont en quête d'existence (l'ami interdit ou le vendu), seul personnage qui surnage un peu jusqu'à ce qu'il ne puisse plus écrire à son tour avant de retrouver "son" public, ou plutôt son voyeur puisqu'il n'a pas perdu son public en réalité. La vie intime entre Sieland et Dreymann est assez distante, peut-être comme si nous ne la voyions pas réellement, comme simplement à l'écoute des sons en même temps que Wiesler. Ca pourrait être un choix de mise en scène pour favoriser une "suggestion" mais je n'y crois pas, pour moi c'est signifiant: il ne s'agit pas du sujet. Alors qu'est-ce qu'un voyeur si ce n'est le public de la vie intime ? L'existence, nécessairement sociale, nécessite-t-elle la présence d'un tiers à l'interaction ? L'intime, le publique, le privé, le clandestin, le joué... ce film a le mérite de laisser le spectateur se poser ses propres questions.

    J'avoue que pour l'instant je suis un peu perdu.

  • La Vie des autres c'est en quelque sorte la notre vue par les yeux et surtout entendue par les oreilles de la Stasi, la police d'état qui était à la RDA ce que le KGB était à l'URSS (et ce que sont encore un peu les RG à notre France bien-aimée pour rebondir sur l'actualité ...).
    Henckel von Donnersmarck aurait pu situer son film dans les années 50 ou 60, à un chapitre précédent et révolu de notre histoire.
    Mais l'intrigue est datée de ... 1984, juste avant l'arrivée de Gorbatchev à Moscou et la chute du Mur à Berlin : ce n'est finalement que la page précédente dans le grand livre. Presque aujourd'hui, peut-être demain.
    Comme s'il fallait nous rappeler que la transformation du siège central de la Stasi en musée d'archives n'est pas la garantie que le spectre de Big Brother s'est bien éloigné pour toujours.
    La référence n'est sûrement pas fortuite, puisque 1984, c'est aussi l'année du roman de G. Orwell.
    Le film démarre lentement mais c'est pour mieux nous immerger dans l'ambiance lugubre des couloirs grisâtres de la Stasi et des rues désertes de Berlin Est.
    Puis l'intrigue se noue à partir de trois fois rien et sous cette histoire d'écoutes téléphoniques et de fiches policières, se découvre alors une très très belle histoire d'amour.
    Une belle histoire d'amour où une actrice de théâtre (que l'on connaîtra à peine) se retrouve au centre de la vie de trois hommes différents, mais une histoire désespérée : que pouvait-on espérer sous un tel régime ?
    Au-delà du contexte politique de l'époque, il semble bien que les hommes, même équipés d'écouteurs et de micros, n'arrivent guère à franchir les "murs" qui les séparent et à communiquer entre eux (Brecht est d'ailleurs cité dans le film).

  • @BMR & MAM

    Pourtant ce n'est ni le public ni l'auteur qui cessent d'exister. Brecht est plus que cité, il s'agit d'un lien, comme la symphonie de l'homme bon en musique puis en livre dans un retournement de l'archive (qui n'est rapidement plus un rapport mais une recréation). Et ces liens, humains, traversent justement les murs.
    Peut-être est-ce l'idée d'une impossibilité du Big Brother constitutive de l'essence humaine ? Car si la date est effectivement choisie (je n'y avais pas songé) elle est pratique car elle annonce aussi la continuité de l'histoire et l'inattendu résultant des orientations des peuples vers une idée d'équilibre qui en fait les en éloignent.

    De plus il y a une revendication, il me semble, d'une continuité de la vie (même si elle évolue ou change du tout au tout) malgré l'histoire de l'Histoire. Comme quelque chose de sous-terrain, mais j'ai du mal à l'appréhender. Je crois qu'il y a un discours tout à fait implicite dans la mise en scène... car je trouve qu'il y a des choses qui ne collent pas nécessairement signifiantes.

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