Critique de MAGIC IN THE MOONLIGHT de Woody Allen à 20H50 sur Canal plus cinéma (05/10/2015)

Fidèle à son habitude, Woody Allen, « retenu à New York » ne s’est pas déplacé pour l’ouverture du Festival du Cinéma Américain de Deauville 2014 à l'occasion de laquelle le film fut projeté mais avait tout de même envoyé un petit mot en vidéo aux festivaliers « J’aimerais traverser l’écran comme dans La Rose pourpre » concluant, avec son humour caustique habituel que « Quoi d’autre puis-je dire : c’est bien d’être à New York aussi. »

 Après « Blue jasmine » projeté à Deauville il y a deux ans en avant-première, avec « Magic in the moonlight » il revient à la comédie, plus légère, même si le film est émaillé de ses réflexions  acerbes (mais lucides) sur la vie et même si, comme toujours chez Woody Allen, la comédie, est le masque de sa redoutable (et irrésistible) lucidité sur l’existence et les travers de chacun.

Cette fois, il nous embarque dans les années 1920, sur la Côte d’Azur, avec un grand magicien incarné par Colin Firth qui va tenter de démasquer l’imposture d’une femme médium incarnée par Emma Stone. Le prestidigitateur chinois Wei Ling Soo est le plus célèbre magicien de son époque, mais rares sont ceux à savoir qu’il s’agit en réalité du nom de scène de Stanley Crawford (Colin Firth, donc) : un Anglais arrogant qui a une très haute estime de lui-même mais  qui ne supporte pas les supposés médiums qui prétendent prédire l’avenir. Se laissant convaincre par son fidèle ami Howard Burkan (Simon McBurney), Stanley se rend chez les Catledge qui possèdent une somptueuse propriété sur la Côte d’Azur : il y fait la connaissance de la mère, Grace (Jacki Weaver), du fils, Brice (Hamish Linklater), et de la fille, Caroline (Erica Leerhsen). Il se fait passer pour un homme d’affaires, du nom de Stanley Taplinger, dans le but de confondre la jeune et ravissante Sophie Baker (Emma Stone) qui séjourne chez les Catledge avec sa mère (Marcia Gay Harden). En effet, Sophie a été invitée par Grace, convaincue que la jeune fille pourra lui permettre d’entrer en contact avec son défunt mari. Mais, contrairement à ce qu’il pensait, non seulement Stanley ne va pas la démasquer immédiatement et se laisser, peut-être, ensorcler par la plus belle et mystérieuse des magies.

 « Magic in the moonlight » est ainsi un film pétillant sur la plus belle des illusions : le mystère du coup de foudre amoureux. Dès les premières secondes, Woody Allen, comme nul autre, dispose de ce pouvoir (dont il faut bien avouer qu’il est plus le fruit de talent que de magie) de nous plonger dans un cadre, une époque, de brosser le portrait d’un personnage (en l’occurrence, l’arrogant Stanley) et de nous embarquer dans un univers, une intrigue, un ailleurs réjouissants, quasiment hypnotiques.

 Les dialogues, qui, comme toujours épousent le débit du cinéaste, fusent à un rythme échevelé et sont délicieusement sarcastiques à l’image du personnage de Colin Firth, parfait dans le rôle de ce magicien cynique et parfois sinistre (pour notre plus grand plaisir) aux répliques cinglantes.  C’est finalement un peu le double de Woody Allen -comme le sont presque toujours ses personnages principaux, y compris lorsqu’il ne les incarne pas lui-même- : prestidigitateur du cinéma qui parvient à nous faire croire à tout ou presque, amoureux de la magie (d’ailleurs omniprésente dans ses films et qu’il a lui-même pratiquée), mais qui lui-même ne se fait plus beaucoup d’illusions sur la vie et ses contemporains, conscient cependant de notre besoin d’illusions et de magie pour vivre. Celles de la prestidigitation. Ou du cinéma. Ces deux maitres des illusions finalement ne se laissent illusionner que par une seule chose : l’amour.

 Les décors subliment la Côte d’Azur lui donnant parfois des accents fitzgeraldiens.  Hommage avant tout au pouvoir de l’imaginaire, des illusions (salvateur et redoutable) comme l’était le sublime « Minuit à Paris », avec ce nouveau film Woody Allen nous jette un nouveau sortilège parvenant à nous faire oublier les faiblesses du film (comme une intrigue amoureuse qui manque parfois un peu de magie justement) pour nous ensorceler et éblouir.

 Dialogues délicieusement sarcastiques, décors et acteurs étincelants, ode ludique aux illusions…. amoureuses (et cinématographiques ), je dois bien avouer avoir, une fois de plus, été hypnotisée par le cinéma de Woody Allen. Retrouvez également mon dossier consacré à Woody Allen avec de nombreuses autres critiques, ici.

13:49 Écrit par Sandra Mézière | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer | | Pin it! | |